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AÏEUX, substantif masculin pluriel.

Publié le 17/10/2015

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AÏEUX, substantif masculin pluriel.  

I.—  GÉNÉALOGIE.  langue commune. 

A.—  Vieux.  Grands-parents : 

Ø 1. Les jours de fête, (...) il regardait les habitants sortir de leurs maisons, puis les danses sur les places, (...) et le soir venu, par le vitrage des rez-de-chaussée, les longues tables de famille où des aïeux tenaient des petits enfants sur leurs genoux...

GUSTAVE FLAUBERT, Trois contes, La Légende de saint Julien l'Hospitalier, 1877, page 124. 

B.—  Usuel, littéraire. 

1. Ensemble de personnes (généralement de sexe masculin) qui sont à l'origine d'une lignée continue ou appartiennent aux générations anciennes d'une lignée continue. Synonymes : ancêtres, ascendants; antonyme : descendants :  

Ø 2. Un mortel dont Bellone admira le courage

Couloit en paix ses jours sur cet heureux rivage,

Habitant le château qu'habitoient ses ayeux, 

JOSEPH-FRANÇOIS MICHAUD, Le Printemps d'un proscrit,  1803, page 97. 

Ø 3. Mrs. Dingley avait hérité de ses aïeux français émigrés au dix-septième siècle en Louisiane un sentiment juste des caractères.

JEAN THARAUD, JÉRÔME THARAUD, Dingley, l'illustre écrivain,  1906, page 25. 

Ø 4. Ce bruit autour de mes oreilles, ce papillotement, ce n'est rien! Ce n'est que soixante millions d'êtres, et leurs millions d'aïeux, et leurs millions de descendants, qui s'envolent de moi, comme l'a dit tout à l'heure Zelten.

JEAN GIRAUDOUX, Siegfried et le Limousin,  1928, III, 4, page 134. 

—   Locution, généralement de style noble. Rejoindre ses aïeux. Mourir : 

Ø 5. Dussé-je avant le temps rejoindre mes aïeux...

CASIMIR DELAVIGNE, Les Enfants d'E=Édouard,  1833, II, 6, page 73. 

Ø 6.... attendre l'heure où le dernier des Sigognac ira rejoindre ses aïeux dans le caveau de famille...

THÉOPHILE GAUTIER, Le Capitaine Fracasse,  1863, page 43. 

—  Familier. (Ô) mes aïeux!   Expression où l'on prend ses ancêtres à témoin de quelque chose de peu commun, avec souvent une nuance d'accablement ou au contraire de soulagement : 

Ø 7. Mais si vous aviez fréquenté comme moi le pou de vêtement, celui-là, mes enfants, alors celui-là, mes aïeux, il n'y a pas moyen de s'en débarrasser.

RAYMOND QUENEAU, Loin de Rueil,  1944, page 20. 

2. En particulier, littéraire.  Ancêtres connus d'une famille illustre : 

Ø 8.... Junot s'écria que Bonaparte n'avait pas besoin d'aïeux...

ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Le Puits de Sainte-Claire,  1895, page 291. 

—  Par métonymie, ironiquement.  Portraits des ancêtres d'une famille généralement illustre : 

Ø 9. « Je recommande également à la piété de mon légataire les dix-huit portraits de famille que je lui laisse, (...) : si mon petit-neveu était tenté quelque jour de mettre ses aïeux en vente, je l'invite à relire auparavant certaine scène de L'École de médisance (school for scandal) qui pourra lui en faire passer l'envie... »

VICTOR-JOSEPH ÉTIENNE, DIT DE JOUY, L'Hermite de la Chaussée d'Antin, tome 5, 1814, page 219. 

3. Par extension.  Ancêtres d'une collectivité (ville, peuple, etc.) : 

Ø 10.... nos aïeux en faisaient grand usage [de l'ambre] dans leur cuisine, et ne s'en portaient pas plus mal.

