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Chine

Publié le 11/04/2013

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1 PRÉSENTATION

Chine, en chinois Zhongguo, pays d’Asie orientale. Sa capitale est Pékin (Beijing), et sa plus grande ville, Shanghai.

La Chine est délimitée par 15 000 km de frontières terrestres partagées avec 14 pays, et une façade maritime de 14 500 km. Elle est bordée, au nord, par la Russie et la Mongolie ; au nord-est, par la Russie et la Corée du Nord ; à l’est, par la mer Jaune et la mer de Chine orientale ; au sud, par la mer de Chine méridionale, le Viêt Nam, le Laos, la Birmanie, l’Inde, le Bhoutan et le Népal ; à l’ouest, par le Pakistan, l’Afghanistan et le Tadjikistan ; au nord-ouest, par le Kirghizistan et le Kazakhstan. La Chine possède 2 900 îles, dont Hainan (33 991 km²), la plus importante, située en mer de Chine méridionale. Au sud-est de la Chine, séparée du continent par le détroit de Taïwan, se trouve Taïwan, revendiquée par la Chine comme 23e province du pays.

2 MILIEU NATUREL
2.1 Relief

La République populaire de Chine est la troisième nation du monde par sa superficie (après la Russie et le Canada) et la première par sa population. La superficie totale du pays est d’environ 9 571 300 km². Véritable État-continent, la Chine s’étend entre 18° et 54° de latitude nord, et entre 74° et 135° de longitude est. Ce pays immense, en forme de croissant échancré, s’étire sur une longueur maximale de 5 200 km d’est en ouest, et atteint une largeur de 5 500 km du nord au sud. Une telle extension longitudinale et latitudinale explique la grande diversité des milieux naturels. La majeure partie du pays possède un relief montagneux : 84 p. 100 du territoire se trouvent à plus de 500 m d’altitude et près de 43 p. 100 à plus de 2 000 m. Les plateaux occupent 26 p. 100 de la superficie du pays ; les bassins, généralement accidentés et situés dans les régions arides, environ 19 p. 100 ; les plaines ne couvrent que 12 p. 100 du territoire.

Le pays présente un étagement des reliefs, l’altitude s’abaissant, par gradins successifs, d’ouest en est, jusqu’à la mer. Les reliefs les plus élevés se trouvent dans la partie occidentale du pays (Tibet, Xinjiang) où sont situées certaines des chaînes de montagnes les plus hautes du monde : le Tian shan oriental et l’Altaï au nord-ouest ; le Pamir et le Karakorum à l’extrême ouest ; les monts Kunlun au centre ; l’Himalaya au sud-ouest. Elles montrent, pour la plupart, une orientation est-ouest. Dans cette zone ont été recensés près de 45 000 glaciers occupant 58 000 km2.

L’orogenèse du Tian shan, des monts Kunlun, ainsi que du Qin ling, dans le centre du pays (province du Shaanxi), a commencé durant le paléozoïque, à la fin du carbonifère, et s’est achevée au Permien. L’Himalaya, qui longe le sud du Tibet, est de formation plus récente. Le soulèvement himalayo-alpin a débuté au cours de l’oligocène, pendant l’ère tertiaire, il y a environ 40 millions d’années. Il est dû à la rencontre de la plaque indienne et de la plaque tibétaine.

Au cours du quaternaire, l’activité tectonique s’est manifestée par de violents séismes. La sismicité est toujours très active, surtout le long d’une diagonale nord-est / sud-ouest s’étirant depuis le « Bassin rouge « du Sichuan jusqu’au golfe de Bohai, sur la mer Jaune, et, au-delà, jusqu’au Grand Hinggan (ou Da Hinggan ling), en Mandchourie.

On distingue, d’ouest en est, trois grands paliers topographiques, en fonction de leur altitude moyenne, présentant chacun une grande diversité géomorphologique.

2.1.1 Le plateau tibétain

Le palier le plus élevé, d’une altitude moyenne de 4 500 m, englobe, au sud-ouest, le haut plateau montagneux et désertique du Tibet, au sol gelé en profondeur (permafrost), qui s’étend sur la région autonome du Tibet et sur une partie des provinces du Qinghai, du Sichuan et du Gansu. Il est bordé par l’Himalaya au sud, le Pamir et le Karakorum à l’ouest, les monts Kunlun, les Altun shan et les Qilian shan au nord, et les « Alpes « du Sichuan au sud-est. Les principaux fleuves d’Asie orientale et méridionale (Indus, Gange, Brahmapoutre, Mékong, Yang-tseu-kiang, Huang He, Salouen) y prennent leur source.

Le Pamir, qui marque la frontière avec le Tadjikistan, culmine en Chine à 7 719 m d’altitude, au sommet du Kongur Tagh. Le Karakorum, qui forme la frontière avec l’Inde et le Pakistan, culmine au sommet du K2 (ou mont Godwin Austen), le deuxième plus haut sommet du monde (8 611 m),sur la frontière sino-pakistanaise.

Les monts Kunlun et les Altun shan marquent la frontière entre les régions autonomes du Tibet et du Xinjiang. Les monts Kunlun s’étirent sur 3 000 km de long et se prolongent dans le Qinghai. Le sommet le plus élevé est l’Ulugh Muztag (6 973 m). Les Altun shan s’étirent sur 800 km. Culminant à 7 439 m d’altitude, elles se prolongent à l’est par les Qilian shan (point culminant : 5 547 m) et les Nan shan. Au nord-est du plateau tibétain se trouve le bassin fermé de Qaidan, entre les monts Kunlun au sud et le système montagneux Altun shan-Qilian shan au nord.

L’Himalaya, qui forme la frontière avec l’Inde, le Népal et le Bhoutan, s’étire sur près de 2 400 km de long et 250 km de large. Il comprend, dans sa partie septentrionale, une centaine de montagnes de plus de 7 000 m d’altitude, dont le plus haut sommet du monde, l’Everest (8 850 m) partagé entre le Tibet (faces nord et nord-ouest) et le Népal. Le soulèvement de l’arc himalayen se poursuit de nos jours au rythme de 5 mm par an.

2.1.2 La Chine du Nord-Ouest et la Chine centrale

Les hauts reliefs du Tibet dominent, au nord et à l’est, un second palier, d’une altitude moyenne de 1 500 m environ, correspondant à la Chine du Nord-Ouest et à la Chine centrale.

La Chine du Nord-Ouest est une région aride, aux paysages souvent désertiques et à la topographie très compartimentée. Elle correspond au Xinjiang et à une partie du Qinghai. Elle comprend une suite de bassins ou dépressions presque entièrement fermés, enserrés entre de hautes montagnes (Altaï, Tian shan oriental, Pamir, monts Kunlun, Altun shan) : bassin de Djoungarie au nord, bassin du Tarim au sud, et bassin de Turfan à l’est.

Le Tian shan oriental, partie chinoise du système montagneux du Tian shan (environ 2 500 km de long), culmine à 7 439 m d’altitude au sommet du pic Pobedy, à la frontière avec le Kirghizistan. À l’extrême nord, l’Altaï chinois culmine à 4 374 m d’altitude.

Le bassin du Tarim, entouré par le Tian shan oriental au nord, le Pamir à l’ouest, et les monts Kunlun au sud, comprend la région du Lob nor (marais salants) et, surtout, l’immense désert de sable du Taklamakan (environ 360 000 km²), désert de type continental, le plus sec de toute l’Asie, dont les dunes peuvent atteindre 100 m de hauteur.

Le bassin semi-désertique de Djoungarie, lieu traditionnel de passage entre la Chine et l’Asie centrale, est enserré par les massifs montagneux de l’Altaï au nord et du Tian shan oriental, au sud, tout comme la dépression de Turfan, plus au sud, située en dessous du niveau de la mer (- 154 m).

À l’est s’étendent les hauts plateaux de la Chine centrale depuis les marches mongoles au nord (Mongolie-Intérieure, Shaanxi, Shanxi, Ningxia, Gansu), jusqu’aux plateaux de la Chine du Sud (Yunnan, Guizhou, Guangxi). Ils sont limités à l’est par la diagonale montagneuse formée par les chaînes du Grand Hinggan (au nord-est), des Taihang shan, des Wu shan et des Xuefeng shan (au sud).

Les plateaux septentrionaux, limités au sud par le Qin ling, correspondent à la bordure méridionale et orientale du désert de Gobi (plateau Mongol) et aux hauts plateaux du Shaanxi, du Shanxi, du Ningxia, du Hebei et du Henan, parmi lesquels le plateau désertique de l’Ordos, circonscrit dans la boucle du Huang He. Excepté le plateau Mongol et la partie nord du plateau de l’Ordos, ils sont recouverts d’un fin limon d’origine éolienne, le lœss. Peu compact, le lœss, épais de 200 m, est très sensible à l’érosion (ravinement), la surface des plateaux étant incisée par de nombreux ravins aux parois verticales.

Débordant sur le Xinjiang, la Mongolie-Intérieure et le Gansu, le désert de Gobi est un désert de sable et de pierres de type continental. Il s’étend sur le plateau Mongol, situé entre 800 et 1 200 m d’altitude. La végétation devient steppique sur ses marges.

La chaîne du Grand Hinggan, au nord-est, couverte de forêts, s’étend sur 1 200 km du nord-est au sud-ouest et culmine à 2 091 m d’altitude.

Plus au sud, le Qin ling s’étend d’ouest en est sur près de 1 500 km. D’une altitude moyenne de 2 000 m, il culmine au sommet du Taibai shan (3 767 m). Ce massif marque, avec la moyenne et la basse vallée du Yang-tseu-kiang, la frontière naturelle entre le nord et le sud de la Chine.

Région de collines relativement isolée, vouée à la riziculture intensive, le bassin intramontagneux du Sichuan (« Bassin rouge «) sépare les plateaux lœssiques septentrionaux des plateaux calcaires de la Chine du Sud. Très érodés, ceux-ci se caractérisent par leur relief karstique. Le plateau du Yunnan-Guizhou est bordé à l’ouest par une succession de chaînes montagneuses séparées par des gorges profondes et abruptes (vallées du Salouen et du Mékong). L’est du Guizhou et le Guangxi (région de Guilin notamment) comporte certains des plus beaux paysages du monde (karst à tourelles).

2.1.3 La Chine orientale et insulaire

Les hauts plateaux de la Chine centrale dominent à l’est un ensemble de collines (au sud-est) et de plaines alluviales (au nord-est et à l’est), caractérisé par de larges vallées, d’une altitude moyenne de 500 m.

Au nord-est se trouve la Mandchourie (provinces du Heilongjiang, du Jilin et du Liaoning), ensemble de plaines (350 000 km2) aux sols noirs très fertiles (tchernoziom), bordées par les massifs du Grand Hinggan, à l’ouest, du Petit Hinggan, au nord, et des Changbai shan, au sud-est, et qui se prolongent, au sud, par les collines de la péninsule du Liaodong. La taïga y est le paysage végétal dominant. Mal connue jusque dans les années 1950, cette région est la plus grande réserve forestière de la Chine. Le Petit Hinggan (ou Xiao Hinggan ling) est un massif peu élevé d’une altitude moyenne de 600 à 800 m. Les Changbai shan, qui forment une partie de la frontière avec la Corée du Nord, constituent un système montagneux dominé par le volcanisme. Ce vaste plateau basaltique (500 km sur 250 km) supporte le volcan le plus élevé de la Chine du Nord-Est, le Paektu shan (2 744 m).

Au sud de la Mandchourie s’étend la Grande Plaine du Nord (provinces de Hebei, Henan, Shandong, Jiangsu, et Anhui), la plus vaste plaine de Chine, construite par les alluvions du bas Huang He. Cette plaine alluviale, aux sols très fertiles (lœss, limons), est occupée par des cultures intensives. On distingue au nord le bassin du Hai he, au centre la plaine et le vaste delta du bas Huang He, qui se jette dans le golfe de Bohai, et au sud le bassin de la Huai. À l’est s’élèvent les collines de la péninsule du Shandong, à une altitude comprise entre 400 et 1 000 m.

Plus au sud, la plaine centrale, formée par la vallée du bas et du moyen Yang-tseu-kiang (Jiangsu, Zhejiang, Anhui, Hubei), est une succession de bassins aux sols alluviaux fertiles. Ces basses terres sont drainées par de nombreux cours d’eau naturels et artificiels, et parsemées de lacs, comme dans le Hubei.

Au sud du Yang-tseu-kiang, la Chine du Sud-Est présente un relief accidenté de collines, entaillées par des vallées étroites et encaissées. On distingue plusieurs chaînes montagneuses de faible altitude (Nan ling, Wuhi shan, Donggang shan), d’orientation nord-est / sud-ouest. Parallèles à la côte, elles se caractérisent par un relief de type appalachien.

Au sud des Nan ling, fortement déboisées et érodées, s’étend le bassin du Xi jiang et le large delta du Zhu jiang (la rivière des Perles), faisant face à l’île de Hainan. La côte méridionale, très accidentée, est découpée, jusqu’à la hauteur de Shanghai, par de nombreuses baies et bordée par une multitude d’îles et d’îlots.

2.2 Hydrographie
2.2.1 Les fleuves

La Chine possède 5 000 fleuves et rivières dont 1 500 ont un bassin hydrographique d’une superficie supérieure à 1 000 km2. La longueur du réseau fluvial chinois atteint, au total, 220 000 km dont 95 000 km de voies navigables. Le débit total est équivalent à celui de l’Europe, soit 2 700 milliards de m3.

La plupart des grandes rivières chinoises prennent naissance sur les hauteurs du plateau tibétain et s’écoulent vers l’est ou vers le sud, délaissant les espaces arides de la Chine occidentale.

Les quatre plus grands fleuves de la Chine, par l’importance de leur bassin de drainage, sont le Yang-tseu-kiang, l’Amour, le Huang He et le Xi jiang.

Le Yang-tseu-kiang (ou Chang jiang) est le plus long fleuve d’Asie (6 300 km). Il draine un bassin gigantesque de 1 800 000 km², soit 18,8 p. 100 du territoire chinois. Navigable sur près de 941 km, il constitue une importante artère de communication entre Shanghai et le Sichuan. Il prend sa source sur le plateau tibétain, dans les monts Kunlun, puis traverse le centre de la Chine. Ses principaux affluents sont le Min jiang, le Jialing jiang, le Xiang jiang et le Han shui. Son débit moyen (34 000 m3/s à son embouchure) est très supérieur à celui du Huang He. Son cours moyen et inférieur connaît des crues parfois catastrophiques, en avril et en septembre, malgré d’importants travaux d’endiguement. Lors de sa traversée du bassin du Sichuan, où il se charge d’alluvions rouges, sa turbidité devient très forte, avec une charge moyenne alluviale de 1 090 g/m3. Il se jette dans la mer de Chine orientale, à proximité de Shanghai, par un vaste delta qui, sans cesse alimenté par les dépôts de boues et de sédiments (plus de 170 millions de m3 par an), gagne progressivement sur la mer.

L’Amour (4 416 km), ou Heilong jiang en chinois (« fleuve du Dragon noir «), est le quatrième plus long fleuve d’Asie et le plus septentrional de la Chine. Il draine, avec ses affluents, une superficie de 1 620 000 km2. Il constitue, sur presque 1 600 km, une grande partie de la frontière nord-est avec la Russie. L’Amour naît de la confluence de l’Argoun, qui prend sa source dans le Grand Hinggan, et du Chilka, venant de Mongolie. Il se jette en Russie, sur la côte orientale de la Sibérie, dans le détroit de Tatarie (mer d’Okhotsk). Son principal affluent en Chine est le Soungari (1 850 km), qui draine la plaine mandchoue.

