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Rainer Maria Rilke par Constantin Brailoiu Il faut que soucis restent frais.

Publié le 05/04/2015

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Rainer Maria Rilke par Constantin Brailoiu Il faut que soucis restent frais. (Rilke) " Tiens dit l'aumônier de l'Académie militaire de Wiener-Neustadt, l'élève René Rilke est donc devenu poète. " L'aumônier regardait un mince volume qu'il venait de prendre des mains du cadet Kappus. Il en connaissait l'auteur, autrefois cadet, lui aussi. Le voilà désormais poète, et peut-être de qualité, puisque son lecteur fasciné n'avait pas remarqué qu'on s'approchait de lui. On n'était, pourtant, qu'en 1912. A l'heure où s'écrit ceci c'est une bien autre affaire. S'agit-il même encore d'un poète ? Des milliers de travaux qui le concernent, se dégage, bien plutôt, l'image d'un penseur et d'un prophète, annonciateur d'un nouvel " Évangile de l'homme ". Les philosophies du jour le réclament : psychanalyse et existentialisme veulent l'accaparer, et des allusions au marxisme se glissent discrètement sous la plume des commentateurs. De plus en plus, on regarde ses vers, sa prose, sa correspondance comme des textes sacrés. Aussi leurs interprétations se font-elles, tout doucement, exégèse (Rilkedeutung). Un lexique rilkéen se prépare, et chaque jour surgit un problème nouveau : Rilke et Dieu, Rilke et le Christ, Rilke et l'ange, Rilke et l'anémone, Rilke et la rose (j'en passe et de moins bons). Son influence s'étend par-dessus terres et mers, toutes les littératures la ressentent. Il va de soi que pareil culte devait englober, à la longue, la personne physique de son objet. Lorsque feu la femme de son éditeur l'aperçut, pour la première fois, son regard, nous avoue-t-elle, brusquement s'arrêta, avec une sorte d'effroi étonné. Qu'avait-il donc touché ? " Un visage à tel point surchargé de sentiment et comme béni par quelque apostolat, en outre d'une telle humilité qu'elle en eut le souffle coupé. " Il lui semblait qu'elle se trouvait devant le porche grand ouvert d'une cathédrale (et j'omets les angelots voltigeant autour du front de l'inconnu). Quant à la voix (qui ne devait émouvoir cette dame que plus tard), elle avait la molle couleur brun sombre, teintée de violet, de la giroflée. Sa biographie ? Il y a, dans le Livre d'heures, un homme qui, attablé avec les siens au repas du soir, se lève soudain et s'en va à jamais, parce qu'une église attend quelque part. C'est lui. Né avant terme, à Prague, en 1875, il passe les premières années d'une enfance, somme toute, confortable, auprès d'un père, officier manqué, et d'une mère déçue, qui les plantera là, en 1884. Deux ans plus tard, École des Cadets, puis, " pour cause d'état maladif persistant ", Académie de Commerce de Linz (1891-1892). Retour précipité à Prague, à la suite d'une incartade. Baccalauréat en 1895, suivi d'une brève période d'activité littéraire et d'études déréglées. Puis commence sa vie réelle, extraordinaire série de voyages - mi-pèlerinage recueilli, mi-fuite éperdue - que seule achèvera, en 1926, sa mort, due à une leucémie. On a dressé l'itinéraire de cet étrange périple, où toute étape est abandonnée presque sitôt atteinte. On y voit les noms d'innombrables localités d'Allemagne, d'Italie, de France, de Suède, de Russie, d'Espagne, de Belgique, de Suisse, d'Égypte, d'Algérie, de Tunisie. Vienne n'y est qu'effleurée : fait capital qu'il faudra méditer. En cours de route, bien des visages apparaissent : femmes aimantes, amis secourables : aucun ne ralentira la marche du pèlerin vers la lointaine église. En 1901, il épouse une élève de Rodin, union dont naîtra une fille. Mais l'année il a déjà déserté son foyer. Sur l'amour et le mariage, il a son idée : l'amour est un surcroît de solitude et il n'y a pas de ménage heureux, sinon celui où chacun fait de l'autre l...
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