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Samuel regarda le dessin.

Publié le 30/10/2013

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Samuel regarda le dessin. « Qu'est-ce que c'est ? - J'essaie de mettre au point un système d'ouverture que l'on puisse manoeuvrer sans descendre de cheval. Ici, c'est le loquet. - Et comment s'ouvre-t-il ? - Avec un ressort. « Samuel étudia le dessin. « Et comment se ferme-t-il ? - Avec cette tige. Elle est repoussée par le ressort. - Je vois, dit Samuel. Ça pourrait marcher, à la rigueur, si la porte était renforcée, et cela prendrait à peu près vingt fois plus de temps que de descendre de cheval et d'ouvrir à la main. « Tom protesta : « Il arrive qu'avec, un cheval rétif... - Je sais, dit Samuel. La seule raison valable est que ce serait amusant. « Tom sourit. « Touché, dit-il. - Si ta mère et moi partions pour un petit voyage, crois-tu que tu pourrais t'occuper de la ferme ? - Evidemment, répondit Tom. Où, comptez-vous aller ? - Ollie nous invite à Salinas. - C'est une bonne idée, dit Tom. Maman est d'accord ? - Entièrement. Même pour la question d'argent. - Très bien, dit Tom. Combien de temps comptez-vous rester absents ? « Le regard scintillant, sardonique de Samuel se fixa sur Tom qui finit par demander : Qu'y a-t-il, père ? - Tu as eu dans la voix une intonation presque imperceptible, mais je l'ai décelée. Tom, mon garçon, cela ne me dérange pas que tu partages un secret avec tes frères et tes soeurs. C'est même une bonne chose. Je ne vois pas ce que tu veux dire, dit Tom. - Je m'en doute bien, lui dit son père. Tu es de ceux qui font éclater les vérités, tant ils les exposent au soleil. Ne dis pas aux autres que je sais. « Il s'éloigna, puis revint et posa la main sur l'épaule de Tom. « Merci de vouloir m'honorer en me disant la vérité. Ce n'est pas malin, mais c'est plus sûr. - Je suis content que tu partes. « Samuel resta debout devant la porte de la forge et regarda la terre. « On dit que les mères ont plus d'affection pour les enfants laids «, dit-il. Il fit un violent signe de tête. « Tom, je te rends vérité pour vérité, je te prierai de garder cela au plus profond de toi et de ne le dire à aucun de tes frères ou soeurs ; je sais pourquoi je pars, et. Tom, je sais où je vais. Et j'en suis heureux. «   Chapitre XXIV         Je me suis souvent demandé pourquoi certaines personnes sont, moins que d'autres, affectées et déchirées par les vérités de la vie et de la mort. La mort d'Una fit sauter les digues de la jeunesse, et la vieillesse entra en Samuel. Mais Liza, qui aimait certainement sa famille aussi profondément que son mari, ne fut pas touchée aussi violemment. Elle continua de vivre de la même façon ; elle connut la douleur, mais elle lui survécut. Je pense que Liza acceptait la vie comme la Bible, avec ses paradoxes et ses contradictions. Elle n'aimait pas la mort, mais elle savait qu'elle existait et, lorsqu'elle arriva, Liza ne fut pas surprise. Samuel jouait et philosophait avec la mort, mais il n'y croyait pas. La mort ne faisait pas partie de son univers. Lui-même et tout ce qui l'entourait étaient immortels. Mais lorsque la vraie mort fit son oeuvre, ce fut un outrage, un déni à son immortalité, et la première fissure entraîna la chute de toute la construction. Je crois qu'il avait toujours pensé pouvoir discuter avec la mort, c'était un adversaire personnel qu'il était de taille à abattre. Pour Liza, c'était simplement la fin promise et attendue. La mort ne l'arrêta pas et, malgré son chagrin, elle mit son ragoût au feu, cuisit six tartes et prépara le banquet funéraire. Elle veilla à ce que Samuel eût une chemise blanche propre, son costume de velours noir brossé et des chaussures cirées. Peut-être est-ce ainsi que l'on fait les unions durables, où les deux parties sont rivées par des forces complémentaires. Samuel, plus que Liza, savait se résigner, mais il en était déchiré. Liza l'observa soigneusement après qu'ils eurent décidé d'aller à Salinas. Elle ne savait pas ce qu'il avait dans la tête, mais, comme une mère avisée, elle sentait qu'il préparait quelque chose. Elle était complètement réaliste ; les bonheurs terrestres sont équivalents. Elle était contente d'aller rendre visite à ses enfants et petits-enfants, et curieuse de voir où ils vivaient. Elle n'était pas attachée aux endroits, une maison n'était qu'une étape sur le chemin du ciel. Elle n'aimait pas le travail et l'accomplissait parce qu'il était là pour être fait. Mais elle était fatiguée, il lui était de plus en plus difficile de lutter contre les douleurs et les rhumatismes qui essayaient de la garder au lit le matin - et qui n'y réussirent jamais, d'ailleurs. Elle attendait son départ pour le paradis, jardin sans lessive, cuisine ou vaisselle. Tout à fait entre nous, il y avait quelques petites choses qu'elle désapprouvait au paradis : on y chantait trop et elle ne voyait pas comment les élus eux-mêmes pouvaient survivre longtemps à la paresse céleste. Elle trouverait bien quelque chose à faire pour occuper son temps : des nuages à rapiécer, des ailes fatiguées à masser avec du liniment, des cols de tuniques à retourner et des araignées à pourchasser à coups de tête-de-loup. La visite à Salinas l'amusait et l'effrayait. L'idée lui plaisait tant qu'elle se demanda s'il n'y avait pas là quelque péché caché. Et le Chautauqua ? Elle n'avait pas besoin d'y aller et probablement n'irait-elle pas. Samuel serait déchaîné, il faudrait qu'elle le surveillât. Elle le considérait toujours comme un jeune homme sans défense. Elle ne savait pas quel cheminement suivait la pensée de son mari et quelle destruction menaçait son corps. Les endroits avaient beaucoup d'importance pour Samuel. La ferme était une parente et, lorsqu'il la quitta, ce fut comme s'il avait poignardé une amie. Mais il avait pris sa décision et il résolut de partir en beauté. Il fit de cérémonieuses visites à tous ses voisins, les anciens de la Vallée qui se rappelaient le bon temps et, lorsqu'il eut quitté ses vieux amis, ceux-ci comprirent qu'ils ne le reverraient plus, bien qu'il n'eût rien dit. Il

