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- Non, Biddy, c'est vrai ; seulement je n'aime pas cela, et je ne l'approuve pas.

Publié le 15/12/2013

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- Non, Biddy, c'est vrai ; seulement je n'aime pas cela, et je ne l'approuve pas. - Ni moi non plus, dit Biddy, bien que cela doive t'être bien égal. - Absolument, lui dis-je ; mais je dois avouer que j'aurais une bien faible opinion de toi, Biddy, s'il dansait devant toi, de ton propre consentement. » J'eus l'oeil sur Orlick par la suite, et toutes les fois qu'une circonstance favorable se présentait pour qu'il manifestât à Biddy l'émotion qu'elle lui causait, je me mettais entre lui et elle, pour atténuer cette démonstration. Orlick avait pris pied dans la maison de Joe, surtout depuis l'affection que ma soeur avait prise pour lui ; sans cela, j'aurais essayé de le faire renvoyer. Orlick comprenait parfaitement mes bonnes intentions à son égard, et il y avait de sa part réciprocité, ainsi que j'eus l'occasion de l'apprendre par la suite. Or, comme si mon esprit n'eût pas été déjà assez troublé, j'en augmentai encore la confusion en pensant, à certains jours et à certains moments, que Biddy valait énormément mieux qu'Estelle, et que la vie de travail simple et honnête dans laquelle j'étais né n'avait rien dont on dût rougir, mais qu'elle offrait au contraire des ressources fort suffisantes de considération et de bonheur. Ces jours-là, j'arrivais à conclure que mon antipathie pour le pauvre vieux Joe et la forge s'était dissipée, et que j'étais en bon chemin pour devenir l'associé de Joe et le compagnon de Biddy... quand tout à coup un souvenir confus des jours passés chez miss Havisham fondait sur moi comme un trait meurtrier, et bouleversait de nouveau mes pauvres esprits. Une fois troublés, j'avais de la peine à les rassembler, et souvent, avant que j'eusse pu m'en rendre maître, ils se dispersaient dans toutes les directions, à la seule idée que peut-être, après tout, une fois mon apprentissage terminé, miss Havisham se chargerait de ma fortune. Si mon apprentissage eût continué, je n'ose affirmer que je serais resté jusqu'au bout dans ces mêmes perplexités ; mais il fut interrompu prématurément, ainsi qu'on va le voir. XVIII C'était un samedi soir de la quatrième année de mon apprentissage chez Joe. Un groupe entourait le feu des Trois jolis Bateliers et prêtait une oreille attentive à M. Wopsle, qui lisait le journal à haute voix. Je faisais partie de ce groupe. Un crime qui causait grande rumeur dans le public venait d'être commis, et M. Wopsle, en le racontant, avait l'air d'être plongé dans le sang jusqu'aux sourcils. Il appuyait sur chaque adjectif exprimant l'horreur, et s'identifiait avec chacun des témoins de l'enquête. Nous l'entendions gémir comme la victime : « C'en est fait de moi ! » et comme l'assassin, mugir d'un ton féroce : « Je vais régler votre compte ! » Il nous fit la déposition médicale, en imitant sans s'y tromper le praticien de notre endroit. Il bégaya en tremblant comme le vieux gardien de la barrière qui avait entendu les coups, avec une imitation si parfaite de cet invalide à moitié paralysé, qu'il était permis de douter de la compétence morale de ce témoin. Entre les mains de M. Wopsle, le coroner devint Timon d'Athènes, et le bedeau, Coriolan. M. Wopsle était enchanté de lui-même et nous en étions tous enchantés aussi. Dans cet agréable état d'esprit, nous rendîmes un verdict de meurtre avec préméditation. Alors, et seulement alors, je m'aperçus de la présence d'un individu étranger au pays qui était assis sur le banc en face de moi, et qui regardait de mon côté. Un certain air de mépris régnait sur son visage, et il mordait le bout de son énorme index, tout en examinant les figures des spectateurs qui entouraient M. Wopsle. « Eh bien ! dit-il à ce dernier, dès que celui-ci eut terminé sa lecture, vous avez arrangé tout cela à votre satisfaction, je n'en doute pas ? » Chacun leva les yeux et tressaillit, comme si c'eût été l'assassin. Il nous regarda d'un air froid et tout à fait sarcastique. « Coupable, c'est évident, fit-il. Allons, voyons, dites ! - Monsieur, répondit M. Wopsle, sans avoir l'air de vous connaître, je n'hésite pas à vous répondre : coupable, en effet ! » Là-dessus, nous reprîmes tous assez de courage pour faire entendre un léger murmure d'approbation. « Je le savais, dit l'étranger, je savais ce que vous pensiez et ce que vous disiez ; mais je vais vous faire une question. Savez-vous, ou ne savez-vous pas que la loi anglaise suppose tout homme innocent, jusqu'à ce qu'on ait prouvé... prouvé... et encore prouvé qu'il est coupable. - Monsieur, commença M. Wopsle, en ma qualité d'Anglais, je... - Allons ! dit l'étranger à M. Wopsle, en mordant son index, n'éludez pas la question. Ou vous le savez, ou vous ne le savez pas. Lequel des deux ? » Il tenait sa tête en avant, son corps en arrière, d'une façon interrogative, et il étendait son index vers M. Wopsle. « Allons, dit-il, le savez-vous ou ne le savez-vous pas ? - Certainement, je le sais, répondit M. Wopsle. - Alors, pourquoi ne l'avez-vous pas dit tout de suite ? Je vais vous faire une autre question, continua l'étranger, en s'emparant de M. Wopsle, comme s'il avait des droits sur lui : Savez-vous qu'aucun des témoins n'a encore subi de contre-interrogatoire ? » M. Wopsle commençait : « Tout ce que je puis dire, c'est que... » Quand l'étranger l'arrêta. « Comment, vous ne pouvez pas répondre : oui ou non !... Je vais vous éprouver encore une fois. » Il étendit son doigt vers lui. « Attention ! Savez-vous ou ne savez-vous pas qu'aucun des témoins n'a encore subi de contre-interrogatoire ?...

