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thérapeutique n'avait pas agi.

Publié le 31/10/2013

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thérapeutique n'avait pas agi. Le besoin de crier des mots sales à tue-tête était aussi violent que jamais.   CHAPITRE VII   S'il y a un espoir, écrivait Winston, il réside chez les prolétaires. S'il y avait un espoir, il devait en effet se trouver chez les prolétaires car là seulement, dans ces fourmillantes asses dédaignées, quatre-vingt-cinq pour cent de la population de l'Océania, pourrait naître la force qui étruirait le Parti. Le Parti ne pouvait être renversé de l'intérieur. Ses ennemis, s'il en avait, ne possédaient ucun moyen de se grouper ou même de se reconnaître les uns les autres. Si même la légendaire Fraternité xistait, ce qui était possible, il était inconcevable que ses membres puissent se rassembler en nombre supérieur deux ou trois. La rébellion, chez eux, c'était un regard des yeux, une inflexion de voix, au plus, un mot huchoté à l'occasion. Mais les prolétaires n'auraient pas besoin de conspirer, si seulement ils pouvaient, d'une açon ou d'une autre, prendre conscience de leur propre force. Ils n'avaient qu'à se dresser et se secouer comme un cheval qui s'ébroue pour chasser les mouches. S'ils le voulaient, ils pouvaient dès le lendemain souffler sur le Parti et le mettre en pièces. Sûrement, tôt ou tard, il leur viendrait à l'idée de le faire ? Et pourtant ! Il se souvint qu'une fois, alors qu'il descendait une rue bondée de gens, une effrayante clameur d'une centaine de voix, des voix de femmes, avait éclaté un peu plus loin, dans une rue transversale. C'était un formidable cri de colère et de désespoir, un « Oh-o-o-oh ! « profond et retentissant dont l'écho se prolongeait comme le son d'une cloche. Son coeur avait bondi. « On a commencé avait-il pensé. Une émeute ! À la fin, les prolétaires brisent leurs chaînes. « Quand il arriva à l'endroit du vacarme, ce fut pour voir une cohue de deux ou trois cents femmes pressées autour des étals d'un marché en plein air. Elles avaient des visages aussi tragiques que si elles avaient été les passagers condamnés d'un bateau en train de sombrer. Mais à ce moment, le désespoir général se brisa en une multitude de querelles individuelles. Il apparut qu'à un des étals on vendait des casseroles de fer-blanc. C'était une camelote misérable, mais les ustensiles de cuisine étaient toujours difficiles à obtenir. Le stock s'était brusquement épuisé. Les femmes qui avaient réussi à en avoir, poussées et bousculées par les autres, essayaient de se retirer avec leurs casseroles, tandis que des douzaines d'autres criaient autour de l'étal, accusaient le vendeur de favoritisme et prétendaient qu'il avait des casseroles en réserve quelque part. Il y eut une nouvelle explosion de glapissements. Deux femmes énormes, dont l'une avait les cheveux défaits, s'étaient emparées de la même casserole et essayaient de se l'arracher l'une l'autre des mains. Elles tirèrent violemment toutes deux un moment, puis le manche se détacha : Winston les regarda avec dégoût. Pourtant, quelle puissance presque effrayante avait un moment sonné dans ce cri jailli de quelques centaines de gosiers seulement. Comment se faisait-il qu'ils ne pouvaient jamais crier ainsi pour des raisons importantes ? Winston écrivit : Ils ne se révolteront que lorsqu'ils seront devenus conscients et ils ne pourront devenir conscients qu'après 'être révoltés. « Cela, pensa-t-il, pourrait presque être une transcription de l'un des manuels du Parti. « Le Parti rétendait, naturellement, avoir délivré les prolétaires de l'esclavage. Avant la Révolution, ils étaient ideusement opprimés par les capitalistes. Ils étaient affamés et fouettés. Les femmes étaient obligées de ravailler dans des mines de charbon (des femmes, d'ailleurs, travaillaient encore dans des mines de charbon). es enfants étaient vendus aux usines à l'âge de six ans. Mais en même temps que ces déclarations, en vertu des principes de la double-pensée, le Parti enseignait ue les prolétaires étaient des inférieurs naturels, qui devaient être tenus en état de dépendance, comme les nimaux, par l'application de quelques règles simples. En réalité, on savait peu de chose des prolétaires. Il 'était pas nécessaire d'en savoir beaucoup. Aussi longtemps qu'ils continueraient à travailler et à engendrer, leurs autres activités seraient sans importance. Laissés à eux-mêmes, comme le bétail lâché dans les plaines de l'Argentine, ils étaient revenus à un style de vie qui leur paraissait naturel, selon une sorte de canon ancestral. Ils naissaient, ils poussaient dans la rue, ils allaient au travail à partir de douze ans. Ils traversaient une brève période de beauté florissante et de désir, ils se mariaient à vingt ans, étaient en pleine maturité à trente et mouraient, pour la plupart, à soixante ans. Le travail physique épuisant, le souci de la maison et des enfants, les querelles mesquines entre voisins, les films, le football, la bière et, surtout, le jeu, formaient tout leur horizon et comblaient leurs esprits. Les garder sous contrôle n'était pas difficile. Quelques agents de la Police de la Pensée circulaient constamment parmi eux, répandaient de fausses rumeurs, notaient et éliminaient les quelques individus qui étaient susceptibles de devenir dangereux. On n'essayait pourtant pas de les endoctriner avec l'idéologie du Parti. Il n'était pas désirable que les prolétaires puissent avoir des sentiments politiques profonds. Tout ce qu'on leur demandait, c'était un patriotisme primitif auquel on pouvait faire appel chaque fois qu'il était nécessaire de leur faire accepter plus d'heures de travail ou des rations plus réduites. Ainsi, même quand ils se fâchaient, comme ils le faisaient

