RIVAROL
Publié le 05/05/2011
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Antoine Rivarol est né à Bagnols, près d'Uzès, le 26 juin 1753 : famille nombreuse, noblesse probable. Après des études en Avignon et un court séjour au séminaire de cette ville, il se rend à Versailles, puis s'installe à Paris en 1777 et ne tarde pas à se faire une célébrité dans les milieux littéraires et mondains. En 1784, il obtient le prix de l'Académie de Berlin pour son Discours sur l'universalité de la langue française. La Révolution fait de lui un journaliste : de juillet 1789 à novembre 1790, il rédige presque à lui seul le Journal politique national, et de 1790 à 1792 collabore aux Actes des apôtres. En juin 1792, il quitte la France et séjourne successivement à Bruxelles, Londres, Hambourg, enfin Berlin où il meurt d'une fluxion de poitrine le 13 avril 1801.
«
brillant des acquisitions intellectuelles du XVIIIe siècle.
Il tient la balance égale entre la vieille « poétique » chèreaux régents de collège, et les sciences nouvelles, l'histoire, la géographie, la politique, non sans annoncer dessciences plus modernes encore, la sociologie, la linguistique, voire le structuralisme.
En s'écriant : « Admirablepropriété de la parole, de montrer ainsi l'homme tout entier » Rivarol fait mieux qu'utiliser habilement les données dusujet : il suit la voie ouverte et déjà exploitée par une philosophie sensualiste de la connaissance, mais l'infléchitvers une célébration de l'harmonie et de la clarté.
Ses écrits futurs développeront la même idée.Jusqu'en 1789, Rivarol joue désespérément le rôle du fureteur à l'affût.
Faute d'occasions, il se prodigue en parodieset espiègleries : le Petit Almanach des grands hommes (1788) dans son genre est un chef d'oeuvre.
Les Lettres à M.Necker sur son livre de r importance des opinions religieuses (1788) , où l'auteur rivalise mal avec les Provinciales,pèchent par confusion et délayage.
A Necker, qui dans un ouvrage également diffus, prétendait démontrer l'Utilitétemporelle des religions, et convertir au déisme les gens d'esprit, Rivarol réplique à peu près que la démonstrationest maladroite et inopportune, et il s'explique sur les rapports de la morale, des lois et de la religion en des termesqui prouvent une parfaite méconnaissance du sentiment religieux.
Retenons du moins de la lecture de ces lettresque leur auteur à la veille de la Révolution est un adepte convaincu des Lumières : le terme revient constammentsous sa plume pour désigner un alliage de sens pratique et d'honnêteté.Les événements de 1789 électrisent son esprit.
Comme André Chénier, il devient par la grâce des circonstances cequ'il était dans l'âme : un publiciste.
Il faudrait pouvoir lire dans leur présentation originale les feuilles du Journalpolitique national (1789-1790) afin de suivre le chroniqueur au jour le jour.
On l'a comparé à Tacite lorsqu'il racontela réunion des Etats généraux, la prise de la Bastille, les premiers massacres, la nuit du 4 août, les journéesd'octobre.
Il n'est pas juste de dire que Rivarol s'est mis au service de la cour, qu'il a embrassé la cause d'un parti.Dans sa lutte, il est parfaitement isolé, comme Cassandre.
Trop lucide dès le premier jour, témoin plus que jamais, ilrend compte et avertit.
Il ne défend pas les personnes mais les principes et surtout celui qui les résume tous, leprincipe de conservation ; à ses yeux, la vérité, la nature éternelle des choses prévaudront fatalement.
Unchangement de régime ne peut qu'engendrer le chaos.
Quant à l'égalité des hommes, pilier de la fameuse Déclarationdes Droits de l'Homme, elle est, pense-t-il, un mensonge contredit par les faits : la nature a voulu les hommesinégaux.
« En arrière, écrit P.-H.
Simon, il regarde du côté de Machiavel, en avant du côté de Bonald et de Maurras.»On a dit, d'un terme heureux, que Rivarol avait démystifié la Révolution française.
Née de la vanité, elle devaitmourir de ses inconséquences et de ses excès.
Voilà ce qu'il répète inlassablement.
Son intelligence suraiguë lerendait inaccessible à l'ivresse commune.
Il n'a pas craint dès lors de ramer à contre-courant.