Berceau de la civilisation chinoise, le Huang He (5 464 km) est le principal fleuve de la Chine du Nord. Comme le Yang-tseu-kiang, il naît sur le plateau tibétain, dans les monts Kunlun. Son bassin hydrographique couvre une superficie de 750 000 km2. Son tracé sinueux le conduit jusqu’au golfe de Bohai, dans la mer Jaune. Lors de sa traversée des plateaux lœssiques, il se charge d’alluvions d’où son surnom de « fleuve Jaune «. Ses principaux affluents sont le Fen he et le Wei he. Son débit irrégulier (1 500 m3/s en moyenne, jusqu’à 20 000 m3/s en période de crue) en fait un fleuve capricieux et dangereux. Le Huang He est en effet réputé pour ses inondations dévastatrices qui ont régulièrement frappé le pays au cours de l’istoire et qui lui ont valu le qualificatif de « Chagrin de la Chine «.

Le bas Huang He a souvent changé de cours à la faveur de grandes inondations. Au début du xixe siècle, il se jetait dans la mer Jaune, au sud de la péninsule de Shandong. Il retrouva son cours actuel (abandonné au xive siècle) en 1851. Son taux de turbidité, très élevé, est responsable de l’envasement et de l’exhaussement du lit du fleuve, qui s’élève dangereusement à parfois plus de 10 m au-dessus de plaines surpeuplées. Aujourd’hui, le Huang He est endigué dans son cours inférieur. Cependant, lors des deux périodes de crues annuelles, liées à la fonte des neiges (mars-avril) et à la mousson (juin à septembre), les digues peuvent se rompre, donnant lieu à de graves inondations.

Le Xi jiang (2 100 km), dont le bassin hydrographique couvre une superficie de 448 000 km2, est le plus grand fleuve de la Chine du Sud. Il prend sa source dans les montagnes du Yunnan et arrose le Guangxi et le Guangdong. Il se jette dans la mer de Chine méridionale, sous le nom de Zhu jiang (ou rivière des Perles), en aval de Canton, par un vaste delta aux sols alluviaux très fertiles, sillonné par de multiples bras et canaux. Ses principaux affluents sont le Xiang, le Kuai, le Bei et le Dong. Navigable sur la quasi-totalité de son cours, le Xi jiang constitue l’une des plus importantes voies de communication de la Chine.

La Chine occidentale, fortement marquée par l’aridité, est faiblement drainée. Les rivières sont rares et se caractérisent par un écoulement endoréique (elles ne se jettent pas dans la mer). Elles alimentent les bassins arides de l’ouest et du nord, où elles s’évaporent ou s’infiltrent pour former de profondes nappes aquifères. Le plus important de ces cours d’eau est le Tarim (2 000 km). Il draine, avec ses affluents, une superficie de 198 000 km2. Il prend sa source dans le Karakorum, puis traverse le désert du Taklamakan, avant de se perdre dans la cuvette marécageuse du Lob nor. De nombreux cours d’eau temporaires viennent alimenter les oasis du désert du Taklamakan lors de la fonte des neiges dans le Tian shan et les monts Kunlun.

La quasi-totalité du réseau fluvial chinois est soumise au régime de la mousson d’été, à l’origine d’inondations récurrentes. Les autorités chinoises mènent depuis très longtemps de gigantesques travaux visant à développer l’irrigation, à réguler les crues (endiguement, barrages-réservoirs, dérivations), à favoriser le transport fluvial (dragage, canaux) et, plus récemment, à développer l’hydroélectricité.

C’est ainsi que le Grand Canal (1 900 km), voie fluviale artificielle creusée à partir du ve siècle av. J.-C. et achevée au xiiie siècle apr. J.-C., relie Pékin à Hangzhou. Il constitue le plus long système de canaux du monde. Récemment, 140 000 km de canaux ont été créés dans les plaines septentrionales, dont le canal de la Victoire du Peuple, qui évacue une partie des eaux du Huang He.

En 1955, un plan d’aménagement du Huang He prévoyait la construction de 46 barrages, dont certains ont vu le jour (San Men, Liujiaxia, Sanmenxia, Qingtongxia). Ce fleuve est également régulé par des bassins de retenue, comme celui de Longmen qui possède une capacité de 35,4 milliards de m3 d’eau. Il en existe plus de 2 000 dans le pays. Ceux du Yang-tseu-kiang (lacs de Dongting hu et de Poyang hu) s’ajoutent à d’importants lacs de barrages hydroélectriques, comme à Ghezhouba.

2.2.2 Les lacs

La Chine possède un grand nombre de lacs, dont beaucoup sont situés dans les bassins intermédiaire et inférieur du Yang-tseu-kiang, notamment les trois plus grands lacs d’eau douce du pays : le Dongting hu (3 700 km²), le Poyang hu (2 780 km2) et le Tai hu, dans le delta du Yang-tseu-kiang. En été, durant la saison des pluies (mousson), le Dongting hu et le Poyang hu servent de réservoir naturel, ce qui entraîne une augmentation de leur superficie (5 000 km2 pour le Poyang hu).

Le plateau tibétain comporte de nombreux lacs salés datant du pliocène, souvent de taille considérable. Le plus vaste d’entre eux est le Qinghai hu ou Koukou nor (4 400 km2). Le nord-ouest aride et les marges mongoles comportent également plusieurs grands lacs, le plus souvent salés. Les principaux sont le Lob nor et le Bosten hu, à l’est du bassin du Tarim, et le Hulun nur, à l’ouest du Grand Hinggan, en Mandchourie.

2.2.3 L’urgence écologique

La Chine souffre d’une pollution fluviale d’envergure. Près de 35 milliards de tonnes d’eaux usées, d’origine domestique, agricole ou industrielle, sont déversées chaque année. Ces rejets, dont 90 p. 100 ne sont pas traités, sont chargés de métaux lourds, de pétrole ou de produits chimiques, et souillent 47 000 km de fleuves et de rivières avant de rejoindre la mer. Ce phénomène a des conséquences sur la santé, ainsi que sur l’environnement. Le volume de la pêche fluviale aurait ainsi diminué de moitié entre 1960 et 1980. Les lacs, rongés par le sel et la pollution, disparaissent. L’envasement des fleuves et des lacs augmente, entraînant une diminution de la capacité de certains lacs-réservoirs et augmentant les risques d’inondations. Ainsi, en perdant 60 p. 100 de sa capacité, le Dongting hu ne parvient plus à réguler convenablement le Yang-tseu-kiang qui, aujourd’hui, supplante le Huang He en matière d’inondations.

2.3 Climat

En raison de son extension latitudinale, la Chine recouvre plusieurs aires climatiques : la Chine septentrionale est comprise, dans son ensemble, dans la zone tempérée, avec des nuances hypercontinentales et arides au nord-ouest ; le plateau du Tibet connaît un climat de montagne ; la Chine du Sud appartient à la zone subtropicale, tandis que le climat devient tropical sur l’extrême sud du pays. Si les températures estivales présentent une relative uniformité sur la majeure partie du pays, les hivers en revanche se caractérisent par de très forts écarts thermiques entre le nord et le sud du pays. La moyenne des précipitations annuelles est d’environ 650 mm, mais n’a que peu de signification en raison de l’ampleur des contrastes régionaux.

En effet, l’immensité du territoire et la disposition des reliefs introduisent de nombreuses nuances climatiques, renforcées par la forte variabilité annuelle des précipitations et des températures. Le climat de la Chine est toutefois marqué par deux phénomènes majeurs : la continentalité et la mousson d’été. La continentalité, liée à l’immensité, se traduit par l’accroissement des amplitudes thermiques annuelles vers l’intérieur des terres et vers le nord du pays, situé plus haut en latitude, accompagné d’une diminution des précipitations. Elle se caractérise par des hivers froids (jusqu’à - 30 °C en Mandchourie) et secs, et des étés chauds, voire torrides (jusqu’à + 45 °C dans la dépression de Turfan ou dans la région du Poyang hu). D’une manière générale, en hiver, l’anticyclone de Sibérie centrale souffle en direction du sud-est des vents froids et secs. Ceux-ci provoquent une chute des températures dans l’ensemble des régions situées au nord du Yang-tseu-kiang et entraînent sur la majeure partie du pays une longue sécheresse qui se traduit par une pénurie chronique en eau douce. La sécheresse de 1981, particulièrement sévère, obligea les autorités chinoises à détourner les eaux du Luan he sur 234 km (entre 1982 et 1983), sans pour autant pourvoir aux besoins de la ville de Tianjin.

Le monde chinois appartient à l’Asie des moussons, c’est-à-dire aux pluies d’été (70 p. 100 des précipitations annuelles) apportées par les masses d’air chaud et humide en provenance du Pacifique et souvent précédées par les « pluies des prunes « (mi-juin - début juillet). Ce phénomène climatique de la mousson (alizé austral ayant traversé l’équateur) est capital pour l’agriculture chinoise, dominée par la riziculture intensive. Les vents de mousson remontent très haut en latitude, ce qui explique la forte humidité des étés en Mandchourie, phénomène très rare à une telle latitude. La mousson d’été apporte d’abondantes précipitations sur toute la moitié orientale du pays. Celles-ci diminuent rapidement vers l’intérieur des terres. La barrière orogénique de l’Himalaya, ainsi que les Qin ling, font en revanche obstacle à la remontée du flux de mousson vers l’ouest et le centre-nord de la Chine, marqués par l’aridité.

La mousson s’accompagne parfois de typhons, cyclones tropicaux souvent dévastateurs. Venant du sud-est, ils frappent les côtes méridionales entre mai et octobre, et surtout de juillet jusqu’en septembre. On en compte en moyenne une dizaine par an. La région la plus touchée est le Guangdong. Le Fujian, abrité par l’île montagneuse de Taïwan, est moins exposé. Depuis très longtemps, les Chinois ont bâti des digues afin de protéger les littoraux.

Le climat subtropical concerne la Chine du Sud-Est, au sud du bassin du Yang-tseu-kiang. Il devient tropical à l’extrême sud du Yunnan et sur l’île de Hainan. Dans cette région, la moyenne des températures estivales atteint 26 °C, mais dans certains endroits, comme autour du Poyang hu, la moyenne du mois de juillet est supérieure à 30 °C. Les étés sont toutefois plus frais en altitude. Protégée, grâce aux barrières montagneuses, des vents froids venus du Nord sibérien, la région connaît des hivers doux. La température moyenne des mois d’hiver varie entre 17 °C dans le sud tropical et environ 3,9 °C le long du Yang-tseu-kiang. Le bassin du Sichuan, où les cultures s’étalent sur onze mois, se caractérise par son humidité et sa forte nébulosité. Les précipitations, essentiellement estivales, dépassent 1 000 mm par an dans toute la Chine méridionale pour atteindre plus de 2 500 mm sur la côte est du Guangdong.

La Chine de l’Est, au nord du Chiang jiang, connaît un climat tempéré, à fortes nuances continentales vers l’intérieur des terres, notamment sur les hauts plateaux lœssiques. Ces derniers étant exposés aux flux d’air polaire sibérien (mousson d’hiver), les hivers y sont froids et secs. Les températures moyennes de janvier s’échelonnent de 3,9 °C au sud à environ - 10 °C au nord de Pékin. Celles de juillet dépassent généralement 26,1 °C et approchent même les 30 °C dans la Grande Plaine du Nord. La majeure partie des précipitations tombent en été, au cours de la mousson. Elles sont en moyenne inférieures à 760 mm et diminuent vers le nord-ouest (entre 100 et 600 mm par an) où la végétation devient steppique.

La Chine du Nord-Est, la Mandchourie, connaît un climat continental. Les hivers y sont très froids (jusqu’à - 30 °C). Les températures moyennes du mois de janvier sont de - 17,8 °C sur la plus grande partie de la plaine mandchoue et celles du mois de juillet dépassent généralement 22,2 °C. Les précipitations annuelles sont encore abondantes dans l’est de la Mandchourie, qui bénéficie des flux de la mousson d’été. Elles sont supérieures à 1 000 mm et atteignent 2 500 mm sur les montagnes du Jilin. Elles diminuent rapidement vers l’ouest (environ 300 mm à l’ouest du Grand Hinggan, sur les marges du désert de Gobi).

La Chine du Nord-Ouest et les marges mongoles (Mongolie-Intérieure) connaissent un climat continental désertique. La moyenne des températures de janvier est partout inférieure à - 10 °C, à l’exception du bassin du Tarim. Les températures moyennes du mois de juillet dépassent en général 20 °C. Elles sont supérieures à 30 °C dans la dépression de Turfan, véritable fournaise en été. Il tombe moins de 250 mm de pluie par an et beaucoup de régions reçoivent moins de 100 mm.

Le plateau tibétain connaît, en raison de l’altitude, un climat montagnard à caractère fortement aride, coupé des pluies de la mousson d’été par la barrière himalayenne. Les températures de juillet restent inférieures à 15 °C. L’air est clair et sec pendant toute l’année et le total annuel des précipitations n’atteint presque jamais 100 mm, à l’exception de l’extrême Sud-Est himalayen (plus de 4 000 mm) et de la haute vallée du Brahmapoutre, directement exposés aux flux de mousson.

2.4 Végétation et faune
2.4.1 Végétation

La Chine compte plus de 7 000 espèces de plantes ligneuses dont 2 800 arbres de futaie. En raison de l’étendue du pays et de la diversité des domaines bioclimatiques, la couverture végétale est très variée. Cependant, des siècles de défrichage et de cultures intensives ont partiellement transformé la végétation naturelle. Aujourd’hui, les couvertures végétales dominantes sont les forêts de conifères ou de feuillus, la prairie (de plaine ou d’altitude) et la steppe.

Après des siècles de défrichage, le manteau forestier ne couvre plus que 1 972 900 km², soit 20,6 p. 100 du territoire. Les forêts denses tropicales se localisent au sud de la vallée du Xi jiang et le long de la frontière indienne, entre le Bhoutan et la Birmanie. Elles sont constituées principalement d’essences sempervirentes à larges feuilles, d’une hauteur dépassant parfois 50 m, mélangées à des palmiers. Une vaste zone de végétation subtropicale s’étend, au nord, jusqu’à la vallée du Yang-tseu-kiang et, à l’ouest, jusqu’au plateau tibétain. Cette zone est particulièrement riche sur le plan botanique : chêne vert, ginkgo, épicéa, pin du Yunnan, teck, palissandre, santal rouge, camphrier, ébénier, azalée, camélia, etc. On y trouve également des forêts de lauriers et de magnolias, avec une sous-végétation dense de buissons et de bambous. En altitude dominent les conifères et les plantes de montagne.

La majeure partie de la Grande Plaine du Nord et des hauts plateaux lœssiques était jadis recouverte de forêts d’arbres à feuilles caduques, dont il reste aujourd’hui diverses espèces de chênes, de frênes, d’ormes et d’érables.

Les réserves forestières les plus importantes se trouvent dans le nord-est de la Chine, en Mandchourie, et plus précisément sur les versants des Grand et Petit Hinggan. Ces massifs, ainsi qu’une partie de la plaine mandchoue, sont le domaine de la taïga, vaste forêt de conifères (mélèze, sapin rouge, etc.), comprenant également quelques espèces d’arbres feuillus (bouleau blanc, tilleul, chêne, peuplier, orme, etc.).

