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CANON, substantif masculin.

Publié le 08/11/2015

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CANON2, substantif masculin.  

A.—  RELIGION.  

1. DROIT ECCLÉSIASTIQUE.  Texte consignant une décision de l'autorité religieuse et fixant la règle de la foi et de la discipline religieuse. Canon des conciles; les (saints) canons (de l'Église) (Confer également François-René de Chateaubriand, Études historiques, 1831, pages 258-259; et absolument Prosper Mérimée, Lettres à la comtesse de Montijo, tome 2, 1870, page 277) : 

Ø 1.... la bulle du Pape, parlant seul de sa chaire ne diffère des canons prononcés en concile général que comme, par exemple, l'ordonnance de la marine ou des eaux et forêts différait, pour les Français, de celle de Blois ou d'Orléans.

JOSEPH, COMTE DE MAISTRE, Du Pape,  1819, page 28. 

—  Par métonymie.  Le recueil de règles ou de textes réglementaires; un article, un paragraphe du texte lui-même. Canon des Apôtres, canons pénitentiaux (Confer François-René de Chateaubriand, Le Génie du Christianisme, tome 1, 1803, page 54 et Dictionnaire de théologie catholique (A. VACANT, E. MANGENOT), tome 14, 1re.  partie, 1938, page 607). 

—  En emploi adjectival. Droit canon. Droit ecclésiastique fondé sur les canons de l'Église. Docteur en Droit canon; École de Droit canon. Synonyme : droit canonique*. 

2. Liste de livres faisant foi. 

a) Canon des Écritures. Ensemble des livres reconnus par le Judaïsme ou les Églises chrétiennes comme inspirés. Canon des Livres Saints (par opposition aux livres apocryphes), canon des Juifs, canon des chrétiens, canon du Nouveau Testament (SIMONE WEIL, Le Judaïsme,  1931, page 151) : 

Ø 2. Le « canon », c'est-à-dire la liste officielle des livres appartenant à la Bible, ne s'est constitué que peu à peu dans l'ancienne synagogue; les rabbins discutaient encore sur la canonicité de certains livres au second siècle de l'ère chrétienne.

Philosophie, Religion (sous la direction de Gaston Berger)  1957, page 4015. 

—  Par analogie.  Recueil des textes inspirés bouddhiques, brahmaniques (Confer Philosophie, Religion (SOUS LA DIRECTION DE GASTON BERGER), 1957, page 5216). 

b) Par extension. 

·    Canon des saints. Catalogue officiel des saints reconnus par l'Église catholique (Confer Anatole France, L'Orme du mail, 1897, page 103). 

·    HISTOIRE, LITTÉRATURE.  Chez les anciens, liste, catalogue des auteurs considérés comme modèles du genre dans une matière. Canon d'Alexandrie, canon des auteurs classiques (Confer Hyppolyte-Adolphe Taine, Voyage en Italie, tome 2, 1866, page 199). 

3. LITURGIE CHRÉTIENNE.  Partie centrale et strictement réglée de la messe contenant notamment les paroles de la Consécration. Canon de la messe (Confer Léon Bloy, Journal, 1904, page 223; Confer également Henri Bremond, Histoire littéraire du sentiment religieux en France, tome 3, 1921, page 80). 

—  Par métonymie.  Tableau mobile placé au milieu de l'autel et sur lequel sont inscrites les paroles du canon. Canon d'autel; canon enluminé (Confer Serge Grandjean, L'Orfèvrerie  du XIXe.  siècle en Europe, 1962, page 112). Par extension.  Chacun des deux petits tableaux placés de part et d'autre de ce tableau central et sur lesquels sont inscrits, sur l'un le psaume du lavabo, sur l'autre le Prologue de l'Évangile de saint Jean. 

Remarque : Attesté dans le Dictionnaire général de la langue française (Adolphe Hatzfeld, Arsène Darmesteter); confer également Serge Grandjean, L'Orfèvrerie du XIXe.  siècle en Europe, page 61. 

B.—  Ensemble de règles de mesure. 

