Deux tahitiennes sur la plage de Gauguin

« Analyse ,._.D'emblée, la composition générale proclame les libertés que l'artiste s'accorde vis-à-vis de la réalité.

En effet, Gauguin nous a laissé ici une double image de Teha 'amana, la première vahiné avec laquelle il se lia, vue simultanément de face et de profil.

Quant à l'improbable couleur verte de la mer , elle nous incite à douter de la réalité de cette « plage » que nous indique le titre du tableau .

La technique des à-plats et les contours sinueux sont mis en vale ur par l 'éclat des cou­ leurs qui contrastent avec l'expression absorbée des visages sereinement abandonnés au my stère de la vie.

Gauguin écrivait d'ailleurs : « Si la couleur est en elle-même un mystère pour nos sens, il con­ vient que nous en usions tout aussi m ystérieu se­ ment ».

Et ceci apparaît clairement dans le tableau où l'accord audacieux des couleurs pures crée une atmosphère irréelle, int emporell e.

On y retrouv e cette harmoni e s ourde obtenue par des tons très peu distants les uns de s autres.

« Tou t m 'ave uglait , m 'éblouissait dans ce paysage», écrit -il.

Ses forces poétique s sont désormais vouées aux Tahitiennes dont d'emblée, d'un geste sû r, il fixe pour l 'éternit é le type de beauté .

L'œuvre C Signée et datée de 1891 , cette œuvre particuli è­ rement célèbre fut ré alisée au cou rs du premier séjou r tahitien du p eintr e et exprime tout son attrait _ pour ces mondes lointain s, qu 'il rêvait vierges de -toute influ ence occidentale.

Au cours de ce premier séjour, qui dura de juin 1891 à l 'été 1893, Gauguin exécuta une sec ond e version de ce tableau : Parau api (« Les nouve lles du jour », actue llement à Dr e sde) , ce qui prou ve l'importance qu'il lui accordait.

Gauguin et le symbolisme '+Le sytnbo lisme, qui trouve dans l'œuvre de Gauguin un e de ses plus hautes expressions, fapparaît çolllJl)e une vigoure:use protestation contre l'esprit rationaliste et positiviste qui imprégnait la culture et la société parisiennes à la fin des a:p,nées 1880.

n s'agissait en fait d'une réaction à l'atmosphère générale, que les symbo­ listes jugeaient trop bourgeoi se' e t terre à terre.

Les impre ssionnistes avaient exploré le monde du réel ; les symbolistes préféreront celui de l'imaginaire et de l'i ntérior ité.

« Rêver avant de commencer un tableau » aurait pu être le credo de s symbolis tes .

Chez Gauguin , les formes sont simplifiées, presque primitives.

Elles répondent à un pres- sant désir de retr?uv er un univers a~chaïqp~ ~ qui se situerait aux antipodes des sociétés d_i tes •.

:: civilisées.

« Pour suggérer une nature des plus 'i variées et son désor dre, et le soleii ,tropicàl gui J l'enveloppe , je dois bien accordenà mes figures 1 un cadre adapté.

Et ce ne peut être que cette vie ·; libre, décou verte et intime à la fois dans les forêts ~ et le long des ruisseaux , avec les femmes et leur s paroles de tous les temps murmurées dans cette J immense maison qu'est la Nature dansl 'infinie ~ richesse de Tahiti: et les couléurs fabuleuses en ~· tout lieu et cet air de feu, mais cependant l'immo- t bilité de son silence.

» L'œuvre de Gauguin est i une quête de la nature et de l'homme comme l'indique le titre d'un grand tableau tardif, D'où ' venons-nous, qui somm es-nous , où allons-nous ? Du même peintre: PICTO 847 à 864 Photo R.M.N.

© Nard ini Editore , 1991 .

VPC Larousse- Laffont pour l' édition frança i se, 199 1.

R1-03-09. »