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Robur-le-Conquerant cèdres, qui se groupent en forêts splendides aux flancs inférieurs de la chaîne.

Publié le 12/04/2014

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Robur-le-Conquerant cèdres, qui se groupent en forêts splendides aux flancs inférieurs de la chaîne. Plus de ces gigantesques fougères ni de ces interminables parasites, tendus d'un tronc à l'autre, comme dans les sous-bois de la jungle. Aucun animal, ni chevaux sauvages, ni yaks, ni bufs tibétains. Parfois une gazelle égarée jusque dans ces hauteurs. Pas d'oiseaux, si ce n'est quelques couples de ces corneilles qui s'élèvent jusqu'aux dernières couches de l'air respirable. Cette passe enfin franchie, l'Albatros commença à redescendre. Au sortir du col, hors de la région des forêts, il n'y avait plus qu'une campagne infinie qui s'étendait sur un immense secteur. Alors Robur s'avança vers ses hôtes, et d'une voix aimable : « L'Inde, messieurs », dit-il. X. Dans lequel on verra comment et pourquoi le valet Frycollin fut mis à la remorque. L'ingénieur n'avait point l'intention de promener son appareil au-dessus de ces merveilleuses contrées de l'Indoustan. Franchir l'Himalaya pour montrer de quel admirable engin de locomotion il disposait, convaincre même ceux qui ne voulaient pas être convaincus, il ne voulait sans doute pas autre chose. Est-ce donc à dire que l' Albatros fût parfait, quoique la perfection ne soit pas de ce monde? On le verra bien. En tout cas, si, dans leur for intérieur, Uncle Prudent et son collègue ne pouvaient qu'admirer la puissance d'un pareil engin de locomotion aérienne, ils n'en laissaient rien paraître. Ils ne cherchaient que l'occasion de s'enfuir. Ils n'admirèrent même pas le superbe spectacle offert à leur vue, pendant que l'Albatros suivait les pittoresques lisières du Pendjab. Il y a bien, à la base de l'Himalaya, une bande marécageuse de terrains d'où transpirent des vapeurs malsaines, ce Teraï dans lequel la fièvre est à l'état endémique. Mais ce n'était pas pour gêner l' Albatros ni compromettre la santé de son personnel. Il monta, sans trop se presser, vers l'angle que l'Indoustan fait au point de jonction du Turkestan et de la Chine. Le 29 juin, dès les premières heures du matin, s'ouvrait devant lui l'incomparable vallée de Cachemir. Oui, incomparable, cette gorge que laissent entre eux le grand et le petit Himalaya! Sillonnée des centaines de contreforts que l'énorme chaîne envoie mourir jusqu'au bassin de l'Hydaspe, elle est arrosée par les capricieux méandres du fleuve, qui vit se heurter les armées de Porus et d'Alexandre, c'est-à-dire l'Inde et la Grèce aux prises dans l'Asie centrale. Il est toujours là, cet Hydaspe, si les deux villes, fondées par le Macédonien en souvenir de sa victoire, ont si bien disparu qu'on ne peut même plus en retrouver la place. Pendant cette matinée, l'Albatros plana au-dessus de Srinagar, plus connue sous le nom de Cachemir. Uncle Prudent et son compagnon virent une cité superbe, allongée sur les deux rives du fleuve, ses ponts de bois tendus comme des fils, ses chalets agrémentés de balcons en découpages, ses berges ombragées de hauts peupliers, ses toits gazonnés qui prenaient l'aspect de grosses taupinières, ses canaux multiples, avec des barques comme des noix et des bateliers comme des fourmis, ses palais, ses temples, ses kiosques, ses mosquées, ses bungalows à l'entrée des faubourgs, - tout cet ensemble doublé par la réverbération des eaux; puis sa vieille citadelle de Hari-Parvata, campée au front d'une colline, comme le plus important des forts de Paris au front du mont Valérien. « Ce serait Venise, dit Phil Evans, si nous étions en Europe. - Et si nous étions en Europe, répondit Uncle Prudent, nous saurions bien retrouver le chemin de l'Amérique! X. Dans lequel on verra comment et pourquoi le valet Frycollin fut mis à la remorque. 