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Jean Dubuffet

Publié le 08/03/2010

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Né au Havre, Dubuffet montra un talent précoce de caricaturiste. Il s'inscrivit à l'Académie Julian de Paris, mais estimant que l'art ne pouvait occuper toute une vie, il reprit en 1925 le florissant négoce en vins de son père, avant de s'établir quelques années plus tard comme grossiste à Paris. Toutefois, en 1942, il abandonna définitivement le négoce de vins pour se consacrer à l'art. Les graffiti inspiraient beaucoup Dubuffet, qui y voyait "l'art de Monsieur Tout-le-Monde". Son trait, en peinture comme en dessin, était brut et sans fioritures. Il préférait l'art spontané des enfants et des fous et collectionnait des tableaux réalisés par des psychotiques. En les exposant, il inventa le terme art brut. Dans ses premières oeuvres réunies dans la série Marionnettes de la ville et de la campagne, il utilisa des couleurs vives, dans des compositions sans perspective. Sa première exposition, après la Libération, scandalisa les milieux artistiques parisiens. Plus tard, il construisit des sculptures monumentales, comme le Groupe de quatre arbres pour le Chase Manhattan Plaza à New York. Pour ses Pâtes, il utilisait des bandes dessinées, des puzzles, des pigments noirs et bleus, du sable et du verre. A partir de 1962, il n'employa plus que des pigments rouges, blancs, noirs et bleus, dans un souci d'opposition systématique à l'esthétisme. Dubuffet refusait toute hiérarchie entre les objets, beaux ou laids, qu'il utilisait, comme il s'en expliqua dans ses textes, publiés en 1967. Les gens d'une certaine génération, en Occident, ne pensent jamais que ceux de la suivante les trouveront ridicules, provisoirement, en attendant qu'une autre découvre dans leurs traces des charmes dignes d'un musée non pas imaginaire, mais concret. Cela, du moins, s'est passé ainsi, depuis disons, environ deux ou trois siècles.

« Voit veut dire nous fait voir, bien entendu. Tout ça, on peut le mettre sous la rubrique : bonshommes.

Les vaches, ce sont les bonshommes à la campagne, lesautomobiles (et le métro), ce sont les bonshommes à la ville.

Et il y a aussi les bonnes femmes.

Tout ça fait unensemble citadin et cambrousard assez homogène ; les Arabes ne sont qu'épisodiques.

Nous avons en eux, au fait,une pierre de touche ; ils sont aussi minables et marrants que les autres, si on les prend au pied de la lettre, au piedde l'image, et pourtant on sait que Dubuffet manifesta quelque arabophilie.

Donc nulle intention désobligeante. Le problème reste ouvert : un chameau est-il plus dérisoire qu'une voiture (wature) automobile ? ou moins ? ouautant ? ou pas ? ou rien… Des bonshommes on passe aux objets ou à l'entourage (barbe eh oui ! wature, campagne à vaches, etc.), et traitd'union aux tables, par exemple. Les tables, en effet, sont, d'une part, des êtres bizarres, singuliers, anormaux, autonomes, comme des bonshommesou des bêtes, et, d'autre part, des espaces plats dont la matière propre est la seule propriété.

De là on passe (non,très exactement, dans la chronologie de l'oeuvre, mais du moins dans sa logique) aux représentations de sols, defonds de ruisseau, de pieds de murs, de seuils herbés, d'humbles plantes plates qui forment l'autre aspect del'oeuvre de Dubuffet. Ce second aspect est, naturellement, le plus ingrat ; la dérision n'y apparaît plus.

Est-ce qu'on peut aimer le gravieret trouver la table dérisoire ? Est-ce qu'on peut chérir la chélidoine et sourire du pis (du pis de la vache) ? Est-cequ'on peut caresser la mousse et refuser celle du visage (la barbe) ? Je pense que Dubuffet n'hésiterait pas àrépondre oui.

Il y est partisan de certains privilèges.

L'humble est privilégié, le naïf, le brut.

Il ne saurait donner lamême représentation sincère aux crétinisés de la barbe, de l'automobile ou du métro. A vrai dire, il y a là quelque problème et je ne suis pas sûr que ce que je viens d'en dire soit l'exacte solution.Comme je l'ai déjà signalé ci-dessus, Dubuffet a beaucoup écrit sur son oeuvre ; au début en des textespublicitaires, ou du moins de propagande, auxquels on ne peut entièrement se fier, ensuite en des explicationsd'ordre technique (procédés, matériau, etc.), en fait peu éclairantes pour l'amateur.

On s'aperçoit, en fin decompte, que de cette abondante production imprimée, on ne peut tirer aucun éclaircissement ; les intentions deDubuffet demeurent secrètes, obscures, et c'est bien qu'il en soit ainsi. Oui, il s'explique parfaitement (du moins aux yeux du non-professionnel) sur ses travaux quant aux moyens de leurréalisation, et l'on voit par là qu'il est peintre, peintre au sens fort du mot, et, quoiqu'il en veuille, peintre arrière-arrière, etc., petit-fils de Giotto ; quant au reste, c'est à l'amateur, au critique d'élucubrer et, comme l'on sait, cesélucubrations sont vaines, et l'on atteint ainsi une certaine frange du néant. Dubuffet est un grand peintre : l'art demeure en question.

Et une question.. »

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