Vocabulaire: CHAPELLE1, substantif féminin. A.— Anciennement. Lieu consacré dans lequel on conservait les reliques des saints ou les trésors des églises. La sainte Chapelle. — Par comparaison : Ø 1.... la merveille, c'est l'espèce de chapelle que la ville a bâtie pour ses archives, sombre, boisée de chêne noir avec barreaux de fer, portes de fer, coffres de fer; je dis chapelle, car elle contient de véritables reliques. JULES MICHELET, Journal, 1838, page 256. — Spécialement, usuel. Chapelle ardente* : Ø 2. On n'avait pas eu besoin de transformer un des salons en chapelle ardente car le vestibule était assez vaste. On ne voyait plus l'escalier, ni les portes, rien que du noir où des cierges brûlaient autour d'un riche cercueil, avec une profusion de fleurs blanches. GEORGES SIMENON, Les Vacances de Maigret, 1948, page 100. B.— Par extension. 1. Petite église secondaire dépendant d'une paroisse. Chapelle catholique, protestante; se rendre à la chapelle du village. Delacroix avait d'abord dressé dans la plaine la chapelle avec son clocher (RENÉ HUYGHE, Dialogue avec le visible, 1955, page 232 ). — Par personnification : Ø 3.... la chapelle nous dit : — Visiteurs de la prairie, apportez-moi vos rêves pour que je les épure, vos élans pour que je les oriente. C'est moi que vous cherchez, que vous voulez à votre insu. MAURICE BARRÈS, La Colline inspirée, 1913, page 342. — Vieilli. [Le sujet désigne un enfant] Jouer à la chapelle. Imiter par jeu les cérémonies de l'église : Ø 4. Dans sa jeunesse il [M. Bouchard] avait servi et regardait les officiers de l'âge de Lucien comme des enfants qui jouent à la chapelle. HENRI BEYLE, DIT STENDHAL, Lucien Leuwen, tome 1, 1836, page 63. · Au figuré. S'occuper avec sérieux de choses futiles. Notre école, dissidente de celle d'Enfantin qui joue à la chapelle et tombe dans le ridicule (ALFRED DE VIGNY, Le Journal d'un poète, 1830, page 904 ). — [Par analogie de forme; par référence à la voûte d'une chapelle] TECHNOLOGIE. a) BOULANGERIE. Voûte du four. b) CHIMIE. Couvercle d'un alambic. 2. Lieu consacré au culte dans un domaine hors-paroisse, public ou privé (château, hôpital, collège, etc.). Entendre la messe à la chapelle de la prison. a) Tenir chapelle. [En parlant du pape] Assister à l'office divin dans sa chapelle. b) Être en chapelle. [En Espagne, en parlant d'un condamné à mort] Assister à une dernière messe avant l'exécution (Confer Alphonse Daudet, Les Rois en exil, 1879, page 406). 3. Partie généralement adjacente d'une église dédiée à la Vierge ou à un saint, et où se trouve un autel secondaire. Chapelle Saint-Laurent. Il y eut une messe à Saint-Sulpice. Elle fut célébrée dans une chapelle latérale (ÉDOUARD ESTAUNIÉ, L'Empreinte, 1896, page 302 ). — Au figuré. Faire petite chapelle. Se mettre à part. Rester en chapelle : Ø 5.... elle [Paloma] trouva plus sage de rester « en chapelle » à la maison et de se remémorer les circonstances dans lesquelles elle avait connu Stéphanion. LÉON DAUDET, Médée, 1935, page 241. — Lieu de nature identique où sont conservées les hosties consacrées. Chapelle du Saint-Sacrement. C.— Par métonymie. 1. [Ensemble de choses] Ensemble des objets (calice, bassin, burettes, etc.) nécessaires à la célébration du culte. Ce prélat a une belle et riche chapelle (Dictionnaire de l'Académie Française), chapelle portative. 2. [Ensemble de personne] a) Ensemble des ecclésiastiques qui desservent une chapelle. La chapelle de ce prince [Charles le Téméraire] était composée de vingt quatre chantres, chapelains, clercs et demi-chapelains (LAURENT GRILLET, Les Ancêtres du violon, tome 1, 1901, page 253 ). — Au figuré, péjoratif. Synonyme : coterie*. Esprit de chapelle : Ø 6.... il n'y avait pas moins doctrinaire que ce libre groupement d'amis, très spécieusement qualifié de « chapelle » par ceux qui les jugeaient du dehors. ROGER MARTIN DU GARD, Souvenirs autobiographiques, 1955, page LXII. · Faire, former chapelle. Ce sont des milieux, me dit-il, où on fait tribu, où on fait congrégation et chapelle (MARCEL PROUST, Sodome et Gomorrhe, 1922, page 1022) : Ø 7. Ils [une bande d'amis] avaient si grand-peur de former « chapelle », que, préventivement, ils s'appliquaient à se railler, et composaient ainsi une chapelle de blague admirative, plus « chapelle » qu'aucune autre. ROGER MARTIN DU GARD, Devenir, 1909, page 27. — Spécialement. TYPOGRAPHIE, au XIXe. siècle. Association entre les ouvriers pour secourir ceux d'entre eux qui, pour des raisons de santé, étaient dans l'impossibilité de travailler. Caisse de chapelle. · Exemplaire de chapelle. Exemplaires que les typographes, en vertu d'un ancien privilège, prélevaient sur tous les ouvrages imprimés et dont la vente permettait d'alimenter la caisse de chapelle. b) Ensemble des musiciens et des chanteurs affectés à un lieu de culte. Maître de chapelle. Celui qui les dirige. Le maître de chapelle se révélait obsédé par l'amour d'une musique ignoble. (...) mais cette église était (...) un concert payant où la foi n'avait que faire (GEORGES-CHARLES, DIT JORIS-KARL HUYSMANS, En route, tome 2, 1895, page 224 ). Forme dérivée du verbe "chapeler" CHAPELER, verbe transitif. A.— Régionalisme. [L'objet désigne la faux] Battre avec un marteau spécial avant d'aiguiser : Ø 1.... un gros tronc à peine équarri, équilibré sur trois pieds rustiques, serrait entre ses fibres comme une minuscule croix byzantine l'enclume à chapeler les faux;... LOUIS PERGAUD, De Goupil à Margot, 1910, page 237. B.— Réduire en miettes la croûte du pain, en la battant ou en la râpant, pour en faire de la chapelure*. Chapeler du pain (Dictionnaire de l'Académie Française). Vous chapelerez très fin un peu de croûte brune de pain (ANDRÉ VIARD, Le Cuisinier royal, 1831, page 237 ). — Par extension. Recouvrir de chapelure : Ø 2. Levez la couenne; chapelez-le [le jambon] , décorez-le avec des ronds de carottes et de cornichons,... LOUIS-EUSTACHE AUDOT, La Cuisinière de la campagne et de la ville, 1896, page 234.