Les prairies couvrent environ 400 000 km2 (4,1 p. 100 du territoire). Elles forment une diagonale de plus de 3 000 km depuis le nord-est (Heilongjiang) jusqu’au sud-ouest (Tibet), incluant une partie de la Mongolie-Intérieure. La plupart sont situées en altitude.

Une steppe à graminées s’étend sur les plateaux du Shaanxi, du Ningxia et de l’Ordos, et dans le Qinghai. Des aires de végétation steppique et xérophyte existent également dans le Xinjiang et en Mongolie-Intérieure. Cette végétation naturelle a été en partie anéantie par les troupeaux (mouton, cheval, etc.) et par l’érosion des sols.

Depuis 1949, 15 000 km2 de forêts ont disparu chaque année, en raison notamment d’une démographie galopante et de constructions mal maîtrisées. Les autorités chinoises ont dû intervenir, car le manteau végétal n’assurait plus un bon drainage de l’eau. Mais la Chine reste toujours confrontée au grave problème de la déforestation (environ 10 000 km2 par an). Dans le sud, les forêts sont attaquées par des pluies acides issues de la pollution industrielle, responsables de la destruction de plusieurs milliers d’hectares de forêts de pins. Les conséquences sont multiples. L’érosion des sols (lessivage, surpâturage, déboisement), qui touche depuis 1949 près de 1 500 000 km2, s’accentue, de même que la désertification. Les déserts, qui couvrent une superficie de 1 300 000 km2, progressent d’environ 2 000 km2 chaque année (provinces du Gansu et du Shaanxi). En hiver, Pékin est régulièrement exposée à des tempêtes de sable.

Une politique de reboisement s’est donc imposée dès le début des années 1980. Des plantations massives d’arbres ont été effectuées dans des régions marécageuses et dans des plaines. Pour enrayer la progression du désert, un vaste programme appelé « Grande Muraille verte « a été lancé en 1978. Il visait à planter des « coupe-vent « (plantes xérophiles) sur 7 000 km de long, depuis le Xinjiang, au nord-ouest, jusqu’au Grand Hinggan, au nord-est. Environ 100 000 km2 ont ainsi été plantés d’arbres, le plus souvent en vain, faute d’entretien.

2.4.2 Faune

La diversité climatique et végétale explique la présence d’une faune très variée, allant des espèces sibériennes de Mandchourie jusqu’aux espèces tropicales de Chine méridionale. Le pays abonde en espèces sauvages. On en compte 1 103 pour les oiseaux, 400 pour les mammifères, 290 pour les amphibiens et 340 pour les reptiles. Certaines d’entre elles ne subsistent qu’en Chine : spatule du Yang-tseu-kiang (Psephurus gladius), alligator du Yang-tseu-kiang, takin, salamandre, hydropote (que l’on trouve également dans la péninsule coréenne), sans oublier le fameux panda géant, emblème du pays, qui vit dans les montagnes situées aux confins du Sichuan, du Gansu et du Shaanxi.

Le sud tropical est la zone d’habitat naturel de nombreux primates, tels que le gibbon et le macaque. Les grands prédateurs, comme l’ours, le tigre et le léopard survivent dans les régions périphériques isolées. Plusieurs espèces de panthères se répartissent entre la Mandchourie septentrionale, le Tibet (panthère des neiges) et l’extrême sud (panthère longibande). En revanche, les petits carnivores comme le renard, le loup, le chien viverrin et la civette abondent partout. L’antilope, la gazelle, le chamois, le cheval sauvage, le cerf et les autres ongulés peuplent les hautes terres et les bassins de l’ouest, tandis que l’élan habite le nord de la Mandchourie. Il faut signaler l’importance de certains animaux semi-domestiques comme le buffle d’eau, dont le rôle d’animal de trait est important dans le sud ; le chameau, utilisé dans les régions arides du nord et de l’ouest ; le yack, utilisé sur les hauts plateaux du Tibet.

À signaler enfin l’existence de près de 3 milliards de rats, qui transmettent une fièvre hémorragique, et la présence du paludisme dans les plaines marécageuses, maladie véhiculée par un moustique, l’anophèle.

En 1994, afin de protéger la faune et les espèces menacées, comme le panda, la Chine a créé 763 réserves naturelles réparties sur l’ensemble du pays et couvrant 661 800 km2 (6,9 p. 100 du territoire). Dix d’entre elles sont rattachées au réseau mondial de la protection de l’Homme et des êtres vivants. Six autres figurent parmi les grandes zones marécageuses de la planète, propices aux palmipèdes et échassiers.

3 POPULATION ET SOCIÉTÉ
3.1 Démographie

Depuis la proclamation de la République populaire, le pays a connu trois recensements de population : il y avait ainsi 582,6 millions d’habitants en 1953, 1 milliard en 1982 et 1,15 milliards d'habitants en 1990.

En 2008, le pays, avec une population estimée à 1,33 milliards d'habitants (environ 21 p. 100 de la population mondiale), est le plus peuplé de la planète. Depuis le début des années 1970, les autorités chinoises ont lancé une politique de contrôle des naissances, avec pour objectif une stabilisation de la population à 1,2 milliard d’habitants en l’an 2000. Depuis le recensement de 1982, le taux de croissance de la population a ainsi connu une diminution spectaculaire.

3.1.1 La croissance démographique

La Chine a connu, dans la seconde moitié du xxe siècle, une transition démographique accélérée. La première phase, amorcée au début des années 1950, s’est traduite par une explosion démographique. Entre les recensements de 1953 et de 1990, la population a doublé (+ 615 millions habitants), malgré la crise démographique dite des « années noires « (1959-1961), ayant provoqué un déficit de naissances évalué à 60 millions d’individus. L’indice synthétique de fécondité était alors entre 5 et 6 enfants par femme (5,8 en 1970).

L’entrée dans la deuxième phase de la transition démographique, marquée en Chine par une baisse rapide de la fécondité, s’est amorcée vers la fin des années 1970. L’indice de fécondité est tombé à 3,26 entre 1975 et 1980 puis à 2,4 entre 1985 et 1990. Il s’élevait, en 2008, à 1,77 enfant par femme.

Le taux d’accroissement naturel, de l’ordre de 2 à 3 p. 100 par an durant la première phase de la transition démographique (2,6 p. 100 en 1969), est retombé à 1,1 p. 100 par an entre 1990 et 1995. Il est estimé à 1,02 p. 100 pour la période 1995-2000. Le taux de natalité est passé de 45 p. 1 000 en 1953 à 21 p. 1 000 en 1990, pour atteindre 13,70 p. 1 000 en 2008. Dans le même temps, le taux de mortalité serait tombé de 22,5 p. 1 000 à 7 p. 1 000. Cette faible mortalité s’explique par la jeunesse actuelle de la population. En 2008, 25,8 p. 100 de la population chinoise avaient moins de 15 ans, 67,6 p. 100 entre 15 et 65 ans et 8 p. 100 (2008), seulement, plus de 65 ans. La population est masculine à 51,45 p. 100.

Grâce aux progrès de la médecine et au développement des soins (0,94 médecin pour 1 000 Chinois contre 0,71 en 1975), notamment en milieu rural (« médecins aux pieds nus «), l’espérance de vie à la naissance, de l’ordre de 35-40 ans au début des années 1950, a fortement augmenté et atteint désormais 73,2 ans (2008). Ce phénomène, conjugué au régime de basse natalité, devrait entraîner un vieillissement progressif de la population, sans doute l’un des grands problèmes auxquels sera confrontée la Chine du xxie siècle. Les inégalités sont toutefois très fortes selon les provinces (jusqu’à 12 ans d’écart).

3.1.2 Le contrôle des naissances

Le très net ralentissement de la croissance démographique est le résultat de la politique de limitation des naissances développée par les autorités chinoises à partir du début des années 1970. Celle-ci prit une tournure fortement incitative et contraignante en 1979 avec la politique de l’« enfant unique «. En septembre 1982, la direction du Parti communiste chinois annonça que la nation devait limiter sa population à 1,2 milliard d’habitants pour la fin du siècle, et que cet objectif nécessitait une intensification des efforts de contrôle démographique. Ce chiffre, déjà dépassé en 1994, a dû être révisé à la hausse et il apparaît que la population chinoise ne devrait réellement se stabiliser qu’aux alentours de 2050.

Les politiques antinatalistes s’accompagnèrent d’un renforcement continu des services de santé publique, chargés de l’information sur le contrôle des naissances et de la distribution gratuite ou à faible prix de moyens contraceptifs. En 1984, on estimait à 24 millions le nombre de couples s’étant engagés à ne pas avoir plus d’un enfant. La limitation de la natalité est aujourd’hui entrée dans les mœurs. La contraception est largement diffusée : près de 90 p. 100 des femmes mariées en âge de fécondité y ont désormais recours. L’élévation de l’âge du mariage (22-23 ans, l’âge légal étant de 20 ans) et la légalisation de l’avortement ont également joué un rôle important dans la baisse de la fécondité.

Toutefois, la politique de l’enfant unique se heurte à de nombreuses résistances, notamment dans les campagnes où l’immense majorité des Chinois restent pauvres et peu informés. De fortes pressions sociales s’exercent sur les femmes ayant déjà au moins un enfant pour qu’elles interrompent leur grossesse. Un des effets de la libéralisation des mœurs et de l’évolution économique de la Chine est l’augmentation du nombre de divorces ; le taux de divorces est passé de 0,35 en 1980 à 1,5 p. 100 en 1995.

3.1.3 La répartition de la population

La densité moyenne atteint 143 habitants au km², mais elle masque de très fortes disparités régionales. La répartition de la population montre en effet une opposition majeure entre la Chine de l’Ouest, où la densité moyenne n’excède pas 10 habitants au km² (Tibet : 1,8) et la côte orientale, du Liaoning au Zhejiang, très densément peuplée, avec plus de 360 habitants au km² (près de 2 200 à Shanghai). Ainsi, 43 p. 100 des habitants vivent sur 18 p. 100 de la superficie totale du pays. Il s’agit des régions côtières orientales où se concentrent les richesses, les grandes villes et les grandes plaines agricoles : Hebei avec Pékin et Tianjin ; Fujian ; Guangdong ; Hainan ; Heilongjiang ; Jiangsu avec Shanghai ; Jilin ; Shandong ; Zhejiang ; Liaoning avec Shenyang. Environ 44 p. 100 de la population occupent les provinces du centre de la Chine (Anhui, Guizhou, Hubei, Henan, Hunan, Jiangxi, Shaanxi, Shanxi, Sichuan) qui représentent 20,6 p. 100 du territoire. Enfin, 13 p. 100 seulement résident en Chine occidentale et sur les marges mongoles (Gansu, Guangxi, Mongolie-Intérieure, Ningxia, Qinghai, Tibet, Xinjiang, Yunnan) qui couvrent 61,4 p. 100 du pays.

La population chinoise, encore fortement rurale (59 p. 100), reste donc essentiellement concentrée dans les 19 provinces historiques de la Chine. L’entassement humain de la Grande Plaine du Nord et du bas Yang-tseu-kiang, massivement peuplés par les Han, contraste singulièrement avec les rares îlots de peuplement de la Chine de l’Ouest (oasis, haute vallée du Brahmapoutre). Ce déséquilibre est l’expression du modèle de peuplement et d’occupation de l’espace développé par les Chinois (Han), pour lesquels on peut parler de civilisation agricole de plaine, reposant sur la riziculture intensive. À l’inverse, la Chine occidentale et, d’une manière plus générale, les montagnes sont longtemps restées le domaine des nombreuses minorités que compte le pays. La politique de colonisation de fronts pionniers, développée depuis 1949 dans les provinces les plus reculées (Heilongjiang, Xinjiang, Mongolie-Intérieure, Qinghai, Tibet), n’a guère modifié les déséquilibres existants.

Enfin, la Chine est, depuis très longtemps, un pays d’émigration. On estime à 50 millions le nombre de Chinois, appelés Huaqiao, ayant émigré à l’étranger dont 2,57 millions en Amérique du Nord, 0,59 million en Europe et 0,16 million en Océanie. L’essentiel de cette émigration concerne en fait l’Asie, et principalement Taïwan (21 millions), l’Indonésie (6,15 millions), la Thaïlande (4,8 millions), la Malaisie (4,1 millions), Singapour (1,85 million), et, jusqu’à un passé très récent, Hong Kong (5,7 millions) et Macao (0,27 million).

3.1.4 Composition ethnique de la population

La Chine est une « République socialiste unitaire et multinationale «. Dans cet État pluriethnique, les Han constituent l’immense majorité de la population (92 p. 100 en 1990), les 8 p. 100 restants regroupant 55 minorités ethno-linguistiques.

Les Han se caractérisent davantage par une culture et une civilisation commune, principalement agricole, que par des traits physiques communs. La majorité d’entre eux vit dans les bassins des cours moyens et inférieurs du Huang He, du Yang-tseu-kiang et du Zhu jiang et dans la plaine du Nord-Est (Mandchourie). Un certain nombre se sont récemment implantés dans les provinces périphériques, dans le cadre de la colonisation des zones pionnières. Il s’agissait, pour la plupart, de migrations forcées.

Les Han constituent aujourd’hui la majorité de la population dans 28 provinces sur 30, à l’exception du Xinjiang et du Tibet. En Mongolie-Intérieure par exemple, ils représentent 84,5 p. 100 de la population. En 1949, les Han représentaient à peine 5,5 p. 100 de la population du Xinjiang. Aujourd’hui, ils en constituent 38 p. 100.

En dépit de leur faible poids démographique, de leur diversité ethnique et de leur dispersion spatiale, les minorités revêtent une importance géopolitique certaine, dans la mesure où elles occupent plus de 60 p. 100 du territoire et où certaines aires d’habitat constituent des zones particulièrement sensibles. Dix-huit de ces peuples comptent plus de 1 million d’individus. D’autres, au contraire, n’en comptent que quelques centaines, comme les Luobas. L’ensemble se répartit en cinq groupes : Altaïque (Ouïgours, Mandchous, Mongols, Coréens, Kazakhs), Hui (Huis), Sino-Thaï (Zhuangs, Buyis, Dongs, Lis, Dais), Tibéto-Birman (Yis, Tibétains, Bais, Hanis, Lisus) et Miao-Yao (Miaos, Tujias, Yaos). Bien que partout présentes, les minorités se localisent principalement dans les régions périphériques frontalières du Nord-Est, du Nord, du Nord-Ouest, de l’Ouest, ainsi que dans les provinces du Sud.

Les Zhuangs (15,49 millions en 1990) vivent à 92 p. 100 dans la région autonome du Guangxi. Une grande partie d’entre eux sont fortement assimilés. Les 8,6 millions de Huis, ou musulmans chinois, sont regroupés dans la région autonome Hui du Ningxia, au Gansu et au Qinghai. Les Ouïgours (environ 7,2 millions), turcophones, peuplent la région autonome du Xinjiang, dont ils constituent la moitié de la population. Les Yis (environ 6,5 millions) sont largement sinisés et vivent surtout au Sichuan, au Yunnan et au Guangxi. Les 7,4 millions de Miaos peuplent le Guizhou, le Hunan et le Yunnan. Les Tujias (5,7 millions) vivent principalement dans le Hubei, le Hunan et le Sichuan. Les Tibétains (près de 6 millions) vivent dans la région autonome du Tibet, au Sichuan et au Qinghai. Enfin, 4,8 millions de Mongols se partagent un espace qui comprend la Mongolie-Intérieure, le Gansu et le Xinjiang.

