Modigliani
Publié le 17/04/2012
Extrait du document
«
Ce qu'était son style vers 1915, on peut le voir clairement dans le Portrait d'Henry Laurens
et dans le Marié et la Mariée du Museum of Modern Art de New-York.
A première vue, le Laurens
semble une œuvre fauve et le Marié et la Mariée une œuvre cubiste.
Mais, en fait, l'une n'est pas
plus cubiste
que l'autre n'est fauve : de toute évidence, Modigliani use des éléments à la mode
pour créer des caractères, intention aussi étrangère à Picasso qu'à Matisse, à Braque qu'à Juan
Gris.
Chez Modigliani, les déformations ne sont qu'un moyen, non un but : le nez cubiste semble
souligner le caractère,
mettre en relief l'aversion du peintre pour la suffisance solennelle du
bourgeois.
Dans les œuvres peintes jusqu'en 1917, la couleur intense, riche en nuances, a une valeur
propre.
L'origine cézannienne du rapport forme-couleur reste manifeste.
La ligne sert à construire
des zones
de couleur, comme, par exemple, dans le Portrait de Paul Guillaume de 1916 (Collection
Pallini, à
Milan).
Puis, petit à petit, elle devient conductrice de l'image.
Non que la richesse du
coloris s'atténue, mais elle se voit contrainte de changer de nature, afin de s'adapter à la ligne,
de même qu'auparavant la ligne était fonction de la couleur.
C'est à ce moment que Modigliani ressent la nécessité de ne pas renoncer à la troisième
dimension
et dessine cependant la 1 igne sur; la surface; il trace sa belle courbe, mais occupe avec
cette
courbe plusieurs plans superposés; il donne simultanément la sensation d'une zone de couleur
étendue et celle d'une masse de volume, accentue une couleur pure et tout de suite lui adjoint
une zone neutre, pour suggérer l'accord tonal; il occupe l'espace et subitement renverse l'image
à la surface.
Le désir d'obéir à cette double exigence entraîne nécessairement la déformation de
l'image et la nécessité de dépasser la déformation par une synthèse formelle.
Dans le Marié et la
Mariée de 1915, la synthèse fait encore défaut : toutes les possibilités sont là, mais pas encore mises
en œuvre.
Après
1917, la synthèse est, au contraire, évidente, et, dans beaucoup d'œuvres, parfaite.
Elle est fondée
sur la ligne.
Ce retour à la ligne comme élément conducteur d'un style est la nou
veauté
de Modigliani, ce qui le distingue de tous ses contemporains.
On peut dire qu'après Ingres,
la ligne avait perdu sa fonction directrice, et que c'est lui qui la lui a rendue.
On a dit aussi que,
ce faisant,
il s'était inspiré de l'exemple des grands primitifs, de Lorenzetti à Botticelli, ce qui n'est
pas exclu, mais, à
coup sûr, l'effet de la ligne de Modigliani diffère entièrement de celui de la ligne
des anciens,
du fait même que ceux-ci n'avaient pas à concilier des intentions opposées.
Il reste qu'une fois maître de sa ligne, Modigliani crée la série de ses chefs-d'œuvre.
Le
Nu au coussin, de la Collection Gianni Mattioli de Milan et le Nu étendu, du Museum of
Modern Art de New York, révèlent à la perfection la poésie de Modigliani, sa proportion idéale,
sa volonté
de vérité à tout prix, en même temps que l'élégance et la noblesse de sa sensibilité.
En 191 7 commence aussi la série de ses portraits les pl us fameux : le Portrait de :(borowski
du musée de Saô Paulo, au Brésil, et les nombreux Portraits de Madame Hébuterne et de Madame
:(borowski.
La grâce féminine a rarement trouvé une expression à la fois plus délicate et plus fer
vente, plus sublimée aussi.
Modigliani charge
ses modèles de ses propres tourments, de ses propres
souffrances.
Il les transforme en anges déchus, chez qui le désir de pureté artistique et morale
transcende tous les troubles.
La guerre s'appesantissait aussi sur les corps et les âmes des enfants.
Et la vision que Modi
gliani a
d'eux, de leur précocité, qui n'abolit pas la candeur, de leur isolement inconsolé, de leur
souffrance,
de leur désir de vivre déçu, s'exprime dans ses toiles avec une prodigieuse puissance.
Marie, autrefois dans la Collection Sabouraud de Paris, est peut-être le chef-d'œuvre de l'artiste.
Modigliani représente le principal
apport de l'Italie à l'art moderne.
A Paris, entre 1906
et 1920, il a été l'un des artistes les plus originaux, capable de créer son monde propre, plein de
maux matériels et moraux, mais aussi d'idéal, d'aspirations élevées, de liberté.
Une fleur est née
de tout cela : une ligne parmi les plus pures, parmi les plus choisies que l'histoire de l'art connaisse..
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