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DÉFLORER, verbe transitif.

Publié le 13/12/2015

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DÉFLORER, verbe transitif.  

A.—  Dépouiller de sa fleur, de sa fraîcheur primitive. 

1. [Le complément désigne une personne considérée principalement dans sa valeur morale]  L'esprit de cour a déjà défloré les jeunes enthousiastes de la république! (AURORE DUPIN, BARONNE DUDEVANT, DITE GEORGE SAND, Histoire de ma vie, tome 2, 1855, page 132 ). 

—  Par métonymie.  [Les qualités affectives, morales, spirituelles d'une personne] :

Ø 1. Les rois comme les femmes croient que tout leur est dû. Quelque triste que soit ce principe, il est vrai, mais ne déflore point l'âme. Placez vos sentiments purs en des lieux inaccessibles où leurs fleurs soient passionnément admirées...

HONORÉ DE BALZAC, Le Lys dans la vallée,  1836, page 162. 

2. Par extension.  [Le complément désigne des entités abstraites]  Sachant bien que la préparation d'un plaisir ne l'assure qu'en le déflorant et que le ravissement le plus exquis saisit l'être entier par surprise (ANDRÉ GIDE, Les Nouvelles nourritures,  1935, page 281 ). 

3. Par analogie.  [Le complément désigne des choses concrètes]  Le charme (...) emprunté aux orchidées de la forêt russe que nul regard ne déflore, imprégné de leur grâce sauvage et de leur chaste parfum (EUGÈNE MELCHIOR, VICOMTE DE VOGÜÉ, Les Morts qui parlent,  1899, page 325 ). 

B.—  Faire perdre à une jeune fille la fleur de sa virginité : 

Ø 2.... j'admire les romanciers qui font déflorer des vierges harnachées dans des robes, sanglées dans des corsets, et cela, naturellement, en un tour de baiser, en un clin d'oeil, comme si c'était possible! —  Quel ennui tout de même que de se battre avec ces affutiaux, que d'errer dans les plis à empois du linge!...

GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, Là-bas, tome 1, 1891, page 241. 

—  Par exagération. Vous autres filles élevées dans le monde, vous n'arrivez jamais vierges aux bras de vos époux (...) vous ne pouvez empêcher qu'un désir, qu'un rêve ne vous viole et ne vous déflore (ALPHONSE KARR, Sous les tilleuls,  1832, page 114 ). 

—  Par analogie. C'est un être idéal, (...) elle a peur de déflorer le sentiment qu'elle a pour lui (MARCEL PROUST, Du côté de chez Swann, 1913, page 227) : 

Ø 3.... Ouvrez à vos désirs ailés d'impatience

Les portes de la vie où de vivre on commence;

Et, si vos passions ont leur virginité,

Déflorez-les sans hâte, avec pudicité.

HENRI MURGER, Les Nuits d'hiver, À un adolescent, 1861, page 157. 

—  Par métaphore.  Faire perdre à une oeuvre artistique ou à un sujet sa pureté, son caractère inédit et encore inexploré en le soumettant à l'analyse critique ou en le traitant grossièrement. Déflorer un sujet. On m'a (...) questionné sur votre ouvrage, et, sans entrer dans aucun de ces détails qui déflorent un livre avant son apparition (JEAN-JACQUES AMPÈRE, Correspondance,  1855, page 270 ). Nul être pensant n'a défloré plus d'idées, gâché plus de mots vénérables, offert aux goujats plus riche proie (GEORGES BERNANOS, Sous le soleil de Satan,  1926, page 281 ). 

Remarque : On rencontre dans la documentation a) L'emploi adjectival de déflorer : déflorant au sens de « qui déflore ». La publication prématurée et déflorante (VICTOR HUGO, Correspondance, 1859, page 309). b) Déflorateur, substantif masculin  Celui qui déflore une jeune fille.  Attesté dans Dictionnaire de l'Académie Française, Compléments 1842, DICTIONNAIRE UNIVERSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE  (LOUIS-NICOLAS BESCHERELLE) 1845, Grand dictionnaire universel du XIXe. et du XX-20e. siècle (Pierre Larousse), DICTIONNAIRE DE LA LANGUE FRANÇAISE  (ÉMILE LITTRÉ), DICTIONNAIRE DES DICTIONNAIRES  (SOUS LA DIRECTION DE PAUL GUÉRIN) 1892. Emploi adjectival.  Qui déflore. Qui pouvait résister à l'esprit déflorateur de Louis XVIII, lui qui disait qu'on n'a de véritables passions que dans l'âge mûr (HONORÉ DE BALZAC, Lys, 1836, page 278). 

STATISTIQUES : Fréquence absolue littéraire : 41. 

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