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L'Amérique Latine par Leslie F.

Publié le 05/04/2015

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L'Amérique Latine par Leslie F. Manigat Directeur de l'Institut des Relations Internationales, Université des Antilles Le cas des pays d'Amérique latine au cours de la période qu'il est convenu d'appeler l'entre-deux-guerres illustre à la fois, et d'une façon contradictoire, l'inadéquation du découpage chronologique de la périodisation classique européenne, et cependant la sensibilité de cette partie du Nouveau Monde aux moindres pulsations d'une vie internationale gravitant alors autour de l'Europe et des États-Unis. D'une part, en effet, il est à se demander s'il a existé quelque chose comme " un entre-deux-guerres " pour les pays au sud du Rio Grande. La guerre de 1914-1918 les a surpris en ordre dispersé, les a à peine dérangés dans leur évolution et, en tout cas, les a amenés à prendre des positions diverses. Une minorité seulement a déclaré formellement la guerre à l'Allemagne, huit exactement : le Brésil, Costa Rica, Cuba, Guatemala, Haïti, Honduras, Nicaragua et Panama. A l'exception du Brésil, cette liste ne comporte que des petits pays d'Amérique centrale et des Caraïbes, zone directement dans l'orbite des États-Unis. Cinq autres se contentèrent de la rupture des relations diplomatiques : Pérou, Uruguay d'abord puis la Bolivie, la République Dominicaine et l'Équateur. Enfin, sept restèrent carrément neutres : l'Argentine le Chili, la Colombie, le Mexique, le Paraguay, El Salvador et le Venezuela. Parmi ces derniers, comme on le voit, se trouvaient les pays qui ont traditionnellement le plus de poids dans la balance du continent. On peut donc dire que " la Grande Guerre " n'a pas été un phénomène latino-américain. Les pays d'Amérique latine l'ont vécue de l'extérieur, en spectateurs lointains et d'opinions partagées. Loin d'être comme en Europe la fin véritable du dix-neuvième siècle historique, la guerre de 1914-1918, " accident de parcours ", n'a fait qu'accélérer un processus de restructuration générale dont le démarrage spectaculaire remonte à la conjoncture de 1910-1911 qui, elle, a inauguré le vingtième siècle historique latino-américain. De ce fait, 1919 ne représente pas un point de départ inaugurant une problématique nouvelle dans l'évolution de l'Amérique latine, mais bien plutôt la continuation de courants, tendances et caractéristiques propres à une période dont le début remonte à la révolution mexicaine de 1910. Le ton donné par cette révolution, les thèmes propulsés par elle, les forces profondes mises en branle par son impact ou à son exemple dominent toute la période qui va de 1910 à 1929, et qui a mérité d'être appelée " l'élan des forces de la modernisation ", avec l'ouverture au capital étranger, la poussée industrielle engendrant une croissance tournée vers l'extérieur, l'irruption des classes moyennes au pouvoir consacrant en leur faveur la solution de la crise hégémonique de l'oligarchie traditionnelle et transformant le caudillisme " archaïque " en agent de la modernisation économique et politique. 1939 n'est guère davantage une date césure d'importance décisive. La Seconde Guerre mondiale, bien que vécue plus intensément et moins indirectement que la première, et bien qu'ayant fini par réaliser l'unanimité des pays d'Amérique latine (l'Argentine exceptée) contre les puissances de l'Axe, ne termine pas à proprement parler une période, et 1945 ne provoque pas de rupture véritable d'avec un avant-guerre. L'ère nouvelle déclenchée par la crise de 1929 poursuit son itinéraire historique en traversant la guerre, pour ne se terminer véritablement qu'aux environs de 1959-1960 ; Le nationalisme revigoré par la crise et le populisme hérité de la poussée libérale-démocratique et sociale-contestataire de la période antérieure transforme le caudillisme éternel en un césarisme national-populiste avec par exemple un Perón en Argentine, un Vargas au Brésil, un Cárdenas au Mexique, de la tâche historique d'assurer la participation des masses laborieuses aux bénéfices de l'industrialisation à son étape nouvelle de substitution d'importation. Les deux guerres n'encadrent donc pas une phase bien délimitée avec son unité thématique et problématique, mais représentent chacune un moment particulier à l'intérieur de deux phases différenciées fondamentalement par la crise de 1929. La fin de la guerre, une fois résorbée la courte crise d'adaptation aux conditions du retour à la paix, permet une relance vigoureuse de l'élan des forces de modernisation déjà à l'oeuvre avant guerre, comme on l'a vu. La décennie des années vingt, correspondant à l'ère de la prospérité Coolidge-Hoover aux États-Unis, s'analyse pour l'Amérique latine en une période de rapide développement économique dans le cadre de " la croissance vers l'extérieur ", et d'intenses transformations sociales. C'est d'abord le retour marqué des investissements européens et l'arrivée en force du capital nord-américain. De la région des Caraïbes, où il avait déjà la prépondérance et où il renforce et consolide des positions qu'on ne peut plus lui contester, Wall Street, comme l'on aime à dire en Amérique latine, a profité de la guerre pour se substituer à la City de Londres et au marché financier de Paris. Les capitaux américains investissent le pétrole vén&eacut...

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