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Un bonheur suffisant, plein et parfait

Publié le 20/06/2012

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«Il y a plus de rennmscence que de création« dans les Rêveries,

Rousseau l'avoue lui-même. Écrite en 1777, la se Promenade est

consacrée à l'évocation du séjour qu'il fit en 1765 à l'île SaintPierre,

située au milieu du lac de Bienne.

La simplicité et la liberté des relations humaines dans une petite

société (Thérèse, le receveur, sa femme et leurs domestiques, «de

très bonnes gens et rien de plus«, Confessions, XII), le charme et

la variété de ce paysage d'eau, d'arbres et de prairies, «les douceurs

du désoeuvrement et de la vie contemplative« (Confessions,

XII), firent de cette halte sur les chemins de l'exil un moment de

bonheur parfait : par ses limites dans le temps - quelques semaines

- ce séjour, plus que les années des Charmettes ou les mois exaltés

de Montmorency, se prête à une analyse précise de la nature du

bonheur.

« UN BONHEUR SUFFISANT, PLEIN ET PARFAIT 43 Quand le soir approchait, je descendais des cimes de l'île et j'allais volontiers m'asseoir au bord du lac, sur la grève, dans quelque asile caché; là le bruit des vagues et l'agitation de l'eau, fixant mes sens et chassant de mon àme toute autre agitation, la plongeaient dans une rêverie délicieuse où la nuit me sur­ prenait souvent sans que je m'en fusse aperçu.

Le flux et reflux de cette eau, son bruit continu mais renflé par intervalles, frap­ pant sans relâche mon oreille et mes yeux, suppléaient aux mouvements internes que la rêverie éteignait en moi, et suffi­ saient pour me faire sentir avec plaisir mon existence, sans prendre la peine de penser.

De temps à autre naissait quelque faible et courte réflexion sur l'instabilité des choses de ce monde dont la surface des eaux m'offrait l'image : mais bientôt ces impressions légères s'effaçaient dans l'uniformité du mouve­ ment continu qui me berçait, et qui sans aucun concours actif de mon âme ne laissait pas de m'attacher au point qu'appelé par l'heure et par le signal convenu, je ne pouvais m'arracher de là sans efforts.

[.

..

] De quoi jouit-on dans une pareille situation? De rien d'exté­ rieur à soi, de rien sinon de soi-même et de sa propre existence; tant que cet état dure, on se suffit à soi-même, comme Dieu.

Le sentiment de l'existence dépouillé de toute autre affection est par lui-même un sentiment précieux de contentement et de paix, qui suffirait seul pour rendre cette existence chère et douce à qui saurait écarter de soi toutes les impressions sensuelles et terrestres qui viennent sans cesse nous en distraire, et en trou­ bler ici-bas la douceur.

[.

..

] Il est vrai que ces dédommagements ne peuvent être sentis par toutes les âmes ni dans toutes les situations.

Il faut que le cœur soit en paix et qu'aucune passion n'en vienne troubler le calme.

Il y faut des dispositions de la part de celui qui les éprouve, il en faut dans le concours des objets environnants.

Il n'y faut ni un repos absolu ni trop d'agitation, mais un mou­ vement uniforme et modéré qui n'ait ni secousses ni intervalles.

Sans mouvement, la vie n'est qu'une léthargie.

Si le mouvement est inégal ou trop fort, il réveille; en nous rappelant aux objets environnants, il détruit le charme de la rêverie et nous arrache d'au dedans de nous, pour nous remettre à l'instant sous le joug de la fortune et des hommes et nous rendre au sentiment de nos malheurs.

Un silence absolu porte à la tristesse; il offre. »

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