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Brissot, sur l'abolition de la traite des Noirs

Publié le 19/02/2013

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Très au fait de la question de l’esclavage depuis ses séjours outre-Atlantique, Brissot de Warville est l’un des précurseurs du courant anti-esclavagiste. En août 1789, lors de la venue du Britannique Thomas Clarkson, fondateur de la société anglaise des « Amis des Noirs «, il expose dans le Patriote français sa conception d’une libération progressive des « Noirs « et tente de convaincre les planteurs de l’intérêt qu’ils auraient à favoriser une telle émancipation.

L’intérêt de l’abolition de la traite des Noirs selon Brissot de Warville

 

La Société des amis des Noirs s’est assemblée hier pour la première fois, depuis la révolution du 13 Juillet. M. le marquis de Condorcet la présidait. On y a reçu, avec une satisfaction générale, le célèbre Clarkson, auteur des meilleurs ouvrages qui aient été publiés en faveur de l’abolition de la Traite des Noirs. Sa présence ne peut être que très utile à cette cause en France, dans un moment où les principes de liberté qui y règnent, ne peuvent manquer de la faire triompher.

 

 

Les ennemis des Noirs se plaisent à répandre sur cette Société, des bruits extrêmement faux, et qu’il importe de dissiper. Ils insinuent que l’objet de la Société est de détruire tout d’un coup l’esclavage, ce qui ruinerait les Colonies. Mais ce n’est point-là l’intention des Amis des Noirs. Ils ne demandent que l’abolition de la Traite des Noirs parce qu’il en résultera infailliblement que les Planteurs, n’espérant plus remettre des Noirs en Afrique, traiteront mieux les leurs. Non seulement la Société des Amis des Noirs ne sollicite point en ce moment l’abolition de l’esclavage, mais elle serait affligée qu’elle fût proposée. Les Noirs ne sont pas encore mûrs pour la liberté ; il faut les y préparer : telle est la doctrine de cette Société.

 

 

Si les Planteurs entendoient leurs intérêts, ils devraient se réunir à cette Société. Il est impossible qu’un commerce aussi infâme ne soit pas aboli. Il est possible que, s’il ne l’était pas, les Noirs se révoltent. Ce n’est point par la force qu’on les arrêtera ; c’est par un traitement plus doux, c’est par espoir de recouvrer la liberté.

 

 

[…]

 

 

Nous avons imprimé, dans une de nos feuilles, une lettre relative au projet affreux prêté à cette Société, d’envoyer douze mille fusils aux Noirs de Saint-Domingue, pour les faire révolter. Ce bruit s’était tellement accrédité au commencement de cette révolution, qu’une patrouille nombreuse enfonça l’appartement où se tient la Société et la fouilla, en l’absence de son secrétaire : elle n’y trouva que des livres, les seules armes avec lesquelles cette Société fasse la guerre aux Négociants que leur affreux commerce fait appeler vulgairement marchands de chair humaine.

 

 

Source: Brissot de Warville, le Patriote français, n° 24, 24 août 1789.

 

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