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CARESSER, verbe transitif.

Publié le 09/11/2015

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CARESSER, verbe transitif.  

A.—  Faire des caresses*. 

1.  [Le sujet désigne une personne] 

a) [Le complément désigne une personne]  Caresser un enfant, une femme; caresser ses cheveux, son épaule : 

Ø 1. Surtout ils [les bergers] s'occupent des enfants. Eux, à qui les leurs manquent tant, ils s'emparent de ceux de leurs hôtes. Ils les prennent sur leurs genoux, les câlinent et les caressent.

JOSEPH DE PESQUIDOUX, Chez nous,  1921, page 240. 

—  Par antiphrase, populaire.  Frapper. Caresser les côtes de quelqu'un : 

Ø 2.... poissarde en fanchon, qui, de l'arrière, à la place des laquais et des malles, caressait du plumeau les enfants acharnés à lui tirer les jupons;...

PAUL ADAM, L'Enfant d'Austerlitz,  1902, page 13. 

b) [Le complément désigne un animal]  Caresser un chat, un chien. Il (...) parlait à ses boeufs, les caressait à lisse et à contre-poil (MARCEL AYMÉ, La Jument verte,  1933, page 65 ). 

c) [Le complément désigne une chose]  Caresser un objet. L'effleurer de la main ou en éprouver le contact. Andrea caressait toujours le manche de son poignard (PIERRE-ALEXIS, VICOMTE PONSON DU TERRAIL, Rocambole, les drames de Paris, tome 1, L'Héritage mystérieux, 1859, page 315 ). Il se jetait littéralement sur le binocle; ses doigts caressaient la convexité des verres (GASTON LEROUX, Le Mystère de la chambre jaune,  1907, page 78 ). 

Remarque : [Le complément désigne une partie du corps] Se caresser la barbe, le menton (au lieu de caresser sa barbe, etc.). 

—  Par métaphore, poétique. Caresser un instrument de musique. En jouer délicatement : 

Ø 3.... Ô Myrrha,

Notre jeune Iollas, qui souvent t'admira,

Va venir près de nous, sous l'arbre qui soupire,

Dénouer nos cheveux et caresser la lyre.

THÉODORE DE BANVILLE, Les Stalactites, Idylle, 1846, page 303. 

—  Au figuré, populaire. Caresser la bouteille. Avoir un penchant pour la boisson. Ma mère, tout en gardant au capitaine une indulgence de soeur, l'invitait parfois à moins caresser les flacons d'eau-de-vie (ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, Le Crime de Sylvestre Bonnard,  1881, page 287 ). 

d) Par extension. Caresser quelqu'un ou quelque chose du regard, des yeux. Regarder tendrement : 

Ø 4. Jacques épiait avec ravissement cette métamorphose. Il caressait du regard le jeu des ombres sur le buste mobile, l'ondulation des muscles sous l'étoffe, le rythme de la respiration.

ROGER MARTIN DU GARD, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, page 366. 

2. [Le sujet désigne une chose]  Littéraire.  Effleurer délicatement. La brise, le soleil, le vent caressent quelque chose ou quelqu'un; un son caresse l'oreille. Je descendis à ma cabine : je me couchai, balancé dans mon hamac au bruit de la lame qui caressait le flanc du vaisseau (FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND, Mémoires d'Outre-Tombe, tome 1, 1848, page 245) : 

Ø 5. À peine la classe était-elle commencée, que des parfums domestiques venaient caresser l'odorat du professeur.

JULES FLEURY-HUSSON, DIT CHAMPFLEURY, Les Souffrances du professeur Delteil, 1855, page 133. 

3. Emploi pronominal.  [Le sujet désigne une personne ou un animal, plus rarement une chose dotée de mouvement] 

a) Réciproque. Je vois paisiblement nos deux institutrices se caresser, se bécotter, se disputer pour le plaisir de s'aimer mieux après (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Claudine à l'école, 1900, page 156) : 

Ø 6. C'était toujours un dessus-de-lit, bleu de roi, piqué, et recouvert d'un réseau de dentelles au point d'Angleterre. Dans ce réseau on brodait deux colombes qui se caressaient du bec;...

HENRI BOSCO, Le Mas Théotime,  1945, page 17. 

b) Réfléchi. Se caresser à quelqu'un, à ou contre quelque chose.  Se frotter doucement à, contre, etc. La douce eau contre le rivage / Se caresse nonchalamment (ANNA DE NOAILLES, Les Éblouissements,  1907, page 226) : 

Ø 7.... cette douce nuque offerte n'attendait rien ni personne : elle se caressait à ce col de veste et jouissait d'elle-même,...

JEAN-PAUL SARTRE, La Mort dans l'âme,  1949, page 117. 

B.—  Au figuré, littéraire.  [Le sujet désigne une personne] 

1. [L'objet désigne une personne (peu usité) ou une de ses qualités]  Flatter —  en bonne et en mauvaise part —  Caresser l'amour propre, l'orgueil, la vanité de quelqu'un. Madame de Talleyrand se souvint que le Garde des Sceaux caressait beaucoup l'abbé de Périgord, son fils (NICOLAS-SÉBASTIEN ROCH, DIT DE CHAMFORT, Caractères et anecdotes,  1794, page 100) : 

Ø 8.... son supérieur, le Duc de Bretagne, Jean V, le caresse et le choie, afin de lui extorquer à bas prix ses terres.

GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, Là-bas, tome 2, 1891, page 98. 

Ø 9. On décida que je prononcerais le discours d'ouverture. Ce choix flatteur caressa doucement la vanité de mon coeur...

ANATOLE-FRANÇOIS THIBAULT, DIT ANATOLE FRANCE, La Vie en fleur,  1922, page 421. 

—  Emploi pronominal réciproque.  S'adresser des propos flatteurs plus ou moins sincères (confer caresse B) : 

Ø 10. On se traite de part et d'autre [Français et Vénitiens] d'abord avec toutes les douceurs, toutes les affabilités du sourire, pour mieux se tromper : on se caresse et on ment. 

CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Causeries du lundi, tome 8, 1851-62, page 391. 

2. [L'objet désigne une abstraction]  Entretenir avec complaisance. Caresser une ambition, une chimère, un désir, une idée, une pensée, un projet, un rêve; caresser l'espoir ou l'espérance de : 

Ø 11.... il caressait le rêve d'avoir à son tour un coin de terre, où il bêcherait et planterait à son aise.

ÉMILE ZOLA, La Conquête de Plassans,  1874, page 1160. 

—  Emploi pronominal : 

Ø 12. Quel charme et quel attrait dans toutes ces précautions! Comme la curiosité s'y pique, et que l'amour-propre, sans y songer, s'y chatouille et s'y caresse!

CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Port-Royal, tome 5, 1859, page 384. 

Remarque : On rencontre dans la documentation le dérivé caressable, adjectif.  Qui accepte les caresses; docile. Jamais elle ne grondait cet enfant, espérant qu'il demeurerait un être caressable (LOUISE DE VILMORIN, La Fin des Villavide, 1937, page 137). 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 2 498. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 2 566, b) 3 707. XXe.  siècle : a) 4 226, b) 3 909. 

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