ARIDE, adjectif.

ARIDE, adjectif.  

A.—  [En parlant d'un sol, d'un terrain]  Dépourvu d'humidité, sec. Roche, sable aride : 

Ø 1. Tel champ dont le sol est sec et aride, a besoin de pluies fréquentes;

CHARLES-FRANÇOIS DUPUIS, Abrégé de l'origine de tous les cultes,  1796, page 444. 

—  Rare.  [En parlant du temps, de certains éléments atmosphériques]  Sans pluie : 

Ø 2. Ces mêmes maladies ne cessent que par des froids rudes ou par des chaleurs arides, si contraires à toute espèce de génération.

JACQUES-HENRI BERNARDIN DE SAINT-PIERRE, Harmonies de la nature, 1814, page 189. 

—  Emploi comme substantif.  Caractère de ce qui est aride : 

Ø 3. Je gagnais en courant la garrigue, vers où m'entraînait déjà cet étrange amour de l'inhumain, de l'aride, qui, si longtemps, me fit préférer à l'oasis le désert.

ANDRÉ GIDE, Si le grain ne meurt,  1924, page 382. 

—  En particulier.  Sans végétation, stérile et, par extension, dénudé, nu. Campagne, champ, contrée aride. 

·    Rare.  [En parlant de la végétation, des cultures]  Peu abondant, maigre : 

Ø 4. Il faut un peu de courage et de résolution pour aller jusqu'à la cime de ce petit Gibraltar... de là se voient le clocher et les arides cultures du Croisic.

HONORÉ DE BALZAC, Béatrix,  1839, page 212. 

·    Par métaphore.  Désolé, triste : 

Ø 5.... Athènes est un autel aux dieux, le plus beau piédestal sur lequel les siècles passés aient pu placer la statue de l'humanité! Aujourd'hui l'aspect est sombre, triste, noir, aride, désolé; un poids sur le coeur; rien de vivant, de vert, de gracieux, d'animé;...

ALPHONSE DE LAMARTINE, Souvenirs, impressions, pensées et paysages pendant un voyage en Orient (1832-1833) ou Note d'un voyageur, tome 1, 1835, page 127. 

—  Spécialement. 

1. GÉOGRAPHIE, CLIMATOLOGIE.  Région aride, climat aride (Confer Dictionnaire des sols (GEORGES PLAISANCE, ANDRÉ CAILLEUX) 1958). 

2. CÉRAMIQUE.  Qui possède la propriété de diminuer la plasticité de la pâte. Matières arides. 

B.—  Par analogie, littéraire.  [Appliqué au corps ou à certaines de ses parties]  Corps, sein aride; yeux arides. 

—   Désséché : 

Ø 6. Tout jeune homme aujourd'hui semble un vieillard aride,

Et le plus jeune front déjà porte sa ride

Dans ce siècle penseur, tant la réflexion

Est plus prompte que l'âge à creuser son sillon!

AUGUSTE BRIZEUX, Marie,  1840, page 83. 

—  Par métaphore. Chagrin, douleur aride. Sans larmes : 

Ø 7. Pleurer l'eût soulagée. Mais ce remède des faibles lui avait toujours été refusé. Même lorsqu'elle était encore une enfant, ses chagrins étaient sans larmes, rétractés, arides... Son regard sec, après avoir erré sur les papiers épars, les meubles, les bibelots de la cheminée, s'était fixé sur la glace,...

ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, page 264. 

C.—  Au figuré, dans le domaine moral et intellectuel. 

1. Dépourvu de sensibilité. Âme, coeur aride : 

Ø 8. Elle pouvait s'être trompée, elle pouvait avoir donné sa vie à un homme dur et aride...

BENJAMIN HENRI CONSTANT DE REBECQUE, Adolphe,  1816, page 54. 

2. [En parlant d'un enseignement, d'une science, etc. ou, plus généralement, de la vie, de l'existence, etc.]  Dépourvu d'agrément, d'attrait. Étude aride : 

Ø 9. Ma vie est abominablement aride, sans plaisir, sans distraction, sans épanchement.

GUSTAVE FLAUBERT, Correspondance,  1872, page 64. 

3. [En parlant de l'esprit, de l'imagination]  Qui ne produit rien, qui ne donne naissance à aucune création originale. Esprit aride : 

Ø 10.... ceux qui n'ont jamais tenté, pour la joie d'un lecteur inconnu —  suprême folie —  de mettre du noir sur du blanc, n'entreront jamais tout à fait dans l'amertume de cet homme chez qui l'ivresse des sens, même dans son premier éclat, n'avait jamais valu l'émotion créatrice et qui ne sortait rien d'une cervelle aride.

JEAN THARAUD, JÉRÔME THARAUD, Dingley, l'illustre écrivain,  1906, page 150. 

D.—  Emploi comme substantif, littéraire. L'aride. La terre : 

Ø 11....

Souriant aux belles étoiles

Qui figurent de blanches voiles

Voguant au plus profond des eaux,

À la brise qui les balance

Et fait de l'océan immense

Un ciel limpide dont les flots

Mouillent d'innombrables vaisseaux;

S'enfonçant au loin dans l'humide,

Puis revenant raser l'aride

Pour recueillir les grands discours

Que l'océan dit en lui-même,

Et ceux dont aux grèves qu'il aime

Il va développant le cours,

Mieux encor les nuits que les jours.

MAURICE DE GUÉRIN, Poèmes, L'Anse des dames, 1839, page 123. 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 950. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 2 157, b) 1 333; XXe.  siècle : a) 1 074, b) 838.