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-ABLE, -IBLE, -UBLE, suffixe.

Publié le 27/09/2015

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-ABLE, -IBLE, -UBLE, suffixe.  

Sert à former des adjectifs à partir de verbes, exprime la possibilité. 

I.—  Suffixe formateur d'adjectifs à partir de verbes transitifs directs et exprimant la possibilité passive (\" que l'on peut \" + infinitif) 

On observera que les adjectifs en -able ne peuvent guère être suivis d'un complément d'agent introduit par la préposition par (*critiquable par certains, par beaucoup, mais : critiquable pour certains, pour beaucoup). Il est donc préférable de définir -able par la tournure active \" que l'on peut \" + infinitif plutôt que par la tournure passive \" qui peut être \" + participe passé. Le dérivé qualifie celui ou ce qui est l'objet de l'action. Les exemple sont innombrables : 

absorbable  -  \" qui peut être absorbé \" 

applicable  -  \" qu'on peut appliquer \" 

communicable  -  - 

conciliable  -  - 

convocable  -  - 

détachable  -  - 

dissociable  -  - 

enviable  -  - 

identifiable  -  - 

mangeable  -  - 

maniable  -  - 

négligeable  -  - 

partageable  -  - 

pénétrable  -  - 

retouchable  -  - 

simplifiable  -  - 

vendable  -  - 

vérifiable  -  - 

Certains dérivés impliquent plutôt l'idée d'obligation que celle de possibilité :  admirable  -   \" qui doit être admiré \", risible  -   \" dont on doit rire \"... 

Remarque : 1. Remédiable (rare) « à quoi l'on peut remédier » est issu de remédier, verbe transitif indirect. Irrémédiable est au contraire usuel. 2. -able est parfois accolé à des verbes intransitifs employés transitivement : chômable « qui peut être chômé »; sortable « que l'on peut sortir ». 3. Dans aimable, le sens du verbe aimer est atténué (« qui mérite d'être aimé » d'où « qui cherche à faire plaisir ») et l'on se rapproche de la valeur active. Il n'en était pas ainsi en français classique Amiable, terme de droit et de mathématiques, est employé par la langue courante dans la locution à l'amiable. 

II.—  Plus rarement.  Suffixe formateur d'adjectifs à partir de verbes intransitifs. 

A.—  Le dérivé présente un sens actif (\" qui peut + infinitif \"). Il qualifie ce à quoi (plus rarement celui à qui) on attribue une action. 

Il est concurrencé dans ce cas par les adjectifs d'origine participiale en -é* et -ant*, ainsi que par l'ensemble des adjectifs en -if*. Ce dernier suffixe, cependant, ne met pas l'accent sur l'idée de possibilité et correspond régulièrement à des substantifs en -tion (on notera toutefois qu'on dit variable et non *variatif malgré l'existence du substantif variation). 

1. Adjectif qualifiant des substantifsde l'inanimé : 

convenable  -  \" qui doit convenir \", \" qui convient en effet \" 

délectable  -  \" qui délecte \" 

durable  -  \" qui doit durer \" 

fermentable.  ou plus fréquemment fermentescible  -  \" qui est susceptible de fermenter \" 

flottable -  (bouée flottable)  \" qui peut flotter \" confer aussi infra B. 

immuable (muer)  -  \" qui ne change pas \" 

périssable  -  \" qui est sujet à périr \" 

préalable  -  \" qui doit précéder \" 

semblable  -  \" qui ressemble à \" 

valable  -  \" qui vaut \" 

variable  -  \" qui est susceptible de varier \" 

Confer aussi lamentable \" qui fait se lamenter \". Mais il y a rupture sémantique avec le verbe se lamenter. Lamentable fonctionne comme synonyme superlatif de mauvais. 

2. Adjectif qualifiant des substantifsde l'animé : 

faillible  -  \" qui peut se tromper \" 

serviable  -  \" qui rend service \" 

viable  -  \" apte à vivre \", \" qui normalement doit vivre \" —  ce terme a été encore employé par Proust dans le sens de \" praticable \" (E. Thorné Hammar, Le Développement de sens du suffixe latin -bilis en français. Lund, 1942, page 189.). 

3. Dans ce sens, le suffixe s'accole exceptionnellement à des verbes transitifs : 

épouvantable  -  \" qui épouvante \" 

secourable  -  \" qui secourt \" 

B.—  Par extension.  Le dérivé sert à qualifier le lieu où l'action est susceptible de se dérouler (\" où l'on peut + infinitif \") : 

flottable  -  (rivière flottable)  \" sur laquelle quelque chose peut flotter \" 

jouable  -  (terrain jouable)  \" où l'on peut jouer \",  signalé par Jacqueline Pinchon, (confer bibliographie, opere citato, page 47) 

navigable  -  \" où l'on peut naviguer \" 

patinable  -  \" où l'on peut patiner \" (Éva Thorné Hammar, Le Développement de sens du suffixe latin -bilis en français, Lund, 1942, page 188) 

pâturable  -   \" où l'on peut pâturer \" 

praticable  -  (chemin praticable) \" où l'on peut passer sans danger \" 

skiable  -  \" où l'on peut skier \" 

stationnable  - (néologisme)  \" où l'on peut stationner \" 

trottable  -  \" où l'on peut trotter \" —  attesté dans DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (ÉMILE LITTRÉ) \" prairies (...) très trottables \" 

Remarque : Dans carrossable (de carrosse) « où peuvent circuler des voitures », cyclable « où l'on peut faire du vélo » (GRAMMAIRE HISTOTRIQUE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (KRISTOFFER NYROP) tome 3 1936, § 141 considère cet adjectif comme dérivé du substantif. Il se peut aussi que la base soit cycler, anciennement « faire du vélo »), il ne s'agit sans doute pas de dérivés directs de substantif, mais plutôt de formations issues de locutions verbales du type circuler en carrosse, circuler à (bi)cycl (ette), qui pallient l'absence de verbes comme *carrosser, *cycler. 