Parmi les autres minorités figurent les Coréens (environ 2 millions) du Jilin, les Mandchous (9,8 millions) du Liaoning et du Heilongjiang, fortement assimilés, ou encore les Buyis (2,5 millions) du Guizhou. Le Xinjiang regroupe une douzaine d’ethnies, pour la plupart d’origine turque et de religion musulmane (Ouïgours, Kazakhs, Kirghiz, Ouzbeks, Tatars). Quant à la Chine du Sud-Est, elle est une véritable mosaïque ethnique. Elle abrite de nombreux peuples (Thaï, Miao, Yao, Lisu, Hani, Bai, Yi, etc.), refoulés au fil des siècles par les Han lors de leur progression vers le sud, et qui se sont réfugiés, pour la plupart, dans les montagnes méridionales (Yunnan, Sichuan, Hunan, Guangxi) délaissées par les Chinois, voire au-delà des frontières actuelles.

Jusqu’en 1964, la croissance démographique des minorités était inférieure à celle des Han. Mais cette tendance s’est inversée entre 1964 et 1990 (+ 10,8 p. 100 pour les Han, + 35,5 p. 100 pour les minorités). Ce phénomène s’explique à la fois par le réveil identitaire des peuples minoritaires et par la possibilité qui leur est généralement donnée d’avoir une fécondité plus élevée que dans les provinces orientales, de l’ordre de 2 ou 3 enfants par femme. Ainsi, les Mandchous ont connu un taux de croissance de 128,2 p. 100 entre 1982 et 1990. On peut citer, comme autres exemples, les Tujias (+ 101,2 p. 100), les Ouïgours (+ 21 p. 100) ou encore les Miaos (+ 46,9 p. 100). Les minorités, qui totalisaient 67 millions d’individus au recensement de 1982, en comptaient 91,2 millions en 1990.

Sur le plan administratif, les groupes minoritaires sont répartis entre diverses circonscriptions où ils bénéficient, en principe, d’une certaine autonomie. En réalité, et malgré une loi promulguée en 1984, cette relative indépendance est souvent régentée par le pouvoir han. Pékin tente, en effet, d’unifier le pays en encourageant ou en forçant la sinisation des régions périphériques peuplées par les minorités ethniques.

Mais l’immigration chinoise et la politique de sinisation sont fortement contestées parmi certaines minorités, notamment dans les régions autonomes du Tibet et du Xinjiang, ou dans la province du Qinghai.

De sérieuses avancées ont toutefois été enregistrées depuis la prise en compte de la réalité minoritaire. Depuis 1949, ce problème a suivi les méandres de l’histoire, passant d’une sinisation rapide et répressive, notamment pendant la Révolution culturelle, à une assimilation plus souple. Cette dernière, fixée à long terme, privilégie le développement économique et culturel (Mongolie-Intérieure, Xinjiang). Mais la disparité des richesses et le joug pénible de Pékin insupportent de plus en plus certains peuples, tels que les Ouïgours qui n’ont pas hésité à prendre les armes en 1996. Pour l’instant, et malgré d’importants programmes d’aide et de financement, notamment en ce qui concerne l’alphabétisation, les territoires autonomes échappent au progrès dont bénéficie la Chine. L’écart socio-économique entre l’Est, prospère et dynamique, et l’Ouest, démuni et isolé, tend à s’accentuer.

L’intégration brutale n’a pas pour autant disparu. Le Tibet en est l’illustration la plus frappante. En 1950, ce pays, alors souverain et indépendant, fut envahi par l’armée chinoise. En 1959, l’ONU désapprouva officiellement cette invasion et enjoignit à la Chine de respecter les droits du Tibet. Mais cette nation allait voir son économie dévastée pendant le Grand Bond en avant, et sa croyance — le bouddhisme lamaïque — combattue de manière systématique et meurtrière. Les émeutes tibétaines de 1987 furent réprimées dans le sang.

Aujourd’hui, près de 1 million de Tibétains sont morts. Les 6 millions restants côtoient près de 7 millions de Chinois Hans, contre 2 millions en 1989, et sont désormais obligés de parler le mandarin et non le tibétain. Ils font l’objet de multiples persécutions. Enfin, Pékin utilise les montagnes du Tibet pour y stocker ses déchets nucléaires et se livre à une déforestation massive de l’Himalaya. Plusieurs centaines de milliers de Tibétains se sont réfugiés à l’étranger, surtout en Inde, à l’image du dalaï-lama, chef spirituel, partisan de la non-violence et prix Nobel de la paix en 1989. Des protestations croissantes s’élèvent à travers le monde, mais aussi parmi les Chinois Han. Ainsi, le 13 juillet 1995, l’occupation chinoise du Tibet a été déclarée illégale par le Parlement européen.

Si les Tibétains pratiquent une résistance non violente, les minorités musulmanes du Xinjiang, traditionnellement rebelles à l’autorité de Pékin, manifestent une opposition plus radicale. Les actions terroristes se multiplient depuis le milieu des années 1990. Les 5 et 6 février 1997, de très violentes émeutes indépendantistes provoquant environ 70 morts et 140 blessés, à Yining, ont à nouveau embrasé la minorité ouïgoure. Elles furent sévèrement réprimées par des arrestations massives, suivies d’exécutions sommaires. Depuis, plusieurs attentats meurtriers attribués aux séparatistes ouïgours ont ensanglanté le Xinjiang et certaines villes chinoises.

3.2 Découpage administratif et villes principales
3.2.1 Découpage administratif

L’administration locale chinoise s’articule autour de trois grands échelons. Le premier, immédiatement en dessous du gouvernement central, comprend 22 provinces (Shaanxi, Gansu, Qinghai, Hebei, Shanxi, Liaoning, Jilin, Heilongjiang, Shandong, Jiangsu, Zhejiang, Anhui, Jiangxi, Fujian, Henan, Hubei, Hunan, Guangdong, Sichuan, Guizhou, Yunnan et Hainan), ainsi que Taïwan, revendiquée comme 23e province, 5 régions autonomes (Mongolie-Intérieure, Guangxi, Tibet, Ningxia, Xinjiang), établies entre 1947 et 1965, et 4 municipalités directement subordonnées à l’autorité centrale : Pékin (Beijing), Shanghai, Tianjin et Chongging. Quant au territoire de Hong Kong, il est doté, depuis son retour à la Chine (1er juillet 1997), d’un statut de région administrative spéciale. Le deuxième échelon comprend des préfectures (appelées parfois départements), des districts et des municipalités. Le troisième est celui des cantons et des bourgs.

3.2.2 Villes principales

Malgré une forte croissance urbaine depuis la fin des années 1970, la Chine reste un pays encore faiblement urbanisé (taux d’urbanisation : 41 p. 100 en 2005 contre 22,5 p. 100 en 1985 et seulement 17,3 p. 100 en 1975). Pendant longtemps en effet, le gouvernement chinois a souhaité limiter le développement des villes en fixant les populations dans les campagnes.

L’exode rural spontané fut interdit à partir des années 1950 en raison du manque d’emplois productifs disponibles en ville. Mao Zedong estimait, en outre, que la distinction de classes entre citadins et ruraux constituait l’une des causes majeures de l’inégalité sociale en Chine. Au cours des années 1960-1970, le gouvernement envoya un grand nombre de jeunes citadins instruits dans les campagnes afin, notamment, de réduire l’attrait exercé par la ville sur les masses paysannes. Ces mesures, qui ont donné lieu à des déportations massives de population (près de 30 millions de personnes), furent réduites après la mort de Mao en 1976, avant d’être abandonnées en 1978. Depuis, l’exode rural a repris de plus belle. Cependant, et malgré une industrialisation rapide, la Chine reste une nation agricole et rurale (59 p. 100 de la population).

En 1995, 40 villes chinoises avaient une population de plus de 1 million d’habitants. La plupart sont d’importants centres industriels et commerciaux. Shanghai, qui comptait une agglomération de 12,8 millions d'habitants en 2003, est la plus grande ville du pays, le premier port de Chine et la sixième métropole la plus peuplée du monde. Pékin, capitale politique du pays, est, avec son agglomération de 10,8 millions d'habitants (2003), la deuxième ville de Chine et la huitième métropole du monde. Viennent ensuite, toujours avec leur agglomération, Tianjin (9,27 millions d'habitants en 2003), avant-port de Pékin, au confluent de la Huai et du Grand Canal ; Shenyang (4,88 millions d'habitants en 2003) ; Wuhan (5,65 millions d'habitants en 2003), port fluvial au confluent du Han shui et du Yang-tseu-kiang ; Canton (3,89 millions d'habitants en 2003), grand port maritime situé à l’embouchure du Zhu Jiang ; Chongqing (4,85 millions d'habitants en 2003) ; Chengdu (3,40 millions d'habitants en 2003) ; Xi'an (3,20 millions d’habitants en 2003) ; Jinan (2,62 millions d'habitants) ; Changchun (3,01 millions d'habitants en 2003) ; Nankin (2,78 millions d'habitants en 2003).

3.3 Institutions et vie politique

Le régime chinois est une démocratie populaire à parti unique et d’inspiration marxiste-léniniste. L’avènement de la République populaire en 1949 a introduit un changement profond dans les institutions. Depuis, le pays a élaboré quatre Constitutions. La première (1954), calquée sur la Constitution de l’URSS de 1936, fut la plus stalinienne et la plus totalitaire. Deux autres lui succédèrent en 1975 et 1978. En 1982, une nouvelle Constitution fut acceptée, plus conforme aux nouvelles orientations du régime, et comportant 138 articles répartis en 4 chapitres. Néanmoins, son préambule indique que le régime politique de la Chine reste une dictature du prolétariat conduite par le Parti communiste et reposant sur un front uni pouvant inclure des partis démocratiques.

3.3.1 Pouvoir exécutif

Le président de la République remplit une fonction purement symbolique. Mais, en théorie, il peut légiférer, nommer ou renvoyer de hauts fonctionnaires, ratifier ou contester des accords passés avec des pays étrangers. Il est assisté d’un vice-président et est élu pour cinq ans par l’Assemblée nationale populaire (ANP).

Le pouvoir exécutif est entre les mains du Conseil des affaires d’État, c’est-à-dire la plus haute autorité du gouvernement. Ce Conseil régit différents ministères et commissions. Il est responsable devant l’ANP et son Comité permanent, dont il applique les lois et les résolutions. Il prend des mesures administratives, élabore des lois et des règlements, et émet des ordonnances. Il est dirigé par le Premier ministre et se compose des vice-Premiers ministres, des ministres, des présidents de commissions, du président de la commission des Comptes et d’un secrétaire général.

Le commandement des affaires militaires nationales relève de la Commission militaire centrale.

Généralement, les charges les plus importantes dans la conduite des affaires politiques sont les postes de Premier ministre et de secrétaire général du Parti. Mais l’autorité qui leur est conférée dépend largement des personnalités qui les occupent. Au début des années 1990, le personnage le plus puissant du gouvernement a été Deng Xiaoping, qui, bien que ne détenant plus aucun poste officiel depuis 1989, est resté l’arbitre du régime jusqu’à sa mort en février 1997.

3.3.2 Pouvoir législatif

Le pouvoir législatif est détenu par l’Assemblée nationale populaire (ANP). Ses membres (2 985 dans la Xe Assemblée entrée en fonction en mars 2003) sont élus pour cinq ans au suffrage indirect par les provinces, les municipalités, les régions autonomes, les régions administratives spéciales et l’armée.

L’ANP vote les lois, amende la Constitution, approuve le budget national et les plans économiques. Elle a également le pouvoir de nommer et de révoquer les membres du Conseil des affaires d’État et de la Commission militaire centrale, le président de la Cour populaire suprême et le procureur du Parquet populaire suprême.

Dans la réalité, l’ANP dispose de peu de pouvoir effectif. En raison de sa taille, elle ne se réunit qu’une fois par an pour régler les affaires importantes. Durant l’intersession, un Comité permanent, élu par les députés et dans lequel figurent également le président et les vice-présidents de l’Assemblée, la remplace, la représente et peut ratifier ou abroger des traités passés avec des gouvernements étrangers.

3.3.3 Pouvoir judiciaire

La tradition judiciaire chinoise est fondamentalement différente de celle des nations occidentales. Le droit a toujours eu pour fonction de défendre l’ordre public et non de garantir les droits de l’individu. Néanmoins, depuis la Constitution de 1978, la Chine a commencé à aligner ses institutions judiciaires sur les modèles occidentaux. La Constitution de 1982 garantit désormais un droit de défense juridique et les libertés de chacun. Interrompues depuis des années, les professions d’avocat et de notaire connaissent de ce fait un nouvel essor, même si leur rôle est encore mal accepté.

Le système judiciaire chinois est articulé autour de trois éléments : les tribunaux, la Sécurité publique (police) et le parquet.

L’organe supérieur est la Cour populaire suprême, qui veille à l’observation de la Constitution et juge en dernier ressort. Elle est chargée de contrôler les tribunaux populaires locaux ou spéciaux et le tribunal militaire. Elle est responsable devant l’ANP et son Comité permanent.

Les tribunaux populaires sont les organes judiciaires locaux. Ils figurent dans les provinces, les régions autonomes, les municipalités et se répartissent en trois échelons : district, préfecture et province. Les procès y sont publics, sauf ceux concernant les secrets d’État ou les mineurs.

Les parquets populaires sont des instances indépendantes. Ils se chargent du contrôle juridique et fonctionnent parallèlement aux tribunaux populaires. Le Parquet populaire suprême est dirigé par un procureur général. Le domaine d’intervention des parquets est la sécurité du territoire et les affaires criminelles. Les parquets populaires veillent également à l’application scrupuleuse de la loi au sein des tribunaux populaires ou encore aux conditions pénitentiaires et au respect des procédures de la Sécurité publique.

La Sécurité publique, omnipotente sous Mao Zedong, a vu ses pouvoirs discrétionnaires limités. Néanmoins, la détention administrative dans les laogai, les camps de rééducation par le travail (sans jugement et en principe limitée à quatre ans), et dans les maisons de détention (réservées à l’exécution des peines de courte durée) sont toujours sous son contrôle, ce qui lui permet d’arrêter tout suspect sans aucune procédure judiciaire.

3.3.4 Gouvernement local

En Chine, le système politique repose, à la base, sur les structures locales présentes dans l’ensemble des circonscriptions à l’échelon des provinces, des régions autonomes, des municipalités, des districts et des cantons. Leurs membres sont élus par la population.

Les assemblées populaires locales sont les ramifications de l’ANP. Au-dessus de l’échelon du district, elles peuvent instituer des comités permanents. Aux échelons les plus hauts (provinces, régions autonomes, municipalités), elles ont le droit de statuer sur des affaires importantes et de procéder à des règlements.

Les gouvernements populaires locaux sont placés sous la tutelle du Conseil des affaires d’État. Ils ont pour tâche de contrôler le travail administratif de leur territoire. Chacun doit rendre compte de ses résultats à l’assemblée populaire de même échelon, et à l’organe administratif de l’État qui lui est immédiatement supérieur.

3.3.5 Partis politiques

Même si le préambule de la Constitution ne fait plus référence au rôle dirigeant du Parti communiste, celui-ci le conserve de fait, l’imbrication de l’appareil d’État et de l’appareil du Parti s’observant encore à tous les échelons.

