BERNARD Claude : sa vie et son oeuvre

BERNARD Claude (1813-1878). Claude Bernard est sans doute la meilleure illustration de la figure du savant héroïque et solitaire, apparue dans la seconde moitié du xixe siècle et constituée comme modèle intellectuel et moral dans renseignement républicain. Renan le décrivait ainsi : « Pensif, triste, absorbé, ne se permettant pas une distraction, pas un sourire... il sentait qu’il faisait œuvre de prêtre, qu’il célébrait une sorte de sacrifice... ».

Jeune homme, Claude Bernard voulait être écrivain : né dans une famille de vignerons du Beaujolais, il fut contraint de prendre un emploi de préparateur en pharmacie à sa sortie de collège. Auteur dramatique à ses heures de loisir, il était « monté à Paris » : découragé par Saint-Marc Girardin, il s’orienta vers la médecine. Ses débuts furent difficiles : refusé au concours d’agrégation, il fonda un laboratoire libre de physiologie, mais échoua très vite. Magendie, qui avait remarqué ses talents d’expérimentateur, lui offrit un poste de préparateur. Nommé en 1847 suppléant de Magendie au Collège de France, il lui succéda en 1855. Egalement professeur à la faculté des sciences de 1854 à 1868, il renonça à sa chaire de Sorbonne pour enseigner au Muséum d’histoire naturelle. Son élection à l'Académie en 1868 et sa nomination au Sénat impérial achevèrent de faire de lui « le plus illustre des savants français ».

Ses travaux sur le rôle du suc pancréatique dans la digestion des graisses, sur l’importance du sympathique et des glandes endocrines et sur la fonction glycogénique du foie conduisirent Claude Bernard à fonder la physiologie générale : celle-ci consiste à déterminer les conditions élémentaires des phénomènes de la vie. Chaque phénomène vital est en effet déterminé par les conditions physico-chimiques qui en sont les causes matérielles immédiates ou prochaines. L'ensemble de ces conditions constitue le milieu. Claude Bernard distingue deux types de milieux : le milieu extérieur (entourant l’individu) et le milieu intérieur (constitué par l’ensemble des liquides interstitiels), concept qui est à la base de la physiologie générale. Les relations entre le milieu intérieur et le milieu extérieur se font par deux types de mécanismes : les réserves (ainsi, l'excédent de glucose s’entrepose dans le foie pour être distribué à mesure des besoins) et les régulations : « C'est le système nerveux qui se montre toujours le régulateur des phénomènes de la vie ».

La mise au point de nouvelles techniques d’expérimentation permet à Claude Bernard de se définir comme fondateur de science : se délivrant de règles d’investigation empruntées aux physiciens, il justifie la spécificité de l’expérimentation en physiologie. La méthode ne peut jamais être formulée séparément des recherches dont elle est issue : « C’est le vivant qui fournit par sa structure et ses fonctions les clés de son déchiffrement » (G. Canguilhem).