BOUGON1, -ONNE1, adjectif.

BOUGON1, -ONNE1, adjectif. [En parlant d'une personne ou de son comportement] Qui bougonne. Air bougon; voix, humeur bougonne : Ø 1. Ginginet était ce soir-là plus grincheux et plus bougon que de coutume. GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, Marthe, histoire d'une fille, 1876, page 56. Ø 2. On voudrait lui [Desjardins] faire lire Montaigne, et l'on désespère de lui lorsqu'on apprend qu'il a pour livre de chevet les Essais. Au demeurant il est charmant; j'aime sa cordialité bougonne; même il n'est pas incapable de bonhomie, et son humour est savoureux. ANDRÉ GIDE, Journal, 1923, page 756. Ø 3. Il avait pour chef un vieil officier que nous avions baptisé Godasse, je ne sais plus au juste pourquoi, bougon comme un adjudant de quartier et contre qui nous menions une guerre sournoise où nous avions rarement le dessous. FRANCIS AMBRIÈRE, Les Grandes vacances, 1946, page 109. — Emploi comme substantif : Ø 4. C'était un homme de cinquante ans, une sorte de loup de mer, un bougon qui ne devait pas être commode. JULES VERNE, Le Tour du monde en quatre-vingts jours, 1873, page 190. Forme dérivée du verbe "bougonner" bougonner BOUGONNER, verbe. A.— Emploi intransitif, familier. Grommeler, murmurer entre ses dents pour manifester sa mauvaise humeur. Synonymes : marmonner, marmotter, ronchonner : Ø 1. La Teuse, qui était restée plantée à la même place, ramassa son écuelle et sa cuiller de bois, en bougonnant. Elle mâchait entre ses dents des paroles qu'elle accompagnait de grands haussements d'épaules. ÉMILE ZOLA, La Faute de l'Abbé Mouret, 1875, page 1434. Ø 2. Il est seul. On le rencontre qui marche par les champs en grommelant et en bougonnant PAUL CLAUDEL, Tête d'or, 1re. version, 1890, page 35. Ø 3. M. Lampre était bien obligé d'en convenir, mais il n'en continuait pas moins de bougonner. Ce petit homme de soixante-dix ans, bedonnant, à la mine empourprée, à la barbe sanglière, aux cheveux tout à fait blancs, était grognon mais complaisant et généreux. GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, L'Oblat, tome 1, 1903, page 66. — Par métaphore : Ø 4.... les appas, Les soupirs, les baisers, ne s'inquiètent pas Si quelque orage couve, et si cette gorgone, La foudre, au loin, là-bas, à l'horizon bougonne. VICTOR HUGO, La Légende des siècles, L'Amour, tome 6, 1883, page 229. · Bougonner contre : Ø 5.... cet homme vigoureux, encore jeune, avait fait de brillantes campagnes au Soudan et à Madagascar; puis, brusquement, il avait envoyé tout promener, (...) passant ses journées à bouleverser ses plates-bandes, à étudier sans succès des exercices de flûte, à bougonner contre la politique, et à rabrouer sa fille, qu'il adorait... ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, Dans la maison, 1909, page 976. B.— Emploi transitif. 1. Vieux. Réprimander quelqu'un, chercher querelle à quelqu'un : Ø 6. Il avait toujours la mine de mauvaise humeur, semblait vouloir intimider ses pratiques, bougonnait les gens qui entraient chez lui, et avait l'air plus disposé à leur chercher querelle qu'à leur servir la soupe. VICTOR HUGO, Les Misérables, tome 2, 1862, page 314. 2. Usuel. Dire en grommelant. a) [Pour introduire le discours direct] : Ø 7. Justin proteste avec rage. Jean-Paul Sénac baisse les yeux. Il se tait une minute et, bientôt, il recommence à bougonner dans sa moustache : — Moi, je mange de la salade pour enlever le goût du gras. Faut-il encore qu'on l'ait, le goût du gras. GEORGES DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Le Désert de Bièvres, 1937, page 188. b) [Avec un complément d'objet exprimant une idée de parole] : Ø 8. Il (...) mit les mains dans ses poches en bougonnant des paroles indistinctes... GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Chambre d'hôtel, 1940, page 67. Ø 9. Joseph a bougonné des phrases assez vagues : « Tiens! voilà la maison de ces hurluberlus... » GEORGES DUHAMEL, Chronique des Pasquier, La Passion de Joseph Pasquier, 1945, page 118. Remarque : On rencontre dans la documentation un participe présent adjectivé bougonnant « enclin à bougonner ». " Du vieillard éducateur, au contraire, il savait beaucoup de choses : un esprit acharné à instruire, une largesse en cadeaux somptueux (...). La vie de l'enfant dépendait entière de celle-ci, sa vie présente et future, l'avenir de sa fortune. Caroline Cavrois, méticuleuse et triste, plutôt bougonnante, laide en outre, ne paraissait pas s'occuper de son pupille! " (PAUL ADAM, L'Enfant d'Austerlitz, 1902, page 108).