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Cambodge

Publié le 11/04/2013

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cambodge
1 PRÉSENTATION

Cambodge, en khmer Kâmpuchéa, pays d’Asie du Sud-Est. Sa capitale est Phnom-Penh.

Situé dans la péninsule indochinoise, le Cambodge est délimité au nord-est par le Laos, à l’est et au sud-est par le Viêt Nam, au sud-ouest par le golfe de Thaïlande, à l’ouest et au nord-ouest par la Thaïlande.

2 LE PAYS ET SES RESSOURCES
2.1 Relief et hydrographie

Le Cambodge a une superficie de 181 035 km². Son territoire est constitué par la cuvette centrale du Mékong et les plateaux adjacents. La plaine alluviale est occupée en son centre par le lac Tonlé Sap, dont la superficie varie de 2 600 km2 à la saison sèche à 10 400 km² à la saison des pluies. Si « l’Égypte est un don du Nil «, on peut dire du Cambodge qu’il est un don du Mékong. La plaine est entièrement drainée par ce fleuve, un drainage rendu difficile par sa pente très basse et les inondations annuelles. Le Tonlé Sap se déverse dans la rivière du même nom mais, pendant la saison sèche, il s’écoule vers le sud et se jette dans le Mékong. Lors de la saison des pluies, les eaux en crue du Mékong sont refoulées dans le Tonlé Sap, inondant ainsi le centre du pays.

Les plateaux périphériques ne représentent que le quart de la superficie du Cambodge. Au nord, on trouve en bordure du Khorat (dont la majeure partie est en Thaïlande) l’escarpement des monts Dangrek, longue muraille de grès qui domine, sur près de 300 km, la cuvette cambodgienne et dont l’altitude varie de 150 à 700 m. Son recul a laissé au milieu de la plaine des buttes témoin, les phnom, très importantes pour l’habitat, qui ont souvent choisies comme lieu d’implantation car elles seules protègent naturellement des inondations. À l’est, s’étendent les plateaux Moî, qui culminent à 1 100 m au Namlyr, dans les monts des Chhlong. Au sud-est du Tonlé Sap, le massif granitique du Phnom Aural est le point culminant du Cambodge (1 813 m) ; il précède la chaîne montagneuse des Cardamomes, qui forme un écran entre la plaine et le golfe de Thaïlande, où s’ouvre la baie de Kompong Som. La partie méridionale des Cardamomes, la chaîne de l’Éléphant, tombe en abrupt sur la mer.

2.2 Climat

Le Cambodge est soumis à l’influence de la mousson, mais dans des conditions particulières, car le pays est presque complètement entouré par des plateaux élevés. La cuvette se trouve ainsi protégée des flux humides et ne reçoit que des pluies modérées (1 400 mm en moyenne à Phnom-Penh). En revanche, les plateaux sont soumis à des conditions différentes : un climat plus froid et nettement plus humide, avec des précipitations supérieures à 2 m. Le versant maritime des monts des Cardamomes, directement exposé à la mousson, peut recevoir des précipitations supérieures à 5 m.

La succession des saisons est celle des climats tropicaux asiatiques : une saison sèche de novembre à mars, une saison particulièrement aride d’avril à mai puis, de mai à octobre, la saison pluvieuse. La température annuelle moyenne est d’environ 26,7 °C. Le niveau annuel moyen des précipitations est de 1 400 mm dans la plaine centrale et de plus de 3 800 mm dans les zones montagneuses et sur le littoral.

2.3 Flore et faune

Près des trois quarts du pays sont boisés. La végétation d’origine est une forêt tropicale décidue, caractérisée par un fort peuplement en teck, adapté aux climats à saison sèche. Sur les versants humides, on trouve la forêt dense, toujours verte. L’agriculture sur brûlis a entraîné la dégradation de la forêt en savane et en veal, des étendues d’herbe où les arbres ont presque complètement disparu. Les fonds argileux de la cuvette portent encore une forêt de marécages, plus ou moins drainée par des brèches naturelles ou humaines. Les forêts les plus denses se trouvent dans les montagnes et le long de la côte sud-ouest. Les plateaux et les hautes plaines sont des zones de savane. Tecks, arbres à gomme, kapokiers, palmiers, cocotiers et bananiers sont des essences courantes.