« XVIII C’était unsamedi soirdelaquatrième annéedemon apprentissage chezJoe.Ungroupe entourait lefeu des Trois jolis Bateliers et prêtait uneoreille attentive àM. Wopsle, quilisait lejournal àhaute voix.Jefaisais partiedece groupe. Uncrime quicausait granderumeur danslepublic venait d’êtrecommis, etM. Wopsle, enleracontant, avaitl’air d’être plongé danslesang jusqu’aux sourcils.Ilappuyait surchaque adjectif exprimant l’horreur,ets’identifiait avec chacun destémoins del’enquête.

Nousl’entendions gémircomme lavictime : « C’enestfait demoi ! » etcomme l’assassin, mugird’untonféroce : « Jevaisrégler votrecompte ! » Ilnous fitladéposition médicale,enimitant sanss’y tromper lepraticien denotre endroit.

Ilbégaya entremblant commelevieux gardien delabarrière quiavait entendu les coups, avecuneimitation siparfaite decet invalide àmoitié paralysé, qu’ilétait permis dedouter delacompétence morale decetémoin.

Entrelesmains deM. Wopsle, lecoroner devintTimon d’Athènes, etlebedeau, Coriolan. M. Wopsle étaitenchanté delui-même etnous enétions tousenchantés aussi.Danscetagréable étatd’esprit, nous rendîmes unverdict demeurtre avecpréméditation. Alors, etseulement alors,jem’aperçus delaprésence d’unindividu étranger aupays quiétait assis surlebanc en face demoi, etqui regardait demon côté.

Uncertain airdemépris régnait surson visage, etilmordait lebout deson énorme index,toutenexaminant lesfigures desspectateurs quientouraient M. Wopsle. « Eh bien ! dit-ilàce dernier, dèsque celui-ci eutterminé salecture, vousavezarrangé toutcelaàvotre satisfaction, jen’en doute pas ? » Chacun levalesyeux ettressaillit, commesic’eût étél’assassin.

Ilnous regarda d’unairfroid ettout àfait sarcastique. « Coupable, c’estévident, fit-il.Allons, voyons, dites ! – Monsieur, réponditM. Wopsle, sansavoir l’airdevous connaître, jen’hésite pasàvous répondre : coupable,en effet ! » Là-dessus, nousreprîmes tousassez decourage pourfaireentendre unléger murmure d’approbation. « Je lesavais, ditl’étranger, jesavais ceque vous pensiez etce que vous disiez ; maisjevais vous faireune question.

Savez-vous, ounesavez-vous pasque laloi anglaise suppose touthomme innocent, jusqu’àcequ’on ait prouvé...

prouvé...etencore prouvé qu’ilestcoupable. – Monsieur, commençaM. Wopsle, enma qualité d’Anglais, je... – Allons ! ditl’étranger àM. Wopsle, enmordant sonindex, n’éludez paslaquestion.

Ouvous lesavez, ouvous ne le savez pas.Lequel desdeux ? » Il tenait satête enavant, soncorps enarrière, d’unefaçoninterrogative, etilétendait sonindex versM. Wopsle. « Allons, dit-il,lesavez-vous ounelesavez-vous pas ? – Certainement, jelesais, répondit M. Wopsle. – Alors, pourquoi nel’avez-vous pasdittout desuite ? Jevais vous faireuneautre question, continual’étranger, en s’emparant deM. Wopsle, commes’ilavait desdroits surlui : Savez-vous qu’aucundestémoins n’aencore subide contre-interrogatoire ? » M. Wopsle commençait : « Tout ceque jepuis dire, c’est que... » Quand l’étranger l’arrêta. « Comment, vousnepouvez pasrépondre : ouiounon !...

Jevais vous éprouver encoreunefois. » Il étendit sondoigt verslui. « Attention ! Savez-vousounesavez-vous pasqu’aucun destémoins n’aencore subidecontre-interrogatoire ?.... »

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