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56 Tess ne savait que faire.

Publié le 06/01/2014

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56 Tess ne savait que faire. Elle se sentait très alerte, et son coeur battait à tout rompre. C'était comme un éveil, comme si son esprit oudain libéré était capable d'explorer des territoires inconnus. Elle avait passé plusieurs heures sur le site Internet de Stephenson. Des questions la harcelaient maintenant de toutes parts, tandis que des idées ontradictoires se bousculaient, chacune exigeant d'être poursuivie jusqu'à sa conclusion logique. Elle ne savait pas par où commencer. La question essentielle était précisément celle qu'elle avait peur de poser. Mais elle savait qu'il fallait le faire. Elle n'était pas sûre d'en avoir le droit. Ce n'était pas juste. Ce n'était pas bien. Il n'avait que quatre ans. Comme pour la libérer de son supplice, son téléphone sonna. Elle le regarda d'un air absent, puis elle econnut le code régional de l'appelant. 510. Berkeley. Elle prit immédiatement l'appel. C'était Marya, l'assistante de Jim Stephenson : -- Je viens d'entendre votre message. Je suis vraiment ésolée, pour Mlle Martinez... C'est si... c'est horrible. Que s'est-il passé ? Tess lui dit simplement que Michelle avait été tuée par un homme armé qui s'était introduit chez elle, et qu'Alex se trouvait désormais à la garde de son père biologique. Elle expliqua qui elle était. -- J'ai parlé aux maîtres d'Alex, ajouta-t-elle, qui m'ont dit qu'il traversait une période difficile. J'espérais pouvoir en parler au professeur Stephenson. -- Vu les circonstances, répondit Marya, je suis sûre que Jim aura à coeur de vous aider, avec Alex. Le problème, c'est qu'il est absent. -- Ah ? -- Je le crains... La femme semblait hésiter. Tess attendit, sans savoir pourquoi le ton de Marya la mettait mal à l'aise. -- Quand sera-t-il de retour ? -- Je... n'en suis pas sûre, fit Marya, toujours hésitante. Les antennes de Tess se dressèrent. -- Pourrais-je l'appeler ? Vous savez où je peux le toucher ? -- Non, je regrette. Il... Il ne m'a pas dit où il allait, et son portable est relié à sa boîte vocale. Tess sentait qu'on lui envoyait toutes sortes de signaux d'alarme. -- Depuis quand est-il absent ? -- Une dizaine de jours. Depuis le début de la semaine dernière. -- Et il ne vous a pas dit où il allait ? -- Non. Il m'a laissé un message disant qu'il devait voir un nouveau patient et qu'il serait absent quelque temps. Tess trouvait cela très bizarre. -- Il fait souvent cela ? -- Non, pas vraiment. D'habitude, il envoie d'abord un de ses chercheurs. Et ça ne lui ressemble pas d'être aussi vague. Son agenda est plein, je dois répondre à des appels très durs, et réorganiser les rendez-vous... -- Vous ne pouvez pas interroger quelqu'un de son entourage ? Sa femme ? Il ne vit pas avec quelqu'un ? -- Il est divorcé, fit Marya. Il vit seul. Tess avait le cerveau en ébullition. Ses pensées se télescopaient, les associations d'idées étaient plus ombreuses. -- Dites-moi une chose, fit-elle, la gorge serrée. Est-ce que le professeur Stephenson porte des lentilles de ontact ? -- Oui. Pourquoi cette question ? demanda Marya, perplexe. Tess sentit la pression sur ses tempes. Elle ne savait que lui dire. Il fallait mettre un terme à cette onversation. -- Je vous rappellerai. J'ai quelques détails à vérifier. Merci, vous m'avez beaucoup aidée. Pouvez-vous 'informer, entre-temps, si vous avez de ses nouvelles ? Tess coupa la communication et inspira profondément. Elle ne pouvait plus tergiverser. Cela ruait et hurlait en elle. Tess s'arma de courage et entra dans la aison. Elle alla prendre le dessin dans sa chambre. Dans la cuisine, Julia préparait un sandwich au beurre de acahuète et un verre de lait pour Alex. -- Il est dans sa chambre ? Julia acquiesça. -- Oui, j'allais l'appeler pour lui donner son sandwich... -- Laisse-moi une seconde avec lui, d'accord ? Julia lui jeta un coup d'oeil confus. -- Oui, bien sûr. Assis par terre, Alex jouait avec ses figurines. Quand Tess entra dans la chambre, il la regarda sans rien dire. -- Salut, Alex. Comment va Ben, aujourd'hui ? Alex haussa les épaules. -- Il