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QU'EST-CE QUE LE STYLE ?

Publié le 07/07/2011

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D'après Taine, dans la Philosophie de l'Art, les arts ont trois éléments : les âmes, les événements, le style. Dans l'analyse qu'il fait du style, on étudiera : a) la netteté des idées ; b) la précision du vocabulaire ; c) la clarté de la syntaxe.

Il reste un dernier élément, le style. A vrai dire, c'est le seul visible ; les deux autres ne sont que ses dessous ; il les revêt et se trouve seul à la surface. Un livre n'est qu'une suite de phrases que l'auteur prononce ou fait prononcer à ses personnages ; les yeux et les oreilles de la tête n'y saisissent rien d'autre, et tout ce que l'ouïe et la vue intérieures y apercevront de plus ne leur sera dévoilé que par l'entremise de ces mêmes phrases. Voilà donc un troisième élément d'importance supérieure, et dont l'effet doit concorder avec l'effet des autres pour que l'impression totale soit la plus grande possible. Mais une phrase prise en elle-même est capable de diverses formes et, partant, de divers effets. Elle peut être un vers suivi d'autres vers ; elle peut comprendre des vers de longueur égale ou de longueur inégale, des rythmes et rimes diversement disposés ; là-dessus voyez toutes les richesses de la métrique. D'autre part, elle peut former une ligne de prose suivie d'autres lignes de prose ; et ces lignes, tantôt s'enchaînent en une période, tantôt composent tour à tour des périodes et des phrases courtes ; voyez là-dessus toutes les richesses de la syntaxe. Enfin les mots qui composent les phrases ont par eux-mêmes un caractère ; selon leur origine et leur usage ordinaire, ils sont généraux et nobles, ou techniques et secs, ou familiers et frappants, ou abstraits et ternes, ou éclatants et colorés. Bref, une phrase prononcée est un ensemble de puissances qui remue à la fois dans le lecteur l'instinct logique, les aptitudes musicales, les acquisitions de la mémoire, les ressorts de l'imagination, et qui, par les nerfs, les sens, les habitudes, ébranle tout l'homme. Il faut donc que le style s'accommode au reste de l'œuvre ; il y a là une dernière convergence, et, sur ce terrain, l'art des grands écrivains est infini ; leur tact est d'une délicatesse extraordinaire, et leur invention d'une fertilité inépuisable : on ne trouve point chez eux un rythme, un tour, une construction, un mot, un son, une liaison de mots, de sons et de phrases, dont la valeur ne soit sentie et dont l'emploi ne soit voulu. Ici encore, l'art est supérieur à la nature ; car, par ce choix, cette transformation et cette appropriation du style, le personnage imaginaire parle mieux et plus conformément à son caractère que le personnage réel. Taine.   

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