1. CHRONOLOGIE.  Ensemble de formules servant à calculer certaines dates mobiles. Canon chronologique. 

—  Par métonymie. Canon pascal. Table des fêtes mobiles, notamment de Pâques, établie pour plusieurs années. Canon pascal d'Eusèbe, canon pascal de saint Hippolyte, canon pascal de Théophile d'Alexandrie. 

2. MUSIQUE.  

a) HARMONIE.  vieux.  Méthode pour mesurer l'intervalle des sons. 

Remarque : Attesté dans la plupart des dictionnaires généraux du XIXe.  siècle ainsi que dans Dictionnaire de l'Académie Française 1932 et DICTIONNAIRE ENCYCLOPÉDIQUE QUILLET 1965. 

b) \" Composition polyphonique dans laquelle une voix est rigoureusement imitée par plusieurs autres voix qui font leur entrée successivement \" (Karl Geiringer, Jean-Sébastien Bach, 1966, éditions du Seuil, 1970, page 123). Canon à trois voix; canon à l'unisson (H. REBER, Traité d'harmonie, 1949, page 265); canon à l'octave (HENRI POTIRON, La Musique d'église,  1945, page 110) : 

Ø 3. Notre esprit, en écoutant un canon, doit suivre chaque voix séparément et, en même temps, faire attention à l'harmonie verticale. (...) les plus grands compositeurs ont consacré une grande partie de leurs efforts à la construction de canons et de fugues...

Les Grands courants de la pensée mathématique.  1948, page 478. 

C.—  BEAUX-ARTS.  

1. Norme de proportionnalité appliquée à la figure et au corps de l'homme et déterminant le type idéal de la perfection physique. Canon de Polyclète, canon de Lysippe (Confer Histoire de la science, 1957, page 1363; Charles Blanc, Grammaire des arts du dessin, 1876, page 44 et Théophile Gautier, Guide de l'amateur au Musée du Louvre, 1872, page 221) : 

Ø 4.... il n'y a pas de beauté, ni seulement de grâce, où l'on ne sent pas la force interne, la « force discrète » demandée par Aristote (comme il n'y a pas, dans l'âme, de sensibilité qui vaille sans la force). Même un jeune enfant ne peut être beau, en qui ne se trahit pas une certaine vigueur latente : la taille ne fait rien à l'affaire. Tout cela a été proclamé par le canon grec de la bonne époque. Il est le canon parfait, pour l'homme et pour la femme. Si peu qu'on s'en éloigne, on se trompe.

HENRI DE MONTHERLANT, Les Olympiques,  1924, page 279. 

2. Par extension.  Règle directrice appliquée dans un art, dans une discipline intellectuelle : 

Ø 5. Qu'il s'agisse des règles du théâtre, de celles de la poésie, des canons de l'architecture, de la section d'or, la volonté de dégager une science de l'art, ou du moins, d'instituer des méthodes, et, en quelque sorte, d'organiser un terrain conquis, ou que l'on croit définitivement conquis, elle [l'esthétique] a séduit les plus grands philosophes.

PAUL VALÉRY, Variété IV,  1938, page 259. 

 

CANON1, substantif masculin.  

A.—  Objet en forme de tube. 

1. ARMURERIE.  Partie d'une arme à feu portative, en forme de tube, dans laquelle on met la charge et servant à lancer le projectile. Canon(s) du fusil, de carabine, de pistolet : 

Ø 1.... il aperçut précisément en face de lui, d'abord un canon de fusil, puis une tête dépassant la crête du mur. Le fusil s'abaissa, et (...) il vit la flamme du fusil d'Orlanduccio,...

PROSPER MÉRIMÉE, Colomba,  1840, page 135. 

·    Baïonnette au canon. Baïonnette fixée à l'extrémité du canon du fusil (Confer Roland Dorgelès, Les Croix de bois, 1919, page 194). 

·    Canon lisse (dont l'intérieur est lisse) par opposition à canon rayé dont l'intérieur, rayé en spirales, imprime un mouvement de rotation au projectile, régularisant ainsi la pression de l'air et augmentant la précision du tir (Confer Albert de Broglie, La Diplomatie et le droit nouveau, 1868, page 104). 