« CHAPITRE VII  S’il ya un espoir, écrivait Winston, ilréside chezlesprolétaires.

S’il yavait unespoir, ildevait eneffet setrouver chezlesprolétaires carlàseulement, danscesfourmillantes masses dédaignées, quatre-vingt-cinq pourcentdelapopulation del’Océania, pourraitnaîtrelaforce qui détruirait leParti.

LeParti nepouvait êtrerenversé del’intérieur.

Sesennemis, s’ilenavait, nepossédaient aucun moyen desegrouper oumême desereconnaître lesuns lesautres.

Simême lalégendaire Fraternité existait, cequi était possible, ilétait inconcevable quesesmembres puissentserassembler ennombre supérieur à deux outrois.

Larébellion, chezeux,c’était unregard desyeux, uneinflexion devoix, auplus, unmot chuchoté àl’occasion.

Maislesprolétaires n’auraientpasbesoin deconspirer, siseulement ilspouvaient, d’une façon oud’une autre, prendre conscience deleur propre force.Ilsn’avaient qu’àsedresser etse secouer comme un cheval quis’ébroue pourchasser lesmouches.

S’ilslevoulaient, ilspouvaient dèslelendemain soufflersurle Parti etlemettre enpièces.

Sûrement, tôtoutard, illeur viendrait àl’idée delefaire ? Etpourtant ! Il se souvint qu’unefois,alors qu’ildescendait uneruebondée degens, uneeffrayante clameurd’une centaine devoix, desvoix defemmes, avaitéclaté unpeu plus loin, dans uneruetransversale.

C’étaitun formidable cridecolère etde désespoir, un« Oh-o-o-oh ! » profondetretentissant dontl’écho seprolongeait comme leson d’une cloche.

Soncœur avaitbondi.

« Onacommencé avait-ilpensé.Uneémeute ! Àla fin, les prolétaires brisentleurschaînes. » Quand ilarriva àl’endroit duvacarme, cefut pour voirunecohue dedeux outrois cents femmes pressées autour desétals d’unmarché enplein air.Elles avaient desvisages aussitragiques quesielles avaient étéles passagers condamnés d’unbateau entrain desombrer.

