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Indes. Bénarès. Évocation du Ramayana.

Publié le 08/03/2012

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En Inde, la plupart des manifestations hindoues sont nées des grandes épopées du Mahabharata, « grand récit de guerre des fils de Bharata « et du ramayana, « geste de Rama «, qui raconte la jeunesse du prince Rama et son mariage à rebondissements avec la belle Sita. Ces épopées jouent toujours un grand rôle dans les fêtes religieuses comme ici, à Bénarès, où des enfants parés d'or et de bijoux représentent les divinités du Ramayana. Ils incarnent Rama, exilé par sa belle- mère et Sita qui, en voulant le suivre, est enlevée par le démon Ravana qui l'emporte dans son palais. S'alliant à l'armée des singes, Rama tuera Ravana et délivrera Sita qui devra cependant passer l'épreuve du feu pour prouver sa pureté. L'épopée est jouée inlassablement par ces enfants qui, très imprégnés de leur rôle, le tiennent avec beaucoup de dignité. Leur spectacle sera accompagné de chants et de danses sacrées qui seront offerts aux divinités parmi une foule débordante.

« L'HOMMAGE POPULAIRE AU DIEU lAMA • Nombre de festivals glorifiant ,_.

attirent des foules énonnes en Inde .

Le plus populaire , appelé Dashahra , célébré en octobre ou n011en1bre , marque le souvenir de la victoire du dieu Rama sur le démon Ravana, dont il débarrassa le monde .

• La bataille est reconstituée dans les cours des temples et sur les places publiques , où l'on bnlle des effigies de Ravana.

Le culte de Rama est associé à d'autres fêtes, comme celle de Navrati, célébrant en mars ou avril, Ourga , déesse de l'énergie et épouse de Shiva : la date coïncidant avec la naissance de Rama , on y réàte le Ramayana.

• La grande fête du Divali (rangées de lampes), en octobre ou novembre, honore le dieu-éléphant Ganesh ainsi que Lakhsmi, épouse de Vishnou , mais elle est avant tout la célébration du couronnement de Rama, rentré victorieux après 14 ans d'exil.

Les sujets de Rama ayant illuminé la ville pour fêter son retour, les maisons sont éclairées par une multitude de lampes à huile à l'occasion de cette fête.

sous la dynastie des Maurya , qui y règne depuis 320 av.

J.-C.

Cet État se trouve bien à l'est du pays natal de Rama .

le royaume de Kosala, avec Ayodhya pour capitale, désigné sous le nom de «pays du milieu » ; ce qui prouve que l'occupation aryenne ou védique avait atteint les régions orientales de l'Inde .

·Le Ramayana , récit issu de la caste des guerriers dont il illustre la promotion dans le système social hindou , témoignerait de l'expa nsion aryenne vers le sud, puisque Rama traverse tout le sous-continent indien pour aller rechercher Sita dans l'ile de Lanka (Ceylan ou Sri Lanka ).

L'EXPANSION VUS LE SUD JUSQU'AU Sa1 LANKA • Pourt ant, il est peu probable que Valmi ki ait été le témoin de cette expansion , sinon sous la forme d 'expéditions ponctuelles conduisant les armée s indienne s vers le sud, où les populat ions indigènes non «convert ies» seraient encore représentées sous les traits de démons.

Depuis sa capitale Patal iputra sur le Gange , le fondateur de la puissante dynastie Maurya, Chandragupta , élargit son royaume vers le Bengale à l 'est et vers les régions du sud, jetant les fondations d'un empire qui brillera de tout son éclat sous le règne du grand souvera in Asok a (v .

269-232 av.

J.-C).

• C'est donc sous le règne d'Aso k a, 1------------~ marqué par la tolérance religieuse , que • C'est sur ces derniers que s 'appuie une société hiérarchi sée en quat re castes majeures : au sommet les brt1hmanes , qui ont une fonction sacerdotale et transmettent le savoir religieux , les Kshatriyas , guerriers ayant vocation à protéger le peuple , les Vaishya s , qui s 'occupent de commerce et d 'agriculture , et les Shudras .

Ces derniers servent les trois autres caste s, mais participent malgré tout de ce système social rigide dont sont exclus les «hors -castes », parias ou intouchables .

LE «PAYS DU MIUEU », TEllE NATALE DE RAMA • On sait peu de choses des premiers royaumes indiens .

Toutefois , l ' hindou isme y était suffisamment implant é pour avoir donné naissance à ses premiers courants «schismatiques » , le bouddhi sme et le jaïnisme , dès 500 avant notre ère.

Ces royaumes étaient aussi assez prospères pour avoir fasciné Alexand re le Grand et l'avoir incité à poursu ivre sa grande aventure orientale vers l'Indus.

Mais si le grand conquérant gréco -macédonien a vaincu le roi Poros , dont le royaume s'étendait dans le nord-est de l'actuel Pakistan , vers 326 avant notre ère, il dut renoncer à aller au-delà de l 'Indus .

