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Julio González 1876-1942 Elle fut étrange, la vie du sculpteur catalan Julio

Publié le 05/04/2015

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Julio González 1876-1942 Elle fut étrange, la vie du sculpteur catalan Julio González ; non seulement par suite de son caractère réservé et hermétique, non seulement à cause de la diversité des sollicitations artistiques qui retardèrent en quelque sorte sa maturité, mais aussi en raison de l'importance posthume de son oeuvre. A ce fils et petit-fils d'orfèvres, qui désirait être peintre ou musicien et qui finit sculpteur, il fut réservé d'être l'initiateur de la transformation radicale de la sculpture moderne. Peut-être parce qu'il commença par travailler le métal, peut-être parce qu'il n'aimait pas les formes conventionnelles et en particulier la rhétorique méditerranéenne, ou encore parce qu'il était nourri d'une veine poétique qui l'éloignait des paroles et le rapprochait des faits, peut-être pour d'autres raisons encore, poussé par le désir de spiritualiser le volume, il se trouva, s'emparant de l'espace, et s'efforçant pour le dominer et l'informer suivant un système d'équations qui se résolvent en mouvement. Tel était déjà l'objectif que les sculpteurs baroques s'étaient proposé, que les romantiques avaient mis en relief et qu'avaient rendu plus explicite encore les expressionnistes allemands. Ce fut lui qui provoqua la défection des cubistes et qui détermina l'invention géniale du Cheval de Duchamp-Villon. Julio González, qui se mit à sculpter lorsqu'il eut dépassé la quarantaine, reprit le problème à la base et, sans se perdre en théories, se laissant porter par son instinct, obéissant à une conception très personnelle d'un espace viv...

« González avait trouvé la surface plane en tant que moyen d'expression indépendant.

Il la recoupa et lui donna une forme, il la juxtaposa et la superposa.

Mais González n'était pas un peintre à qui il est loisible de déterminer, avec de petites zones sans épaisseur, un espace virtuel au moyen d'allusions dynamiques.

Il était un sculpteur, et il lui fallait créer des rythmes réels dans des espaces tout aussi réels.

Aussi, pour ne pas aboutir à l'impasse des cubistes — qui furent incapables de détruire le volume — abandonna-t-il le plan (1934) et entreprit-il le fil de fer, encore grumeleux et rugueux, avec lequel il construisit une forme vaguement figurative qui organisa l'espace, qui le comprima — pourrait-on dire — en le soumettant à des rythmes organiques centripètes se suffisant à eux-mêmes. Il y a là un grand dilemme : alléger la sculpture de la masse qui la rend statique ou qui traduit le mouvement comme un geste fixe, ou bien lui donner une précision dynamique et obtenir ainsi la spiritualisation du rythme.

Il fallait du courage pour se lancer dans la création de structures aux forces centrifuges qui excluaient toute possibilité de reconstruction figurative.

Mais González réalisa cette conquête entre 1934 et 1936.

Une Danseuse , un Ange , une Maternité , des têtes et des torses de femmes, seront les pièces où il superposera, sur un thème à peine figuratif, une libre structure d'unité expansive.

Toutes ces pièces sont des axes qui prennent possession de l'espace en partant d'un noyau central, filaments de fer très fins et réguliers qu'ordonne un ordre encore organique, mais manifestement de filiation géométrique. Il était sur le point de réaliser une grande et féconde invention.

Le fil de métal, surtout d'un métal élastique comme l'acier, ou des matériaux plastiques transparents auraient pu permettre la création de formes expressives ne correspondant pas à une version anthropomorphique de l'espace.

Telle sera la solution des concrets de nos jours.

Or González ne se sépara point du fer — qui est lourd et statique même quand il se réduit à des filaments — ni de la figure humaine à laquelle, en définitive, il se réfère toujours. Aussi, parce qu'il n'a su se détacher ni du matériau ni du motif, sa volonté lyrique, son génie inventif, sa puissance clarificatrice s'affaiblirent dans les années qui suivirent. Déjà, dans une série de personnages assis, debout, ou couchés (1934-1937), il se mit à employer des plaques de fer soudées pour créer des volumes creux aux arêtes aiguës.

Il condensa en eux toute l'énergie spirituelle de l'homme et, sans recourir aux descriptions superficielles, il en accentua surtout la réduction géométrique.

Cependant le pathétique commence à avoir prise sur lui et, au lieu de se baser sur l'espace, il s'attacha, une fois de plus, aux volumes ; au lieu d'utiliser une géométrie dynamique, il utilisa la géométrie statique.

Il exagéra les rythmes et se laissa guider davantage par un instinct puissant, une violence démoniaque, que par la rigueur nécessaire au lyrique. La Monserrat (1937), figure de femme dans laquelle il cherche à symboliser Barcelone, faite avec des plaques de fer soudées, conforme à la tradition figurative, paraît indiquer un changement, un retour en arrière, l'aiguille du cadran s'étant inclinée vers une expression moins neutre et moins objective.

Le Personnage (1939), sa dernière sculpture — volume enflé, rythme lent — révèle plutôt l'angoisse que la liberté d'esprit.

C'est une sorte d'homme-cactus agressif et violent, plein d'émotion contenue, une véritable immanence vitale.. »

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