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hommage au maître, déjeuners ou thés offerts grâce à des efforts d'autant plus touchants qu'ils supposaient des rivations réelles.

Publié le 06/01/2014

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hommage au maître, déjeuners ou thés offerts grâce à des efforts d'autant plus touchants qu'ils supposaient des rivations réelles. Les personnes et les disciplines fluctuaient au cours de ces fêtes comme des valeurs boursières, en aison du prestige de l'établissement, du nombre des participants, du rang des personnalités mondaines ou officielles qui cceptaient d'y assister. Et comme chaque grande nation avait à São Paulo son ambassade sous forme de boutique : le hé anglais, la Pâtisserie viennoise, ou parisienne, la Brasserie allemande, des intentions tortueuses s'exprimaient aussi elon que l'une ou l'autre avait été choisie. Que tous ceux d'entre vous qui jetteront les yeux sur ces lignes, charmants élèves, aujourd'hui collègues estimés, n'en essentent pas de rancune. En pensant à vous, selon votre usage, par vos prénoms si baroques pour une oreille uropéenne, mais dont la diversité exprime le privilège qui fut encore celui de vos pères, de pouvoir librement, de toutes es fleurs d'une humanité millénaire, cueillir le frais bouquet de la vôtre : Anita, Corina, Zenaïda, Lavinia, Thaïs, Gioconda, ilda, Oneïde, Lucilla, Zenith, Cecilia, et vous, Egon, Mario-Wagner, Nicanor, Ruy, Livio, James, Azor, Achilles, Decio, uclides, Milton, c'est sans ironie que j'évoque cette période balbutiante. Bien au contraire, car elle m'a enseigné une eçon : celle de la précarité des avantages conférés par le temps. Pensant à ce qu'était alors l'Europe et à ce qu'elle est ujourd'hui, j'ai appris, en vous voyant franchir en peu d'années un écart intellectuel qu'on aurait pu croire de l'ordre de lusieurs décennies, comment disparaissent et comment naissent les sociétés ; et que ces grands bouleversements de 'histoire qui semblent, dans les livres, résulter du jeu des forces anonymes agissant au coeur des ténèbres, peuvent aussi, n un clair instant, s'accomplir par la résolution virile d'une poignée d'enfants bien doués. QUATRIÈME PARTIE LA TERRE ET LES HOMMES   XII VILLE ET CAMPAGNE   À São Paulo, on pouvait s'adonner à l'ethnographie du dimanche. Non auprès des Indiens des faubourgs dont on 'avait fait la fausse promesse, car les faubourgs étaient syriens ou italiens et la curiosité ethnographique la plus voisine, une quinzaine de kilomètres, consistait en un village primitif dont la population vêtue de loques trahissait par ses heveux blonds et ses yeux bleus une origine germanique récente, puisque c'est aux environs de 1820 que des groupes de olons allemands étaient venus s'installer dans les régions les moins tropicales du pays. Ici, ils s'étaient en quelque sorte ondus et perdus dans la misérable paysannerie locale, mais plus au sud, dans l'État de Santa Catarina, les petites villes e Joinville et de Blumenau perpétuaient sous les araucarias une ambiance du dernier siècle : les rues, bordées de aisons aux toits à forte pente, portaient des noms allemands : on y parlait cette seule langue. À la terrasse des rasseries, des vieillards à favoris et à moustaches fumaient de longues pipes à fourneau de porcelaine. Autour de São Paulo, il y avait aussi beaucoup de Japonais ; ceux-ci étaient d'un abord plus difficile. Des entreprises 'immigration les recrutaient, assuraient leur passage, leur logement temporaire à l'arrivée, puis les distribuaient dans es fermes de l'intérieur qui tenaient à la fois du village et du camp militaire. Tous les services s'y trouvaient réunis : cole, ateliers, infirmerie, boutiques, distractions. Les émigrants y passaient de longues périodes dans une réclusion artiellement volontaire et systématiquement encouragée, remboursant leur dette à la compagnie et déposant leurs ains dans ses coffres. Après plusieurs années, celle-ci se chargeait de les ramener dans la terre de leurs ancêtres pour y ourir, ou, si la malaria avait eu raison d'eux auparavant, de rapatrier leur corps. Tout était organisé pour que cette rande aventure se déroulât sans qu'ils eussent jamais