La faune, très riche, comprend des éléphants, des cerfs, des buffles, des panthères, des ours et des tigres.

Les ressources minérales du Cambodge sont limitées, à l’exception des phosphates et des pierres précieuses. Le Cambodge dispose d’un énorme potentiel hydroélectrique, dont le développement a été entravé par les conflits indochinois et la guerre civile.

3 POPULATION ET SOCIÉTÉ
3.1 Démographie

Environ 94 p. 100 de la population cambodgienne appartient à l’ethnie khmère. Le Cambodge abrite aussi des communautés chinoise, vietnamienne, cham, et des peuples allogènes, les Khmers Loeu (d’en haut) : les Saoch, les Pear, les Brau et les Kuy, dans les zones de montagne et sur les plateaux.

Avec une population de 14,2 millions d'habitants en 2008, le Cambodge est l’un des pays indochinois les moins peuplés (densité 80,7 habitants au km²). L’espérance de vie moyenne à la naissance est de 61,7 ans, le taux de mortalité infantile de 56,6 p. 1 000). La population s’accroît à un rythme annuel de 1,8 p. 100, et se caractérise par sa jeunesse, puisque 33,2 p. 100 p. 100 des Cambodgiens ont moins de 15 ans et seulement 5,5 p. 100 plus de 60 ans. 80,3 p. 100 des Cambodgiens vivent dans les campagnes. On estime qu’entre 1975 et 1979, la politique du régime khmer rouge a entraîné la disparition d’au moins 10 p. 100 de la population.

3.2 Découpage administratif et villes principales

Le Cambodge est divisé en vingt provinces (khet). La capitale, Phnom-Penh (1 157 066 habitants) est située à la jonction du Mékong et de la rivière Tonlé Sap. Les autres centres urbains sont Battambang (171 382 habitants), Kompong Cham (1 608 914 habitants) et Kampot. Le plus grand port est Sihanoukville, anciennement Kompong Som, sur le golfe de Thaïlande.

3.3 Langues et religions

La langue officielle est le khmer, ou cambodgien. Le français, l’anglais et le vietnamien sont également parlés.

Le bouddhisme theravada ou Hinayana (bouddhisme du « Petit Véhicule «) est la religion majoritaire (90 p. 100 de la population). Les autres religions pratiquées au Cambodge sont le catholicisme, l’islam (pratiqué par les Cham) et le bouddhisme mahayana. Les Khmers Loeu sont pour la plupart animistes.

3.4 Éducation

En raison de la guerre civile, le système éducatif a été complètement bouleversé. Les estimations indiquaient, pour 1992, un taux d’alphabétisation de 62,2 p. 100, ayant progressé à hauteur de 71,3 p. 100 en 2005. Même si certains établissements d’enseignement ont rouvert leurs portes depuis 1990, les statistiques permettent difficilement de saisir le mouvement réel.

3.5 Culture

L’héritage culturel du peuple khmer, majeur pour l’art de la péninsule indochinoise, se reflète nettement dans le Cambodge de l’ère contemporaine. De nombreux édifices (le palais royal à Phnom-Penh, par exemple) sont décorés dans le style architectural khmer et font apparaître des motifs tels que le garuda, un oiseau symbolique et mythique de la religion hindouiste. Les objets artisanaux, souvent réalisés en lamé d’or ou d’argent, reproduisent également des motifs anciens. La danse classique cambodgienne mime, dans le plus pur style traditionnel, la vie légendaire des divinités antiques. Les vestiges d’Angkor, capitale des Khmers du ixe au xve siècle, constituent l’un des sites archéologiques les plus riches et les plus remarquables du monde (voir aussi art khmer).