aide son grand-père Max à sauver Gwen. -- On dirait qu'il a du pain sur la planche. Elle s'assit à côté de lui, sur le plancher. -- Alex, je dois te parler de quelque chose. Il ne la regardait pas. -- Je t'ai déjà posé la question, mais je dois te le demander encore une fois. Il faudra que tu me répondes, lex. C'est très, très important. Elle hésita, poursuivit : -- Je viens de parler à Jim, l'ami de ta maman. Il a dit que c'était d'accord. Il veut bien que tu m'en parles. Elle posa le dessin sur le sol, juste devant Alex. Son coeur battait à tout rompre. -- Il faut que je le sache, Alex. Elle montra la silhouette sur le dessin, celle qui semblait menacer Alex. Celle qui semblait maintenant le enir en joue avec un revolver. Elle tapota le dessin du doigt. -- Je dois savoir qui c'est, Alex. Il faut que tu me dises qui est ce monsieur. Il se contentait de la fixer sans bouger. Presque sans respirer. -- Alex, s'il te plaît, répéta-t-elle, doucement. Il faut que je le sache. Juste toi et moi. Tu n'as aucune raison 'avoir peur. Absolument aucune. Je suis ton amie, Alex. Tu dois me faire confiance. Alex ouvrit légèrement la bouche. Il la regarda de côté, hésitant. Elle lui adressa un sourire rassurant. -- Dis-moi, Alex. Je suis ici pour t'aider. Les yeux du petit garçon étaient agrandis par la peur. -- Mais c'est ton ami, marmonna-t-il. Les mots la déchirèrent. Elle connaissait la réponse, mais elle voulait l'entendre. Elle suffoquait, presque incapable de parler, mais lle s'arma de courage : -- Qui, Alex ? Qui est mon ami ? Ses lèvres se tordirent, il se recroquevilla, comme si c'était la dernière chose qu'il avait envie de dire. Mais l le dit quand même : -- Reilly. Il leva les yeux vers elle. La peur et l'embarras se lisaient sur son visage. -- Reilly m'a tué. Il m'a tiré dessus. Il leva la main, pointa un doigt au milieu de son front. -- Juste ici. Tess acquiesça. Son corps était devenu insensible à ce qui l'entourait, comme si elle était en transe. -- Dis-moi ce que tu te rappelles, Alex. Raconte-moi tout. Il lui raconta. Tout. Quand il eut fini, elle le prit dans ses bras. Elle le serra très fort contre elle, lui caressa doucement les heveux, sentant son petit coeur battre contre sa poitrine. Au bout d'un long moment, elle embrassa Alex, se leva et sortit de la chambre. Elle se dirigea vers le salon, entement, avec l'impression d'avoir glissé dans une fissure sous la surface d'un lac gelé, et de flotter au hasard ans l'obscurité glacée. Elle trouva son téléphone, composa le numéro de Reilly. -- Il faut que tu viennes, Sean. Dès que possible. Je dois te parler. Il lui promit qu'il serait là le plus tôt possible. Elle reposa le téléphone. Les yeux dans le vague, dans la lumière qui baissait peu à peu, elle se demandait omment elle avait pu se tromper à ce point sur tout ce qu'elle croyait savoir de notre monde. 57 Quand Villaverde se mit en route pour rentrer chez lui, le crépuscule tombait, d'un rose et d'un pourpre omptueux. Il décida de se lever avant l'aube, le lendemain, et d'aller surfer à Black's Beach. Avant d'être nommé agent spécial principal, il y allait au moins trois fois par semaine. Il parcourait les dix ilomètres qui le séparaient du campus de l'université, se garait sur un parking presque désert au moment où le oleil commençait tout juste à miroiter au-dessus des montagnes à l'est, et descendait le sentier escarpé enant au pied de la falaise, aux meilleures vagues du comté. Il surfait pendant deux heures sur les déferlantes e trois mètres, regagnait le rivage, s'arrêtait pour avaler un petit déjeuner sur La Jolla Village Drive, et prenait ers le sud pour être à son bureau avant huit heures et demie. Depuis qu'il était le patron du bureau de San Diego, il avait de la chance s'il pouvait surfer une fois par emaine au large de Pacific Beach - l'endroit présentait l'avantage de se trouver à moins de huit blocs de chez ui, mais les vagues erratiques dépassaient rarement un mètre. Il ne pigeait toujours pas comment un employé u Bureau parvenait à avoir une famille en plus du boulot, et garder un peu de temps pour lui. Quand Gillian et ui s'étaient séparés, trois ans plus tôt (elle était partie