Alaric Ier par J.

Alaric Ier par J. Gaudemet Professeur à l'Université de Paris Alaric naquit hors des frontières de l'Empire romain, dans une île des Bouches du Danube. Il appartenait à la famille princière des Balthes. Ce n'était encore qu'un enfant lorsque, sous la pression des Huns, les Wisigoths durent quitter en 376 le territoire qu'ils occupaient depuis les dernières décades du IIIe siècle au nord du Danube, dans l'ancienne province romaine de Dacie. A regret, l'empereur Valens les laissa s'installer en Thrace, campement provisoire, mal toléré par les Romains, qui, vendant les vivres à des prix excessifs, incitèrent les Goths à se faire pillards. Bientôt, les hostilités s'engagèrent et le 9 août 378 l'armée romaine, commandée par Valens, était anéantie par la cavalerie barbare à Andrinople, l'empereur lui-même disparaissant dans le combat. Victoire sans lendemain, qui ouvrait pour les Wisigoths une longue période de courses errantes, marquées de haltes dévastatrices, jusqu'au jour où un royaume wisigoth se stabilisera en Aquitaine et dans l'Espagne orientale (418). A la fois menaçants et demandeurs, les Barbares en quête d'un territoire seront tour à tour les jouets ou l'enjeu des politiques impériales souvent opposées de Constantinople et de Ravenne. L'outrance des prétentions, la terreur qu'inspirent les excès de troupes mal encadrées et sous-alimentées ne doivent pas faire oublier la faiblesse politique d'un peuple auquel l'Empire refusa longtemps une assise stable. Ainsi s'expliquent les apparentes incohérences et les incertitudes d'Alaric en face des autorités romaines. En 382, Théodose avait abandonné aux Goths les terres désertes entre le Danube et les Balkans, leur promettant en outre un tribut en nature contre la fourniture de contingents militaires. Mais en 391, pressés par d'autres Barbares, les fédérés Goths rompent le foedus et se retranchent dans les marais de Macédoine. Théodose, en les y poursuivant, faillit tomber aux mains d'Alaric. En 392, Stilicon leur imposait le renouvellement du traité conclu dix ans plus tôt. Quelques années plus tard, les fédérés Goths étaient engagés à côté de troupes romaines contre l'usurpateur Eugène. La victoire que remporta Théodose à la " Rivière Froide " (septembre 394) fut en partie l'oeuvre des contingents Goths, que l'empereur exposa sans compter. Voulait-il par là affaiblir ses alliés en même temps qu'il éliminait son adversaire ? Toujours est-il qu'Alaric quittait dès la fin de 394 l'armée impériale et bientôt s'insurgeait contre l'empire. A quel titre Alaric, qui pendant quinze ans dirigera les Goths, exerçait-il son autorité ? On en a discuté. Des historiens anciens (Jordanès, Orose, Cassiodore) le qualifient de roi. Mais ils écrivent après la mort d'Alaric, à une époque où les Wisigoths établis en Aquitaine ont effectivement un roi. D'autres, d'ailleurs, l'appellent plus exactement dux ou hégémon. Alaric ne porta sans doute pas le titre royal. Il resta un chef de bande, parfois contesté par les siens, mais qu'imposaient la guerre contre Rome, les longues migrations de province en province, les négociations avec les empereurs. En mars 395, Alaric campe sous les murs de Constantinople avec une armée nombreuse. Mais n'osant pas assiéger une ville qu'il estimait imprenable, il se contenta de ravager sa banlieue. Le ministre d'Arcadius, Rufin, obtint, san...