3.6 Institutions et vie politique
3.6.1 Historique

En avril 1975, le Cambodge tombe sous le contrôle des Khmers rouges et devient la République démocratique du Kampuchéa. En 1979, une organisation de rebelles, le Front uni national pour le salut du Kampuchéa (FUNSK), dépose le gouvernement khmer rouge avec l’appui des troupes vietnamiennes, et instaure la République populaire du Kampuchéa ; le nom du pays redevient officiellement État du Cambodge en 1989.

Après le retrait des troupes vietnamiennes en 1989 et l’intensification de la guérilla khmère rouge, les différentes factions signent en octobre 1991 les accords de Paris sous l’égide de l’ONU ; un Conseil national suprême de 12 membres est créé pour gouverner le pays sous la tutelle des Nations unies jusqu’à la tenue d’élections libres. Le prince Norodom Sihanouk est élu président du Conseil national suprême.

3.6.2 La Constitution de 1993

En septembre 1993, la nouvelle Constitution rétablit la monarchie constitutionnelle : en vertu de la Constitution, le roi règne mais ne gouverne pas. Le pouvoir exécutif est exercé par un Premier ministre nommé par le roi et issu de la majorité parlementaire. Le Parlement est constitué d’une Assemblée nationale composée de 123 membres élus au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans. Créé par une révision constitutionnelle adoptée en 1999, un Sénat regroupe 61 membres nommés par le roi ; cette chambre ne dispose que d’un simple pouvoir consultatif.

La particularité de la monarchie cambodgienne est qu’elle est élective. En effet, le roi ne désigne pas d’héritier, mais celui-ci est choisi au sein de la famille royale par le Conseil du trône, un organe composé du Premier ministre, du président de l’Assemblée nationale, des chefs des deux ordres religieux du Cambodge et des deux vice-présidents de l’Assemblée nationale.

3.6.3 Partis politiques

Le pays est dirigé depuis 1985 par Hun Sen, à la tête du Parti du peuple cambodgien (PPC), l’ancien parti unique communiste. Les autres principaux partis politiques sont le Funcinpec (Front uni national pour un Cambodge indépendant, neutre, pacifique et coopératif), parti royaliste dirigé par le prince Ranariddh Sihanouk, fils du roi Norodom Sihanouk, et le Parti de Sam Rainsy (PSR, droite).

3.7 Défense

En 1990, l’armée cambodgienne, reconstituée par le Viêt Nam, regroupait 102 000 hommes. En 2004, les effectifs des forces armées se composent de 75 000 hommes dans l’armée de terre, 2 800 hommes dans la marine et 1 500 hommes dans l’armée de l’air.

4 ÉCONOMIE
4.1 Généralités

Le Cambodge est un pays de quasi-monoculture : le riz représente la ressource essentielle du pays. La production de caoutchouc, autre atout essentiel de l’agriculture cambodgienne, a diminué quand, en 1975, le nouveau gouvernement khmer rouge a nationalisé tous les moyens de production et collectivisé l’agriculture. Les récoltes ont stagné jusqu’au début de la guerre, en 1978. Mais en 1979, la culture du riz a pratiquement été interrompue, provoquant une disette généralisée dans tout le pays. La guerre a également eu de graves conséquences dans le secteur de la petite industrie, et les réseaux de communications ont été détruits.

Au milieu des années 1980, l’agriculture et l’industrie ont recommencé à fonctionner. Mais le Cambodge n’en est pas moins resté, au début des années 2000, l’un des pays les plus pauvres du monde : en 2004, le produit national brut s’élevait à 4,8 milliards de dollars et le PNB par habitant (490 dollars) figurait parmi les plus bas du monde ; pour la période 1990-2002, le taux de croissance annuel du produit national brut atteignait 1,79 p. 100. De plus, la suspension des aides américaines a profondément handicapé le pays puisqu’il dépend largement de l’aide internationale. Aujourd’hui, le secteur textile constitue la première industrie du pays, tandis que le tourisme génère la deuxième source de revenus.