le sentiment d'avoir quitté le Japon. Mais il n'est pas certain que es préoccupations des entrepreneurs fussent simplement financières, économiques ou humanitaires. Un examen attentif es cartes révélait les arrière-pensées stratégiques qui avaient pu inspirer l'implantation des fermes. L'extrême difficulté u'on éprouvait à pénétrer dans les bureaux de la Kaigai-Iju-Kumiai ou de la Brazil-Takahoka-Kumiai, et plus encore dans les réseaux presque clandestins d'hôtels, d'hôpitaux, de briqueteries, de scieries, grâce à quoi l'immigration se suffisait à elle-même, enfin dans les centres agricoles, protégeait des desseins tortueux dont la ségrégation des colons en des points bien choisis d'une part, de l'autre les recherches archéologiques (méthodiquement conduites à l'occasion des ravaux agricoles, avec pour objet de souligner certaines analogies entre les vestiges indigènes et ceux du néolithique aponais) n'étaient vraisemblablement que les deux extrêmes maillons. Au coeur de la ville, certains marchés des quartiers populaires étaient tenus par les noirs. Plus exactement - puisque ce erme n'a guère de sens dans un pays où une grande diversité raciale, s'accompagnant de fort peu de préjugés, au moins ans le passé, a permis les mélanges de toutes sortes - on pouvait s'y exercer à distinguer les mestiços croisés de blanc et de noir, les caboclos, de blanc et d'indien, et les cafusos, d'indien et de noir. Les produits en vente conservaient un tyle plus pur : pénétras, tamis à farine de manioc de facture typiquement indienne, formés d'un treillis lâche de bambous refendus et cerclés de lattes ; abanicos : éventails à feu, aussi hérités de la tradition indigène, et dont l'étude est plaisante ; car chaque type représente une solution ingénieuse pour transformer par le tressage, la structure perméable et échevelée d'une feuille de palmier en une surface rigide et continue, propre à déplacer l'air quand elle est violemment agitée. Comme il y a plusieurs manières de résoudre le problème et plusieurs types de feuilles de palmier, il est possible de les combiner pour déterminer toutes les formes concevables et collectionner ensuite les spécimens illustrant ces petits théorèmes technologiques. Il existe deux espèces principales de palmes : tantôt les folioles sont distribuées symétriquement de part et d'autre d'une tige médiane ; tantôt elles divergent en éventail. Le premier type suggère deux méthodes : ou bien rabattre toutes les folioles du même côté de la tige et les tresser ensemble, ou bien tresser chaque groupe isolément, en repliant les folioles à angle droit sur elles-mêmes et en insérant les extrémités des unes à travers la partie inférieure des autres et réciproquement. On obtient ainsi deux espèces d'éventail : en aile, ou en papillon. Quant au deuxième type, il offre plusieurs possibilités qui sont toujours, bien qu'à des degrés divers, une combinaison des deux autres, et le résultat en cuiller, en palette ou en rosace, évoque par sa structure une sorte de grand chignon aplati. Un autre objet particulièrement attrayant des marchés paulistes était la figa. On appelle figa, figue, un antique alisman méditerranéen en forme d'avant-bras terminé par un poing fermé, mais dont le bout du pouce émerge entre les remières phalanges des doigts du milieu. Il s'agit sans doute d'une figuration symbolique du coït. Les figas qu'on trouvait dans les marchés étaient des breloques en ébène ou en argent, ou bien des objets grands comme des enseignes, naïvement sculptés et bariolés de couleurs vives. J'en suspendais de joyeux carrousels au plafond de ma maison, villa enduite d'ocre, dans le style romain des années 1900, située vers le haut de la ville. On y pénétrait sous une voûte de jasmin et, par-derrière, il y avait un jardin vieillot à l'extrémité duquel j'avais demandé au propriétaire de planter un bananier qui me convainquît d'être sous les tropiques. Quelques années plus tard, le bananier symbolique était devenu une petite forêt où je faisais ma récolte. Dans les environs de São Paulo, on pouvait enfin observer et recueillir un rustique folklore : fêtes de mai où les villages

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