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Daumier

Publié le 17/01/2022

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Daumier (Honoré), (Marseille, 1808 - Valmondois, 1879) n'est pas seulement sculpteur presque au contraire : célèbre pour ses dessins satiriques, ses gravures, ses lithographies, il est méconnu pour ses sculptures ; ce qui pouvait hâtivement faire répondre «pas du tout« au test. Erreur et injustice : son travail de sculpture est l'un des plus singuliers qui soient, puisqu'il est l'exécution en volumes de son talent de caricaturiste féroce. Daumier est donc un des rares représentants de la sculpture comique et cruelle. On ira s'en convaincre au Musée d'Orsay à Paris, où une vitrine de bustes fabrique l'un des plus terribles portraits-charges des bourgeois respectables du XIXe siècle.

« En 1848, il envoie au concours pour la figure de la République une esquisse (Louvre) qui est très admirée, et il n'obtient pas le prix simplement parce qu'il refuse, par modestie, de con­ courir pour le tableau définitif.

Il ébauche un portrait du ministre de la justice, Crémieux, et, l'Etat lui commandant un tableau, il compose les esquisses qu'on appelle à tort la Barricade ou l'Emeute, et qui veulent symboliser la Révolution de 1848 (réplique de ce qu'a été pour 1830 la Liberté sur la barricade de Delacroix).

En 1849, il envoie au Salon le Meunier, son .fils et l'âne (anc.

coll.

Bignou); à celui de 1850 les Femmes poursuivies par des saryres (Montréal), un Don Q.uichotte.

et le dessin de Sitene du Musée de Calais.

Vers 1852, il peint Œdipe et le berger et la Sainte }.{ade­ leine; vers 1858, le Wagon de troisième classe et le Drame du Musée de Munich, ainsi que divers sujets sur le théâtre.

Au salon de 1861 figure la Blanchisseuse (Musée du Louvre); en 1864, Dau~ier représente son ami Jules Dupré au travail (le Peintre, au Musée de Reims).

Un peu plus tard, viennent les Avocats; Don Q.uichotte et la mule morte est exposé au Salon de 1868, et l'œuvre s'achève par les Parades foraines.

On le voit par ses premiers tableaux, on le sait d'ailleurs, Daumier ne s'est pas formé seul; il a fréquenté assidûment le Louvre; il y a admiré surtout Rubens et Rembrandt, et on retrouve dans ses premières œuvres peintes un sentiment très rubénien dans l'allégresse, la plénitude des formes, les sujets et le style.

Mais ce sentiment disparaît assez vite; l'influence de Rubens cède devant celle de Rembrandt.

Rembrandt, plus familier à un graveur, le séduit par ses op­ positions violentes et sourdes, par ses éclairages, par la richesse de son métier.

Daumier cesse rapidement d'être sensible à l'agrément de la couleur claire; les teintes sourdes, les noirs, les bruns, certains rouges, les visages se découpant en sombre sur un fond violemment éclairé, consti­ tuent pour lui l'essentiel de l'art du peintre.

L'influence de Decamps, celle de Millet sont faciles à reconnaître à côté de celle de Rembrandt, mais Daumier reste très personnel.

Il est personnel par son style, par son dessin rapide, par sa couleur; il l'est aussi par ses sujets résolument modernes.

Il peint ce qu'il voit à côté de lui dans l'île Saint-Louis: les chevaux à l'abreuvoir, les laveuses remontant péniblement l'escalier, les passants contemplant le clair de lune, les enfants se baignant dans la Seine; l'éclairage scénique le séduit quelque temps, et il termine par les avocats et les pitres forains.

Daumier est ce peintre de la modernité que Baudelaire appelait de tous ses vœux; mais Baudelaire, qui professait pour lui une « admiration absolue», ne l'a pas compris, peut-être parce que Daumier ne s'est jamais réalisé complètement; la centaine de toiles que nous possé­ dons de lui ne sont généralement que des esquisses, des études inachevées.

Cependant, son œuvre a eu un grand retentissement: Manet et Cézanne en ont compris la leçon; ils ont admiré ces œuvres géniales et incomplètes, alors que la veuve de Daumier acceptait de vendre tout son atelier en échange d'un poulailler.

JEAN ADHÉMAR Conservateur adjoint du Cabinet des estampes Paris. »

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