Devoir de Philosophie

Séquence 1 BAC – Texte 1 : Dom Juan (1665), Molière, Acte V, scènes 4 à 6.

Publié le 08/05/2018

Extrait du document

juan
Séquence 1 BAC – Texte 1 : Dom Juan (1665), Molière, Acte V, scènes 4 à 6. Séquence 1 – Mourir sur scène Molière… Dom Juan résumé + thème, contextualisation spacio-temporelle de la scène étudié. Dans cet extrait, Dom Juan livre son dernier combat contre Dieu en défiant la Statue et l’intervention du merveilleux donne un caractère spectaculaire à ce châtiment. Lecture analytique en trois angles : -La mort de Dom Juan, une fin attendue. -Comédie ou tragédie ? -Un dénouement dont l’interprétation est ouverte. La fin attendue de Dom Juan  Un dénouement logique Dénouement peu surprenant mais ressemblant à celui de Tirso de Molina, déjà connu des spectateurs. Dénouement inévitable : DJ a mené une vie trop immorale pour ne pas être puni. Combat inégal : Dom Juan, être de chair, contre un fantôme, immatériel et donc hors d’atteinte. La dernière réplique de Sganarelle sert de récapitulatif : « Ciel offensé »= Impiété de DJ, qui a sorti Elvire du couvent, a essayé de faire jurer un pauvre, et a fait semblant de se convertir. « Lois violées »= Meurtre du commandeur, et non-respect de la morale sociale et religieuse. « Filles séduites »= Elvire, Charlotte et Mathurine, ainsi que la fille du Commandeur. « Familles déshonorées, parents outragés »= Frères d’Elvire et père de Dom Juan. « Femmes mise à mal »= Elvire est une de ces femmes, qu’il a poussé à bout. « Maris poussés à bout »=Pierrot est l’un de ces maris, Dom Juan a courtisé sa fiancée, Charlotte. Une fin à machine, le « Deus ex machina » « Dieu issu de la machine ». Désigne la machinerie faisant entrer en scène, en le descendant des cintres, un dieu dénouant de manière imprévue une situation désespérée. Très spectaculaire dans Dom Juan, alors que ce type de fin (intervention divine + machinerie) était déjà présente dans la version de Tirso de Molina. Ici, abondance d’artifices visuels et auditifs (« Le tonnerre tombe avec un grand bruit et de grands éclairs sur Dom Juan ; la terre s’ouvre et l’abîme ; et il sort de grands feux de l’endroit où il est tombé. ») Gradation de l’intervention divine : le spectre (représente les femmes bafouées par DJ), le temps avec sa faux à la main (mort imminente de DJ), et enfin la Statue (obstacle divin qui entraine DJ dans l’abîme). Un dénouement intense et mouvementé Répliques courtes (stichomythies). La parole circule rapidement, les mouvements sont agités, serrés et vifs. DOM JUAN : Attitude de défi face au spectre (veut le frapper avec son épée). Cela marque son incrédulité. Il exprime son impossibilité totale d’entrer dans la religion. En mourant, il jure envers le Ciel qui le punit « O Ciel ! ». Il blasphème. Le champ lexical du feu (« feu », « brûle », « brasier ») désigne la chaleur qu’il ressent mais n’a ni remords ni lamentations. DJ est matérialiste. Il croit en ce dont il a fait l’expérience, surtout par les sens. L’ouïe « Je connais cette voix », la vue « je veux voir », le toucher « éprouver ». Ensuite, quand il parle avec la statue, il la touche. Mais il n’admet toujours pas la présence d’une force supérieure « Que sens-je ? ». DJ= Logique, inébranlable, incrédule, jusqu’au bout. Mouvement contradictoires : il avance (horizontal), recule (horizontal), puis disparait dans un mouvement vertical. LE SPECTRE ET LA STATUE : Sganarelle décrit les mouvements du spectre, qui est soumis à un mouvement horizontal (« Oh monsieur je le reconnais au marché ») alors que ce mouvement devrait être vertical (« Le spectre s’envole dans le temps. ») Les mouvements des personnages s’étendent aussi sur le haut et le bas, et non pas que sur l’espace scénique habituel. C’est une caractéristique du mouvement Baroque. Comédie ou tragédie ? Un dénouement tragique Comédie où des éléments de la tragédie se mêlent comme le thème et le lexique de la mort. La mort du héros suffirait à rendre cette fin tragique (cette fin était inévitable, elle était annoncée par la scène du pauvre, le rdv avec la statue (morte), et le spectre qui prend la figure du temps). Dom Juan n’est pas maitre de sa destiné, c’est le Ciel qui l’est. Dans une tragédie, le personnage est condamné à faire des choses contre sa volonté (=fatalité). Ici, le Ciel offre sa miséricorde à DJ qui refuse jusqu’à la fin, et se condamne lui-même. Il est libertin : il ne veut pas changer et va revendiquer