L'IMPRESSIONNISME
Publié le 03/05/2019
                             
                        
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L'œil leplus digne d'admiration est celui qui est allé le plus loin dans l'évolution de cet organe, et par conséquent la peinture la plus admirable sera, non pas celle où il y aura ces chimères d'écoles : <   L'état le plus fa vorable à la liberté de cette évolution est la suppression des écoles, des jurés, des médailles, ces meubles enfantins, du patronage de l'État, du parasitisme des critiques d'art sans œil; le dilettantisme nihiliste, l'anarchie ouverte à toutes les influences, telle qu'elle règne parmi les artistes fr ançais en ce moment : << Laissez fa ire, laissez passer,>> Au-dessus de l'humanité, la Loi suit son développement réflexe et l'Inconscient souille où il veut,   DÉFINITION DU PLEIN AIR   Le plein air, fo rmule qui servit d'abord et surtout aux paysagistes de l'École de Barbizon (village près de la forêt de Fontainebleau), ne signifie pas cela, Ce plein air des paysagistes impressionnistes, il commande leur peinture entière et signifie la peinture des êtres ou des choses dans leur atmosphère : paysage, salons à la bougie ou simples intérieurs, rues, coulisses éclairées au gaz, usines, halles, hôpitaux, etc   EXPLICATIONS DES APPA RENTES EXAGÉRATIONS IMPRESSIONNISTES   L'œil commun du public et de la critique non artiste, élevé à voir la réalité dans des harmonies établies et fixées par la foule de ses peintres médiocres comme œil, cet œil n'a aucun droit contre ces yeux aigus d'artistes qui, plus sensibles aux variations lumineuses en noteront naturellement sur leur toile des nuances, des rapports de nuances rares, imprévus, inconnus qui fe ront crier les aveugles à l'excentricité voulue, et même dût-on faire la part de l'incohérence d'un œil naturellement, volontairement si l'on veut, exaspéré dans la hâte non par le dessin-contour mais uniquement par les vibrations et les contrastes de la couleur ; la perspective théorique remplacée par la perspective naturelle des vibrations et des contrastes des couleurs ; l'éclairage d'atelier, c'est-à-dire le tableau peint, qu'il représente la rue, la campagne, un salon éclairé, dans le jour égal de l'atelier et travaillé à toute heure, remplacé par le plein air, c'est-à-dire le tableau fait devant son objet, si impraticable soit-il et dans le temps le plus court possible, vu les variations rapides de l'éclairage des choses. Nous allons voir ces trois points, ces trois procédés de langues mortes, comme pour fa ciliter, en le démontant, un devoir d'écolier, remplacés par l'unique ressource des jeux de la lumière, la Vie.   Le dessin est un vieux et vivace préjugé dont l'origine doit être recherchée dans les premières expériences des sensations humaines. Primitivement l'œil, ne connaissant que la lumière blanche, avec ses ombres indécomposées, par conséquent, point aidé dans ses expériences par la ressource des colorations discernantes, s'aida des expériences tactiles. Alors, par des associations habituelles d'aide mutuelle et ensuite par hérédité des modifications acquises entre la fa culté des organes tactiles et celle de l'organe visuel, le sens des fo rmes a passé des doigts dans l'œil. Les fo rmes arrêtées ne relèvent pas primitivement de l'œil et l'œil par succession et raffinement en a tiré pour la commodité de son expérience le sens des contours nets ; et de là cette illusion enfantine de la traduction de la réalité vivante et sans plans par le dessin-contour et de la perspective dessinée.   Essentiellement l'œil ne doit connaître que les vibrations lumineuses, comme le nerf acoustique ne connaît que les vibrations sonores. C'est parce que l'œil, après avoir commencé par s'approprier, raffiner et systématiser les fa cultés tactiles a vécu et s'est instruit, s'est entretenu dans l'illusion par les siècles d'œuvres dessinées que son évolution comme organe des vibrations lumineuses s'est si retardée relativement à celle de l'oreille par exemple, et est encore dans la couleur une intelligence rudimentaire, et que tandis que l'oreille en général analyse aisément les harmoniques, tout cela se résout en réalité en vibrations colorées et doit être obtenu sur la toile uniquement par vibrations colorées.   Dans cette petite et étroite exposition de chez Gurlitt, la formule est sensible surtout dans le Monet... et le Pissarro... où tout est obtenu par mille touches menues dansantes en tout sens comme des pailles de couleurs — en concurrence vitale pour l'impression d'ensemble. Plus de mélodie isolée, le tout est une symphonie qui est la vie vivante et variante, comme «les voix de la forêt» des théories de Wagner en concurrence vitale pour la grande voix de la forêt, comme l'Inconscient, loi du monde, est la grande voix mélodique, résultante de la symphonie des consciences de races et d'individus. Tel est le principe de l'école du plein air impressionniste. Et l'œil du maître sera celui qui discernera et rendra les dégradations, les décompositions les plus sensibles, cela sur une simple toile plane. Ce principe a été, non systématiquement, mais par génie appliqué en poésie et dans le roman chez nous.   FAUSSE ÉDUCATION DE NOS YEUX   Or chacun sait que nous ne voyons pas les couleurs de la palette en elles-mêmes, mais selon les illusions correspondant à l'éducation que nous ont donnée les tableaux des siècles, et avant tout pour la lumière que peut nous donner la palette (comparez photométriquement le soleil le plus éblouissant de Turner à la flamme de la plus triste chandelle). Le jugement réflexe d'une convention harmonique innée pour ainsi dire se fait entre la sensation visuelle du paysage et la sensation des ressources étalées sur la palette. C'est la langue proportionnelle du peintre, qu'il enrichit proportionnellement à la richesse du développement de sa sensibilité optique. De même pour les grandeurs et la perspective. Oserai-je dire qu'en ce sens la palette du peintre est à la lumière réelle et à ses jeux en couleur sur les réalités réfléchissantes et réfractantes, ce que la perspective sur une toile plane est à la profondeur et aux plans réels de la réalité dans l'espace ? Ces deux conventions sont les ressources du peintre.
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LAfORGUE 
non  par  le  dessin-contour  mais uniquement  par  les vibrations  et les 
co ntrastes  de la couleur ; la  perspect ive théorique  remplacée  par la 
perspect ive naturelle  des  vibrations et des  cont rastes  des couleurs ; 
l'é clairage  d'atelier,  c'est-à-dire  le tableau  peint,  qu'il  représente la 
rue,  la campagne,  un salon  éclairé,  dans le jo ur  égal  de l'atelier  et 
trav aillé  à toute  heure,  remplacé  par le plein  air, c'est-à-dire  le 
tableau  fait  devant  son objet,  si impraticable  soit-il et dans  le temps 
le  plus  court  possible,  vu  les variations  rapides de l'éc lairage  des 
choses.
                                                            
