Vocabulaire: CHATOUILLE2, substantif féminin. ZOOLOGIE. Petite lamproie d'eau douce. Dans les eaux vives, Najard promène une chatouille blanchâtre, une larve de lamproie (MAURICE GENEVOIX, La Boîte à pêche, 1926, page 262 ). Forme dérivée du verbe "chatouiller" CHATOUILLER, verbe transitif. A.— Exciter l'épiderme de quelqu'un par des attouchements réguliers provoquant facilement un rire convulsif. Chatouiller quelqu'un sur la plante des pieds : Ø 1.... il [Hassler] disait des mots drôles, et il le [Christophe] chatouillait pour le faire rire; et Christophe ne pouvait s'empêcher de rire au milieu de ses larmes. ROMAIN ROLLAND, Jean-Christophe, L'Aube, 1904, page 80. — Locution figurée. Chatouiller les côtes à quelqu'un. · Lui procurer une sensation de satisfaction : Ø 2.... il [Jeanlin] continuait à rire, plein d'un immense dédain pour Lydie et Bébert. Jamais on n'avait vu des enfants si cruches. L'idée qu'ils gobaient toutes ses bourdes, et qu'ils s'en allaient les mains vides, pendant qu'il mangeait la morue, au chaud, lui chatouillait les côtes d'aise. ÉMILE ZOLA, Germinal, 1885, page 1370. · Par antiphrase. Le frapper. — Locution pronominale. Se chatouiller pour se faire rire. Se forcer à rire alors qu'on n'en n'a pas envie : Ø 3.... rien n'est plus attristant que de voir des gens mécontents d'eux et de tout, qui se chatouillent les uns les autres pour se faire rire. ÉMILE-AUGUSTE CHARTIER, DIT ALAIN, Propos, 1907, page 25. — Par euphémisme. Chatouiller une femme. La caresser. Elle [Thérèse] était sur une vache avec un grand soldat basané, qui la chatouillait, et la serrait de très près (LOUIS ARAGON, Les Beaux quartiers, 1936, page 183 ). — Péjoratif. Provoquer une sensation souvent désagréable de démangeaison, par des attouchements ou des frottements. Madge avait appuyé sa main contre la vis de chêne. Un frottement continu lui chatouillait la peau (MARCEL SCHWOB, Le Livre de Monelle, 1894, page 46 ). Je vais jouer (...) à me chatouiller l'intérieur des narines avec la pointe d'une herbe parfumée (GABRIELLE COLLETTE, DITE COLETTE, Sept dialogues de bêtes, 1905, page 130 ). B.— Par extension. 1. Toucher quelqu'un ou quelque chose de manière à provoquer une réaction. Il [le marchand] examina les dents, chatouilla les ventres, puis demanda qu'on les [chevaux] fît sortir, pour les voir trotter (ALPHONSE DE CHATEAUBRIANT, Monsieur des Lourdines, 1911, page 234) : Ø 4.... quand ça tombait un peu trop pour son goût, il se couchait sur le ventre, au fond de la tranchée, et tu pouvais toujours lui masser les entre-côtes à coup de talon, pendant des heures, lui faire des piqûres fortifiantes avec ta baïonnette dans le gras des fesses, même lui chatouiller le dedans de l'oreille avec le canon de ton revolver, il bougeait pas, le frère!... ROGER CRÉTIN, DIT ROGER VERCEL, Capitaine Conan, 1934, page 171. — MANÈGE. Chatouiller un cheval de l'éperon. Le toucher légèrement de l'éperon. 2. Au figuré. a) Produire (sur l'ouïe, la vue, l'odorat, le goût) des sensations agréables. Cette odeur chatouille mes narines; cette nourriture chatouille mes papilles : Ø 5. Le glouton ignore le principe élémentaire de la gastronomie, l'art sublime de broyer : il avale les morceaux entiers; ils passent dans sa bouche sans chatouiller son palais, sans éveiller la plus petite idée... HONORÉ DE BALZAC, Œuvres diverses, tome 2, 1850, page 63. b) Flatter une personne ou certains de ses penchants par d'aimables paroles ou attitudes. Chatouiller l'amour-propre, l'orgueil, la vanité de quelqu'un : Ø 6.... tu peux être épousée par amour, et cela ne te suffit pas. Grand merci! Tâche de trouver mieux; je t'en souhaite. Dans ces dernières paroles de M. Levrault, il y avait bien quelque chose qui chatouillait agréablement l'orgueil de sa fille. JULES SANDEAU, Sacs et parchemins, 1851, page 12. Ø 7. [à...] : Je vous remercie, mon cher Ami, d'avoir songé à moi pour cette ouverture qui ne vous intéresse pas seulement, mais tous ceux qui vous lisent. Vous assaisonnez cela de choses bien aimables et qui me chatouillent fort. CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Correspondance générale, tome 5, 1818-69, page 580. — Absolument : Ø 8.... voilà qu'un écrivain de nos amis et qui dit être de nos confidents, publiant deux gros volumes sur le Travail intellectuel en France au XIXe. siècle, a jugé ce fait capital digne de mention. Jusque-là tout est bien, et de telles mentions chatouillent;... CHARLES-AUGUSTIN SAINTE-BEUVE, Poésies complètes, 1829, page 315. — Rare, pronominal : Ø 9. CLYTEMNESTRE. Ma petite Électre... ÉLECTRE. Je ne suis pas ta petite Électre. À frotter ainsi tes deux enfants contre toi, ta maternité se chatouille et s'éveille. JEAN GIRAUDOUX, Électre, 1937, I, 4, page 78. Remarque : On rencontre dans la documentation le substantif masculin chatouillage. Action de chatouiller. La nourriture produit, chez cette créature d'apparence idéale, une fébrilité singulière, qui se traduit par de petits rires enfantins, de petits cris insensés, de petits propos bêtement exaltés, le chatouillage fou de sa mère (Edmond et Jules de Goncourt, Journal, 1871, page 830).