sa liberté jusqu’à sa mort. (Représente une certaine grandeur). Sganarelle, le parallèle comique Porte les traits caractéristiques du comique : -Comique de parole : Il est superstitieux et naïf. Donne des descriptions absurdes. Répète ce que tout le monde voit ; rend ses répliques redondantes et traduit sa stupéfaction. -Comique de caractère : Peureux et prêt à tout, y compris le blasphème. Ses exclamations/interjections soulignent sa lâcheté. Il est aussi moralisateur, ce qui s’oppose à son côté lâche. Les victimes vengées qu’il énumère s’opposent à « moi seul » ; comique Opportuniste et cupide, quand à la fin il réclame ses « gages ». C’est pourtant lui qui à la dernière réplique, et qui tire la moralité de la pièce : « Voilà par sa mort un chacun satisfait ». Mélange des genres, esthétique baroque Le mélange des genres tragique et comique rend cette pièce difficile à classer. Ce qui est certain, c’est qu’elle ne suit pas les règles de la tragédie classique : la vraisemblance n’est pas respectée (Statue qui parle, spectre), la bienséance est bafouée (mort sur scène), et l’unité de lieu (plusieurs lieux) et de temps (sur plusieurs jours) ne sont pas respectées non plus. En plus s’ajoutent les registres fantastique et surnaturel. Caractéristiques du baroque : déroulement rapide des évènements, association des contraires (tragédie/comédie), thème de la mort, du temps, de l’éphémère… Un dénouement à l’interprétation ouverte L’héroïsme de Dom Juan DJ fait preuve d’une constance extraordinaire par son refus de se repentir jusqu’à la fin. Malgré Sganarelle terrifié, il s’en tient à la raison et à ses sens. (Une lucidité qui annonce/rappelle les Lumières). La répétition de la négation montre son obstination à défendre sa liberté. Il meurt en tendant la main sans hésitation vers son bourreau, la Statue. Même dévoré par le feu, il ne se repenti pas et ne demande pas pardon pour ses péchés. Il décrit juste ses sensations. Jusqu’à la mort, Dom Juan défie Dieu. Un châtiment divin spectaculaire La première lecture du dénouement serait de voir dans cet affrontement final la victoire divine sur l’impie (incroyant, blasphématoire, athée) : une fois mort, il ne peut plus rien et n’a pas pu se soustraire à son destin. On assiste là à une sorte de renversement du « Deus ex machina » habituel, ou Dieu est censé sauver le héros de la pièce. Cette mort à clairement une dimension cathartique (purgation à visée morale) ; Dom Juan meurt par le feu, élément purificateur, et on peut voir dans la sentence du Commandeur un rappel a valeur générale, pour les spectateurs : il est nécessaire de mener une vie vertueuse pour ne pas aller en enfer. Les didascalies donnant des indications visuelles sont importantes, surtout au XVIIème siècle, où elles sont rares « Le spectre change de figure », « Le spectre s’envole », « Le tonnerre tombe avec un grand bruit et de grands éclairs sur Dom Juan ; la terre s’ouvre et l’abîme ; et il sort de grands feux de l’endroit où il est tombé ». Les figures surnaturelles : -Le spectre symbolise les superstitions mais le spectateur peut hésiter en supposant que c’est Elvire « Je crois reconnaitre au marcher ». Cependant le doute n’est plus possible à parti de la didascalie « le Spectre s’envole (…) ». -La Statue du Commandeur parle, est animée, ce qui relève du merveilleux et du divin « Arrêtez, Dom Juan. Vous m’avez hier donné parole de venir manger avec moi ». La mort de Dom Juan, qui relève de l’imagerie chrétienne avec la descente en enfer, est marquée par l’ouverture de la terre, par le tonnerre et par le feu : «  un feu invisible me brûle ». Tout ici est dans la démesure visuelle et sonore, dans l’invraisemblance,… Ce sont des caractéristiques principales du baroque. Conclusion : C’est un dénouement en demi-teintes que propose Molière à la fois inattendu et prévisible, comique et tragique, conformiste et subversif : le héros est bel et bien puni pour son impiété, mais sans avoir renié la liberté qu’il a vécue toute sa vie. Un dénouement caractéristique de l’esthétique baroque où l’on retrouve l’importance de mouvements instables, la présence du surnaturel sur scène, et le non-respect des règles classiques telles que l’unité de temps, l’unité de lieu, la vraisemblance et la bienséance. C’est toute cette diversité qui fait de cette pièce une tragi-comédie qui amènera également Mozart à caractériser son Don Giovanni de Drama giocoso (drame joyeux).

Liens utiles