à Chicago avec sa boîte, il avait préféré rester à San iego), Villaverde avait broyé du noir pendant des semaines à l'idée qu'il avait peut-être raté sa dernière hance sérieuse d'avoir des enfants. Le temps passant, il avait réalisé qu'il était beaucoup plus heureux tout eul. Il tourna sur Grand Avenue, parcourut les trois blocs qui le séparaient encore de chez lui et entra avec récaution le Yukon dans l'allée. Introduire le 4 × 4 dans cet accès étroit et en pente raide était une manoeuvre délicate, mais il en avait l'habitude et y parvenait toujours sans bobo. Il prit sur le siège passager le plat préparé qu'il avait acheté au Margo's Mexican Grill et le pack de six orona de la supérette. Tout en claquant la portière, il jeta un coup d'oeil machinal dans la rue, comme chaque oir en rentrant. Tout était normal. Comme toujours. Il était impatient de décompresser en regardant un DVD. ontrairement aux quelques flics de sa connaissance - dont Lupo -, il n'emportait jamais de travail chez lui. Il vait vu un de ses coéquipiers devenir dingue, obsédé qu'il était par une affaire de meurtres intergangs articulièrement horrible et complexe. Mais Villaverde n'avait pas attendu cela pour s'imposer une règle : le ravail au bureau, le repos chez soi. Ça impliquait bien entendu qu'il pouvait rester au bureau jusqu'à trois eures du matin, voire toute la nuit (une des salles de réunion contenait un divan assez confortable), mais il inissait toujours le travail en cours avant de rentrer chez lui. Il ouvrit la porte, ramassa le courrier, alluma la lumière et passa dans la cuisine. Il décapsula une bière et ut une longue gorgée. Le lendemain, il se viderait l'esprit à Black's Beach, et irait tôt au bureau pour superviser 'opération au studio du journal de la KGTV. Reilly et lui avaient déjà eu une réunion téléphonique avec le édacteur en chef de Channel 10 et le directeur des programmes de KGTV. Ils avaient convenu que Reilly articiperait et ils commenceraient à annoncer l'entretien dès six heures du matin, ce qui donnerait largement le emps à El Brujo de préparer son opération. Opération que Villaverde espérait bien neutraliser. Une fois pour toutes. On sonna à la porte. Villaverde but une autre gorgée, posa sa canette de bière et se dirigea vers l'entrée. Il 'avait pas pris la peine de fermer. La nuit était douce et il aimait sentir le souffle de l'air dans la maison. Un rand type à la peau sombre, vêtu d'un costume de bonne coupe, se tenait derrière la moustiquaire. Il lui faisait igne, hésitant, visiblement embarrassé. -- Excusez-moi, demanda l'homme, je suis bien chez les Prager ? Machinalement, Villaverde posa la main gauche sur le Glock coincé sous sa ceinture et ouvrit la porteoustiquaire de la main droite, tout en maintenant son arme à l'écart de la porte ouverte. -- C'est la maison voisine, dit-il. Le 58. -- Oh, je suis désolé, fit l'homme avec un sourire penaud, passant une main manucurée sur son menton rborant une barbe de quelques jours. Il portait quelque chose au poignet. Un bracelet de cuir façonné. Villaverde le repéra immédiatement. Le léger clic de la porte du jardin, au fond de la cuisine, parvint à ses reilles à la seconde précise où son cerveau faisait le lien entre le bracelet et la vidéo de la voiture de l'adjoint ugate. Il recula d'un pas et sortit son arme, mais avant qu'il ait le temps de la lever l'homme qui se trouvait à la orte se ruait en avant, lui saisissait le bras gauche des deux mains et essayait de le lui tordre derrière le dos. Villaverde connaissait ce mouvement. Il abaissa son épaule gauche, déplaça son poids puis lança son pied auche, balayant les jambes de l'assaillant pour lui faire perdre l'équilibre. Une main de l'homme lâcha le bras rmé de Villaverde, mais l'autre cramponnait encore solidement son avant-bras. Villaverde se jeta contre son dversaire tout en sortant son revolver pour faire face au second intrus qui allait lui tomber dessus d'une econde à l'autre. Il sentit alors une douleur aiguë dans sa cuisse droite. Il baissa les yeux, vit qu'on lui avait planté dans la ambe une fine aiguille métallique. Il comprit avec horreur que l'homme l'avait laissé délibérément le mettre à