JEAN-ANTELME BRILLAT-SAVARIN, Physiologie du goût ou Méditations de gastronomie transcendante,  1825, page 342. 

Ø 11. Chaque ville, chaque bourgade (...) a d'abord célébré ses aïeux illustres. « Je suis la ville de La Boétie, » a dit Sarlat. « Je suis Gambetta, » a dit Cahors.

MAURICE BARRÈS, Mes cahiers, tome 2, août-décembre 1913, page 202. 

—   Ancêtres mythologiques d'un peuple : 

Ø 12.... elle [une île] étoit plantée de ces vieux arbres que les peuples de l'Arcadie regardoient comme leurs aïeux. 

FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Les Martyrs ou le Triomphe de la religion chrétienne, tome 1, 1810, page 207. 

Remarque : 1. Par opposition à pères, aïeux désigne des ancêtres plus éloignés. Par opposition à ancêtres, qui ne fait que constater une filiation réelle, les 2 termes indiquent la survie d'une relation intime avec les ancêtres. 2. De là un certain nombre de traits \" stylistiques \" qui caractérisent aïeux : a) Il est noté comme \" terme d'honneur \" dans le Dictionnaire de l'Académie Française 1798, Dictionnaire général et grammatical des dictionnaires français (Napoléon Landais) 1834; b) Il est fréquemment associé avec des termes laudatifs (dignes, illustres, nobles, sublimes, etc.); c) Il prend souvent une coloration affective avec l'idée de patrimoine moral ou spirituel à conserver d'où les association syntagmatique —  Locution prépositive à la mémoire de mes aïeux, au nom de mes aïeux, par mes aïeux. —  Substantif culte des aïeux, moeurs des aïeux, terre des aïeux. —  Verbes, hériter de ses aïeux, suivre les traces de ses aïeux, tenir de ses aïeux. 

II.—  Emplois analogiques et figurés. 

A.—  [En parlant de personnes ou de personnages]  Précurseur, devancier (confer aïeul II A) : 

Ø 13. Ducis, pour certains accents religieux, grandioses et doux, est un parent de Chateaubriand, de même qu'il est un de nos pères et de nos aïeux en rêverie. 

CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Nouveaux lundis,  1863-1869, page 365. 

Ø 14. D'autres ont parlé,... et de son Christ mort... et de sa série de la Passion [à Holbein] ... mais nul,... n'aura aimé plus profondément que moi cette truculente et furieuse guirlande de ribaudes et de gais compagnons, indéniables aïeux des buveurs de Téniers... 

PAUL DUVAL, DIT JEAN LORRAIN, Sensations et souvenirs, Un Holbein, 1895, page 296. 

B.—  [En parlant d'animaux, de plantes, d'entités diverses]  Ce qui est à l'origine de quelque chose (confer aïeul II B) : 

Ø 15.... c'est au pied de quelques-uns de ces térébinthes aïeux du térébinthe qui me couvre, que le poëte sacré venait sans doute attendre le souffle qui l'inspirait si mélodieusement.

ALPHONSE DE LAMARTINE, Souvenirs, impressions, pensées et paysages pendant un voyage en Orient (1832-1833) ou Note d'un voyageur,  1835, page 433. 

Ø 16. Pour raconter son infortune

À la forêt de ses aïeux, 

La biche brame au clair de lune

Et pleure à se fondre les yeux.

MAURICE ROLLINAT, Les Névroses, Refuges, 1883, page 219. 

Ø 17. Les mouvements de la matière et de la vie ont le pas grave, et sentent qu'ils sont les aïeux des mouvements hâtifs dont frémissent les hommes.

LOUIS FARIGOULE, DIT JULES ROMAINS, La Vie unanime, Moi, par dessus, 1908, page 216. 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 1 608. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 3 019, b) 3 158; XXe.  siècle : a) 2 600, b) 1 003. 

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