Le Parti communiste chinois (PCC) compte plus de 58 millions d’adhérents (1997). Le Congrès national est l’organe suprême du Parti. Le Comité central, élu par le Congrès national, désigne le Bureau politique et son comité permanent qui détiennent le contrôle réel de l’appareil, ainsi que le secrétaire général du Parti.

Il existe également huit autres formations politiques appelées « partis démocratiques «, et contrôlées par le PCC. D’autres structures, dites groupements sociaux, participent à la vie du pays. Parmi eux figurent la Fédération des syndicats de Chine (1925) et la Fédération nationale des femmes de Chine (1949), chargée de protéger les droits et les intérêts des Chinoises, renforcés par une loi adoptée en 1992. Le seul groupe ayant un véritable poids politique est cependant la Ligue de la jeunesse communiste (1922), laquelle, en rassemblant quelque 57 millions de jeunes, joue un rôle déterminant dans la préparation à leur adhésion future au PCC.

3.3.6 Défense nationale

La Constitution de 1982 confère le commandement des forces armées à la Commission militaire centrale. Les forces militaires du pays sont constituées par l’Armée populaire de libération (APL), dont l’appellation date de 1946, ainsi que par la police armée et la milice populaire.

L’APL comporte trois armées composées de militaires de carrière et d’appelés (service de trente-six à quarante-huit mois). Avec 2 millions d’hommes et 1,2 million de réservistes en 2004, elle est numériquement la première armée du monde. La marine compte 255 000 hommes et 972 bâtiments de toutes tailles, dont 50 sous-marins. L’armée de l’air représente 400 000 hommes et 4 970 chasseurs. L’armée de terre comprend 2 millions d’hommes, 14 500 pièces d’artillerie et près de 8 000 chars de combat. La Chine possède également l’arme nucléaire.

Aux moments les plus chaotiques de la Grande Révolution culturelle prolétarienne, l’APL demeura la seule force organisée et fut utilisée pour mettre fin au mouvement. C’est également elle qui fut chargée de réprimer le mouvement démocratique de juin 1989 à Pékin. Elle constitue toujours une institution déterminante et les gouvernants restent en permanence sensibles à ses réactions. En 2003, le budget de la Défense représentait 3,9 p. 100 du produit intérieur brut (PIB) contre 7,9 p. 100 en 1985. Bien que ses effectifs aient baissé de 1 million d’hommes en dix ans, l’APL possède un pouvoir économique conséquent (25 millions de salariés, 50 000 usines, hôtels, hôpitaux, etc.). Son bénéfice annuel serait de 5 à 10 milliards de dollars. Cet empire financier lui permet de peser lourdement dans le jeu politique de la Chine.

3.4 Langues et religions
3.4.1 Langues

Les Chinois possèdent une écriture depuis plus de trois mille ans, et bien qu’il existe plus d’une douzaine de dialectes, les caractères restent les mêmes partout en Chine. Cette unité scripturale a joué un rôle déterminant dans l’unité historique du peuple chinois depuis la dynastie Shang (xvie-xive siècle av. J.-C.).

La langue officielle est le putonghua (« langue commune «), appelée plus communément chinois mandarin en Occident, et qui est en fait la langue parlée en Chine du Nord. Le chinois est la langue la plus parlée au monde avant l’anglais et l’espagnol. Appartenant à la famille linguistique sino-tibétaine, la langue chinoise possède de nombreuses variantes orales, notamment dans le Sud où l’on parle fréquemment le chinois cantonais. En 1955, elle fut déclarée langue commune à la Conférence nationale pour la réforme de la langue écrite. Elle comprend, selon le niveau de langage, de 10 000 à 50 000 caractères, dont 6 000 sont utilisés couramment et dont 2 400 servent uniquement dans la vie quotidienne. On a cherché à simplifier l’écriture afin de lutter contre l’analphabétisme (fixé à moins de 500 caractères). C’est pourquoi certains caractères présentent aujourd’hui moins de traits, ou sont plus proches d’une écriture cursive. Les principaux autres dialectes chinois sont le wu, le xiang, le yue, le min, le kejia ou encore le gan.

En 1977, la République populaire demanda officiellement aux Nations unies d’utiliser le système de romanisation hanyu pinyin (littéralement « transcription phonétique du chinois «) pour les noms de lieux. Ce système, créé à la fin des années 1950, a été modifié à plusieurs reprises.

Environ 100 millions de Chinois pratiquent les 55 langues des minorités nationales (miao-tseu, tibétain, thaï, lolo, mongol, etc.). Le gouvernement chinois a encouragé le développement des formes écrites de ces langues à l’aide du pinyin. Le mandarin est néanmoins enseigné dans les écoles, généralement comme deuxième langue, et sa connaissance est exigée dans toute la Chine.

3.4.2 Religions

La Chine compte plus de 100 millions de croyants. Il n’y a pas à proprement parler de religion officielle, mais trois « voies spirituelles « dominent pourtant : le confucianisme, le taoïsme et le bouddhisme (voir religions chinoises).

Le confucianisme, discipline morale née au vie siècle av. J.-C., fut vilipendé par Mao Zedong en 1973. Il a, depuis, retrouvé une place dans la pensée chinoise.

Le taoïsme a pris racine dans la population han vers le iie siècle. L’ermitage des Nuages blancs (Pékin), le palais Qingyang (Chengdu), le palais Taiqong (Shenyang) en sont les temples les plus célèbres.

C’est aujourd’hui le bouddhisme, introduit au ier siècle, qui exerce la plus forte influence en Chine. Le bouddhisme dit Hinayana (ou « Petit Véhicule «) est pratiqué par certaines minorités (Dais, Bulangs, De’angs, etc.). Les plus célèbres sanctuaires sont le temple du Cheval blanc (Luoyang), Lingyin (Hangzhou), Shaolin (Henan) et le monastère de la Grande Bienfaisance (Xi'an). Le bouddhisme lamaïque (Tibétains, Mongols, Luobas, Menbas, Tus, Yugurs) est pratiqué dans de nombreux monastères (Jokhang, Sagya et Tashilunpo au Tibet ; Ta’er au Qinghai ; temple des Lamas Yonghegons à Pékin).

Apparu en Chine au viie siècle, l’islam est pratiqué ouvertement par dix minorités nationales (Huis, Ouïgours, Kazakhs, Kirghiz, Tatars, Ouzbeks, Tadjiks, Dongxiangs, Salars, Bao’ans) et compte une vingtaine de millions d’adeptes. À noter les mosquées de la Grue (Yangzhou), de Huajue (Xi’an), de Niujie (Pékin), de Dongba (Yinchuan) ou encore d’Idkah (Xinjiang).

Le catholicisme rassemble 4 millions de pratiquants, notamment dans le Sud, parmi lesquels de nombreux Miaos, des Yaos et des Yis. Le protestantisme concerne également 3 millions de Chinois. Ces deux religions, moins influentes que le bouddhisme et l’islam, furent surtout propagées dans les grandes villes (Shanghai, Pékin, etc.).

L’une des premières mesures du Parti communiste chinois, en 1949, fut de bannir les cultes. Tous les lieux de culte furent fermés pendant la Révolution culturelle et les moines bouddhistes rééduqués par le travail dans les champs. Il fallut attendre la nouvelle Constitution de 1982 et son article 88 pour que la liberté de culte soit garantie. Cependant, des inégalités persistent. Le bouddhisme tibétain, qualifié de « secte « par les documents officiels, est étouffé. Le futur panchen-lama a été enlevé et se trouve séquestré quelque part dans le pays. Les catholiques dont la plupart sont restés fidèles au Vatican, ne possèdent pas encore d’Église propre et ne se reconnaissent pas dans celle qu’a imposée le Parti communiste en 1957, l’Association catholique patriotique chinoise.

3.5 Éducation

En Chine, l’enseignement est laïc et obligatoire. En 1994, on dénombrait 961 000 établissements et 188,096 millions d’élèves.

3.5.1 Enseignement primaire et secondaire

La scolarisation prévoit deux premiers cycles. Le primaire (six années) regroupe 145 millions d’enfants répartis dans 629 000 écoles. Environ 86,6 p. 100 d’entre eux accèdent au cycle secondaire, qui propose une filière d’enseignement général, composée de deux cycles d’une durée de trois ans (82 000 établissements et 90,7 millions d’élèves), et d’une filière d’enseignement spécialisé. Celle-ci se divise en un second degré technique (deux ans) pour former les ouvriers spécialisés, professionnel (trois ans) et normal (quatre ans) pour la finance, la technologie, la gestion, etc. Il concerne 3,198 millions d’élèves et 3 987 écoles.

3.5.2 Enseignement supérieur

L’entrée dans l’enseignement supérieur se fait par un concours sélectif organisé à l’échelon national et sous le contrôle unique de l’État. Ce même État se charge, en général, de trouver un emploi à l’étudiant diplômé. On distingue les universités (de quatre à cinq ans), les écoles supérieures (de deux à trois ans) et les instituts spécialisés.

Parmi les universités chinoises les plus connues figurent : les universités Beida (fondée en 1898) et Qinghua (université du peuple) à Pékin ; l’université de Hangzhou (1952) ; l’université Fudan à Shanghai (1905) ; l’université Nankai à Tianjin ; l’université chinoise de Sciences et de Technologie (1958) à Hefei (Anhui) ; l’université de Nankin. En 2001–2002, on dénombrait 12,1 millions d’étudiants dans 1 080 établissements (24 à Shanghai, 8 à Nankin et à Tianjin, une dizaine à Canton, Xi’an et Wuhan, etc.).

3.5.3 Évolution récente

En 2005, le taux d’alphabétisation était de 87,3 p. 100 (contre 68,2 p. 100 en 1985), et 16 p. 100 des jeunes Chinois poursuivaient des études supérieures (contre 1,4 p. 100 en 1985). Le budget alloué à l’éducation est de 1,9 p. 100 du PIB, soit 12 milliards de dollars (contre 8,5 en 1985). C’est dire l’importance qu’accorde le pouvoir à la transmission des connaissances et à l’acquisition de savoir-faire.

On estime qu’en 1949, 20 p. 100 de la population savait lire et écrire. L’un des programmes les plus ambitieux du Parti communiste fut l’alphabétisation des Chinois et la création d’un système public qui allait subir les conséquences des crises politiques du régime.

Entre 1949 et 1951, plus de 60 millions de paysans s’inscrivirent aux « écoles d’hiver «, destinées à offrir un enseignement pendant la saison creuse. Mao Zedong déclara que la finalité de l’enseignement était de diminuer les distinctions de classes. Pour cela, il fallait réduire le fossé social qui séparait les travailleurs manuels des intellectuels, les citadins des ruraux, les ouvriers des agriculteurs.

Les transformations les plus radicales eurent lieu entre 1966 et 1978. Pendant la Révolution culturelle, presque toutes les écoles furent fermées. Plus de 130 millions d’enfants et d’adolescents cessèrent d’être scolarisés. Beaucoup d’entre eux furent les vecteurs de cette Révolution et participèrent au mouvement des « Gardes rouges «. Les écoles primaires et secondaires recommencèrent à fonctionner en 1968 et 1969, mais les établissements d’enseignement supérieur ne rouvrirent qu’entre 1970 et 1972.

La politique éducatrice changea radicalement au cours de cette période. La scolarité traditionnelle (d’une durée de 13 ans de la maternelle à la terminale) fut ramenée à 9 ou 10 ans pour le primaire et le secondaire. Les universités adoptèrent le cursus dit du « trois en un « : enseignement, recherche et production. Deux années de travail manuel obligatoires précédaient l’admission qui se faisait par l’intermédiaire des comités révolutionnaires sur des critères idéologiques.

À la mort de Mao Zedong en 1976, cette politique fut révisée. La scolarité se rapprocha de ce qu’elle était avant la Révolution culturelle. Les programmes du primaire et du secondaire furent progressivement refondus pour atteindre douze années d’études, et il ne fut bientôt plus nécessaire d’avoir passé deux ans à la campagne pour entrer à la faculté.

L’un des changements les plus déterminants fut la restauration d’un examen national d’entrée à l’université. Cet examen constituait, avant 1966, un élément essentiel du mécanisme de mobilité sociale. Au cours de la Révolution culturelle, les adversaires de la tradition purent le supprimer sous prétexte qu’il favorisait une minorité d’élèves bénéficiant d’une tradition intellectuelle familiale. Lorsque les universités rouvrirent, de nombreux candidats furent admis en raison de leurs opinions politiques, de leur activité pour le Parti ou du soutien de leurs pairs. Cette méthode de sélection cessa d’être appliquée en 1977 avec le lancement de la campagne des Quatre Modernisations. Le bilan était alors catastrophique : 237,72 millions d’analphabètes de plus de 12 ans, dont 69 p. 100 de femmes.

Les objectifs de modernisation dans l’agriculture, l’industrie, la défense et la science réclamant de hauts niveaux d’aptitude, l’enseignement devait donc impérativement reposer sur des compétences théoriques et pratiques et non sur un quelconque clientélisme politique ou un esprit révolutionnaire.

En vue du xxie siècle et dans le cadre de l’économie socialiste de marché, l’État chinois a fourni de gros efforts. Ainsi, le « projet 211 « vise à définir 100 universités clés qui formeront aux métiers de demain. De 1978 à 1994, 220 000 jeunes sont allés étudier à l’étranger. La formation pour adulte va du télé-enseignement universitaire aux cours par correspondance ou du soir. En 1994, 2,3 millions d’adultes suivaient une formation dans le supérieur, 2,6 millions dans les écoles secondaires spécialisées et 47,5 millions dans le technique.

3.6 Vie culturelle

Pékin, Shanghai et Canton constituent les principaux centres culturels et artistiques de la Chine. Ces trois métropoles concentrent les plus grandes institutions du pays en matière d’arts et de culture (musées, théâtres, opéras, salles de spectacles, cirques, orchestres, bibliothèques, etc.). Parmi les sites les plus renommés de Pékin figurent la Cité interdite, ancienne résidence des empereurs de Chine aujourd’hui transformée en musée, le temple du Ciel, le palais impérial d’Été, le musée de l’Histoire et de la Révolution chinoise (1950), sur la place Tian’anmen, ou encore la bibliothèque de Pékin (plus de 6 millions de volumes). Célèbre pour ses jardins (Yuyuan, xvie siècle) et ses parcs, Shanghai abrite le musée d’Art et d’Histoire, qui renferme de remarquables collections de bronzes, de peintures et de porcelaines, ainsi que le musée de Sciences naturelles.

Malgré une diffusion croissante, les médias (radio, télévision) demeurent relativement peu développés, étant donné l’ampleur du marché chinois. Depuis les années 1980, la censure et la propagande idéologique ont connu un net relâchement au profit d’une réelle ouverture à la culture occidentale (musique, cinéma, littérature). Au début des années 1990, la Chine possédait 21,3 millions de postes de radio, 35,8 millions de téléviseurs (contre 7 millions en 1981) et 15 millions de téléphones. La presse écrite présente plus de 1 600 titres de journaux et magazines. Les plus importants sont le Renmin Ribao, à Pékin, quotidien tiré à 3 millions d’exemplaires sous le contrôle direct du Comité central du Parti communiste chinois, le Sichuan Ribao, le Guangming Ribao ou encore le Jiefang Ribao.

Voir aussi art chinois ; cinéma chinois ; opéra chinois ; littérature chinoise ; musique chinoise.