• À cette époque , qui est auss i celle présumée de Valmiki , le royaume de Magadha, à l 'est de Bénarès , devient l'un des plus puissants États indiens , la civilisation védique s'est étendue à tout le sous -continent indien, jusqu 'au Sri Lanka , converti au bouddhisme par Mahinda, fils ou frère cadet d'Asoka .

Ce dernier avait choisi l'enseignement bouddhique, qui cohabitait avec l'hindouisme, et avait déployé ses efforts pour porter dans toutes ses nouvelles possessions la parole du Bouddha , que les hindous considèrent comme le 9 ' avatar du dieu Vishnou.

• Valmik i n'a théoriquement pas pu assister à la propagation de la tradition védique sous ses différentes formes relig ieuses à l 'ensemble de l'Inde, mais s on Romoyono en décrit la genèse.

UNE VOCATION MORALE ET RELIGIEUSE LEs VEDA, TEXTES atvtlis • Le Romoyono participe d 'une tradition textuelle sur laquelle s'appuie l'hindouisme comme ensemble de croyances , de doctrines et de règles de vie.

Cette tradition repose sur le socle du texte fondateur qu'est le Veda , dû aux conquérants aryens , et dont le plus ancien , le RigVeda , qui remonte à 1500-1300 avant notre ère, relève des « Samhita » , recueils d 'hymn es, de prières, de formules rituelles en sanskrit archaïque ; les autres textes de la tradition védique sont les Brahmana , traités du rituel et surtout du sacrifice , les Aranyaka et les Upanishad , exposés , parfois sous forme de dialo gues, sur l'identité du «soi» individuel et de l'âme cosmique , ou absolu .

Cet ensemble de textes védiques , d 'origine divine ou surnaturelle , révél és à des «voyants », const itue la « Shrut i » , qui s e traduit «audition », car elle doit se transmettre de la bouche du maitre à l'or e ille du disciple , et ne doit être enseign é e qu'aux garçon s des trois premières castes .

LE RAMAYANA, TEXTE MtMOIIEL • Les anciens Indiens distinguaient des textes ré vé lés de la « Shruti », m ême s'ils prennent appui sur celle- ci, les textes de la tradition mémorielle ou« Smriti »( mé moire).

• Ensemble de textes attribu és à des auteurs humains , et sans doute composés pour la plupart dans les siècle s qui précèdent et suivent immédiatement le début de notre ère, la « Smriti » consiste essentiellement en des «codes », recueils de préceptes religieux , moraux , juridiques .

La « Smriti » comprend les écrits historiographiques , les « lt ihasa » et les récits sur les temps anciens à dimension encyclopédique , les «Pur ana >>.

C'est à la catégorie des « ltihasa >>(qui signifie« Il était ains i>>) qu'appartiennent le Ramayana et le Mahabharata.

LE SENS DU DEVOIR • Les principe s ense ignés dans ces textes portent sur le «dharma » (traduit par religion ).

à la fois ordre du monde et ensemble des règles de conduite à suivre en fonction de la caste à laquelle chaque homme appart i ent outre les devoirs et vertus valant pour toute l'humanité .

l'accompli ssement du devoir approprié à sa condition permet d 'accéder dans une vie future à une renaissance heureuse.

On peut s'employer par une success ion d'actes (karma) juste s à s 'a s surer des vies meilleures et plus heureuses, mais on peut aussi , par d 'autres voies , se dégager du cycle infini de naissances et de morts et accéder à la délivrance.

• Dans le Ramayana, c'est ainsi le dharma qui détermine et fait avancer l'intrigue, le sens de l'honneur de la caste des guerrier s étant d écisif pour les destiné es.

• Dans les premiers siècles de notre ère, avec l'extension du vishnou ïsme , dont les sectateurs exaltent Vishnou comme la divin it é suprême venue sauver le monde du désordre et y rétablir , sous s e s divers avatars , l'équilibre e ntre les dieux et les démons , la figure de Rama prend un sens particulier .

Le Ramayana a été ains i interprét é comme l'histoire de l'incarnation de Vlsbnou , que les dieu x auraient prié de sauver l 'univers des projets menaçants de Ravana .

selon une légende du premier chant de l'épop é e.

Vishnou leur aurait alors promis de prendre l'apparence de Rama -chandra pour libérer l'univers de Ravana , ennemi du dharma , dont la destruction sera it le but v éritable de l'épop é e.

UN CODE DE CONDUITE • La geste de Rama tend à montrer que si elle est garantie par la vie ascét ique, · la purification intérieure , préalable à toute libération , peut se réaliser aussi au sein de la société , pourvu qu'on y accomplisse avec soin et générosité les devoirs de sa caste .

Une doctrine nouvelle qui explique la vénération exerc é e par Rama, en tant que modèle d 'une vie conforme au dharma , et l'importance du Ramayana .

Jouant le rôle de sauveu r, avec Krishna , une autre incarnation de Vishnou , Rama , hissé au rang de divinité , a fait l'objet d 'un culte qui s'est développé vers le X lv' siècle , et qui subs iste encore aujourd'hui , comme l'attestent les multiples temples et festivals qui lui sont dédiés.