53 Robur-le-Conquerant » L'Albatros ne s'attarda pas au-dessus du lac que le fleuve traverse et reprit son vol à travers la vallée de l'Hydaspe. Pendant une demi-heure seulement, descendu à dix mètres du fleuve, il resta stationnaire. Alors, au moyen d'un tuyau de caoutchouc envoyé en dehors, Tom Turner et ses gens s'occupèrent de refaire leur provision d'eau, qui fut aspirée par une pompe que les courants des accumulateurs mirent en mouvement. Durant cette opération, Uncle Prudent et Phil Evans s'étaient regardés. Une même pensée avait traversé leur cerveau. Ils n'étaient qu'à quelques mètres de la surface de l'Hydaspe, à portée des rives. Tous deux étaient bons nageurs. Un plongeon pouvait leur rendre la liberté, et, lorsqu'ils auraient disparu entre deux eaux, comment Robur eût-il pu les reprendre? Afin de laisser à ses propulseurs la possibilité d'agir, ne fallait-il pas que l'appareil se tint au moins à deux mètres au-dessus du lac? En un instant, toutes les chances pour ou contre s'étaient présentées à leur esprit. En un instant ils les avaient pesées. Enfin ils allaient s'élancer par-dessus la plate-forme, lorsque plusieurs paires de mains s'abattirent sur leurs épaules. On les observait. Ils furent mis dans l'impossibilité de fuir. Cette fois, ils ne se rendirent pas sans résistance. Ils voulurent repousser ceux qui les tenaient. Mais c'étaient de solides gaillards, ces gens de l'Albatros! « Messieurs, se contenta de dire l'ingénieur, quand on a le plaisir de voyager en compagnie de Robur-le-Conquérant, comme vous l'avez si bien nommé, et à bord de son admirable Albatros, on ne le quitte pas ainsi... à l'anglaise! J'ajouterai même qu'on ne le quitte plus! » Phil Evans entraîna son collègue qui allait se livrer à quelque acte de violence. Tous deux rentrèrent dans le roufle, décidés à s'enfuir, dût-il leur en coûter la vie, et n importe où. L'Albatros avait repris sa direction vers l'ouest. Pendant cette journée, avec une vitesse moyenne, il franchit le territoire du Caboulistan, dont on entrevit un instant la capitale, puis la frontière du royaume de l'Hérat, à onze cents kilomètres de Cachemir. Dans ces contrées, toujours si disputées encore, sur cette route ouverte aux Russes vers les possessions anglaises de l'Inde, apparurent des rassemblements d'hommes, des colonnes, des convois, en un mot tout ce qui constitue le personnel et le matériel d'une armée en marche. On entendit aussi des coups de canon et le pétillement de la mousqueterie. Mais l'ingénieur ne se mêlait jamais des affaires des autres, quand ce n'était pas pour lui question d'honneur ou d'humanité. Il passa outre. Si Hérat, comme on le dit, est la clef de l'Asie centrale, que cette clef allât dans une poche anglaise ou dans une poche moscovite, peu lui importait. Les intérêts terrestres ne regardaient plus l'audacieux qui avait fait de l'air son unique domaine. D'ailleurs, le pays ne tarda pas à disparaître sous un véritable ouragan de sable, comme il ne s'en produit que trop fréquemment dans ces régions. Ce vent, qui s'appelle « tebbad », transporte des éléments fiévreux avec l'impondérable poussière soulevée à son passage. Et combien de caravanes périssent dans ces tourbillons! Quant à l'Albatros, afin d'échapper à cette poussière qui aurait pu altérer la finesse de ses engrenages, il alla chercher à deux mille mètres une zone plus saine. Ainsi disparut la frontière de la Perse et ses longues plaines qui restèrent invisibles. L'allure était très X. Dans lequel on verra comment et pourquoi le valet Frycollin fut mis à la remorque. 54

« » L'Albatros ne s'attarda pas au-dessus du lac que le fleuve traverse et reprit son vol à travers la vallée de l'Hydaspe. Pendant une demi-heure seulement, descendu à dix mètres du fleuve, il resta stationnaire.

