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DÉFERLER, verbe.

Publié le 12/12/2015

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DÉFERLER, verbe.  

A.—  Emploi transitif.  MARINE.  

1. Déplier (une voile ferlée) en détachant les rabans qui la tiennent serrée. Antonyme : carguer. Le vent (...) soufflant du nord-nord-ouest, je fis déferler le grand hunier (YVES-JOSEPH KERGUELEN-TREMAREC, Voyage dans les mers australes,  1782, page 59 ). 

—  Emploi adjectival du participe passé. Les voiles déferlées qui coiffaient les mâts s'enflèrent (FRANÇOIS-RENÉ DE CHATEAUBRIAND,Mémoires d'Outre-Tombe, tome 1, 1848, page 245 ). 

2. Déferler un pavillon, une voile. Le/la déployer en pesant sur sa drisse (d'après Petit dictionnaire de marine (ROBERT GRUSS) 1942 et Glossaire des termes de marine (Julien Le Clère)). 

B.—  Emploi intransitif. 

1. [Le sujet désigne une vague, une succession de vagues, la mer]  Se briser en écumant à l'approche d'un obstacle, du rivage. Une montagne d'eau qui s'élevait à la hauteur des hunes, déferlant contre la dunette, se déroula sur le pont (EUGÈNE SUE, Atar Gull,  1831, page 3 ). Les matelots se sont jetés à la mer, ayant de l'eau jusqu'aux aisselles et par-dessus la tête, quand la vague déferlait (PROSPER MÉRIMÉE, Lettres à Monsieur Panizzi, tome 2, 1870, page 317 ). La mer, d'un bleu foncé, déferlait sur une plage de coraux brisés (JULIEN VIAUD, DIT PIERRE LOTI, Le Mariage de Loti,  1882, page 230 ). De grandes vagues somptueuses déferlaient sur la plage, derrière une poussée d'embruns (JULIEN GRACQ, Un Beau ténébreux.  1945, page 180 ). 

—  Par métonymie (du tout pour la partie)  [Le sujet désigne la mer]  Déferler (absolument). Être agitée, couverte de vagues. La mer est énorme et déferle méchamment (BLAISE CENDRARS, Les Confessions de Dan Yack,  1929, page 119 ). 

·    Déferler sur (une terre).  Recouvrir, submerger. En cette minute des villages belges brûlaient, la mer déferlait sur les campagnes hollandaises (SIMONE DE BEAUVOIR, Les Mandarins, 1954, page 16 ). 

2. [Par analogie et référence au mouvement d'une vague] 

a) [Son extension progressive, son déploiement]  La houle des blés mûrs s'enfle et déferle au vent (HENRI DE RÉGNIER, Les Jeux rustiques et divins,  1897, page 215) : 

Ø 1. Déjà la troupe humaine remue dans l'ombre, aux mille bras, aux mille bouches; déjà le boulevard déferle et resplendit...

GEORGES BERNANOS, Sous le soleil de Satan,  1926, page 59. 

Ø 2.... cette écume, ces cygnes, ces fantômes, ces anges (les fleurs des arbres fruitiers), en huit jours naissent, déferlent et s'anéantissent, meurent épars.

GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Gigi,  1944, page 197. 

b) [Son bruit] :

Ø 3. C'était le frisson des feuilles froissées par la brise. Une à une je les entendais déferler comme des vagues sur le vaste silence de la nuit tout entière.

MARCEL PROUST, Les Plaisirs et les jours,  1896, page 195. 

c) [La force, la brutalité de son surgissement] 

—  Déferler contre..  Venir buter contre, se heurter à. Poussés violemment par une bise haute, les nuages déferlaient contre les sommets (JEAN GIONO, Le Bonheur fou,  1957, page 327 ). 

·    Au figuré. L'abri du drap mieux bordé, du papier fleuri contre lequel déferlaient les songes (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Le Blé en herbe,  1923, page 228 ). 

—  Déferler, déferler dans, sur, vers. 

·    [Le sujet désigne un groupe, un phénomène fait de plusieurs éléments]  Surgir, faire irruption brutalement et rapidement. Les rires, les acclamations déferlèrent. À ce moment, un flot de gens déferla de la rue de Buci vers la rue Jacob (PAUL LÉAUTAUD, Le Théâtre de Maurice Boissard, tome 2, 1943, page 65 ). Une marée de sanglots déferla dans la salle (ALBERT CAMUS, La Peste,  1947, page 1394 ). 

·    Rare.  [Le sujet désigne un seul élément]  Démarrer, bondir violemment. Un sifflet retentit (...). Le train déferla (ÉDOUARD ESTAUNIÉ, Vie secrète,  1908, page 925 ). Je m'élance, je déferle à travers les marches, les espaces (LOUIS-FERDINAND DESTOUCHES, DIT CÉLINE, Mort à crédit,  1936, page 328) : 

Ø 4.... le libre vent que rien n'arrête dans sa course à travers l'océan, et qui déferle sur la plaine avec une infrangible violence.

MAXENCE VAN DER MEERSCH, L'Empreinte du dieu,  1936, page 180. 

C.—  Au figuré. 

1. Survenir brutalement, avec une force envahissante. Pour moi, c'était sans cesse le même jour qui déferlait dans ma cellule et la même tâche que je poursuivais (ALBERT CAMUS, L'Étranger,  1942, page 1181 ). Heureusement, la colère déferla, recouvrit tout, il (Daniel) se sentit ranimé par une rage allègre (JEAN-PAUL SARTRE, L'Âge de raison,  1945, page 154 ). Cette vague d'un intense chagrin qui déferlait en elle (PAUL VIALAR, Les Brisées hautes,  1952, page 180 ). 

2. Se manifester avec force et continuement. [Le] tintamarre des 100.000 fiacres qui déferlent jour et nuit (BLAISE CENDRARS, Moravagine,  1926, page 92 ). Un flot de lettres anonymes déferlait, inondait chaque jour les bureaux (MAXENCE VAN DER MEERSCH, Invasion 14,  1935, page 450 ). La musique déferlait dans le silence avec une sorte de tendresse violente et sauvage (JULIEN GREEN, Chaque homme dans sa nuit,  1960, page 262 ). 

3. Se répandre, dans une poussée massive et continue. Endiguer le flot allemand qui déferlait à l'ouest (MARÉCHAL JOSEPH JOFFRE, Mémoires, tome 2, 1931, page 96 ). La marée de soldats identiques et anonymes qui déferle sur le quai (JULES VUILLEMIN, Essai sur la signification de la mort,  1949, page 127 ). 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 234. Fréquence relative littéraire : XIXe.  siècle : a) 63, b) 166; XXe.  siècle : a) 353, b) 637. 

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