2. TECHNIQUES DIVERSES.  Objet creux ou plein de forme cylindrique. 

a) [Cylindres creux] 

—  HABILLEMENT.  Pièce de toile ample et froncée que l'on attachait au bas de la culotte (notamment au XVIIe.  siècle) et, en général, partie de vêtement plus ou moins cylindrique pour loger les cuisses (VICTOR HUGO, Ruy Blas,  1838, IV, 2, page 416 ). 

—  TECHNOLOGIE.  Objets, généralement cylindriques et forés, servant à différents usages. 

·    Corps d'une seringue (Confer Paul de Kock, L'Âne à Monsieur Martin, 1862, page 152). 

·    Tuyau d'une fontaine (Confer Jean Giono, Colline, 1929, page 76 et Alexandre Arnoux, Zulma l'infidèle, 1960, page 24). 

·    Tuyau reliant l'arrosoir à la pomme. 

·    Partie forée d'une clef; partie de la serrure recevant la clef. 

—  ZOOLOGIE.  Tuyau de la plume d'oie. 

b) [Cylindres pleins] 

—  CHIMIE.  Soufre en canon. Variété commerciale du soufre concentré en cylindres (Confer P. Lebeau, G. Courtois, Traité de pharmacie chimique, tome 1, 1929, page 140). 

—  ÉLECTRONIQUE.  Canon à électrons ou canon électronique. Dispositif produisant un faisceau d'électrons animés d'une très grande vitesse et concentrés ou focalisés en un étroit faisceau axial (Confer Roger Husson, François Graf, Manuel de biologie générale, 1965, page 71). 

—  ÉQUITATION.  Partie du mors qui s'appuie sur la barre. 

—  MÉDECINE VÉTÉRINAIRE.  Partie des membres du cheval comprise entre le genou (ou le jarret) et le boulet : 

Ø 2. La maladie d'Abadie correspond à l'inflammation du périoste de l'extrémité inférieure du canon en avant et de l'extrémité supérieure de la première phalange avec laquelle le canon forme l'articulation du boulet. 

ERNEST GARCIN, Guide vétérinaire,  1944, page 157. 

B.—  Dispositif sur lequel est montée une bouche à feu en forme de tube. 

1. ARTILLERIE.  

a) Pièce d'artillerie munie d'une bouche à feu en forme de tube servant à lancer des projectiles plus ou moins lourds : 

Ø 3. Quant aux canons provenant du brick, c'étaient de jolies pièces en acier fondu qui, sur les instances de Pencroff, furent hissées au moyen de caliornes et de grues jusqu'au palier même de Granite-house : des embrasures furent ménagées entre les fenêtres, et on put bientôt les voir allonger leur gueule luisante à travers la paroi granitique. De cette hauteur, ces bouches à feu commandaient véritablement toute la baie de l'union.

JULES VERNE, L'Île mystérieuse,  1874, page 464. 

·    Batterie de canons. Réunion de plusieurs canons de manière qu'ils manoeuvrent ensemble (Confer Honoré de Balzac, La Cousine Bette, 1846, page 299). 

·    Mettre le canon en batterie. Le disposer pour tirer (ANDRÉ MALRAUX, L'Espoir,  1937, page 464 ). 

·    Poudre à canon. Poudre des pièces d'artillerie (par opposition à poudre de chasse). Synonyme : poudre à tirer (Confer Gustave Flaubert, L'Éducation sentimentale, tome 1, 1869, page 95). 

—  Familier, péjoratif. Chair* à canon. 

SYNTAXE : [Généraux] âme, bouche, bout, gueule du canon; culasse du canon; affût du canon; bruit du (des) canon(s); portée du (des) canon(s); roulement du canon; le canon gronde; le(s) canon(s) tire (nt), tonne (nt). [Relatifs à certaines spécificités] a) Dimensions : canon long (confer JOFFRE, Mémoires, tome 1, 1910-14, pages 63-64); canon court. b) Poids (en livres) des projectiles : canon de 24, de 12, de 8; ou au diamètre (en millimètres) de leur âme : canon de 75 (confer MAURRAS, Kiel et Tanger, 1914, page XXII), canon de 120 (MAURRAS, Kiel et Tanger, 1914, page 139), canon de 155 (confer JOFFRE, Mémoires, t. 1, 1910-14, page 14), canon de 240. c) Emploi : canon court de campagne (confer JOFFRE, Mémoires, tome 1, 1910-14, page 70); canon de marine (confer H. LE MASSON, La Mar., 1951, page 66); canon de montagne, de place, de siège. 