Maisàce moment, ledésespoir généralsebrisa enune multitude dequerelles individuelles.

Ilapparut qu’àundes étals onvendait descasseroles defer-blanc.

C’était une camelote misérable, maislesustensiles decuisine étaienttoujours difficiles àobtenir.

Lestock s’était brusquement épuisé.Lesfemmes quiavaient réussiàen avoir, poussées etbousculées parlesautres, essayaient de seretirer avecleurs casseroles, tandisquedesdouzaines d’autrescriaientautourdel’étal, accusaient le vendeur defavoritisme etprétendaient qu’ilavait descasseroles enréserve quelque part. Il yeut une nouvelle explosion deglapissements.

Deuxfemmes énormes, dontl’une avaitlescheveux défaits, s’étaient emparées delamême casserole etessayaient desel’arracher l’unel’autre desmains.

Elles tirèrent violemment toutesdeuxunmoment, puislemanche sedétacha : Winstonlesregarda avecdégoût. Pourtant, quellepuissance presqueeffrayante avaitunmoment sonnédanscecri jailli dequelques centaines degosiers seulement.

Commentsefaisait-il qu’ilsnepouvaient jamaiscrierainsi pourdesraisons importantes ? Winstonécrivit :Ils neserévolteront quelorsqu’ils serontdevenus conscients etils ne pourront devenirconscients qu’après s’être révoltés.« Cela, pensa-t-il, pourraitpresqueêtreunetranscription del’un desmanuels duParti. » LeParti prétendait, naturellement, avoirdélivré lesprolétaires del’esclavage.

AvantlaRévolution, ilsétaient hideusement opprimésparlescapitalistes.

Ilsétaient affamés etfouettés.

Lesfemmes étaientobligées de travailler dansdesmines decharbon (desfemmes, d’ailleurs, travaillaient encoredansdesmines decharbon). Les enfants étaientvendus auxusines àl’âge desix ans. Mais enmême tempsquecesdéclarations, envertu desprincipes deladouble-pensée, leParti enseignait que lesprolétaires étaientdesinférieurs naturels,quidevaient êtretenus enétat dedépendance, commeles animaux, parl’application dequelques règlessimples.

Enréalité, onsavait peudechose desprolétaires.

Il n’était pasnécessaire d’ensavoir beaucoup.

Aussilongtemps qu’ilscontinueraient àtravailler etàengendrer, leurs autres activités seraientsansimportance.

Laissésàeux-mêmes, commelebétail lâchédanslesplaines de l’Argentine, ilsétaient revenus àun style devie qui leur paraissait naturel,selonunesorte decanon ancestral.

Ils naissaient, ilspoussaient danslarue, ilsallaient autravail àpartir dedouze ans.Ilstraversaient unebrève période debeauté florissante etde désir, ilssemariaient àvingt ans,étaient enpleine maturité àtrente et mouraient, pourlaplupart, àsoixante ans.Letravail physique épuisant, lesouci delamaison etdes enfants, les querelles mesquines entrevoisins, lesfilms, lefootball, labière et,surtout, lejeu, formaient toutleurhorizon et comblaient leursesprits.

Lesgarder souscontrôle n’étaitpasdifficile.

Quelques agentsdelaPolice delaPensée circulaient constamment parmieux,répandaient defausses rumeurs, notaientetéliminaient lesquelques individus quiétaient susceptibles dedevenir dangereux. On n’essayait pourtantpasdeles endoctriner avecl’idéologie duParti.

Iln’était pasdésirable queles prolétaires puissentavoirdessentiments politiquesprofonds.Toutcequ’on leurdemandait, c’étaitun patriotisme primitifauquelonpouvait faireappel chaque foisqu’il était nécessaire deleur faire accepter plus d’heures detravail oudes rations plusréduites.

Ainsi,même quand ilssefâchaient, commeilslefaisaient. »

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