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Fig. 5-6 : Décors Caduveo.   Les Mbaya étaient organisés en castes : au

Publié le 06/01/2014

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Fig. 5-6 : Décors Caduveo.   Les Mbaya étaient organisés en castes : au sommet de l'échelle sociale, les nobles divisés en deux ordres, grands nobles héréditaires et anoblis individuels, généralement pour sanctionner la coïncidence de leur naissance avec celle d'un enfant de haut rang. Les grands nobles se distinguaient au surplus entre branches aînées et branches cadettes. Ensuite venaient les guerriers, parmi lesquels les meilleurs étaient admis, après initiation, dans une confrérie qui donnait droit au port de noms spéciaux et à l'emploi d'une langue artificielle formée par l'adjonction d'un suffixe à chaque mot, comme dans certains argots. Les esclaves chamacoco ou d'autre extraction et les serfs guana constituaient la plèbe, bien que ces derniers aient adopté, pour leurs besoins propres, une division en trois castes imitée de leurs maîtres. Les nobles faisaient étalage de leur rang par des peintures corporelles au pochoir ou des tatouages, qui étaient l'équivalent d'un blason. Ils s'épilaient complètement le visage, y compris les sourcils et les cils, et traitaient avec dégoût de « frères d'autruche » les Européens aux yeux embroussaillés. Hommes et femmes paraissaient en public accompagnés d'une suite d'esclaves et de clients qui s'empressaient autour d'eux, leur épargnant tout effort. En 1935 encore, les vieux monstres fardés et chargés de pendeloques, qui étaient les meilleures dessinatrices, s'excusaient d'avoir dû délaisser les arts d'agrément, étant privées des cativas - esclaves - autrefois affectées à leur service. Il y avait toujours à Nalike quelques anciens esclaves chamacoco, maintenant intégrés au groupe, mais traités avec condescendance.   Fig. 7-8 : Motifs de peintures corporelles.   La morgue de ces seigneurs avait intimidé jusqu'aux conquérants espagnols et portugais, qui leur accordaient les itres de Don et Dona. On racontait alors qu'une femme blanche n'avait rien à craindre de sa capture par les Mbaya, nul guerrier ne pouvant songer à ternir son sang par une telle union. Certaines dames mbaya refusèrent de rencontrer l'épouse du vice-roi pour la raison que seule la reine du Portugal eût été digne de leur commerce ; une autre, fillette encore et connue sous le nom de Dona Catarina, déclina une invitation à Cuiaba du gouverneur du Mato Grosso ; comme elle était déjà nubile, ce seigneur, pensait-elle, l'aurait demandée en mariage et elle ne pouvait se mésallier ni l'offenser par son refus. Nos Indiens étaient monogames ; mais les adolescentes préféraient parfois suivre les guerriers dans leurs aventures ; elles leur servaient d'écuyers, de pages et de maîtresses. Quant aux dames nobles, elles entretenaient des sigisbées qui, souvent, étaient aussi leurs amants sans que les maris daignassent manifester une jalousie qui leur eût fait perdre la face. Cette société se montrait fort adverse aux sentiments que nous considérons naturels ; ainsi, elle éprouvait un vif dégoût pour la procréation. L'avortement et l'infanticide étaient pratiqués de façon presque normale, si bien que la perpétuation du groupe s'effectuait par adoption bien plus que par génération, un des buts principaux des expéditions guerrières étant de se procurer des enfants. Ainsi calculait-on, au début du XIXe siècle, que 10% à peine des membres d'un groupe guaicuru lui appartenaient par le sang. Quand les enfants parvenaient à naître, ils n'étaient pas élevés par leurs parents mais confiés à une autre famille où ceux-ci ne les visitaient qu'à de rares intervalles ; on les gardait, rituellement enduits de la tête aux pieds de peinture noire - et désignés d'un terme que les indigènes appliquèrent aux nègres quand ils les connurent - jusqu'à leur quatorzième année où ils étaient initiés, lavés et rasés de l'une des deux couronnes concentriques de cheveux dont on les avait jusqu'alors coiffés.   Fig. 9-12 : Autres motifs de peintures corporelles.   Pourtant, la naissance des enfants de haut rang était l'occasion de fêtes qui se répétaient à chaque étape de sa croissance : le sevrage, les premiers pas, la participation aux jeux, etc. Les hérauts proclamaient les titres de la famille et prophétisaient au nouveau-né un avenir glorieux ; on désignait un autre bébé, né au même moment, pour devenir son frère d'armes ; des beuveries s'organisaient, au cours desquelles l'hydromel était servi dans des vases formés de cornes ou de crânes ; les femmes, empruntant l'équipement des guerriers, s'affrontaient dans des combats simulés. Les nobles assis selon leur rang étaient servis par des esclaves qui n'avaient pas le droit de boire, afin de rester capables d'aider leurs maîtres à vomir en cas de besoin, et de prendre soin d'eux jusqu'à ce qu'ils s'endormissent dans l'attente des visions délicieuses que leur procurait l'ivresse. Tous ces David, Alexandre, César, Charlemagne ; ces Rachel, Judith, Pallas et Argine ; ces Hector, Ogier, Lancelot et Lahire fondaient leur superbe sur la certitude qu'ils étaient prédestinés à commander l'humanité. Un mythe le leur assurait, que nous ne connaissons plus que par fragments mais qui, épuré par les siècles, resplendit d'une admirable simplicité : forme la plus concise de cette évidence dont mon voyage en Orient devait me pénétrer plus tard, à savoir que le degré de servitude est fonction du caractère fini de la société. Voici ce mythe : quand l'Être suprême, Gonoenhodi, décida de créer les hommes, il tira d'abord de la terre les Guana, puis les autres tribus ; aux premiers, il donna l'agriculture en partage et la chasse aux secondes. Le Trompeur, qui est l'autre divinité du panthéon indigène, s'aperçut alors que les Mbaya avaient été oubliés au fond du trou et les en fit sortir ; mais comme il ne restait rien pour eux, ils urent droit à la seule fonction encore disponible, celle d'opprimer et d'exploiter les autres. Y eut-il jamais plus profond ontrat social que celui-là ? Ces personnages de romans de chevalerie, absorbés dans leur jeu cruel de prestiges et de dominations au sein d'une ociété qui mérite doublement d'être appelée « à l'emporte-pièce », ont créé un art graphique dont le style est incomparable à presque tout ce que l'Amérique précolombienne nous a laissé et qui ne ressemble à rien, sinon peut-être au décor de nos cartes à jouer. J'y ai déjà fait allusion tout à l'heure, mais je veux maintenant décrire ce trait extraordinaire de la culture caduveo. Dans notre tribu, les hommes sont sculpteurs et les femmes sont peintres. Les hommes façonnent dans le bois dur et bleuté du gaiac les santons dont j'ai parlé plus haut : ils décorent aussi en relief les cornes de zébu qui leur servent de asse, avec des figures d'hommes, d'autruches et de chevaux ; et ils dessinent parfois, mais toujours pour représenter des euillages, des humains ou des animaux. Aux femmes sont réservés le décor de la céramique et des peaux, et les

