Refaire pour vérifier : jusqu'à quel point refait-on la même chose ?
Publié le 11/05/2011
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On trouve souvent qu'une expérience est très simple, claire et très démonstrative. Et rarement on a la pensée que cette expérience n'a pu arriver qu'à la suite d'une série de tâtonnements, d'expériences dites de crépuscule. C'est la même chose dans toutes les sciences. Priestley a dit de bonnes choses à ce sujet de même que Du Bois-Reymond dans sa préface. Cette simplicité apparente trompe donc souvent ceux qui ne sont pas initiés aux sciences. C'est pourquoi Dubois d'Amiens a pu dire, dans son éloge de Magendie, que les grands physiologistes font peu d'expériences, c'est-à-dire qu'ils cachent celles qui leur ont servi de tâtonnement. L'expérimentation augmente de difficulté chez les êtres vivants par cela seul qu'ils sont plus complexes dans leurs phénomènes que les êtres bruts. Un être brut n'a aucune spontanéité qui puisse le faire changer d'état. Pour l'être vivant au contraire, outre le milieu extérieur qui agit sur lui, il y a un milieu intérieur indépendant. Plus les animaux sont élevés, plus ils sont indépendants. Aussi la délicatesse et les difficultés de l'expérimentation augmentent. Les expériences sont plus faciles chez les végétaux, chez les animaux à sang froid que chez les animaux à sang chaud. La première condition pour un expérimentateur c'est de pouvoir se mettre toujours des des circonstances identiques afin de reproduire les phénomènes à volonté et de déterminer par là les rapports, c'est-à-dire les lois qui existent entre ces phénomènes et leur condition d'existence. Cette condition fondamentale de l'expérimentation sera relativement très facile à remplir chez les êtres bruts et beaucoup plus difficile chez les êtres vivants et surtout chez ceux qui occupent le haut de l'échelle. Avec un thermomètre, un baromètre, un hygromètre et tous les instruments de précision ordinaires, un physicien mettra un corps brut dans des conditions qu'il déterminera, mais pour un animal, cela ne suffit pas, cela est même très souvent tout à fait secondaire, et rien n'est plus faux que cette précision extérieure dont se piquent certains physiologistes qui se croient suffisamment justifiés parce qu'ils prennent modèle des physiciens. Ils sont fanatiques de l'exactitude en physiologie et ils ne sont cependant rien moins qu'exacts. Il s'agit donc, surtout chez les êtres vivants, de déterminer les conditions organiques, c'est-à-dire celles du milieu intérieur. C'est un milieu qui est de plus en plus complexe, et nous n'avons pas assez d'instruments pour le mesurer. CLAUDE BERNARD.
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