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ABRI, substantif masculin.

Publié le 27/09/2015

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ABRI, substantif masculin.  

Lieu servant à protéger. 

A.—  Sens propre. 

1. Langue courante.  Lieu couvert protégeant des hommes ou des animaux contre les intempéries ou quelque danger : 

Ø 1. Après avoir traversé une petite plaine couverte de troupeaux de boeufs, et dans laquelle il ne reste que quelques arbres pour servir d'abri à ces animaux contre la pluie ou les trop grandes chaleurs, nous montâmes des collines...

Voyage de la Pérouse autour du monde (MILET DE MUREAU)  tome 2, 1797, page 261. 

Ø 2. C'est grâce à l'appropriation du sol et des capitaux, que l'homme qui n'a que ses bras trouve de l'occupation et se fait un revenu. (...) le plus mince de nos ouvriers, s'il est valide, s'il est laborieux, a un abri, un vêtement, et peut gagner, tout au moins, sa subsistance.

JEAN-BAPTISTE SAY, Traité d'économie politique,  1832, page 405. 

Ø 3. Les deux tentes arabes dressées pour nous recevoir serviront d'asile à nos gens et d'abri pour nos bagages.

EUGÈNE FROMENTIN, Un Été dans le Sahara,  1857, page 16. 

Ø 4. Là-dessous, tout le fouillis et tout le pittoresque architectural de cabanes en terre moussue, de huttes en rameaux de sapin encore verts, d'abris faits de branchages desséchés couleur raisin de Corinthe, de tentes de toile grise surmontées de fumées azurées,...

EDMOND DE GONCOURT, JULES DE GONCOURT, Journal, octobre, 1870, page 640. 

Ø 5. «... l'âme humaine n'est que caprice et faiblesse; toi-même, ami maraud, ne te plains-tu pas quelquefois de ton coeur trop sensible? Ah! Giovanni, qu'avons-nous fait là? Où courons-nous? Quel démon nous chasse de ces lieux? Eh quoi! Ne trouverons-nous jamais l'abri où reposer nos vieux os de vagabonds? »

OSCAR VLADISLAS DE LUBICZ-MILOSZ, L'Amoureuse initiation,  1910, page 203. 

Ø 6.... après une matinée de terrassement, on était réunis pour prendre le repas. Il tombait une pluie torrentielle; on était brouillés et noyés et bousculés par l'inondation, et on mangeait debout, à la file, sans abri, en plein ciel liquéfié.

HENRI BARBUSSE, Le Feu,  1916, page 122. 

Ø 7. Elle quêta des yeux un coin où se cacher, un abri.

ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, page 172. 

2. Par extension. dans divers domaines techniques  Dispositif, couvert ou non, servant à protéger. 

—  AGRICULTURE, HORTICULTURE.  \" Tout dispositif propre à protéger les plantes contre l'action des vents, du froid, etc. \" (Grand Larousse encyclopédique en dix volumes) : 

Ø 8. Les citronniers, plus grêles, plus élancés, avaient tout à la fois moins de faste et plus d'élégance. Parfois des claies protectrices au-dessus d'eux leur faisaient un abri presque sombre.

ANDRÉ GIDE, Journal, Feuillets d'automne, 1902, page 100. 

—  CHEMIN DE FER.  Abri d'une locomotive. \" Emplacement protégé et vitré destiné au mécanicien et au chauffeur pour leur permettre d'assurer leur service et la manoeuvre des appareils de commande et d'alimentation. \" (Larousse du XXe.  siècle en six volumes). 

—  MARINE.  Emplacement côtier naturel ou construction, servant à protéger les bateaux contre la tempête : 

Ø 9. La côte n'offrait aucun abri. Nulle baie, nulle anse, nul portugais Pas même une crique.

JULES VERNE, Les Enfants du capitaine Grant, tome 1, 1868, page 249. 

Ø 10. Le mot abri est aussi employé pour qualifier un port, une rade, sans spécifier contre quel danger, risque ou inconvénient il abrite.

Rade-abri. On donne ce nom à la partie de la rade qui est abritée par des ouvrages d'art contre la mer. (...) on appelle abri de navigation l'endroit de la passerelle de navigation protégé du vent, des embruns et de la pluie par un vitrage.

Abri du marin (...) locaux (...) qui servent de centre de réunion, de délassement, d'instruction et de soins médicaux aux pêcheurs et aux marins de commerce.

Glossaire des termes de marine (JULIEN LE CLÈRE)  1960. 

—  MILITAIRE (TECHNIQUE).  Moyen naturel aménagé ou ouvrage enterré pour protéger les militaires en campagne contre la vue et le tir de l'ennemi : 

Ø 11. Chaque ouvrage, tranchée, boyau, fortin, abri, boqueteau a reçu une dénomination particulière ou un numéro d'ordre précédé d'une lettre variant suivant les secteurs de l'attaque.

MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 11, février 1917-novembre 1918, page 323. 

Remarque : On rencontre abri comme 1er.  ou 2e.  terme de composés tranchée-abri, tente-abri et abri-caverne : 

Ø 12. Pendant la nuit, le génie avait travaillé à des ouvrages de défense. Même, sous le feu commençant des prussiens, on creusait encore des tranchées-abris, on élevait des épaulements.

ÉMILE ZOLA, La Débâcle,  1892, page 239. 