·    Canon de retraite. Canon qui est disposé pour tirer dans le sillage (confer Crèvecoeur, Voyage dans la Haute Pensylvanie, tome 1, 1801, page 255); par opposition à canon de chasse, disposé pour tirer dans l'axe vers l'avant. 

b) Par métonymie.  Ensemble de canons, artillerie (d'une place, d'une armée). Le canon américain nettement entendu (JULIEN GREEN, Journal,  1944, page 146 ). 

—   Matériel consistant en canons : 

Ø 4. Après plusieurs heures de combat, et différentes charges d'infanterie et de cavalerie, il se mit en retraite, nous laissant du canon et des prisonniers.

EMMANUEL DIEUDONNÉ, COMTE DE LAS CASES, Le Mémorial de Sainte-Hélène, tome 1, 1823, page 677. 

2. Par extension. 

a) AGRICULTURE.  Canon paragrêle. Canon tirant à la verticale et destiné à causer des perturbations dans les nuages afin d'y empêcher la formation de grêlons (Confer Tony Ballu, Les Machines agricoles, 1933, page 19). 

b) MARINE.  Canon porte-amarre. Petit canon destiné à lancer depuis la côte un cordage à un navire en perdition afin de permettre le sauvetage de l'équipage (Confer Jean-Baptiste Charcot, Le \" Pourquoi-Pas? \" dans l'Antarctique, 2e.  expédition antarctique française, 1908-10, 1910, page 36). 

c) PÊCHE.  Canon-harpon, canon lance-harpon, canon porte-harpon. Engin en forme de canon court employé pour la pêche aux grands cétacés et dont le projectile est un harpon chargé de poudre destiné à les atteindre (Confer Henri-Philippe d'Orléans, Chasses et chasseurs arctiques, 1911, page 207). 

d) SPECTACLES.  Homme-canon, femme-canon. Athlète qui porte sur ses épaules un petit canon dont on allume la charge (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Paysages et portraits,  1954, page 196 ). 

 

DÉRIVÉS : 1.  Canonnage,  substantif masculin.   ARTILLERIE de MARINE.  Art du canonnier. Un marin exercé au canonnage des bâtiments (Dictionnaire de l'Académie française. 1835-1932). 2.  Canonnerie,  substantif féminin.  vieilli.  Fonderie de canons; endroit d'une fonderie où l'on ne coule que des canons (Confer Blaise Cendrars, Bourlinguer, 1948, page 290). 

CANON3, substantif masculin.  

MÉTROLOGIE.  Ancienne mesure de capacité des vins et spiritueux. 

—  Par métonymie et populaire.  La contenance de cette mesure. Boire un canon : 

Ø ... il entrait volontiers boire un canon avec les camarades. Tout de même, on n'était pas mal chez le marchand de vin; on rigolait, on restait là cinq minutes. Ça ne déshonorait personne. (...) attendu qu'un verre de vin n'a jamais tué un homme.

ÉMILE ZOLA, L'Assommoir,  1877, page 490. 

·    Canon sur le comptoir. \" Verre de vin que l'on boit sur le comptoir d'un marchand de vin \" (Grand dictionnaire universel du XIXe. siècle (Pierre Larousse), Grand Larousse encyclopédique en dix volumes); Confer Émile Zola, L'Assommoir, 1877, page 439; Confer également Edmond et Jules de Goncourt, Journal, 1879, page 10. 

Remarque : Il existe un dérivé argotique de canon3, canonner, verbe, signifiant \" boire un verre, fréquenter les cabarets \" (attesté dans la plupart des dictionnaires d'argot; confer Huysmans, Les Soeurs Vatard, 1879, page 101). 

 

 

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