3.7 Société
3.7.1 La démocratie sur le papier

La Chine est en butte à une difficulté, la dissidence, ou plutôt les Chinois qui défendent publiquement une opinion différente de la ligne du Parti. Ceux-ci réclament la liberté de penser et d’agir, davantage de démocratie et le respect de la souveraineté des peuples. Bien que la Constitution de 1982 garantisse le respect des droits individuels et de l’opinion de chacun, il semble que le régime actuel ne respecte pas ces engagements. On estime à 50 millions le nombre d’« opposants « qui auraient été emprisonnés dans les camps de rééducation par le travail, les sinistres laogai aux conditions de vie inhumaines et qui affichent une triste devise « Le travail fait votre vie «. Environ 25 millions de Chinois en seraient morts.

En 1979, Deng Xiaoping arriva au pouvoir, et promit un assouplissement. De plus, il libéra l’un des plus célèbres contestataires, Harry Wu, qui avait passé dix-neuf années en laogai. Cependant, ses promesses étaient davantage destinées à encourager les investissements étrangers dans le cadre d’une économie socialiste de marché.

Aussi, la voix des opposants se fit de plus en plus forte jusqu’aux fameuses manifestations de la place Tian’anmen, réprimées dans le sang en juin 1989. La contestation devint alors discrète jusqu’en 1993, date à laquelle des pétitions commencèrent à circuler dans le pays, réclamant une plus grande participation des citoyens à la vie publique. Mais ce mouvement fut une nouvelle fois étouffé et les derniers dissidents condamnés rapidement à de très lourdes peines d’emprisonnement.

En 1994, la Chine, pour faire bonne figure lors de la candidature de Pékin pour l’organisation des jeux Olympiques, abandonna le terme de laogai. Mais le système répressif perdura. Aujourd’hui, il existe près de 2 000 camps rebaptisés « usines « ou « fermes «, et dirigés désormais comme des entreprises capitalistes. Environ 6 à 8 millions de Chinois, dont 10 p. 100 de prisonniers politiques, y fabriquent des produits manufacturés (fleurs artificielles, moteurs, vêtements, etc.) exportés dans le monde entier.

Il existe en outre 68 types d’infractions passibles de la peine de mort. En 1996, 2 300 condamnations à mort ont ainsi été exécutées. Le 30 octobre 1996, Wang Dan, ancien leader des manifestations de 1989, fut renvoyé en camp de travail pour onze années supplémentaires à l’issue d’un procès prétendument public (il été libéré et expulsé, depuis lors (1998), vers les États-Unis). Certains dissidents ont pu s’exiler à l’étranger, comme Wang Juntao (États-Unis) ou le syndicaliste Han Dongkang (Hong Kong). Lui Xiaobo, célèbre critique littéraire, fut condamné, quant à lui, à trois ans de détention pour avoir proposé un véritable dialogue avec le dalaï-lama.

La Chine étant devenue aujourd’hui l’objet de toutes les convoitises, de plus en plus de puissances occidentales séparent, dans leurs relations avec cet État, les droits de l’homme de l’économie, à l’image de la France qui, dans un souci de pragmatisme économique, refusa de recevoir officiellement le dalaï-lama en 1996 de peur de froisser Pékin. Plus récemment, elle s’est opposée à tout projet de résolution de l’Union européenne visant à condamner la violation des droits de l’homme en Chine.

3.7.2 Les sociétés secrètes

Le retour de Hong Kong à la Chine pose aujourd’hui le problème des sociétés secrètes. Les triades sont en effet à Hong Kong et à Taïwan ce que la mafia est à la Sicile ou aux États-Unis.

La naissance des sociétés secrètes obéit à l’origine à des désirs patriotiques. La première remonte à 1644, avec la chute des Ming que remplacèrent les Qing mandchous. Cinq bonzes du monastère de Shaolin, haut lieu des arts martiaux, fondèrent la ligue des Hung dans le but de renverser les Qing. Pendant plus de deux siècles, les clans et les ligues jouèrent des rôles divers, tels les Boxers qui se révoltèrent entre 1898 et 1900. En 1904, Sun Yat-sen se lia avec les Hung et proclama la République en 1911. Après 1949, certaines sociétés secrètes, qui avaient combattu les communistes dans les années 1930 pour le compte de Jiang Jieshi, se réfugièrent à Taïwan ou à Hong Kong, qui devint l’une des plaques tournantes de la drogue venant du Triangle d’or.

Aujourd’hui, Hong Kong compte 56 triades aux activités multiples (racket, jeu, prostitution, docks, parkings, etc.). La plus puissante est le Sun Yee On (56 000 membres), qui possède des ramifications à tous les niveaux de la société et de l’administration, de la police à la commission anticorruption, et qui contrôle l’industrie cinématographique.

4 ÉCONOMIE
4.1 Généralités
4.1.1 Tradition et changement

Depuis 1992 et le XIVe Congrès du Parti, la Chine obéit aux lois d’une « économie socialiste de marché «. D’origine socialiste, c’est-à-dire reposant sur un partage équitable des richesses et la propriété collective sous l’égide de l’État, cette économie est aujourd’hui bousculée par les lois de la compétition internationale et de la mondialisation. Pékin se doit, d’un côté, de préserver ses préceptes communistes et, de l’autre, de mener le pays dans la voie du développement en attirant les capitaux étrangers et en appliquant des méthodes qu’elle qualifiait autrefois de capitalistes.

L’économie socialiste de marché vise à privilégier le secteur public tout en veillant à développer les autres domaines de l’économie. Pour cela, elle s’appuie sur une modernisation et une gestion nouvelle des entreprises d’État. Le but recherché est de créer un marché intérieur équilibré entre villes et campagnes et un vaste marché international. L’État n’a plus qu’un regard macroéconomique et se charge de contrôler le bon fonctionnement de l’économie nationale (protection sociale, distribution des revenus, encouragement et équilibre des richesses).

Cette politique d’ouverture et de libéralisation de l’économie a eu un résultat très positif. Le PIB chinois a connu en dix ans une forte croissance. Il est ainsi passé de 367,9 milliards de dollars en 1985 à 581,1 milliards en 1993 et à 2 645 milliards de dollars en 2006. Malgré cette croissance vertigineuse, la Chine demeure un pays essentiellement rural et pauvre, accusant un important retard économique. La population active comprenait 781 millions de personnes en 2006, dont 44,1 p. 100 de femmes.

4.1.2 Révélation de la puissance chinoise

Dès 1949, et jusqu’en 1961, date de la rupture avec l’URSS, la Chine a calqué son développement sur le modèle soviétique. Elle a connu trois périodes de croissance : 1949-1952 et la reconstruction du pays suivie par le premier plan quinquennal (1953-1957) ; 1963-1965 et la correction des erreurs du Grand Bond en avant ; 1977-1982 avec les Quatre Modernisations. Mais le pays a également traversé deux grandes crises : 1958-1962 et le désastreux Grand Bond en avant de Mao Zedong ; 1966-1976 et la Révolution culturelle.

Jusqu’à la fin des années 1970, les matières premières et les équipements destinés aux entreprises d’État étaient fournis par le gouvernement. La production était ensuite gérée et redistribuée par l’État. Ainsi, les biens de consommation nécessaires à la population rurale étaient distribués par un organisme d’État, la Coopérative de fourniture et de distribution. Les biens essentiels (céréales, huile, viande, sucre, tissus de coton) étaient rationnés en raison de leur relative rareté et leurs prix fixés très bas pour les rendre accessibles à tous. Une grande partie de la rémunération versée aux familles rurales était constituée de céréales.

Les années des Quatre Modernisations ont vu la libéralisation des prix et l’apparition des premières sociétés privées (100 000 en 1978, 17 millions en 1985). En 1980 ont été créées les premières ZES (zones économiques spéciales), de type capitaliste et destinées, grâce à l’apport des capitaux étrangers, à produire pour l’exportation. Ce sont Xiamen (Fujian), Zhutai, Shantou et, surtout, Shenzhen (Guangdong). De ce fait, les investissements extérieurs ont afflué (34 milliards de dollars entre 1979 et 1992), notamment en provenance de Hong Kong, encourageant ces régions à gagner en autonomie. En 1984, 14 ports (dont l’île de Hainan) ont été ouverts aux capitaux étrangers, ce qui a eu pour effet de stimuler encore davantage le secteur privé et la libéralisation des prix.

Ce processus allait être fortement entravé par les répercussions du massacre de la place Tian’anmen en 1989. Les nations occidentales ont en effet protesté par des sanctions économiques à l’égard de la Chine. Le pays était alors sur le point d’être repris en main par les partisans de la ligne dure du régime. Cependant, Deng Xiaoping est parvenu à maintenir le cap de la croissance tout en ménageant ces derniers. En 1992, il a lancé le concept d’une « économie socialiste de marché pour les cent prochaines années «, suivi en juillet 1993 d’un plan d’austérité en « 16 points «.

4.1.3 Croissance et inégalités

La croissance de l’économie chinoise est l’une des plus fortes du monde. Elle s’élève à près de 10 p. 100 en moyenne pour la période 1990-2003. En 2005, le calcul du PIB de la Chine en incluant Hong kong et en tenant mieux compte du secteur privé fait apparaître le pays comme la quatrième puissance mondiale, mais sa population demeure largement pauvre (le PNB par habitant classe la Chine 147e sur 227 en 2004). Elle pèse d’un poids toujours plus grand dans l’économie mondiale, notamment par ses besoins en matières premières et par ses exportations, de textiles entre autres. Elle est ainsi devenue le premier consommateur du monde d’acier, de cuivre et de zinc, le second pour l’aluminium et le pétrole et le troisième pour le nickel. En 2004, Shanghai est devenu le second port mondial en volume de marchandises traitées (380 millions de tonnes de marchandises traitées), derrière Singapour, et devant Rotterdam, ce qui atteste également de la formidable croissance de la Chine. L’objectif des dirigeants chinois est désormais d’éviter une surchauffe de l’économie et de contenir l’inflation.

Le succès de l’économie chinoise va aujourd’hui de pair avec une absence inquiétante de réformes des structures, notamment en ce qui concerne la modernisation de l’agriculture et de l’industrie. Une grande partie des richesses se concentrent entre les mains de réseaux familiaux proches du pouvoir et qui appliquent des méthodes capitalistes. Elles sont également sous la coupe des entreprises collectives et locales sur lesquelles l’État n’exerce plus de contrôle.

Autrefois déterminée par une planification centralisée, la circulation des marchandises obéit aujourd’hui, du moins en grande partie, aux lois du marché. Entre 1978 et 1984, la part du commerce de détail contrôlée par l’État est passée de 90,5 p. 100 à 45,8 p. 100. Pour la même période, la part des entreprises collectives est passée de 7,4 p. 100 à 39,6 p. 100 et celle des entreprises privées de 2,1 p. 100 à 14,6 p. 100. Le passage progressif du pays à l’économie capitaliste a donc favorisé l’expansion du secteur privé. En 1994, on dénombrait 260 000 entreprises à capitaux mixtes ou entièrement étrangers. En 2003, les investissements directs étrangers s’élevaient à 53,5 milliards de dollars.

Cette évolution sans précédent a bouleversé la structure socio-économique du pays. Le revenu moyen des citadins a triplé, tandis que celui des agriculteurs doublait en moyenne. Mais le progrès ne profite pas à tout le monde. Les révoltes ouvrières et dans les campagnes pauvres, dues aux restructurations et aux licenciements massifs dans le secteur public, au droit du travail bafoué ou encore à la réquisition de terres, sont en augmentation (87 000 affrontements en 2005 contre 10 000 en 1995). Il existe en outre trois Chine. La Chine maritime, avec ses dix provinces et ses trois grandes municipalités autonomes (Shanghai, Pékin, Tianjin), assure 53 p. 100 de la production industrielle et agricole du pays alors qu’elle n’abrite qu’un tiers de la population. La Chine du Sud connaît aujourd’hui un développement rapide avec les zones économiques spéciales du Guangdong et du Fujian, des ports très actifs comme Shantou ou Canton et, bien sûr, Hong Kong. La Chine de l’Ouest et de l’intérieur, qui représente 70 p. 100 du territoire pour seulement 28 p. 100 de la population, ne fournit que 17 p. 100 de la production économique. Un habitant du Guizhou gagne aujourd’hui dix fois moins qu’un résident de Shanghai.

4.2 Agriculture, forêts, pêche

Le secteur primaire, base traditionnelle de l’économie chinoise, fournissait 11,7 p. 100 du PIB en 2006, contre 32 p. 100 en 1975, et utilisait encore en 2002 44,1 p. 100 de la population active (contre 76,3 p. 100 en 1975). Seuls 10,5 p. 100 du territoire chinois sont cultivables, dont environ la moitié sont irrigués. La Chine est le pays qui comporte le plus de terres irriguées au monde. L’agriculture chinoise est régulièrement soumise aux aléas climatiques (inondations, sécheresse, variabilité annuelle des précipitations, tempêtes de poussière et de grêle, etc.). Les récoltes de céréales sont ainsi régulièrement déficitaires.

4.2.1 Cultures

La Chine est le premier producteur mondial de céréales au monde. Environ 85 p. 100 des terres labourées sont consacrées à la culture de trois céréales (riz, blé, maïs). Au milieu des années 2000, elle était le premier producteur mondial de riz et de blé et le deuxième producteur mondial de maïs, derrière les États-Unis.

La céréale la plus abondante est le riz, avec 32 p. 100 des terres cultivées, une production de 184,07 millions de tonnes en 2006 et d’excellents rendements. Le bassin du bas et moyen Yang-tseu-kiang fournit, à lui seul, 70 p. 100 de la production nationale de riz. Vient ensuite le blé, avec 32 p. 100 des terres cultivées, une production de 104,5 millions de tonnes en 2006 et de bons rendements. Enfin, le maïs occupe 21 p. 100 des terres mises en culture, avec une production de 145,6 millions de tonnes.

Parmi les céréales cultivées dans le nord et la Mandchourie figurent également le millet (1,8 millions de tonnes en 2006, et le sorgho (2,5 millions de tonnes en 2006). Ce dernier est aussi utilisé comme fourrage et pour la distillation d’une boisson alcoolisée, tandis que ses tiges sont destinées à la fabrication de papier et utilisées comme matériau de toiture.

Parmi les autres cultures figurent l’orge (3,4 millions de tonnes en 2006) ; la patate douce (100,2 millions de tonnes en 2006) ; des légumes, dont la pomme de terre (70,3 millions de tonnes en 2006,) ; le tabac (2,8 millions de tonnes en 2006) ; les fruits (93,4 millions de tonnes en 2006), et notamment la banane, l’ananas et les agrumes (oranges et mandarines). Au milieu des années 2000, la Chine était le premier producteur mondial de pommes de terre, de tabac et de fruits.

Les oléagineux (83,3 millions de tonnes en 2006) constituent une part notable de la production et des exportations. La Chine en était le deuxième producteur mondial au milieu des années 2000 derrière les États-Unis. Le plus important est le soja, sur environ 8 p. 100 de la surface cultivée, avec une production de 15,5 millions de tonnes en 2006. Viennent ensuite l’arachide, le sésame, le tournesol et l’abrasin (qui fournit une huile recherchée destinée à des fins industrielles).

La Chine exporte traditionnellement du thé. En 2006, elle en a produit 1 049 500 tonnes. Elle occupait le deuxième rang mondial derrière l’Inde au milieu des années 2000.

La production de sucre est issue pour l’essentiel de la canne à sucre (100,7 millions de tonnes en 2006), mais aussi de la betterave sucrière introduite relativement récemment (en 2006, la production était estimée à 10,5 millions de tonnes).