4.2 Agriculture

Le secteur agricole occupait 60,3 p. 100 de la population active en 2004 et représentait 30,1 p. 100 du PIB. La riziculture fournit la base de l’alimentation et représente le premier poste des exportations. Environ 80 p. 100 des terres cultivées (17,3 p. 100 du territoire) sont des rizières. La production de riz s’élève pour 2006 à 6 264 123 tonnes. Le Cambodge essaye de remettre en culture les surfaces abandonnées. L’hévéa (21 389 tonnes en 2006) est cultivé sur les plateaux basaltiques de l’est du pays. Les autres cultures comme le blé, le manioc (2 182 043 tonnes), le soja (98 289 tonnes), le sésame, le palmier à sucre, le poivre, la mangue, la banane et l’ananas sont essentiellement destinées à la consommation locale.

La forêt cambodgienne couvre 57,7 p. 100 du territoire, c’est dire son importance potentielle. Comme la forêt vietnamienne, elle a souffert de la guerre et d’un écobuage massif qui a permis au peuple cambodgien de survivre. Encore aujourd’hui, le bois de chauffage représente 80 p. 100 de l’énergie consommée. Les coupes (6,84 millions de m3 en 1992) ont été interdites en 1995.

Le Tonlé Sap représente l’une des plus grandes réserves de poissons d’eau douce de l’Asie du Sud-Est. La pêche, surtout en eau douce, demeure une activité économique importante ; le produit de la pêche (426 000 t en 2005) n’est pas exporté.

4.3 Mines et industries

Le secteur de l’industrie occupait 12,5 p. 100 de la population en 2004 et représentait 26,20 p. 100 du PIB. Malgré la présence de gisements d’antimoine et de fer, seules les pierres précieuses (zircon, saphir et rubis) sont extraites, en petite quantité, autour de Battambang. Les ressources minérales incluent la bauxite et les phosphates.

Le début d’industrialisation qu’a connu le Cambodge dans les années 1960 a été stoppé net par la guerre, en 1970. Le retour à la paix a permis un redémarrage de certaines activités, qui retrouvent tout juste leurs niveaux d’avant-guerre. La production industrielle n’a pour débouché que le marché intérieur. Le textile et l’habillement sont désormais les premières industries du pays et attirent en priorité les investissements étrangers.

4.4 Échanges

Le secteur des services occupait 27 p. 100 de la population active en 2004 et représentait 43,7 p. 100 du PIB. Les Khmers rouges avaient aboli la monnaie en 1978. L’unité monétaire du Cambodge, rétablie en 1980, est le riel, divisé en 100 sen (environ 5 100 riels pour 1 euro en novembre 2004). La Banque nationale du Cambodge (1980) est la banque émettrice.

En temps de paix, les principales exportations cambodgiennes sont le riz et ses dérivés, le caoutchouc, le blé et le bois. La valeur annuelle totale des exportations est passée d’environ 60 millions de dollars au début des années 1970 à 12 millions de dollars au milieu des années 1980. Elles ont depuis fortement progressées pour atteindre 2 798 millions de dollars en 2004. Les principaux produits importés par le Cambodge sont les métaux, les machines, les textiles, les minerais et les produits alimentaires ; leur valeur annuelle totale s’élevait à 2,1 milliard de dollars pour l’année 2004.

En 2004, le réseau routier cambodgien s’étendait sur 38 257 km de routes, dont 6 p.100 pavées. Une grande route moderne relie Phnom-Penh au port de Kompong Som. Une ligne de chemin de fer entre la capitale et Battambang continue au nord-est, vers la frontière thaïlandaise. Une autre voie ferrée relie Phnom-Penh et Kompong Som. Le réseau ferroviaire s’étend sur 650 km. Les voies navigables s’étendent sur environ 1 400 km à la saison des pluies et sur moins de 650 km lors de la saison sèche. Le Cambodge dispose d’une flotte de 400 navires marchands disposant d’un statut de pavillon de complaisance. Un aéroport international se trouve près de Phnom-Penh. Agrandi, il peut accueillir 1 million de passagers par an, un atout non négligeable dans la mesure où le tourisme est devenu la deuxième source de revenus du pays.