III.—  Rarement. Suffixe formateur d'adjectifs à partir de substantifs  

A.—  Le dérivé exprime la faculté de provoquer. Il a le sens de \" qui cause, qui produit \". Le substantif de base possède généralement un correspondant verbal de même famille morphosémantique : 

confortable  -  \" qui procure du confort \" /  réconforter. 

dommageable  -  \" qui cause du dommage \" /  endommager. 

effroyable  -  \" qui cause de l'effroi \" /  effrayer. 

pitoyable  -  \" qui inspire la pitié \" /  apitoyer. 

Noter cependant : 

corvéable  -  \" assujetti à la corvée \" 

justiciable  -  \" qui doit passer en justice \" 

préjudiciable  -  \" qui porte préjudice \" 

sabotable  -  \" dont on peut faire des sabots \" (Dictionnaire de la langue française (ÉMILE LITTRÉ)) 

Rentable  -  est, en synchronie, détaché de rente et mis en rapport avec rendement : \" avoir un rendement satisfaisant eu égard à la mise, à l'investissement \". 

B.—  Le dérivé attribue au substantif qu'il sert à qualifier la qualité contenue dans le substantif de base (il a de la charité —  il est charitable). 

Remarque : Dans ce cas, -able entre dans la série des suffixes -al*, -el*, -eux*, -ique*..., formateurs d'adjectif à partir de substantif, et l'on peut se demander s'il ne constitue pas un véritable suffixe homonyme du suffixe -able formateur d'adjectif à partir de verbes (confer Dictionnaire du français contemporain (JEAN DUBOIS) Dictionnaire de grammaire et de littérature (Encyclopédie méthodique) tome 3 1969, page 126). On observera cependant que même dans ce cas une idée verbale sous-tend le suffixe -able; charitable peut se traduire aussi par \" qui fait preuve de charité \", équitable par \" qui fait preuve d'équité \" : 

charitable  -  \" qui a de la charité \" 

équitable  -  \" qui a de l'équité \", \" où l'on a fait preuve d'équité \" 

favorable  -  \" qui attire la faveur, qui est à l'avantage de \" (lorsque Le substantif qualifié est de l'animé : \" qui favorise \") 

raisonnable  -  \" doué de raison \", \" conforme à la raison \" 

véritable  -  \" conforme à la vérité \", \" conforme à ce qui est attendu de... \" 

Créations récentes : 

clubbable  - (Grammaire histotrique de la langue française (KRISTOFFER NYROP) tome 3, § 141) 

goncourable  - (Jacqueline Pinchon, opere citato, page 47) 

ministrable  -  \" qui peut devenir ministre \" (Grammaire histotrique de la langue française (KRISTOFFER NYROP) tome 3, § 141) 

papable  -  \" qui peut devenir pape \" (emprunt à l'italien) 

Ces dérivés ne forment pas de substantif en -abilité. 

Remarque : -able est-il un suffixe ou une flexion? La majorité des adjectifs en -able/-ible sont des dérivés de verbes, et l'on peut se demander si cette finale est un suffixe véritable ou une flexion, au même titre que -ant et -é (ou -u). a) -able/-ible sont toutefois plus indépendants du paradigme verbal que les désinences de participe présent ou de participe passé et se rangent donc plutôt du côté des suffixes : —  en effet, une seule catégorie de verbes, celle des verbes transitifs directs (I) fournit régulièrement des dérivés en -able; au demeurant, même dans cette catégorie, l'adjectif verbal en -able/-ible est loin d'être toujours attesté : la dérivation en -able/-ible paraît difficile avec certains verbes comme agacer, contrarier, ennuyer, fâcher, navrer ou posséder (qui ne sont pas transposables au passif d'action à l'aide de par); les verbes intransitifs ne servent que très rarement de base à des adjectifs en -able/-ible, de même que les verbes transitifs indirects (II); —  d'autre part, la notion verbale normalement contenue dans la base s'est parfois affaiblie; certains dérivés, en particulier les dérivés savants, ne correspondent, en synchronie moderne, à aucun verbe, et l'on a créé des dérivés en -able/-ible sur des radical nominaux. Il est vrai que cela s'est également produit pour les désinence -ant (gauchisant), -é (chocolaté, molletonné, vanillé), -u (feuillu), mais avec une fréquence moindre. b) Pourtant l'argument essentiel qui permet de penser que -able est un suffixe et non pas une flexion est que les dérivés qu'il sert à construction fonctionnent toujours comme adjectif, alors que les formes en -é ou en -ant tiennent à la fois du verbe et de l'adjectif. Que la base soit verbale ou exceptionnellement substantif, la forme en -able appartient sans hésitation possible à la classe des adjectifs : il s'agit donc bien d'un processus de dérivation. 

 

 

 

 

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