UNE GRANDE ŒUVRE LITTÉRAIRE • Moins imposant que le Mahabharata , qui est le texte le plus volumineux du patrimoine littéraire mondial , le Ramayana n 'en est pas moins lui aussi une œuvre monumentale , dont l'étendue impressionne d 'autant plus qu'elle est attribuée à un auteur unique .

Cette fresque de 24 000 vers doubles se décompose en 7 livres : «Baia Kanda » (Livre de la Jeunesse ), «Ayodhya Kanda » ( livre d' Ayodhya ), «Arany a Kanda • (Livre de la Forêt ), « Kishkinda Kan da» (Livre de Kishkinda , royaume des singes) .

« Sundara Kanda >> (Livre de Sun da ra ou Hanuman , le dieu -singe) , « Yuddha Lanka Kanda >> (Livre de la bataille de Lanka ) et« Utta ra Kanda >> (Livre au-delà) .

• Dans la tradition indienne pourtant, le Ramayana et les autres épopées , s ' ils n'ont pas le caractère fondamentalement sacré des textes révélés , ne sont pas tenus pour des œuvres littéraires telles qu'on les définit en Occident l'univers des sens n'étant pas compatible ave c l'aspiration transcendentale à la d élivrance.

La récitation de ces vers a été fortement rituali sée dans la religion hindoue , dont les fidèles sont tenus de connaître les détails de la geste héroïque de Rama .

UNE SOUlCE INÔ'UISABLE D'INSPIIAnON • La tradition indienne voit néanmoins en Valmi ki le «premier des poètes».

Les descriptions de lieux et des grands phénomènes de la nature , des sentiments humains , comme l'amour liant Rama et Sita, le prestige inégalé aussi de ses héros , qui ne donne que plus d 'ampleur à l 'œuvre poétique selon les critères indiens , ont fait du Ramayana une source d'inspiration inépuisable pour les maîtres de la poésie indienne .

• Le grand dramaturge Kalidasa (1v'-v' siècle apr.

J.-C), dont l'œuvre maîtresse , Sakunta/a , jette les fondations de la littérature indienne , s ' est inspiré du souffle épique du Ramayana .

Reprises e t adaptées par ses successeurs , de nombreuses scènes du Romayana ont été portées à la connaissance du plus grand nombre , par la tradition orale, même sous la domination des musulmans , à partir du x n • siècle .

UNE TIADrriON liEN VIVANTE • Le Ramayana a donné lieu à de nombreuses versions vernaculaires , dont celle , en hindi, de Tulsi Das {1543- 1623 ), qui a conféré une connotation fortement sensuelle à l 'amour que vouaient à Rama les autres personnages de l'épopée .

• Outre de nombreuses œuvres picturales et sculpturales, l'épopée a inspiré aussi le Kathakal i, théâtre dansé du Kerala , en Inde du sud, dont les personnages , très maquillés et revêtus de costumes surprenants , en miment les scènes , racontées par des chanteurs .

•l'épopée est très populaire encore aujourd 'hui en Inde, comme le prouve le succès remporté par son adaptation télévisée en 90 épisodes dans les années 1980, qui a captivé plus de 100 millions de téléspectateurs .

• En colonisant l 'Asie du Sud-Est , au premier millénaire de notre ère, l'Inde y a diffusé aussi le Ramayana , qui a marqué de son empreinte les cultures de ces pays , généralement bouddhistes .

De la Birmanie à la Tha-.lande (où l'ancienne capitale du Siam , Ayuthia , a été baptisée en hommage à la ville de Rama, Ayodhya ) en passant par le Vietnam et le Cambodge, l'épopée de Rama est ancrée dans la conscience collective .

l'Indonésie elle-même , très majoritairement musulmane , a conservé dans ses traditions populaires des traces du Ramayana , dont l'influence reste très vivace dans l'ile de Bali, où l'hindouisme s'est maintenu .

RAMA.

UN ENJEU POLmQUE • Rama est tenu pour l'un des fondateurs mythiques de 11nde et les ultranationalistes hindous en ont fait leur héros, exacerbant les tensions avec les musulmans.

•le 6 décembre 1992, à Ayodhya, des extrémistes hindous rasent la mosquée lllll1tl MIIS/Itl (mosquée de Babur) datant de 1528 , au prétexte qu'elle aurait été construite sur les fondations d'un temple marquant le lieu de naissance de Rama .

Les émeutes s'étendent à tout le pays, faisant quelque 2 000 morts .

• Le sujet empoisonne régulièrement les relations déjà tendues entre hindous et musulmans .

Les hindous sont décidés à élever un temple sur le terrain de la mosquée racheté par le gouvernement indien, qui a chargé une commission d'établir si le site est vraiment marqué de la présence de Rama.

Le 27 février 2002 , dans le Gujarat des musulmans mettent le feu à un train de pélerins hindous de retour de Ayodhya, faisant 58 victimes : de nouvelles émeutes font plus de 2 000 morts .

• Le parti du Congrès, qui a succédé au parti nationaliste BJP en 2004, s'efforce depuis de calmer les passions attisées bien malgré lui par Rama .. »

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