Tous les systèmes de communications importants du Cambodge sont contrôlés par le gouvernement. Le téléphone, le télégraphe et la poste ont été remis en service en 1979. En 2000, 1,3 million de postes de radio et 99 000 téléviseurs étaient répartis dans les foyers cambodgiens.

5 HISTOIRE
5.1 Les origines du peuplement

De tous les peuples indochinois, les Môn et les Khmers sont parmi les premiers à s’être installés dans la péninsule. Ce n’est qu’au premier siècle de notre ère qu’une civilisation khmère se développe, sous l’impulsion d’un processus d’indianisation très profond. C’est par le Cambodge que l’hindouisme et le bouddhisme ont pénétré dans ce qui sera plus tard l’Indochine.

5.2 Les premiers États khmers

Le premier royaume du Cambodge, appelé Funan par les Chinois, emprunte à l’inde sa langue et son écriture (le sanskrit), ses lois et ses techniques. Les souverains du Funan adoptent aussi la conception indienne du Devaraja (le Dieu-Roi). Le Funan a été fondé, au ier siècle apr. J.-C., par des populations môn-khmères. Royaume maritime et commerçant, comme le prouvent les ruines du port d’Oc-éo, sur le golfe de Thaïlande, le Funan est un lieu d’échanges important entre la Chine et l’Inde.

Le royaume de Zhenla, un royaume khmer situé au nord-est du Tonlé Sap, à l’origine vassal du Funan, s’émancipe au ve et au viie siècle, et conquiert le Funan. En 706, le Zhenla est divisé en deux royaumes khmers. La moitié nord, l’actuel Laos, devient le Zhenla de Terre et la moitié sud, le Zhenla de l’Eau (Cambodge), qui tombe sous la domination de pirates des royaumes indonésiens de Java.

5.3 Le royaume d’Angkor

C’est un prince éduqué à Java, Jayavarman II (de 802 à 850), qui rétablit un royaume khmer à Angkor. Il remet en vigueur le culte du Dieu-Roi, et son grand temple abrite un linga, symbole du dieu Shiva. Les rois d’Angkor règnent sur la majeure partie du Cambodge, de la Cochinchine et du Laos jusqu’au début du xve siècle. La capitale est au cœur d’un réseau hydraulique de grands réservoirs (baray) et de canaux destinés à acheminer l’eau vers les rizières, un système de mise en culture qui est une véritable prouesse technique. Aux xiie et xiiie  siècles, l’édifice social commence à se fissurer. Si Jayavarman VII construit la troisième Angkor (Angkor Thom), la lutte pour l’hégémonie entre hindouistes et bouddhistes déchire le royaume.

L’introduction du bouddhisme Hinayana, vers 1340, bouleverse l’ordre social et spirituel ; le pali remplace le sanskrit. Au même moment, le Laos s’émancipe et un ennemi nouveau apparaît à l’ouest, le Siam. La perte de contrôle du bassin de la rivière Chao Phraya, territoire appartenant aujourd’hui à la Thaïlande, contribue encore un peu plus à l’affaiblissement de l’empire.

Quand la Thaïlande (ou le Siam comme on l’appelait alors) détruit Angkor en 1431, la cour royale migre à Phnom-Penh. Les Siamois établissent leur contrôle politique sur le royaume khmer qui devient vassal du Siam. Quelques années plus tard, les Vietnamiens, qui ont lentement progressé vers le sud, parviennent au delta du Mékong. Désormais, le Cambodge est coincé entre deux pays voisins, le Siam et le Viêt Nam, qui cherchent à le dominer, voire à le coloniser.

5.4 Le Cambodge sous protectorat français

En 1863, la France, qui cherche à étendre son influence en Indochine, assume les droits du Viêt Nam et offre sa protection au Cambodge, de nouveau menacé par les Siamois. Le roi Norodom Ier accepte le protectorat, qui stipule que le Cambodge s’interdit toute relation avec une puissance étrangère sans l’accord de la France. Un résident général veille à l’exécution du traité. La monarchie cambodgienne reste en place mais, à partir de 1884, elle a perd de facto toute autorité fonctionnelle. Sous le règne de Sisowath, la mise en valeur et la modernisation du pays sont entreprises : construction de routes, aménagement des ports et mise en place d’infrastructures publiques. La restauration du vaste complexe d’Angkor Vat, vers 1930, contribue à raviver la fierté du peuple khmer vis-à-vis de son passé.

