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PASTEUR (1822-1895). Oraison funèbre de Sainte-Claire Deville

Publié le 03/05/2011

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pasteur

On connaît ses travaux, si beaux en eux-mêmes, et qui sont restés féconds en magnifiques résultats entre les mains de ses disciples et continuateurs, surtout de Calmette et de Roux. Mais Pasteur est aussi un écrivain très remarquable. Dans ses rapports, dans ses discours, il a une façon claire, méthodique, simple et émue, de présenter ses découvertes ou les idées générales de la science. Ses lettres sont particulièrement séduisantes; elles sont d'un homme, à qui rien n'est étranger, qui sait être avec candeur fils, ami, époux, père, et qui n'a au bout de la plume aucune de ces phrases toutes faites, qui se substituent si aisément, même chez les plus sincères, à la transcription directe de l'émotion, Que dire de son Oraison funèbre de Sainte-Claire Deville, auprès de laquelle tous les éloges de ce genre semblent conventionnels et froids?  

Oraison funèbre de Sainte-Claire Deville (1881)

Henri Sainte-Claire Deville (1818-1881) s'est distingué par ses recherches sur les huiles minérales, le platine, l'aluminium. C'est un des plus remarquables chimistes de notre temps. — On peut dire que voici le chef-d'oeuvre de l'oraison funèbre au XIXe siècle. Là, le genre est renouvelé ; plus de pastiche, plus d'imitation; rien qui sente la rhétorique : c'est une effusion du coeur, et c'est l'expression d'un spiritualisme scientifique d'une beauté tout à fait inconnue. Me voilà, devant ta froide dépouille, obligé, malgré le chagrin qui m'accable, de demander à des souvenirs ce que tu as été, pour le redire à la foule qui se presse autour de ton cercueil. A quoi bon, hélas! Tes traits sympathiques, ta spirituelle gaieté, ton franc sourire, le son de ta voix, nous accompagnent et vivent au milieu de nous. La terre qui nous porte, l'air que nous respirons, ces éléments que tu aimais à interroger et qui furent toujours si dociles à te répondre, sauraient au besoin nous parler de toi. Les services que tu as rendus à la science, le monde entier les connaît, et tout homme que le progrès de l'esprit humain a touché porte ton deuil. Dirai-je maintenant ce que tu as été dans l'intimité? A quoi bon encore! Est-ce à tes amis que je rappellerai la chaleur de ton coeur? Est-ce à tes élèves que je donnerai des preuves de l'affection dont tu les enveloppais et du dévouement que tu mettais à les servir? Vois leur tristesse. Est-ce à tes fils, à tes cinq fils, ta joie et ton orgueil, que je dirai les préoccupations de ta paternelle et prévoyante tendresse? Est-ce à la compagne de ta vie, dont la seule pensée remplissait tes yeux d'une douce émotion, qu'il est besoin de rappeler le charme de ta bonté souriante? Ah! je t'en prie, de cette femme éperdue, de ces fils désolés, détourne tes regards en ce moment. Devant leur douleur profonde, tu regretterais trop la vie. Attends-les plutôt dans ces divines régions du savoir et de la pleine lumière, où tu dois tout connaître maintenant, où tu dois comprendre même l'infini, cette notion affolante et terrible, à jamais fermée à l'homme sur la terre, et pourtant la source éternelle de toute grandeur, de toute justice et de toute liberté.  

QUESTIONS D'EXAMEN

I. — L'ensemble. — Une oraison funèbre, simple et émue. — Qu'est-ce qu'une oraison funèbre ? Quelles sont celles que vous avez lues ? Quel vous paraît être le caractère de l'oraison funèbre qu'a prononcée Pasteur sur la tombe de son ami ?  Ne vous semble-t-il pas que l'orateur n'ait eu qu'à laisser parler son coeur?

II. — L'analyse du morceau. — Distinguez les différentes parties du morceau : a) Évocation des traits physiques; b) Rappel des souvenirs rendus à la science; c) Sainte-Claire Deville dans l'intimité (avec ses amis, — ses élèves, — ses fils, — la compagne de sa vie; — remarquer la progression croissante) ; d) Attente de ceux qui lui sont chers; — la notion de l'infini; Pasteur ne juge-t-il pas inutile de faire revivre, devant la foule, la physionomie de Sainte-Claire Deville, — de rappeler ses titres scientifiques, — de dire ce qu'il a été dans l'intimité ? (A quoi bon!... A quoi bon encore!...) Et cependant, tout en proclamant l'inutilité d'une telle entreprise, ne marque-t-il pas, en termes à la fois sobres et exacts, les traits sympathiques du disparu, — les services rendus par lui à la science, —le charme de sa souriante bonté? Sur quelle image Pasteur arrête-t-il ensuite sa pensée? Où Sainte-Claire Deville attendra-t-il ses fils et la compagne de ses jours? Comment l'orateur présente-t-il la notion de l'infini?

III. — Le style. — Montrez la simplicité du style (absence de tout apprêt, de toute recherche...), — sa clarté et sa concision; De quel sentiment est empreint tout le morceau? Indiquez les passages dans lesquels se révèle surtout l'émotion de l'orateur ; Par quoi vous frappe la période de la fin? (Attends-les plutôt...); ne rappelle-t-elle pas certaines périodes de Pascal?

IV. — La grammaire. — Indiquez les mots de la même famille que funèbre (de funus, funérailles); Quel est le contraire de chacun des mots suivants : grandeur, justice, liberté? Distinguer les propositions contenues dans la première phrase du morceau; Quels sont les participes passés employés dans la dernière phrase du 1er alinéa? Justifiez-en la terminaison, et, en terminant, rappelez la règle d'accord de ce genre de participes passés.

Rédaction. — But de l'oraison funèbre. — Ses caractères essentiels.

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