« Fig. 7-8 : Motifs depeintures corporelles.  La morgue deces seigneurs avaitintimidé jusqu’aux conquérants espagnolsetportugais, quileur accordaient les titres deDon etDona.

Onracontait alorsqu’une femme blanche n’avaitrienàcraindre desacapture parlesMbaya, nul guerrier nepouvant songeràternir sonsang parune telle union.

Certaines damesmbaya refusèrent derencontrer l’épouse duvice-roi pourlaraison queseule lareine duPortugal eûtétédigne deleur commerce ; uneautre, fillette encore etconnue souslenom deDona Catarina, déclinauneinvitation àCuiaba dugouverneur duMato Grosso ; comme elle était déjànubile, ceseigneur, pensait-elle, l’auraitdemandée enmariage etelle nepouvait semésallier nil’offenser par son refus. Nos Indiens étaientmonogames ; maislesadolescentes préféraientparfoissuivrelesguerriers dansleurs aventures ; elles leurservaient d’écuyers, depages etde maîtresses.

Quantauxdames nobles, ellesentretenaient dessigisbées qui, souvent, étaientaussileursamants sansquelesmaris daignassent manifesterunejalousie quileur eûtfaitperdre laface. Cette société semontrait fortadverse auxsentiments quenous considérons naturels ;ainsi,elleéprouvait unvifdégoût pour laprocréation.

L’avortement etl’infanticide étaientpratiqués defaçon presque normale, sibien quelaperpétuation du groupe s’effectuait paradoption bienplusquepargénération, undes buts principaux desexpéditions guerrièresétant de seprocurer desenfants.

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