La Seconde Guerre mondiale a les mêmes effets au Cambodge que dans l’Indochine. L’administration française subsiste à côté de l’administration japonaise. En janvier 1941, une tentative siamoise pour reprendre les provinces perdues est écrasée par la marine française à Koh Chang ; en mars 1945, les Japonais placent sur le trône le jeune roi Norodom Sihanouk. Habile politique, il s’emploie à négocier avec la France l’indépendance du Cambodge.

5.5 Un Cambodge neutre et indépendant

Accordée le 9 novembre 1953, l’indépendance du Cambodge est totale à partir de la dissolution de l’Union économique et monétaire indochinoise, en 1954. Sihanouk fait approuver son action par référendum puis abdique, en mars 1955, en faveur de son père afin de fonder son propre parti, le Sangkum Reastr Niyum (Communauté socialiste populaire). Sihanouk est très conscient du fait que la survie du Cambodge dépend de sa politique étrangère. Pris en tenailles entre le Viêt Nam et la Thaïlande, en butte aux pressions des grandes puissances comme les États-Unis, l’URSS et la Chine, qui cherchent à consolider leurs positions dans la péninsule, Sihanouk observe une stricte neutralité. Redevenu chef de l’État en juin 1960, il réussit à protéger le Cambodge pendant plus de quinze ans. Toutefois, l’intensification du conflit qui a repris au Viêt Nam en 1959, la création de sanctuaires et de pistes de ravitaillement (la piste Hô Chí Minh) au Cambodge par les Nord-Vietnamiens et les Viêt-công durant la Guerre du Viêt Nam font finalement voler en éclats l’édifice diplomatique péniblement construit.

5.6 Le coup d’État et la création du Kampuchéa démocratique

En 1968, le Parti communiste khmer commence la lutte armée. La personnalisation du régime sihanoukiste l’affaiblit autant que le conflit vietnamien et les pressions étrangères. Le 18 mars 1970, alors que Sihanouk est à l’étranger, le Premier ministre, le général Lon Nol, fait un coup d’État, avec l’aval des États-Unis. Lon Nol donne deux jours aux Vietnamiens pour retirer leurs troupes ; c’était oublier la popularité de Sihanouk dans le monde paysan. Le 19 mars, de Pékin, il révoque le général Lon Nol et appelle à la résistance, créant le FUNK (Front uni national du Kampuchéa). Hanoï et Pékin lui accordent immédiatement leur soutien. Quatre divisions nord-vietnamiennes entrent au Cambodge. L’armée cambodgienne réplique par le massacre d’au moins 100 000 Vietnamiens du Cambodge. L’immense majorité de la paysannerie rallie le FUNK et le petit Parti communiste khmer ; le coup d’État, techniquement réussi, s’avère un échec politique complet. Malgré l’entrée des Américains et des Sud-Vietnamiens au Cambodge, les troupes du maréchal Lon Nol se retrouvent progressivement assiégées dans les villes. Le retrait des Sud-Vietnamiens en 1973 et leur remplacement par des Khmers krom (Cambodgiens vivant au Sud-Viêt Nam) ne changent rien aux données du conflit. Le 17 avril 1975, les Khmers rouges entrent dans Phnom-Penh.

L’Angkar Loeu, le Parti communiste khmer fondé dans les années 1950, n’a jamais été une organisation puissante ; en 1975, il devient le grand vainqueur. Sous la direction d’un doctrinaire et sanguinaire Saloth Sar, de son nom de guerre Pol Pot, l’Organisation suprême entreprend de vider les villes de ses habitants et de ruraliser le Cambodge par la force. Les Khmers rouges isolent le Cambodge, qui se transforme en un gigantesque camp de travail forcé. Leur brutalité, qui a entraîné la mort de sans doute plus de deux millions de personnes, sert de prétexte avoué à Hanoï pour envahir le pays, en décembre 1978. Le pouvoir revient à la fraction provietnamienne du PCK, à Heng Samrin, chef du Conseil de l’État, puis à Hun Sen, sous la protection intéressée du Viêt Nam. Cependant, les Khmers rouges poursuivent la résistance — en particulier dans les régions proches de la frontière thaïlandaise — et ils conservent leur siège à l’ONU.