En ce qui concerne les fibres textiles naturelles, la Chine était également le premier producteur mondial de coton au milieu des années 2000(6,7 millions de tonnes en 2006). La ramie, une plante indigène similaire au chanvre, et le lin sont utilisés pour la fabrication de vêtements délicats, le jute et le chanvre pour la fabrication de sacs et de cordes. La soie naturelle , dont la production repose sur la sériciculture (élevage des vers à soie), est également un produit chinois traditionnel.

4.2.2 Élevage

La Chine possède un cheptel important et diversifié (plus de 400 espèces animales). Elle occupait au milieu des années 2000 la première place du classement mondial en ce qui concerne l’élevage des porcins, ovins, caprins, chevaux et volailles, et la troisième pour les bovins et les buffles. En raison des habitudes alimentaires, les porcins abondent (511 millions de têtes en 2006). Le pays est d’ailleurs le plus gros exportateur de soies de porc. Viennent ensuite les ovins (173,9 millions de têtes), les bovins (117,8 millions de têtes), les caprins (199 millions), les buffles (22,8 millions), le cheval (7,4 millions) et les volailles (5,36 milliards). Le chameau est élevé dans l’ouest et le nord désertique. Enfin, au Tibet, le yack est une source de nourriture et de combustible (bouse séchée) tandis que son poil et sa peau servent à fabriquer des vêtements.

4.2.3 Organisation de l’activité agricole

L’agriculture chinoise reste encore très traditionnelle et emploie une main-d’œuvre surabondante. En 2002, le pays comptait moins de 1 million de tracteurs quand les États-Unis en utilisaient plus de cinq fois plus. La croissance continue de la production et des rendements agricoles peut être attribuée, en partie, à une productivité accrue.

L’activité agricole repose, pour l’essentiel, sur des millions de petites exploitations familiales et sur environ 2 000 fermes d’État. Ce type de structure a été créé à l’arrivée au pouvoir de Mao Zedong, en 1949, alors que 80 p. 100 des champs (1,08 million de km2) appartenaient à de grands propriétaires terriens qui en ont été dépossédés au profit de 300 millions de paysans.

La collectivisation de l’agriculture débute en 1953 avec la création de coopératives afin de partager la terre, devenue propriété collective, et les moyens de production. La Chine agricole se retrouve ainsi exploitée par 800 000 coopératives de 600 à 700 personnes. Puis, en août 1958, dans le cadre du Grand Bond en avant, 26 000 Communes populaires (CP ; renmin gongshe) sont créées. Chacune de ces CP regroupait 30 coopératives de 25 000 personnes et était divisée en plusieurs brigades de production, subdivisées en équipes. Mais ces structures, bien que très productives dans les premiers temps, allaient se montrer inefficaces, forçant même Pékin à importer des céréales. Les famines de 1959 et 1961 ont ainsi été particulièrement désastreuses. Pourtant, cette politique est poursuivie jusqu’à la mort de Mao, son initiateur, qui refuse de la mettre en doute.

En 1979, la quasi-totalité de la population rurale (environ 838 millions de Chinois) se répartit dans environ 52 000 CP. Le gouvernement décide alors de restructurer le secteur agricole afin de supprimer le déficit alimentaire chronique de la Chine et d’augmenter la consommation alimentaire par habitant. Le principe des CP est largement démantelé (il en reste encore quelques exemples), et le cercle familial devient la principale unité de production. Dans ce « système de responsabilité «, complété en 1984 et toujours en vigueur, la terre est entièrement exploitée par un foyer et fait l’objet d’un contrat héréditaire. Cet accord passé avec les autorités locales fixe un quota de production. Si le paysan le dépasse, il peut vendre l’excédent sur le marché libre. Aujourd’hui, ces ventes représenteraient environ 60 p. 100 de la production. La famine a, quant à elle, disparu.

Toutefois, la forte croissance de la production annuelle depuis 1949 a été en partie annulée par la rapide expansion démographique, qui a pour corollaire la diminution des terres agricoles. Par exemple, entre 1952 et 1979, le secteur céréalier s’est accru de 103 p. 100, alors que cette production, rapportée au nombre d’habitants, n’a augmenté que de 20 p. 100. Puis, entre 1979 et 1987, la productivité a doublé, les paysans ont commencé à mieux vivre et le pays a pu exporter certains produits (riz, soja, coton, notamment).

Cependant, la croissance démographique s’est poursuivie, parallèlement, à un rythme certes moins rapide mais encore soutenu. Pour pallier ce problème, il faudrait financer des infrastructures visant à améliorer le transport des marchandises, moderniser les moyens de production (matériel, engrais, etc.) et, plus largement, l’ensemble de l’agriculture chinoise. Cet objectif paraît difficile à atteindre, en raison de l’absence de réformes et des réductions budgétaires.

De même, une réorganisation administrative massive permettrait de mieux réguler le marché et de contrecarrer l’exode rural dû, en grande partie, à la main-d’œuvre pléthorique des 18,67 millions d’entreprises rurales.

En 1995, des révoltes paysannes ont éclaté afin de réagir contre une fiscalité trop lourde et souvent illégale, imposée par des potentats locaux.

4.2.4 Le déficit de terres

Bien que de nouvelles surfaces aient été ensemencées (notamment en Mandchourie et dans la Chine du Nord-Ouest), la diminution des terres cultivées (souvent affectées à d’autres usages), combinée avec la démographie galopante, est plus rapide. Ainsi, la moyenne des terres cultivées par habitant est passée de 0,18 ha en 1949 à 0,11 ha en 1979.

Entre 1949 et 1986, les paysans ont défriché 251 000 km2 tandis que 407 000 km2 disparaissaient, soit un déficit de 156 000 km2. En 1989, la Chine avait ainsi perdu 170 000 km2 de terres arables. Deux phénomènes expliquent cette perte. Le premier est imputable à l’homme (urbanisation, infrastructures, industrialisation, etc.). Le second, d’ordre naturel, concerne l’érosion des sols, la désertification et la déforestation qui modifient les conditions de drainage. Pour lutter contre ces atteintes, des travaux d’irrigation ont été menés (nord-ouest de l’Hubei par exemple) et près de 50 p. 100 des terres sont aujourd’hui irriguées. Toutefois, le réseau d’irrigation, très complexe, nécessite un entretien permanent et contraignant. Enfin, le reboisement contribue efficacement à lutter contre les inondations qui ravagent les champs.

Les quelques centaines de milliers de kilomètres carrés potentiellement utilisables, à l’ouest et au nord-est, ne suffiraient pas à compenser ce déficit chronique de terres agricoles. C’est pourquoi l’agriculture chinoise privilégie aujourd’hui le rendement.

4.2.5 Principales régions agricoles

Le riz est surtout cultivé au sud de la rivière Huai, notamment dans les bassins du bas et du moyen Yang-tseu-kiang, dans le delta du Zhu jiang (région de Canton) et dans le Bassin rouge du Sichuan. Le blé domine au nord de la rivière Huai. Les principales zones céréalières sont la Grande Plaine du Nord, les vallées du Wei he et du Fen he, et les hauts plateaux lœssiques aménagés en terrasses. Le maïs est cultivé essentiellement dans le Nord et le Nord-Est.

L’avoine abonde surtout en Mongolie-Intérieure et dans l’ouest (Tibet). La patate douce prédomine dans le Sud, la pomme de terre dans le Nord. Les fruits vont des espèces tropicales telles que les ananas et les bananes (île de Hainan) aux pommes et aux poires (Liaoning, Shandong), en passant par les agrumes (dans le sud).

La moyenne vallée du Yang-tseu-kiang et les provinces méridionales du Fujian et du Zhejiang sont les grandes régions productrices de thé. La canne à sucre est cultivée principalement dans le Guangdong et le Sichuan, la betterave sucrière dans le Heilongjiang et en Mongolie-Intérieure. Le coton, qui peut pousser quasiment partout en Chine, concerne en priorité la Grande Plaine du Nord (environ 50 p. 100 de la production), les régions de lœss, ainsi que le delta et le bassin moyen du Yang-tseu-kiang. La sériciculture est répandue dans les régions centrales et méridionales, notamment dans le delta du Yang-tseu-kiang.

On peut également citer les principales zones de culture du soja (Nord, Mandchourie), de l’arachide (Shandong, Hebei, Guangdong, Guangxi, Liaoning, etc.), du colza (cours inférieur du Yang-tseu-kiang, bassin du Sichuan), de la ramie (bassin du Yang-tseu-kiang), du lin (Nord), du jute (Zhejiang, Guangdong) et de l’huile d’abrasin (dont 50 p. 100 de la production provient du Sichuan).

Enfin, la Chine possède 313 330 km2 de prés. Les pâturages naturels sont principalement situés en Mongolie-Intérieure (bœuf, cheval de Sanhe, mouton mongol), autour des massifs du Tian shan et de l’Altaï (cheval d’Ili, mouton à toison fine du Xinjiang, etc.) et sur le plateau du Tibet (yack). Dans l’ouest et le nord semi-désertiques, l’élevage des ovins, très souvent extensif, représente une ressource traditionnelle pour les populations semi-nomades. La plupart des troupeaux, dans ces régions, sont constitués de moutons, de chèvres et de chameaux.

4.2.6 Pêche et pisciculture

Avec 44 millions de tonnes de prises en 2003, la Chine était le 1er producteur mondial de poissons, l’élevage en eau douce représentant une part importante de la production.

La pisciculture est déterminante, car elle fournit un revenu complémentaire aux agriculteurs. C’est pourquoi l’État encourage cette forme d’activité depuis 1984. Elle se pratique dans des étangs et dans les bassins de retenue jouxtant les champs et les rizières. Les principales régions productrices se situent à proximité des villes, dans les bassins moyen et inférieur du Yang-tseu-kiang et dans le delta du Zhu jiang. L’élevage des carpes, véritable tradition millénaire, est une activité dominante.

Toujours depuis 1984, l’État développe la pêche hauturière. Celle-ci est représentée par 25 compagnies en Chine, et par une soixantaine d’entreprises à capitaux chinois ou à capitaux mixtes.

4.2.7 Sylviculture

Les ressources forestières de la Chine sont regroupées dans le nord-est et le sud montagneux. Malgré la déforestation passée et présente, elles se sont toutefois développées. Les programmes de reboisement ont permis de faire passer la surface des forêts de 8 p. 100 de la superficie totale en 1949 à plus de 20,6 p. 100 en 2005. La production annuelle de bois était de 298 millions de m³ en 2006.

4.3 Secteur minier et énergétique
4.3.1 Extraction minière

La Chine recèle de très abondantes ressources minérales, dont la production est considérable. Le sous-sol chinois renferme 148 minerais différents. Cependant, ceux-ci n’assurent pas l’autosuffisance, puisque la Chine a importé pour 33 milliards de dollars de pétrole et produits miniers en 2000. Au milieu des années 2000, la Chine était le premier producteur mondial de charbon et le cinquième de pétrole.

La production de charbon a atteint 1 483 millions de tonnes en 2003, soit plus du tiers de la production mondiale. Essentiellement destiné à la consommation intérieure, le charbon constitue le principal combustible industriel et domestique. Les principaux bassins houillers se trouvent au nord du Yang-tseu-kiang (Shaanxi, Henan, Liaoning, Hebei, Heilongjiang, Mongolie-Intérieure).

Grâce au développement rapide de l’extraction du pétrole depuis les années 1950, la Chine produit 1,2 million de barils par an en 2004. Les réserves sont estimées à 3,2 milliards de tonnes. Le pays est parvenu à l’autosuffisance en essence en 1963. Dix ans plus tard, il exportait du pétrole brut et des produits raffinés mais, en 2003, il est devenu le plus gros consommateur de pétrole au monde et il importe désormais le tiers de sa consommation. Parmi les 370 champs pétrolifères que compte le pays, le gisement de Daqing, situé dans le bassin du Songliao (Heilongjiang), est actuellement le plus productif. Il fut découvert et développé à la fin des années 1950. Parmi les autres gisements mis en exploitation dans les années 1950 figurent les champs pétrolifères de Shengli (Shandong) et de Liaohe (Liaoning). D’autres sont plus récents, comme le bassin du Tarim (Xinjiang), qui renferme les plus grosses réserves du pays. Il existe également des gisements offshore à Changbei (golfe de Bohai) et dans la mer Jaune (au large de Shanghai), mais aux coûts encore excessifs.

Le gaz naturel (34,1 milliards de m3 en 2003) occupe une place moins importante. Les principaux gisements se trouvent dans le Sichuan, dans le sud de l’île de Hainan et dans la mer de Chine méridionale.

Au milieu des années 2000, la Chine était à la première place mondiale pour la production de zinc, d’antimoine, d’étain et de tugnstène, à la seconde pour le plomb et le cadmium, à la troisième pour le minerai de fer, les phosphates, le molybdène et le mercure, à la quatrième pour l’or, à la cinquième pour le manganèse et la bauxite et à la huitième pour le cuivre.

La production de minerai de fer a augmenté rapidement dans les années 1970 et au début des années 1980 pour atteindre 102 millions de tonnes en 2004 , avec des réserves estimées à 48,7 milliards de tonnes. En 2004, la Chine produisait également 2,26 millions de tonnes de zinc, 110 000 tonnes d’antimoine, de l’étain (90 000 t) et du tungstène (4 900 t), du plomb (1 millions de tonnes),du cadmium (2 600 t), des phosphates (7,65 millions de tonnes), du molybdène (30 000 t), du mercure (203 t), de l’or (215 tonnes), du manganèse (900 000 tonnes), de la bauxite (15 millions de tonnes) et du cuivre (620 000 tonnes).

4.3.2 Production d’énergie

La Chine était également au milieu des années 2000 le second producteur mondial d’électricité, avec un total de 1 807 milliards de kWh en 2003.

Le charbon assure 53 p. 100 de la production d’électricité. Il alimente de nombreuses centrales thermiques dont 26 possèdent une capacité supérieure à 1 milliard de kWh. La plus importante d’entre elles est située à Jianbi (Jiangsu), avec une production de 1,625 milliard de kWh.

La Chine bénéficie d’un énorme potentiel hydroélectrique, dont seulement 5 p. 100 sont exploités. L’hydroélectricité assure 15 p. 100 de la production électrique (278,5 milliards de kWh en 2003,). Elle est fournie par des centrales hydrauliques, comme celles de Liujia Xia sur le Huang He (Gansu) ou de Xin’an jiang (Zhejiang). Sept d’entre elles fournissent plus de 1 milliard de kWh, dont celle de Gezhouba (2,715 milliards), établie juste en dessous des Trois Gorges du Yang-tseu-kiang. La Chine compte 70 grands barrages, surtout sur le Yang-tseu-kiang, sur lequel s’élève notamment le plus grand barrage du monde, le barrage des Trois-Gorges, achevé en 2006 et qui devrait être capable de produire 84,7 milliards de kWh par an à partir de 2009. Ces barrages permettent à la Chine de se placer, au milieu des années 2000, à la troisième place mondiale pour la production électrique d’origine hydroélectrique. L’administration locale et les communes rurales ont intégré le potentiel hydroélectrique à leurs programmes de conservation de l’eau, notamment dans le sud, où les précipitations sont importantes et où les cours d’eau connaissent un régime souvent capricieux.

Le nucléaire, encore discret, fournit 2,31 p. 100 de la production d’électricité. Il est surtout présent à Daya Bay (Guangdong) et à Qinshan (Shanghai). Plusieurs centrales fonctionnant au méthane et alimentées par des déchets ont également vu le jour au cours des années 1980.