Ø 13. Le fort lui-même a pour garnison deux compagnies du 71e.  régiment territorial, composé de braves gens de l'Anjou, consciencieux et calmes. Mais, qu'on n'imagine pas une ligne de tranchées continues et organisées, avec boyaux de communication, abris-cavernes, dépôts de munitions, etc., etc.!

HENRY BORDEAUX, Les Derniers jours du fort de Vaux,  1916, page 79. 

·    À l'époque moderne, abri antiaérien, pour la protection notamment de la population civile. 

—  TRAVAUX PUBLICS.  Construction couverte ou non destinée à protéger le voyageur sur la voie publique, notamment aux arrêts de tramways ou d'autobus. 

B.—  Emplois figurés.  Protection, refuge moral. 

1. [Le lieu est réel, mais la protection est surtout morale] :

Ø 14.... quand on revient triste, où seraient, sans le mariage, le toit, l'abri, le feu qui flambe, la main amie qui vous serre la main?

ALFRED DE MUSSET, Lettres de Dupuis et Cotonet, tome 4, 1836, page 605. 

Ø 15. Est-il de retraite plus douce

Qu'un sein de mère, et quel abri 

Recueille avec moins de secousse

Un coeur fragile endolori?

ARMAND PRUDHOMME, DIT SULLY PRUDHOMME, Les Vaines tendresses, L'Amour maternel, 1875, page 155. 

Ø 16. Ce sont peut-être des demeures encore plus misérables ces tumulus qu'on voit de place en place au milieu des toits rouges, des demeures ou des silos, abris de la graine humaine ou du froment.

ALBERT T'SERSTEVENS, L'Itinéraire espagnol,  1933, page 286. 

Ø 17. Ils avaient trouvé un abri, un coin à eux, un refuge exclusif aux misères et aux joies de sa famille;...

GABRIELLE ROY, Bonheur d'occasion,  1945, page 333. 

Ø 18.... écoeuré d'avoir tout fait au monde pour être un bon garçon et d'avoir réussi à n'être qu'une poire, dupé, trompé, estampé, (...), j'ai résolu de réfugier désormais mon égoïsme bien acquis sous l'abri du toit à cochons qui s'appelle la légalité.

GEORGES MOINAUX, DIT GEORGES COURTELINE, L'Article 330,  1900, page 261. 

2. [Ce qui protège est une chose ou une personne] 

a) [Ce qui abrite est une chose, une abstraction, mais non un lieu au sens propre] :

Ø 19.... hors la Charte point de salut. C'est le seul abri qui nous reste contre la république et contre le despotisme militaire...

FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Mélanges politiques, préface tome 25, 1815, page IV. 

Ø 20. Chaque siècle, chaque heure, en poussière il [le temps] entraîne.

Ces fragiles abris de la sagesse humaine,

Empires, lois, autels, dieux, législations,

Tentes que pour un jour dressent les nations,

Et que les nations qui viennent après elles

Foulent pour faire place à des tentes nouvelles;...

ALPHONSE DE LAMARTINE, Jocelyn,  1836, page 598. 

Ø 21.... quand je songe à cette horreur, à ce dégoût de l'existence qui s'est, d'années en années, exaspéré en moi, comme je comprends que j'aie forcément cinglé vers le seul port où je pouvais trouver un abri, vers l'Église.

GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, En route, tome 1, 1895, page 42. 

b) [Ce qui abrite est une personne] :

Ø 22. Les français reconnaissaient avec plaisir dans sa personne [le comte d'Artois] leurs anciennes moeurs, leur ancienne politesse et leur ancien langage; la foule l'entourait et le pressait; consolante apparition du passé, double abri qu'il était contre l'étranger vainqueur et contre Bonaparte encore menaçant.

FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, tome 2, 1848, page 518. 

Ø 23. O Jésus! Je n'ai personne, vous êtes mon abri, mon recours, mon désir.

ÉDOUARD ESTAUNIÉ, L'Empreinte,  1896, page 223. 

C.—  Locutions. 

1. Locution prépositive. À l'abri de, employé également au sens propre et au sens figuré, donc suivie d'un complément concret ou abstrait : 

Ø 24. Ah! Cette maison aimée, la vie qu'on y menait si à l'abri des soucis et des tourmentes!

ÉDOUARD ESTAUNIÉ, L'Empreinte,  1896, page 3. 

Ø 25. C'est une tribu légendaire [les Thalmoudites] . Il est écrit d'eux qu'ils vivaient « dans le roc, à l'abri des tempêtes, livrés à leurs passions ».

HENRI-RENÉ LENORMAND, Le Simoun,  1921, 13e.  tableau, page 147. 

Remarque : On remarquera que chacun des deux exemples contient un mot faisant image par rapport au sens propre (exemple 24 : tourmentes; exemple 25 : tempêtes). 

2. Locution adverbiale. À l'abri (le plus souvent abri suggère un lieu réel, notamment dans l'expression mettre à l'abri) : 

Ø 26. Par bonheur, j'ai pu tirer vers une caverne, pas bien loin, où j'ai mis leur demoiselle à l'abri,...

RODOLPHE TOEPFFER, Nouvelles genevoises,  1839, page 402. 

Ø 27.... une sorte de nostalgie du sein maternel semble inspirer le goût d'être enfermé et à l'abri, blotti dans les coins ou dans les bras des adultes, recroquevillé dans ses attitudes.

EMMANUEL MOUNIER, Traité du caractère,  1946, page 356. 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 2 779. Fréquence relative : XIXe.  siècle : a) 4 355, b) 3 135; XXe.  siècle : a) 3 611, b) 4 250.

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