5.7 La restauration de l’État cambodgien
5.7.1 Traité de paix et Conseil national suprême

En septembre 1989, le Viêt Nam retire ses troupes du Cambodge alors que, avec la fin de la guerre froide, l’occupant ne bénéficie plus du soutien financier soviétique. Ce retrait laisse le régime de Hun Sen dans une situation plus que précaire : privé de toute aide étrangère substantielle, le gouvernement cambodgien est de plus aux prises avec la guérilla khmère rouge. C’est dans ce contexte que la République populaire du Kampuchéa abandonne officiellement la voie du socialisme, qu’elle redevient l’État du Cambodge et introduit des réformes visant à attirer les investissements étrangers et à augmenter la popularité du parti unique, rebaptisé Parti du peuple cambodgien (PPC).

Le 23 octobre 1991, les belligérants signent à Paris un traité de paix qui institue un Conseil national suprême (CNS) représentant les différentes factions cambodgiennes et chargé de gouverner provisoirement le pays sous la tutelle de l’ONU. Norodom Sihanouk revient au Cambodge, et est nommé président du CNS.

En mai 1993 — et pour la première fois depuis 1972 — des élections législatives multipartites ont lieu. Elles donnent un avantage relatif au Funcinpec (Front uni national pour un Cambodge indépendant, neutre, pacifique et coopératif), parti royaliste, au détriment du PPC de Hun Sen. Tandis que le Premier ministre sortant refuse de céder le pouvoir, une coalition est formée entre les deux plus grands partis, au sein de laquelle Norodom Ranariddh (chef du Funcinpec et fils de Sihanouk) et Hun Sen sont nommés Premier ministre.

5.7.2 Norodom Sihanouk, roi du Cambodge

En septembre 1993, la nouvelle Constitution est ratifiée, et Norodom Sihanouk est proclamé roi. Malgré les efforts de plusieurs pays, tels que la France et le Japon, la reconstruction du royaume cambodgien reste freinée par un état de guerre larvée et par le développement du banditisme. En outre, plusieurs millions de mines bloquent la reprise des activités agricoles dans les régions rurales.

Le ralliement au gouvernement d’un des principaux dirigeants khmers rouges, Leng Sary, en juillet 1996, entraîne cependant un profond bouleversement de la situation politique. Très affaiblis par cette défection, les Khmers rouges, déclarés hors-la-loi par l’Assemblée nationale depuis 1994, se divisent sur la conduite à tenir. Pol Pot, le chef historique des Khmers, est arrêté et démis de ses fonctions par ses plus proches lieutenants en juillet 1997. Jugé par un tribunal populaire khmer rouge, il est condamné à la prison à perpétuité. Cet événement, qui marque la fin de Pol Pot, révèle également la profonde déliquescence des Khmers rouges qui ne paraissent plus en mesure de poursuivre la lutte armée.

En vue des élections prévues en juillet 1998, les deux partis de la coalition au pouvoir tentent alors de rallier les anciens Khmers rouges. Inquiet de voir une alliance s’esquisser entre le Funcinpec et les Khmers rouges, Hun Sen évince le prince Ranariddh en juillet 1997, par un coup de force sanglant. Il devient le maître du pays, malgré la réprobation de la communauté internationale. L’isolement du pays aggrave une situation économique catastrophique.