Alors, au moyen d'un tuyau de caoutchouc envoyé en dehors, Tom Turner et ses gens s'occupèrent de refaire leur provision d'eau, qui fut aspirée par une pompe que les courants des accumulateurs mirent en mouvement. Durant cette opération, Uncle Prudent et Phil Evans s'étaient regardés.

Une même pensée avait traversé leur cerveau.

Ils n'étaient qu'à quelques mètres de la surface de l'Hydaspe, à portée des rives.

Tous deux étaient bons nageurs.

Un plongeon pouvait leur rendre la liberté, et, lorsqu'ils auraient disparu entre deux eaux, comment Robur eût-il pu les reprendre? Afin de laisser à ses propulseurs la possibilité d'agir, ne fallait-il pas que l'appareil se tint au moins à deux mètres au-dessus du lac? En un instant, toutes les chances pour ou contre s'étaient présentées à leur esprit.

En un instant ils les avaient pesées.

Enfin ils allaient s'élancer par-dessus la plate-forme, lorsque plusieurs paires de mains s'abattirent sur leurs épaules. On les observait.

Ils furent mis dans l'impossibilité de fuir. Cette fois, ils ne se rendirent pas sans résistance.

Ils voulurent repousser ceux qui les tenaient.

Mais c'étaient de solides gaillards, ces gens de l'Albatros! « Messieurs, se contenta de dire l'ingénieur, quand on a le plaisir de voyager en compagnie de Robur-le-Conquérant, comme vous l'avez si bien nommé, et à bord de son admirable Albatros, on ne le quitte pas ainsi...

à l'anglaise! J'ajouterai même qu'on ne le quitte plus! » Phil Evans entraîna son collègue qui allait se livrer à quelque acte de violence.

Tous deux rentrèrent dans le roufle, décidés à s'enfuir, dût-il leur en coûter la vie, et n importe où. L'Albatros avait repris sa direction vers l'ouest.

Pendant cette journée, avec une vitesse moyenne, il franchit le territoire du Caboulistan, dont on entrevit un instant la capitale, puis la frontière du royaume de l'Hérat, à onze cents kilomètres de Cachemir. Dans ces contrées, toujours si disputées encore, sur cette route ouverte aux Russes vers les possessions anglaises de l'Inde, apparurent des rassemblements d'hommes, des colonnes, des convois, en un mot tout ce qui constitue le personnel et le matériel d'une armée en marche.

On entendit aussi des coups de canon et le pétillement de la mousqueterie.

Mais l'ingénieur ne se mêlait jamais des affaires des autres, quand ce n'était pas pour lui question d'honneur ou d'humanité.

Il passa outre.

Si Hérat, comme on le dit, est la clef de l'Asie centrale, que cette clef allât dans une poche anglaise ou dans une poche moscovite, peu lui importait.

Les intérêts terrestres ne regardaient plus l'audacieux qui avait fait de l'air son unique domaine. D'ailleurs, le pays ne tarda pas à disparaître sous un véritable ouragan de sable, comme il ne s'en produit que trop fréquemment dans ces régions.

Ce vent, qui s'appelle « tebbad », transporte des éléments fiévreux avec l'impondérable poussière soulevée à son passage.

Et combien de caravanes périssent dans ces tourbillons! Quant à l'Albatros, afin d'échapper à cette poussière qui aurait pu altérer la finesse de ses engrenages, il alla chercher à deux mille mètres une zone plus saine. Ainsi disparut la frontière de la Perse et ses longues plaines qui restèrent invisibles.

L'allure était très Robur-le-Conquerant X.

Dans lequel on verra comment et pourquoi le valet Frycollin fut mis à la remorque.

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