« — Laisse-moi uneseconde aveclui,d’accord ? Julia luijeta uncoup d’œilconfus. — Oui, bien sûr. Assis parterre, Alexjouait avecsesfigurines.

QuandTessentra danslachambre, illa regarda sansrien dire.

—Salut, Alex.Comment vaBen, aujourd’hui ? Alex haussa lesépaules. — Ilaide songrand-père Maxàsauver Gwen. — On dirait qu’iladu pain surlaplanche. Elle s’assit àcôté delui, sur leplancher. — Alex, jedois teparler dequelque chose. Il ne laregardait pas. — Je t’ai déjà posé laquestion, maisjedois teledemander encoreunefois.

Ilfaudra quetume répondes, Alex.

C’est très,trèsimportant. Elle hésita, poursuivit : — Je viens deparler àJim, l’ami detamaman.

Ila dit que c’était d’accord.

Ilveut bien quetum’en parles. Elle posa ledessin surlesol, juste devant Alex.Soncœur battait àtout rompre. — Ilfaut que jelesache, Alex. Elle montra lasilhouette surledessin, cellequisemblait menacer Alex.Celle quisemblait maintenant le tenir enjoue avec unrevolver. Elle tapota ledessin dudoigt. — Je dois savoir quic’est, Alex.Ilfaut que tume dises quiestcemonsieur. Il se contentait delafixer sans bouger.

Presque sansrespirer. — Alex, s’ilteplaît, répéta-t-elle, doucement.Ilfaut que jelesache.

Justetoietmoi.

Tun’as aucune raison d’avoir peur.Absolument aucune.Jesuis tonamie, Alex.Tudois mefaire confiance. Alex ouvrit légèrement labouche.

Illa regarda decôté, hésitant. Elle luiadressa unsourire rassurant. — Dis-moi, Alex.Jesuis icipour t’aider. Les yeux dupetit garçon étaientagrandis parlapeur. — Mais c’esttonami, marmonna-t-il. Les mots ladéchirèrent. Elle connaissait laréponse, maisellevoulait l’entendre.

Ellesuffoquait, presqueincapable deparler, mais elle s’arma decourage :— Qui, Alex ?Qui estmon ami? Ses lèvres setordirent, ilse recroquevilla, commesic’était ladernière chosequ’ilavait envie dedire.

Mais il le dit quand même:— Reilly. Il leva lesyeux verselle.Lapeur etl’embarras selisaient surson visage. — Reilly m’atué.

Ilm’a tirédessus. Il leva lamain, pointa undoigt aumilieu deson front. — Juste ici. Tess acquiesça.

Soncorps étaitdevenu insensible àce qui l’entourait, commesielle était entranse. — Dis-moi ceque tuterappelles, Alex.Raconte-moi tout. Il lui raconta. Tout. Quand ileut fini, elle leprit dans sesbras.

Elleleserra trèsfortcontre elle,luicaressa doucement les cheveux, sentantsonpetit cœur battre contre sapoitrine. Au bout d’unlongmoment, elleembrassa Alex,seleva etsortit delachambre.

Ellesedirigea verslesalon, lentement, avecl’impression d’avoirglissédansunefissure souslasurface d’unlacgelé, etde flotter auhasard dans l’obscurité glacée. Elle trouva sontéléphone, composalenuméro deReilly. — Ilfaut que tuviennes, Sean.Dèsquepossible.

Jedois teparler. Il lui promit qu’ilserait làleplus tôtpossible. Elle reposa letéléphone.

Lesyeux dans levague, danslalumière quibaissait peuàpeu, ellesedemandait comment elleavait pusetromper àce point surtout cequ’elle croyait savoirdenotre monde.. »

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