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L'adolescence des machines G.

Publié le 05/04/2015

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L'adolescence des machines G.-A. Boutry Professeur au Conservatoire National des Arts et Métiers La machine à vapeur est devenue pour nous un appareil grossier, tributaire d'une mécanique assez fruste. Son fonctionnement dérive d'un phénomène vaste et simple dont le premier aspect ressortit au domaine de la connaissance vulgaire : c'est l'ébullition de l'eau soulevant le couvercle du vase où on l'enferme. Comment s'est-il fait qu'elle a paru si tard au cours de l'évolution scientifique et technique du monde occidental ? Cette question est de rhétorique et non de sens. Ceux des modernes qui la posent devraient s'aviser qu'aucun des témoins du développement de la machine à vapeur ne l'a formulée : l'émerveillement de certains d'entre eux suggérerait plutôt la proposition inverse. Pour tâcher de comprendre ce qui s'est passé il faudrait pouvoir reconstituer sans erreur l'atmosphère qui régnait de 1650 à 1750 dans les ateliers où quelques artisans isolés construisaient les instruments destinés aux " Cabinets de Physique " de l'époque. Cet événement qui va transformer le monde, la domestication par l'homme de la puissance motrice du feu, n'appartient pas à l'ordre scientifique proprement dit : c'est un progrès technique et technologique. Comme tel, il fut gouverné par des paramètres sociaux, économiques et de métier bien plus que par le développement de la physique. A une fugitive exception près, qu'on nommera tout à l'heure, ce ne sont pas des savants du premier rang qu'on y voit travailler, mais des amateurs ou des manuels plus ou moins frottés de science, parfois autodidactes. Les physiciens sont venus bien plus tard. Certes James Watt a connu à Glasgow Joseph Black, et Joseph Black s'est trouvé là à point nommé pour lui expliquer ce qu'était une chaleur latente de vaporisation ; mais, au moment où se place cette scène, Watt avait déjà constaté expérimentalement tout l'essentiel (c'est parce qu'il avait constaté que la condensation, à température constante, d'une livre de vapeur peut à elle seule élever la température de six livres d'eau liquide jusqu'à ébullition que Watt demanda à Black s'il pouvait expliquer la chose.) et le principe de la conservation de l'énergie n'était soupçonné par personne... Quand Sadi Carnot commence d'écrire son opuscule célèbre, James Watt est mort depuis six ans ; en Grande-Bretagne, dix mille machines fixes fonctionnent et les chemins de fer sont nés. Les mémoires désolés de Chaptal suffisent à nous apprendre que le continent est bien en arrière, dans ce domaine, par rapport à la Grande-Bretagne : le résultat le plus durable et le plus grave de l'épopée napoléonienne a été de donner à la révolution...

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Boutry Professeur au Conservatoire National des Arts et Métiers. »

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