Quinn caressa le bout de sa moustache du revers de son index.
Publié le 30/10/2013
Extrait du document


«
Il
s’agrippa àla rampe pourgravir lesmarches duperron desTrask.
Lee ouvrit laporte, untorchon nouéautour delataille.
« Il n’est paslà,dit-il.
– Il vaarriver.
Jel’ai appelé àson bureau.
Jel’attends. »
Lee recula etconduisit leshérif danslesalon.
« Une bonne tassedecafé ? demanda-t-il.
– Je nerefuse pas.
– Je viens delefaire », ditLee ensedirigeant verslacuisine.
Quinn examina lapièce confortable.
Iln’avait plusenvie degarder sonemploi.
Un
médecin luiavait ditunjour : « J’aime mettreunenfant aumonde, carsije fais bien
mon travail, ilse traduit pardelajoie. » Leshérif avaitsouvent penséàcette remarque.
S’il faisait biensontravail, ilse traduisait pardeladouleur pourquelqu’un.
Etlefait
qu’il fûtnécessaire nelui paraissait plusunmotif suffisant.
Ilse retirerait bientôt,qu’il
voulût ounon.
Chaque homme cultiveenlui un jardin secretoùilse retirera lejour desaretraite pour
y faire leschoses qu’iln’apas euletemps d’accomplir.
Ilyfera sesvoyages, ilylira les
livres qu’ilaprétendu lire.Pendant denombreuses années,leshérif avaitrêvé
d’employer sontemps àchasser, àpêcher, àse promener danslachaîne deSanta Lucia,
et àcamper lelong derivières entrevues.
Etmaintenant quecetemps allaitvenir, iln’en
avait plusenvie.
Dormir surlesol serait douloureux poursajambe blessée.
Ilse
rappelait combienuncerf estlourd àporter, etpuis, franchement, iln’aimait pasle
gibier.
Mrs.Reynaud pouvaitl’asperger devin etlefarcir d’épices, toutcompte fait,une
vieille chaussure auraitlemême goût,accommodée decette façon.
Lee avait acheté unpercolateur.
Quinnentendit l’eaubouillonner contreledôme de
verre, etilsoupçonna Leedelui avoir menti.
Lecafé n’était pasfait.
Le vieil homme s’étaitaiguisé l’espritaucours deson travail.
Ayantappris àobserver, il
pouvait évoquer unvisage etlescruter, ainsiquedesscènes complètes etdes
conversations échangées.Ilpouvait lesjouer comme undisque oules passer comme un
film.
Enpensant augibier, ils’était misàexaminer lesalon etse disait qu’ilyavait là
quelque chosed’étrange : fauteuilsrecouverts d’unchintz àfleurs, rideaux dedentelle,
dessus detable blanc exécuté aucrochet, etdes coussins ducanapé recouverts d’untissu
à motifs voyants etimpudents.
C’étaitunepièce féminine dansunemaison oùne
vivaient quedeshommes.
Il pensa àson propre salon.C’était Mrs.Quinn quiavait choisi etacheté toutcequi s’y
trouvait, àpart leporte-pipes.
D’ailleurs,enyrepensant, elleavait aussi acheté leporte-
pipes.
Lesalon desTrask étaitféminin, maistrop, tropféminin, unepièce defemme
conçue parunhomme.
C’étaitoutré.Cedevait êtrel’œuvre deLee.
Adam nes’en rendait
sans doute pascompte.
Horace Quinnserappela l’interrogatoire qu’ilavait faitsubir àAdam biendesannées
auparavant, Adamàl’agonie, avecsonregard horrifié.
Adam,d’unehonnêteté foncière.
Au cours desannées, ilsavaient eusouvent l’occasion desevoir.
Ilsappartenaient tous
deux àla franc-maçonnerie.
HoraceavaitsuiviAdam comme maîtredeloge, etils
portaient tousdeux lesinsignes deleur distinction.
Etpuis, Adam s’étaitretirédela
communauté, unmur invisible l’avaitcoupédumonde, unmur infranchissable derrière
lequel ilétait prisonnier.
Maiscejour-là, lejour del’interrogatoire, lemur n’était pas
encore construit.
Par safemme, Adamavaitfaitconnaissance aveclemonde vivant.Horace s’imagina
Kate souslestubes deformaline, griseetlavée, desaiguilles danslagorge.
Adam étaitincapable demalhonnêteté, carilne désirait rien.Ilfaut avoir desbesoins à
satisfaire pourêtremalhonnête.
Leshérif sedemanda cequ’il sepassait derrière lemur,
quelles angoisses, quelsplaisirs, quellesdouleurs ?
Il changea deposition danssonfauteuil poursoulager lepoids quiappuyait sursa
jambe.
Lamaison étaitsilencieuse.
Seulelacafetière faisaitdubruit.
Adam mit.
»
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