Il aura la sagesse dequitter la France avant qu'il ne soit trop tard (juin 1792).
E6t-11 mieux fait de définir une forme d'innovationconciliable avec le respect des traditions ? Il semble bien que l'avenir immédiat (le règne de la Terreur) lui ait donnéprovisoirement raison.
Dès lors, il ne changera plus : dans l'exil, Il attend le retour de l'ordre ancien, et se livre à desgrands travaux que la mort interrompra.Il avait l'intention de composer un Nouveau Dictionnaire de la langue française.
Il l'aurait fait précéder d'un Discourspréliminaire divisé en trois parties :« 1° un tableau métaphysique et moral de l'homme considéré dans ses facultés Intellectuelles, dans ses idéespremières et fondamentales et dans ses passions ; 2° le tableau de l'esprit humain dans la création du langage engénéral : on y traitera des différentes formes de la pensée ; 3° un tableau grammatical de la langue française, et ledéveloppement du plan du dictionnaire.
...
Immédiatement après le dictionnaire, ajoute l'auteur, Je passerai àl'histoire du corps politique, et J'aurai alors présenté l'homme 1° dans l'ordre intellectuel ; 2° dans le langage engénéral ; 3° dans la langue française en particulier; 4° dans l'ordre social.
»Cette vaste fresque devait, en son syncrétisme, recouvrir à peu près tous les domaines de la connaissance.
Undictionnaire de la langue française en était l'occasion ; ne nous en étonnons pas : Rivarol explique très bien dansson Etat de la question qu'à l'instar de Locke il ne pouvait pas séparer l'étude du langage de l'étude de la penséedans son ensemble, puisque le langage est « l'instrument universel de la pensée ».Seule la première partie du Discours préliminaire (un exposé suivi d'une récapitulation) a été écrite et publiée en1797 à Hambourg, puis à Paris où elle encourut les foudres de la censure.
Ce texte capital, maltraité par les éditeursde 1808 et sans cesse émietté par leurs successeurs, est inaccessible au public français dans sa forme originale :lacune impardonnable.
Il s'agissait au départ de dresser un inventaire analytique du moi, et Rivarol s'y emploie enremontant du simple (le sentiment comme faculté générale) au complexe (idées, facultés intellectuelles, passions)par le biais de l'association qui est la notion-clé de son système.
Il y aurait lieu de comparer cette physiologie del'âme aux oeuvres contemporaines des idéologues : mêmes procédés de dissection, même méthode dedéveloppement ; même référence à Locke, Buffon, Helvétius et surtout à Condillac, avec le souci de rectifier leursanalyses ; mêmes principes de base et même positivisme de la démonstration, qu'il s'agisse de démonter lemécanisme de la sensation ou celui de l'imagination, d'expliquer Dieu, la religion ou le jeu des passions.A ce tableau rigoureux se substitue tout d'un coup, au beau milieu de la Récapitulation, une diatribe enflamméecontre les nouveaux philosophes.
Les souvenirs affluent, la verve reprend ses droits et dicte à Rivarol, pour évoquerla Terreur, des pages fulgurantes.
Il serait trop facile de mettre sur le compte de la hargne ou du dépit cette prise àpartie, car elle exprime en fin de compte une philosophie de l'existence.
Le crime des philosophes, à ses yeux (nonpas « les Rousseau, les Helvétius, les Diderot, les d'Alembert et les Voltaire » qui étaient « morts à propos » maisleurs successeurs) , c'est d'avoir ignoré les lois éternelles de la nature ; ils sont condamnés d'avance car « il n'y ade bon que l'unité et la fixité, de nuisible que l'innovation et la diversité.
»Rivarol est mort en gardant le sourire.
Sa conduite et ses écrits prouvent que, dilettante en apparence, il avaitl'âme d'un passionné.
Il a eu toute sa vie la passion du goût et du style, de la vérité et de la qualité, de la clarté, dela précision, de.
l'ordre.
C'est son amour passionné de la philosophie qui l'a fait s'acharner sur les philosophes.
Cen'est pas en vain que cet apôtre du bon sens se réclamait de Pascal.
Inapte à la poésie, au roman, au théâtre,l'écrivain Rivarol a tout de même inauguré certaines formes modernes de la littérature : l'éditorial, le reportage.
H acontribué à rendre la prose française portative et chaleureuse.
Le penseur s'est intéressé aux rapports, aux.
»
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