Otton III par Edmond-René Labande Professeur à l'Université, Poitiers Le troisième empereur de la maison de Saxe fut l'un des plus étranges souverains que le monde occidental ait connus.

Otton III par Edmond-René Labande Professeur à l'Université, Poitiers Le troisième empereur de la maison de Saxe fut l'un des plus étranges souverains que le monde occidental ait connus. La brièveté de son existence (juin 980-janvier 1002), le fait que, né d'un père allemand et d'une mère grecque, il se soit révélé avant tout romain, la coïncidence de son règne avec la mystérieuse charnière de l'an mil, tout concourt à faire du dernier des Otton un personnage énigmatique ; cette impression ne laisse pas de s'accentuer lorsque l'on approfondit sa biographie. Otton II, roi de Germanie et empereur, avait vingt-quatre ans quand, en 980, sa femme Théophano lui donna, après trois princesses, un fils. Son père Otton le Grand avait, en 962, restauré l'Empire au profit des ducs de Saxe. Dès le 17 mai 983, Otton II réussit à faire élire son fils roi associé ; six mois plus tard, il mourait en Italie. L'archevêque Willigis de Mayence, Théophano, et enfin la veuve d'Otton Ier, Adélaïde, assurèrent à des degrés divers la formation du jeune souverain. L'influence de sa mère se révéla toutefois prépondérante ; elle choisit en 987, pour lui servir de précepteur, l'évêque Bernward d'Hildesheim, à qui Otton manifesta d'emblée une confiance profonde. Mais cette éducatrice attentive et intelligente allait lui être enlevée prématurément : elle mourut à son tour le 15 juin 991. Ainsi des influences, féminines d'un côté, ecclésiastiques d'autre part, se seront exercées sur Otton en son enfance, suscitant en lui une grande délicatesse religieuse, l'avidité de la culture intellectuelle, l'horreur de la guerre, le rêve enfin d'un Empire chrétien qui ferait de lui un nouveau Théodose. Ces possibilités, composantes d'une personnalité précocement affirmée, trouvèrent à s'épanouir lorsque le jeune roi, au début de 996, l'Allemagne et<...