Les élections législatives de juillet 1998 signent la victoire du PPC sans pour autant donner à Hun Sen la majorité nécessaire pour gouverner seul. Marqué par une sanglante campagne d’intimidations, ce scrutin est suivi par de violents affrontements entre les forces de l’ordre et les manifestants de l’opposition qui crient à la fraude. Le roi Norodom Sihanouk dirige alors des négociations qui débouchent sur un accord politique en novembre 1998. Cet accord prévoit la formation d’un gouvernement de coalition présidé par Hun Sen, le prince Ranariddh se voyant octroyé la présidence de l’Assemblée nationale. La création d’un Sénat est également décidée. Ce processus de stabilisation de la situation politique encourage l’Association des nations du Sud-Est asiatique (Ansea) à admettre le Cambodge dans ses rangs en avril 1999.

5.7.3 La fin du mouvement des Khmers rouges

Parallèlement, la décomposition du mouvement khmer rouge s’accélère. La mort de Pol Pot, le 15 avril 1998, semble annoncer la fin définitive du mouvement. Les deux chefs historiques khmers rouges (Khieu Samphan et Nuon Chea) se rallient au gouvernement en décembre 1998, tandis que le dernier des chefs khmers rouges en fuite, Ta Mok, est arrêté le 6 mars 1999 par les autorités cambodgiennes. Le processus de reconnaissance du génocide perpétré par les Khmers rouges est marqué en janvier 1999 par la demande officielle du Premier ministre Hun Sen (pourtant un ancien Khmer rouge) auprès des Nations unies d’organiser un procès pour crimes contre l’humanité afin de juger les Khmers rouges et le régime de Pol Pot. Le roi Norodom Sihanouk, qui a longtemps cautionné le régime khmer, se déclare également prêt à comparaître devant un tribunal national ou international.

Le gouvernement cambodgien tarde cependant à organiser le procès des responsables khmers rouges. La crainte de voir reprendre le conflit (si l’amnistie de certains anciens chefs khmers est remise en cause) ainsi que le passé khmer de nombreux dirigeants du PPC expliquent en grande partie ces atermoiements. Laborieuses, les négociations entre l’ONU et les dirigeants cambodgiens achoppent en particulier sur le degré du contrôle exercé par les juges internationaux au sein du futur tribunal. Après de nombreux échecs, elles aboutissent au printemps 2003 à un accord prévoyant la mise en place d’un « tribunal cambodgien à caractère international « composé majoritairement de juges cambodgiens, mais dont les décisions ne pourront être prises qu’avec l’accord d’au moins un juge international.

Cet accord intervient à l’approche des élections législatives de juillet 2003, qui doivent apporter au Premier ministre Hun Sen la légitimité qui lui manque. Le PPC de Hun Sen obtient 73 sièges sur 123, contre 26 sièges pour le Funcinpec et 24 sièges pour le principal parti d’opposition, le Parti de Sam Rainsy (PSR, droite). Ne disposant pas de la majorité des deux tiers nécessaire pour former seul l’exécutif, Hun Sen peine à s’assurer le soutien des royalistes. Ce n’est qu’un an plus tard, en juillet 2004, à l’issue de longues tractations, que le Parlement approuve un gouvernement de coalition entre le PPC et le Funcinpec.

La formation de ce nouveau gouvernement permet, en août 2004, la ratification par le Parlement cambodgien de l’entrée du pays dans l’Organisation mondiale du commerce (OMC), approuvée en septembre 2003. Le Cambodge était candidat à l’adhésion depuis 1994.

5.7.4 Norodom Sihamoni, roi du Cambodge

En octobre 2004, le roi Norodom Sihanouk crée la surprise en annonçant son abdication. À 81 ans, il entend ainsi régler sa succession de son vivant. Le 14 octobre, Norodom Sihamoni, fils de Sihanouk et candidat favori du couple royal, est élu roi du Cambodge à l’unanimité des neuf membres du Conseil du trône. Âgé de 51 ans, chorégraphe et cinéaste, Norodom Sihamoni a longtemps été éloigné de la vie politique cambodgienne. Réticent à accepter le trône, il apparaît comme une personnalité neutre, loin des clivages politiques qui divisent le Cambodge. Son rôle demeure toutefois essentiel, dans un pays fortement attaché à la monarchie et à son prestige.

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