                                                                                
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langues  mortes,  comme pour faciliter,  en le démontant,  un devoir 
d' écolier,  remplacés  par l'unique  ressource  des jeux  de la lumière, 
la  Vie.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Le  dessin  est un vieux et  vivace préjugé  dont l'origine  doit être 
recherchée  dans les premières  expériences  des sensations  humaines.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Primi tivement  l'œil,  ne connaissant  que la lumière  blanche,  avec ses 
ombres  indécomposées,  par conséquent,  point aidé  dans  ses expé
riences  par la ressource  des colorations  discernantes,  s'aida  des  expé
riences  tactiles.
                                                            
                                                                        
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mutuelle  et ensuite  par hérédité  des modifications  acquises entre la 
fa culté  des organes  tactiles et celle  de  l'organe  visuel,  le  sens des 
fo rmes  a passé des  doigts dans l'œil.
                                                            
                                                                                
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pas pri mitivement  de l'œil  et l'œil  par succession  et raffinement  en a 
tiré  pour  la commodité  de  son expérience  le sens  des contours  nets ; 
et  de  là cette  illusion  enfantine  de la traduction  de la réalité  vivante 
et  sans plans  par le dess in-contour  et de  la perspect ive dessinée.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Essentiellement  l'œil ne  doit  connaître  que les vibrations  lumi
neuses,  comme  le nerf  acoustique  ne  connaît  que les vibrations 
sonores.
                                                            
                                                                                
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prier,  raffiner et  systématiser  les facultés  tactiles  a vécu  et s'est ins
truit,  s'est  entretenu  dans l'illusion  par les  siècles  d'œuvres 
dessinées  que  son évolution  comme  organe des vibrations  lumi
neuses  s'est  si  retardée  relativement à celle  de l'or eille  par exemple, 
et  est  encore  dans la couleur  une intelligence  rudimentaire,  et que 
tandis  que  l'oreille  en génér al analyse  aisément  les harmoniques, 
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