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des phrases d'une incroyable audace : « Il n'est pas plus étrange qu'un athée vive vertueusement qu'il n'est étrange qu'un chrétien se porte à toutes sortes de crimes.

Publié le 06/01/2014

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des phrases d'une incroyable audace : « Il n'est pas plus étrange qu'un athée vive vertueusement qu'il n'est étrange qu'un chrétien se porte à toutes sortes de crimes. » Reconnaître une morale aux sans-Dieu en 1682, c'était fort. Toute son oeuvre va dans cette voie, ainsi son fameux Dictionnaire historique et critique, qui pose par principe que la vérité naît de la contradiction et du croisement des points de vue divers. Il fera un journal qui sera lu dans toute l'Europe, les Nouvelles de la République des Lettres, et écrira bien d'autres d'oeuvres qui lui vaudront d'être autant haï et critiqué des catholiques que des protestants. Dans son cas, c'est bon signe. Citons enfin un nom bien moins connu encore, celui de Richard Simon (1638-1712). Ce prêtre commence sa carrière en défendant les Juifs de Metz d'une fausse accusation de meurtre d'enfant (un de ces prétendus « crimes rituels », dont on a parlé). Il s'attaque ensuite à l'oeuvre de sa vie : l'étude critique de la Bible. Il n'agit pas en athée. Il est prêtre, croyant et respectueux, mais contrairement à l'immense majorité de ses contemporains, il ne prend pas le Livre pour la transcription d'une parole de Dieu droit tombée du ciel, mais pour un texte humain dont il faut étudier l'histoire, le contexte : quand tel texte a-t-il été écrit et par qui ? Pour son malheur, son ouvrage tombe par hasard sous les yeux de Bossuet. Dès les jours suivants, il est saisi, interdit, pilonné. Mettre ensemble les notions de « critique » et de Bible ! Pour l'aigle de Meaux, c'était trop. Le pauvre Simon abandonnera tout et finira sa vie retiré dans son prieuré normand. La voie qu'il a ouverte est énorme et n'a pas cessé d'être parcourue depuis, y compris par les plus éminents spécialistes de l'Église catholique elle-même, qui acceptent désormais très officiellement que l'on voie à l'oeuvre dans la Bible des « genres littéraires ». En France, bien des écoles, bien des rues portent le nom de Bossuet, un styliste remarquable, un immense penseur et écrivain, nul n'en disconvient. Faut-il pour autant oublier celui de l'honorable Richard Simon, une des nombreuses victimes de son sectarisme ? 1 La France de la monarchie absolue, op. cit. 2 Nouvelle Histoire de la France moderne, t. 4, Seuil, 1997, une autre excellente synthèse de la période. 3 France baroque, France classique, op. cit. La Puissance et la guerre (1661-1715), « Points », Le 25 Le Code noir C'est à ce prix que nous avons mangé du sucre en Europe Les chaînes, le fouet, les marchés d'êtres humains, le travail harassant dans les champs de canne à sucre, et l'Afrique vidée de ses hommes par les méfaits du commerce le plus infâme. Selon l'expression du grand spécialiste de cette question, l'historien Olivier Pétré-Grenouilleau1, la traite négrière représente « la plus importante déportation d'êtres humains de tous les temps ». Selon un de ses confrères, Frédéric Régent, ce « commerce d'ébène », comme on l'appelait par euphémisme, pratiqué par de nombreux grands pays européens (Portugal, Pays-Bas, Danemark, France, Grande-Bretagne), a concerné du xvie au xixe siècle 11 à 12 millions d'hommes et de femmes, dont environ un sur dix sont morts pendant la traversée. Repères - 1674 : Compagnie du Sénégal, essor du commerce triangulaire - 1685 : promulgation du Code noir par Louis XIV - 1788 : création à Paris de la Société des amis des Noirs - 1794 : première abolition de l'esclavage par la Ire République - 1802 : rétablissement de l'esclavage par Bonaparte - 1848 : abolition définitive Il y a plus incroyable encore que ces chiffres terribles : l'oubli dans lequel on a voulu les faire tomber pendant si longtemps. Jusque dans les années 1980, à quoi avions-nous droit, au mieux, dans les livres d'histoire à propos de l'esclavage ? À deux lignes pour en rappeler la fin officielle dans notre pays : le décret d'abolition, arraché par son courageux sous-secrétaire d'État aux Colonies Victor Schoelcher à la jeune république de 1848. Le geste est admirable, il valut à celui qui allait devenir député de la Martinique et de la Guadeloupe de dormir à jamais au Panthéon, honneur à lui. Ne soyons pas dupes pour autant de l'intérêt qu'avait la mémoire nationale à prendre les choses dans ce sens-là : parler de l'esclavage à propos de son abolition, cela posait la France comme elle aime à se regarder, généreuse, humaniste, toujours décidée à briser les chaînes de l'oppression. Belle manoeuvre qui permettait d'effacer un peu vite une question plus navrante et pourtant évidente : si l'esclavage fut enfin aboli en 1848, c'est bien qu'il avait été autorisé, organisé, promu jusqu'à cette date incroyablement tardive, et il le fut pendant plus de deux siècles dans l'indifférence de la majeure partie de la population et de ses élites. Tâchons donc de remettre les choses à leur place en les prenant à rebours. Abordons l'esclavage non par sa fin mais par un autre grand jalon qui marque son officialisation dans notre histoire : le Code noir. C'est aussi un texte de loi. Il nous raccroche à l'époque d'où nous sortons : il est de 1685 et fut signé par Louis XIV lui-même, comme tous les actes promulgués sous son règne, il est vrai. Pendant très longtemps, il est, lui aussi, tombé dans l'oubli. Sans doute nos lecteurs d'aujourd'hui ont-ils au moins entendu mentionné son nom. Il est réapparu sur notre scène nationale à la fin du xxe siècle lors du grand débat mémoriel conduit entre autres par la députée de la Guyane Christiane Taubira pour aboutir à cette mesure de justice : faire reconnaître l'esclavage pour ce qu'il est, un crime contre l'humanité. Le Code noir, quand on le lit, est un texte assez étonnant. Il vise à régenter la vie des esclaves dans les colonies d'outre-mer qui en possèdent et commence par régler d'autres obsessions de