«   Chapitre XXIV         Je me suis souvent demandé pourquoicertainespersonnes sont,moins qued’autres, affectées etdéchirées parlesvérités delavie etde lamort.

Lamort d’Una fitsauter les digues delajeunesse, etlavieillesse entraenSamuel.

MaisLiza,quiaimait certainement safamille aussiprofondément quesonmari, nefut pas touchée aussi violemment.

Ellecontinua devivre delamême façon ; elleconnut ladouleur, maiselle lui survécut. Je pense queLiza acceptait lavie comme laBible, avecsesparadoxes etses contradictions.

Ellen’aimait paslamort, maisellesavait qu’elle existait et,lorsqu’elle arriva, Lizanefut pas surprise. Samuel jouaitetphilosophait aveclamort, maisiln’y croyait pas.Lamort nefaisait pas partie deson univers.

Lui-même ettout cequi l’entourait étaientimmortels.

Mais lorsque lavraie mortfitson œuvre, cefut unoutrage, undéni àson immortalité, etla première fissureentraîna lachute detoute laconstruction.

Jecrois qu’ilavait toujours pensé pouvoir discuter aveclamort, c’était unadversaire personnelqu’ilétait detaille à abattre.

Pour Liza,c’était simplement lafin promise etattendue.

Lamort nel’arrêta paset, malgré sonchagrin, ellemitson ragoût aufeu, cuisit sixtartes etprépara lebanquet funéraire.

Elleveilla àce que Samuel eûtune chemise blanchepropre,soncostume de velours noirbrossé etdes chaussures cirées.Peut-être est-ceainsiquel’on faitles unions durables, oùles deux parties sontrivées pardes forces complémentaires. Samuel, plusqueLiza, savait serésigner, maisilen était déchiré.

Lizal’observa soigneusement aprèsqu’ilseurent décidéd’alleràSalinas.

Ellenesavait pascequ’il avait danslatête, mais, comme unemère avisée, ellesentait qu’ilpréparait quelque chose.

Elleétait complètement réaliste ;lesbonheurs terrestres sontéquivalents. Elle était contente d’allerrendre visiteàses enfants etpetits-enfants, etcurieuse devoir où ilsvivaient.

Ellen’était pasattachée auxendroits, unemaison n’étaitqu’une étape sur lechemin duciel.

Ellen’aimait pasletravail etl’accomplissait parcequ’ilétait là pour êtrefait.

Mais elleétait fatiguée, illui était deplus enplus difficile delutter contre les douleurs etles rhumatismes quiessayaient delagarder aulitlematin –et qui n’y réussirent jamais,d’ailleurs. Elle attendait sondépart pourleparadis, jardinsanslessive, cuisineouvaisselle.

Toutà fait entre nous, ilyavait quelques petiteschosesqu’elledésapprouvait auparadis : ony chantait tropetelle nevoyait pascomment lesélus eux-mêmes pouvaientsurvivre longtemps àla paresse céleste.Elletrouverait bienquelque choseàfaire pour occuper son temps : desnuages àrapiécer, desailes fatiguées àmasser avecduliniment, descols de tuniques àretourner etdes araignées àpourchasser àcoups detête-de-loup. La visite àSalinas l’amusait etl’effrayait.

L’idéeluiplaisait tantqu’elle sedemanda s’il n’y avait paslàquelque péchécaché.

EtleChautauqua ? Ellen’avait pasbesoin d’yaller et probablement n’irait-ellepas.Samuel seraitdéchaîné, ilfaudrait qu’ellelesurveillât. Elle leconsidérait toujourscommeunjeune homme sansdéfense.

Ellenesavait pas quel cheminement suivaitlapensée deson mari etquelle destruction menaçaitson corps.

Les endroits avaientbeaucoup d’importance pourSamuel.

Laferme étaituneparente et, lorsqu’il laquitta, cefut comme s’ilavait poignardé uneamie.

Maisilavait prissa décision etilrésolut departir enbeauté.

Ilfit de cérémonieuses visitesàtous ses voisins, lesanciens delaVallée quiserappelaient lebon temps et,lorsqu’il eutquitté ses vieux amis, ceux-ci comprirent qu’ilsnelereverraient plus,bienqu’il n’eût riendit.Il. »

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