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Chardin

Publié le 17/04/2012

Extrait du document

Parmi les peintres français du XVIIIe siècle, Chardin se distingue par son indépendance et son originalité. Il connut la célébrité grâce à ses paisibles natures mortes et à la simplicité de ses scènes de genre, aux antipodes de la frivolité du style rococo en vogue chez bon nombre de ses contemporains. Chardin n'éprouva jamais le besoin de voyager pour aller chercher son inspiration et passa toute sa vie à Paris, préférant puiser les sujets qu'il traite dans les limites de son entourage immédiat. La simplicité de son style lui attira des clients aussi bien dans la famille royale que dans la bourgeoisie.

« des moyens éminemment picturaux, par son langage plastique, que Chardin, lui aussi, fera surgir la nouveauté, jaillir la surprise.

Aussi bien, ce que nous admirons le plus aujourd'hui chez le maître de natures mortes comme le Pain ou le lv!enu de gras ou le Menu de maigre, ou chez celui d'épisodes bourgeois comme la Pourvoyeuse ou le Bénédicité ou la Mere laborieuse, c'est avant tout sa technique.

Souvent même sommes-nous surpris d'éprouver une émotion aussi profonde devant une œuvre aussi modeste.

Voilà, certes, l'art le moins ambitieux qui soit, le plus discret, voire le plus effacé, et cependant il nous émeut autant qu'il nous charme.

Sentimentalement peut­ être, mais surtout par ses qualités plastiques.

Tant est-il que nous avons retenu la leçon de Char­ din: « Pour être avant tout question de sentiment, la peinture n'en est pas moins affaire de tech­ mque ».

Jamais peintre n'a mieux dévoilé, par ses traits et ses couleurs, cette harmonie qui, dans l'univers des formes, ordonne les plans, équilibre les volumes, relie les lignes et enve­ loppe dans un même éclairage féerique les tons et les teintes, les ombres et les reflets.

Chaque fois que Chardin recrée les substances, ille fait avec tant de justesse que nous retrouvons leur confor­ mation, leur densité, leur couleur.

1-1ais sa magie ne s'arrête pas à cette illusion.

Des parentés secrètes, des rapprochements subtils, des oppositions raffinées s'établissent entre le rose d'un cor­ sage ou le gris bleuâtre d'une jupe et le rouge d'un chaudron, entre une nappe blanche, toute lisse, et la pelure grumeleuse d'une poire, entre tel profil humain et tel meuble, rappels non encore discernés, toujours nouveaux.

Cependant sa matière est, en général, plutôt ténue, d'une gamme unie, bien que riche en dégradés.

C'est au moyen de légères hachures et de menus empâte­ ments, rares à cette époque, de traits fort déliés mais peu appuyés, souvent estompés au contraire, qu'il crée ses accords harmoniques les plus délicats, avec une grâce qui n'exclut jamais la fermeté et la précision.

Et sur les teintes et les demi-teintes de sa palette de grand coloriste, ou plutôt de grand tonaliste, flotte une luminosité qui imbibe la chair, les étoffes, la porcelaine, jusqu'au bois et au métal, une fluidité incomparable, comme une vapeur blonde ou une brume pailletée d'argent sur les couleurs bien nourries, établies sur un fond consistant, patiemment préparé.

Après un long crépuscule, cet art vient d'entrer triomphalement dans l'histoire, depuis que nous avons ramené l'art de peindre à une conception essentiellement plastique.

A la tradition de Chardin - « le premier des modernes )), a-t-on pu écrire, et on aurait pu ajouter: « le pre­ mier des impressionnistes))' au surplus le moins romanesque, le ,moins idéologique, mais'le plus strictement pictural des maîtres de son pays - se rattachent Corot et Cézanne, Monet et Renoir, Braque et Derain.

Les impressionnistes l'invoquent, parce qu'il a pratiqué avant tous les autres un pointillisme modulateur, une touche presque divisionniste, l'art des reflets; les cubistes, de leur côté, applaudissent à ses natures mortes rigoureusement agencées et où dominent déjà des règles géométriques élémentaires, non encore codifiées, mais pertinentes.

Tous s'inclinent devant sa soumission aux lois du tableau et sa probité.

Peintre éminemment français, Chardin excelle par son réalisme poétique, sa solidité dépour­ vue de lourdeur, son souci de la chose clairement pensée et profondément sentie mais joliment exprimée, son besoin d'achèvement et de perfection.

Il nous retient par sa gravité souriante, sa tendresse pudique, son lyrisme discret, et pour tout résumer: par l'élégance et la mesure, le charme et le sérieux combinés.. »

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