Devoir de Philosophie

abasourdir ABASOURDIR, verbe transitif.

Publié le 27/09/2015

Extrait du document

abasourdir

ABASOURDIR, verbe transitif.  

I.—  Sens physique.  [Employé surtout au participe passé]  Étourdir et comme assourdir par un grand bruit : 

Ø 1. Si je sortais sans prendre toutes les petites précautions indiquées contre le rhume, j'étais d'abord, je ne dirai pas grondée, mais abasourdie le mot n'est que ce qu'il faut pour exprimer la tempête de sa voix et l'abondance des épithètes injurieuses qui ébranlaient mon système nerveux.

AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, Histoire de ma vie, tome 2, 1855, page 449. 

Ø 2. Il [Vairon] épaula, visa à peine, lâcha le coup... Encore abasourdi par la détonation, il entendit le cri furieux de l'adjudant Morache qui arrivait sur lui en gesticulant, brandissant son bâton comme s'il allait le battre.

ROLAND LECALELÉ, DIT ROLAND DORGELÈS, Les Croix de bois,  1919, page 47. 

Ø 3. Tirez! tirez! hurle Ricordeau qu'on ne voit pas. Abasourdis, hébétés, on recharge le lebel qui brùle.

ROLAND LECALELÉ, DIT ROLAND DORGELÈS, Les Croix de bois,  1919 page 238. 

Remarque : 1. Abasourdi est souvent joint à des mots exprimant le bruit et l'intensité du trouble physique produit chez l'homme ou chez l'animal : vacarme immense (JULES MICHELET, Journal, octobre 1859, page 493); terrible vacarme (GEORGES DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Le Notaire du Havre, 1933, page 140); bruits géants (JEAN-PAUL SARTRE, Les Mots, 1964, page 45). 2. Pour les emplois autres qu'au participe passé, confer stylistique, étymologie et historique. 

II.—  Figuré et familier.  [Employé généralement au participe passé]  Provoquer chez quelqu'un un sentiment voisin de la stupeur : 

Ø 4. Lambert, ou calme ou abasourdi, ne répondit à aucune de nos questions.

HONORÉ DE BALZAC, Louis Lambert,  1832, page 44. 

Ø 5.... on avait oublié l'invitation. « Voulez-vous prendre quelque chose » me dit le mari. J'étais tellement étonné, abasourdi, écrasé, que je refusai.

ALPHONSE KARR, Sous les tilleuls,  1832, page 77. 

Ø 6. La comtesse regarda Eugène, qui restait immobile, abasourdi par la violence de cette scène.

HONORÉ DE BALZAC, Le Père Goriot,  1835, page 263. 

Ø 7. Lousteau sortir laissant Lucien abasourdi, perdu dans un abîme de pensées, volant au-dessus du monde comme il est.

HONORÉ DE BALZAC, Les Illusions perdues,  1843, page 330. 

Ø 8. —  Allons donc! Monsieur Bertuccio, dit le comte. Mais celui auquel il s'adressait était abasourdi, stupide, anéanti.

ALEXANDRE DUMAS PÈRE, Le Comte de Monte-Cristo,  1846, page 626. 

Ø 9. M. de Kergaz pressa Rocambole, déconcerté et tout abasourdi de voir son secret possédé par son adversaire.

PIERRE-ALEXIS, VICOMTE PONSON DU TERRAIL, Rocambole, les drames de Paris, tome 3, Le Club des valets de coeur, 1859, page 530. 

Ø 10. Henriette était abasourdie et ne savait pas si elle comprenait; elle restait comme hébétée en face de son oncle.

LOUIS-ÉMILE-EDMOND DURANTY, Le Malheur d'Henriette Gérard,  1860, page 73. 

Ø 11. Elle monta, effarée, abasourdie.

GUY DE MAUPASSANT, Contes et nouvelles, tome 1, Le Rendez-vous, 1889, page 1115. 

Ø 12. Votre refus de dimanche m'a abasourdi, abruti.

LÉON BLOY, Journal,  1895, page 151. 

Ø 13. Tant d'expériences si nombreuses et parfois contradictoires m'ont aidé à me retrouver tel que m'avaient fait ma famille et ma petite ville, tel que j'étais avant que l'immense bavardage du collège et de la vie m'eût étourdi, abasourdi, presque dénaturé.

MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 6, 1908, page 264. 

Ø 14. Parfois, en revenant de la voir, il [Louis] restait abasourdi et tout sourd, et tout saoul, avec comme une lampe dans ses mauvais yeux, parce que, quand même, tout pourri qu'il était, il y avait des moments où c'était trop lourd pour lui.

JEAN GIONO, Un de Baumugnes,  1929, page 36. 

Ø 15. Il [Alain] était abasourdi. Il remercia les gens complaisants, s'en alla assommé.

MAXENCE VAN DER MEERSCH, Invasion 14,  1935, page 247. 

Remarque : 1. Ces exemples variés mettent en évidence la nature même de l'état psychologique appelé abasourdissement. Abasourdi veut dire étourdi, mais de manière à être jeté à bas, abattu, renversé. L'idée d'un coup donné paraît donc primordiale (exemple 15). Elle se trouve exprimée sous la forme d'une comparaison chez plusieurs auteurs : par exemple \" abasourdi comme un homme à qui on vient d'asséner un coup violent sur le crâne \" (ANDRÉ THEURIET, Le Mariage de Gérard, 1875, page 125). Elle implique certaines conséquences physiques et tout d'abord une expression caractéristique du visage \" les yeux tout ronds et la bouche ouverte, comme un être abasourdi \" (ERCKMANN-CHATRIAN, Histoire d'un paysan, tome 2, 1870, page 359); causée par la torpeur, l'insensibilité (exemple 4, 14). Cet état psychologique entraîne souvent, pour la personne qui en est atteinte, l'immobilité physique (exemple 6) ou morale (exemple 7), éventuellement accompagnée ou à l'origine de sentiments négatifs, voire d'un anéantissement brusque de la personnalité (exemple 5, 8, 13). Les différents synonymes utilisés par les écrivains délimitent le sens de abasourdir. Déconcerté (exemple 9) concerne l'intelligence et la volonté, dont les projets sont bouleversés. Hébété (exemple 10) est relatif à la vivacité émoussée de l'esprit. Effaré (exemple 11) insiste sur l'effroi causé. Abruti (exemple 12) et étourdi (exemple 13) apparaissent respectivement comme des synonymes à valeur superlative et diminutive. 2. Pour les emplois autres qu'au participe passé, confer stylistique, étymologie et historique. 

 

 

 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 221. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 123, b) 411; XXe.  siècle : a) 536, b) 288. 

Liens utiles