« 25 Le Code noir C’est àce prix que nous avons mangé du sucre enEurope Les chaînes, lefouet, lesmarchés d’êtreshumains, letravail harassant dansleschamps decanne àsucre, et l’Afrique vidéedeses hommes parlesméfaits ducommerce leplus infâme.

Selonl’expression dugrand spécialiste de cette question, l’historien OlivierPétré-Grenouilleau 1 , la traite négrière représente « laplus importante déportation d’êtreshumains detous lestemps ».

Selonundeses confrères, FrédéricRégent,ce« commerce d’ébène », commeonl’appelait pareuphémisme, pratiquépardenombreux grandspayseuropéens (Portugal, Pays-Bas, Danemark, France,Grande-Bretagne), aconcerné duxvie au xixe  siècle 11à12 millions d’hommeset de femmes, dontenviron unsur dixsont morts pendant latraversée.

Repères – 1674 : Compagnie duSénégal, essorducommerce triangulaire – 1685 : promulgation duCode noirparLouis XIV – 1788 : création àParis delaSociété desamis desNoirs – 1794 : première abolitiondel’esclavage parlaIre République – 1802 : rétablissement del’esclavage parBonaparte – 1848 : abolition définitive Il ya plus incroyable encorequeceschiffres terribles : l’oublidanslequel onavoulu lesfaire tomber pendant si longtemps.

Jusquedanslesannées 1980,àquoi avions-nous droit,aumieux, dansleslivres d’histoire àpropos de l’esclavage ? Àdeux lignes pourenrappeler lafin officielle dansnotre pays : ledécret d’abolition, arrachéparson courageux sous-secrétaire d’ÉtatauxColonies VictorSchœlcher àla jeune république de1848.

Legeste est admirable, ilvalut àcelui quiallait devenir députédelaMartinique etde laGuadeloupe dedormir àjamais au Panthéon, honneuràlui.

Nesoyons pasdupes pourautant del’intérêt qu’avait lamémoire nationale àprendre les choses danscesens-là : parlerdel’esclavage àpropos deson abolition, celaposait laFrance comme elleaime àse regarder, généreuse, humaniste, toujoursdécidéeàbriser leschaînes del’oppression.

Bellemanœuvre qui permettait d’effacerunpeu viteune question plusnavrante etpourtant évidente : sil’esclavage futenfin abolien 1848, c’estbienqu’ilavait étéautorisé, organisé, promujusqu’à cettedateincroyablement tardive,etille fut pendant plusdedeux siècles dansl’indifférence delamajeure partiedelapopulation etde ses élites. Tâchons doncderemettre leschoses àleur place enles prenant àrebours.

Abordons l’esclavage nonparsafin mais parunautre grand jalonquimarque sonofficialisation dansnotre histoire : leCode noir.C’est aussi untexte de loi.

Ilnous raccroche àl’époque d’oùnous sortons : ilest de1685 etfut signé parLouis XIV lui-même, comme tous lesactes promulgués soussonrègne, ilest vrai.

Pendant trèslongtemps, ilest, luiaussi, tombé dansl’oubli. Sans doute noslecteurs d’aujourd’hui ont-ilsaumoins entendu mentionné sonnom.

Ilest réapparu surnotre scène nationale àla fin du xxe  siècle lorsdugrand débat mémoriel conduitentreautres parladéputée dela Guyane Christiane Taubirapouraboutir àcette mesure dejustice : fairereconnaître l’esclavagepourcequ’il est, un crime contre l’humanité. Le Code noir,quand onlelit, est untexte assez étonnant.

Ilvise àrégenter lavie des esclaves danslescolonies d’outre-mer quienpossèdent etcommence parrégler d’autres obsessions de. »

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