Cette énorme production électrique ne suffit cependant pas aux besoins du pays, notamment dans les villes. La vétusté de certaines installations et le manque de réseau dans certaines régions amputeraient l’industrie de 20 p. 100 de sa production annuelle.

4.4 Secteur industriel
4.4.1 Évolution

L’industrie chinoise a connu une forte croissance au cours des dernières décennies. En 2002, elle employait 17,7 p. 100 de la population active et fournissait 48,40 p. 100 du PIB en 2006 (contre 38,4 p. 100 en 1970).

À partir de 1949, l’industrie progresse de 4 à 4,5 p. 100 par an. La Chine s’inspire alors du modèle soviétique fondé sur la planification et le développement massif des industries lourdes. En 1958, dans le cadre du Grand Bond en avant, il est décidé d’amplifier cette progression. La production industrielle enregistre, cette année-là, une croissance de 33 p. 100. Mais dès 1959, cette croissance mirifique chute et le pays connaît, en 1961 et 1962, deux années de crise aggravées par le départ des conseillers soviétiques en Chine, après la rupture avec l’URSS (1961).

Les autorités chinoises orientent alors le développement industriel sur les industries semi-lourdes et légères. La croissance reprend jusqu’en 1965, année qui marque le début de la Révolution culturelle. Celle-ci replonge le pays dans la crise jusqu’en 1976, année de la mort de Mao Zedong. La démaoïsation et, surtout, l’arrivée de Deng Xiaoping marquent un tournant dans la politique économique chinoise. Le Parti s’oriente alors dans la stratégie de la « Porte ouverte « vers l’Occident capitaliste (période des Quatre Modernisations, 1979-1985) et met à nouveau l’accent sur l’industrie lourde qui engloutit, à elle seule, une grande partie des fonds.

Après une croissance rapide des industries lourdes, qui souffrent toutefois de la déficience des transports et de la production d’énergie, le gouvernement décide de réorienter ses investissements vers l’agriculture et les industries légères. Des fonds importants sont également affectés au bâtiment et aux travaux publics pour améliorer les conditions de vie des citadins et créer des emplois urbains.

De 1979 à 1982, le « système de responsabilité «, qui fonctionne déjà pour l’agriculture, est appliqué à l’industrie dont 30 p. 100 des structures de production accumulent les déficits. Parmi les mesures les plus importantes figurent la libération des prix, l’instauration de primes d’État à la productivité, le droit à la création d’entreprises privées ou encore la création de quatre zones économiques spéciales (ZES) sur le modèle capitaliste.

Depuis 1979, la croissance industrielle s’est accélérée, avec une moyenne annuelle de 11,9 p. 100 (16 p. 100 en 1995). En 1985, il existait 17 millions d’entreprises industrielles privées contre 100 000 en 1978. La production industrielle a, quant à elle, quadruplé entre 1985 et 1994.

Aujourd’hui, l’industrie se répartit entre les entreprises d’État, déficitaires et aux sureffectifs chroniques, et les entreprises privées capitalistes. Celles-ci, souvent très performantes, se localisent principalement dans les ZES. Pratiquant des bas salaires (dix fois inférieurs à ceux de l’Europe occidentale), elles sont très compétitives. La quasi-totalité de leur production est exportée. À partir des années 1980, l’injection dans l’économie de capitaux étrangers, sous forme de prêts et d’investissements, a permis à la Chine de se doter de technologies de pointe. Bell a implanté à Shanghai une usine de matériel téléphonique ; la France a fourni la centrale nucléaire de Daya ; des constructeurs automobiles comme Volkswagen ou Peugeot ont construit des unités de production.

4.4.2 Industries lourdes

Depuis 1949, la sidérurgie est un secteur fortement soutenu par le régime. En 2006, le pays a produit 417,5 millions de tonnes (1er rang mondial), contre 93,14 millions de tonnes dix ans auparavant, signe d’une croissance extrêmement rapide de ce secteur. La Mandchourie, la Chine du Nord et la vallée du Yang-tseu-kiang sont les principales régions productrices. Les principaux complexes sidérurgiques se trouvent à Anshan (la plus importante), Benxi, Pékin, Baotou, Taiyuan, Wuhan, Ma’anshan, Panzhihua, Chongqing, Shanghai, Tianjin, Urumqi, Jiuquan, Chengdu. La Chine propose aujourd’hui plus de 1 400 variétés d’acier et 20 000 types de laminés dont 80 p. 100 satisfont les besoins du pays.

Les autres secteurs sont la construction navale (4,5 millions de tonnes en 2001, 3e rang mondial), la mécanique lourde (locomotives, équipement minier et pétrolier, matériel de forage), le raffinage pétrolier, la pétrochimie (engrais, matières plastiques), la cimenterie (900 millions de tonnes en 2004, 1er producteur mondial).

L’industrie pétrochimique compte des usines dans la plupart des provinces et des régions autonomes (Pékin, Shanghai, Lanzhou, Shengli, Yueyang, Anqing, Canton). La Chine est notamment au milieu des années 2000 le premier producteur et le premier consommateur d’engrais au monde.

4.4.3 Industrie textile

Ce secteur occupe le premier rang mondial et emploie plus de 4 millions de personnes. Il comprend le coton et les fibres synthétiques, sans oublier le tissu, la laine, le lin, la soie, la teinture, la bonneterie et le prêt-à-porter. Les principales filatures de coton se situent dans les provinces du Shaanxi, Hubei, Hunan et Hebei. L’adhésion de la Chine à l’OMC a entraîné au 1er janvier 2005 la levée des quotas à l’exportation sur le textile chinois.

4.4.4 Mécanique, aéronautique et aérospatiale

La construction mécanique (machines, matériel de transports) constitue la plus grande partie de la valeur ajoutée industrielle. Les produits électromécaniques (notamment les équipements électrogènes et les machines à commande numérique) sont devenus des produits piliers de l’exportation chinoise. Par ailleurs, l’industrie automobile s’est considérablement développée : la production est passée de 1,4 million de véhicules en 1995 à 4,4 millions en 2003. De plus, le nombre de véhicules circulant sur les routes chinoises était de l’ordre de 20 millions en 2003.

Le secteur aéronautique est apparu dans les années 1950. Depuis, il s’est beaucoup diversifié dans les domaines militaire (bombardier, chasseur, hélicoptère, etc.) et civil (le « Yun 7 « fabriqué par la Compagnie de l’industrie aéronautique de Xi'an).

La Chine est également entrée dans l’ère spatiale le 24 avril 1970, en lançant son premier satellite baptisé Dong Fang Hong (« l’orient est rouge «) à l’aide d’une fusée Longue Marche (CZ-1). Depuis cette date, plus d’une centaine de satellites (scientifiques, militaires, météorologiques ou de télécommunications) ont été lancés par la Chine.

Le 15 octobre 2003, la Chine est devenue le troisième pays au monde — après l’ex-URSS et les États-Unis — à avoir envoyé un homme dans l’espace, dans le cadre d’un programme national. À bord du vaisseau Shenzhou 5 (Vaisseau divin), le colonel de l’armée de l’air Yang Liwei (38 ans) a effectué 14 révolutions autour du globe avant de revenir sur Terre, devenant ainsi le premier spationaute chinois (ou taïkonaute). Parallèlement au succès de ce premier vol habité, la Chine est en passe de devenir un sérieux concurrent sur le marché des satellites : la vente de satellites de télécommunications et les services de lancement proposés à des clients étrangers sont l’une des priorités de l’Administration nationale chinoise de l’espace (CNSA). Celle-ci a notamment assuré les lancements en décembre 2003 et en juillet 2004 des deux satellites sino-européens TC-1 et TC-2 (satellites scientifiques dénommés Double Star, destinés à l’étude des interactions entre le vent solaire et le champ magnétique terrestre).

4.4.5 Autres secteurs

Les autres secteurs de l’industrie chinoise sont très diversifiés : matières plastiques, industrie du jouet, industrie pharmaceutique, construction électrique et électronique (téléviseurs, machines à coudre), industries légères, réparties en 44 domaines (papeterie, carton, tannerie et fourrures, artisanat, électroménager, bicyclettes, etc.). L’industrie manufacturière chinoise exporte vers plus d’une centaine de pays (porcelaine, horlogerie, maroquinerie, etc.).

4.4.6 Principales régions industrielles

Jusqu’en 1984, le développement industriel était essentiellement dirigé vers les villes de Xi’an, Lanzhou, Jiayuguan, Chengdu, Chongqing et Kunming. Mais, depuis 1984, il profite surtout aux provinces maritimes de l’est (Hebei, Pékin, Liaoning, Shandong, Jiangsu, Shanghai, Zhejiang) et du sud (Fujian, Guangdong, Hong Kong, Hainan), où les investissements étrangers sont massifs.

4.5 Secteur tertiaire

En 2006, les services employaient 31,5 p. 100 de la population active et fournissaient 39,9 p. 100 du PIB.

4.5.1 Secteur financier

L’unité monétaire chinoise est le yuan renminbi. La Banque populaire de Chine est la banque d’émission de la monnaie. Le système financier est sous le contrôle de l’État mais, depuis 2005, de grandes banques d’État chinoises sont introduites en Bourse, s’ouvrant de ce fait aux capitaux étrangers. Cela a notamment été le cas de la Construction Bank of China ainsi que de la Bank of China (BOC) et, en 2006, de l’Industrial and Commercial Bank of China (ICBC), la première banque chinoise, qui a fait l’objet de la plus importante introduction en Bourse jamais effectuée, avec une collecte de plus de 22 milliards de dollars (17,4 milliards d’euros). L’Agriculture Bank of China est responsable du financement du secteur rural.

Hong Kong et Shanghai sont les deux places boursières du pays.

En 2005, les investissements étrangers atteignaient 79 milliards de dollars, contre 37 milliards de dollars dix ans avant. Parallèlement, en 2006, la dette extérieure chinoise s’élevait à 12 p. 100 du PNB national.

4.5.2 Transports

Les transports revêtent une importance capitale en Chine. En effet, ce pays immense aux reliefs contrastés a dû, pour accélérer l’essor de son économie, moderniser l’ensemble de ses réseaux qui péchaient par leur lenteur et leur insuffisance. Il a fallu, notamment, relier les provinces de l’Ouest qui, en raison des contraintes du milieu naturel, sont difficiles d’accès.

Le chemin de fer possède une réputation de lenteur et d’inconfort. Pourtant, il s’agit du principal mode de transport chinois, pour les personnes comme pour les marchandises. Le réseau ferroviaire, qui n’était que de 22 000 km en 1949, fait l’objet d’une vaste campagne de modernisation et d’expansion. L’objectif était d’atteindre environ 90 000 km en l’an 2000, et d’augmenter la part de lignes électrifiées et de lignes doublées, mais le réseau ne totalisait encore que 62 200 km en 2005.

Il existe deux lignes principales de chemin de fer. L’une, d’orientation nord-sud, suit la côte orientale et relie Pékin à Shanghai, Canton et au Viêt Nam au sud, ainsi qu’à Harbin puis à la Mongolie et à la Russie au nord-est. L’autre traverse le pays d’est en ouest, passant successivement par Lianyungang sur la mer Jaune, Zhengzhou, Xi’an, Baoji, Lanzhou et Urumqi, avant de rejoindre le Kazakhstan. Il existe également de nombreuses lignes secondaires, reliant notamment les axes principaux aux provinces du sud-ouest.

En 1949, la longueur du réseau routier et autoroutier chinois n’était que de 80 000 km et concernait surtout les ports côtiers et leurs arrière-pays. Elle dépasse désormais 1 930 543 km, et le fret comme le trafic passagers sont en continuelle augmentation.

Aujourd’hui, les principaux axes de communication relient donc Pékin aux capitales de toutes les provinces et aux régions autonomes, mais également à tous les grands ports (Shanghai, Fuzhou, Canton) et nœuds ferroviaires (Zhengzhou, Lanzhou, Urumqi, Chengdu, Shanghai). Le réseau s’étend également aux plaines, aux régions rurales et rend tous les districts et les bourgs accessibles. Des autoroutes devraient prochainement voir le jour : Shanghai-Nanjing, Shanghai-Hangzhou, Shenzen-Shantou, etc.

Desservie par un vaste aéroport international (Xijiao), Pékin est le principal carrefour aérien du pays. Le trafic aérien progresse régulièrement, aussi bien pour le fret que pour les voyageurs, tandis que les destinations, tant nationales qu’internationales, se diversifient. La compagnie nationale est Air China.

En 1994, la Chine disposait de plus de 110 000 km de cours d’eau navigables, avec une capacité de chargement et de déchargement de 260 millions de tonnes chaque année. La principale voie fluviale est constituée par le Yang-tseu-kiang et ses affluents, avec environ 18 000 km dont 6 000 km praticables toute l’année. Elle assure 70 p. 100 de l’ensemble du transport fluvial. Ses principaux ports sont Chongqing, Yichang et Wuhan. Il faut également citer le Xi jiang, navigable sur la quasi-totalité de son cours, et le Grand Canal Pékin-Hangzhou. Celui-ci est intégré, dans sa partie méridionale, aux systèmes locaux de canaux et de lacs, et des villes comme Suzhou, Wuxi et Changzhou constituent d’importants ports intérieurs. Dans certaines campagnes, les canaux d’irrigation et de drainage sont souvent utilisés par les paysans comme voies de navigation.

En raison de la longueur du littoral (14 500 km de côtes) et du grand nombre de ports industriels, le cabotage a longtemps été un moyen de transport important en Chine. Le développement de la navigation internationale, phénomène plus récent, a atteint son apogée avant la Seconde Guerre mondiale et n’a repris de l’importance qu’à partir de 1970. En 1994, le fret maritime a représenté 766 millions de tonnes, soit 12,9 p. 100 de plus qu’en 1993.

4.5.3 Tourisme

La Chine est une destination touristique et culturelle de plus en plus prisée. En 2006, 49,9 millions de visiteurs étrangers ont rapporté 24,3 milliards de dollars.

4.6 Commerce extérieur

Depuis 1994, la balance commerciale de la Chine enregistre une croissance régulière : l’excédent, qui s’élevait à 5,3 milliards de dollars en 1994, dépassait 100 milliards en 2005 et s’élevait à plus de 177 milliards en 2006 (soit une augmentation de 74 p. 100 en un an). Si les importations ont augmenté de façon significative (+ 20 p. 100 en 2006, notamment en raison des quantités de pétrole nécessaires, la Chine étant devenue le deuxième pays consommateur de pétrole au monde), les exportations ont bondi (+ 27,2 p. 100 en 2006). L’Union européenne, les États-Unis et le Japon sont les principaux partenaires commerciaux de la Chine, qui est parallèlement devenue un partenaire incontournable pour de nombreux autres pays, notamment en Afrique. La Chine représentait, en 2005, plus de 6 p. 100 du commerce mondial de marchandises (un chiffre qui a doublé en dix ans) et occupait ainsi le troisième rang mondial après les États-Unis et l’Allemagne.

5 HISTOIRE
5.1 La préhistoire

Les premiers vestiges attestant une présence humaine en Chine remontent au paléolithique inférieur. Il s’agit de restes fossiles de deux représentants de l’espèce Homo erectus : d’une part de l’homme de Lantian (Homo erectus lantianensis, anciennement Sinanthropus lantianensis) qui, mis au jour en 1963 à Xi’an (Shaanxi), vivait il y a plus de 530 000 ans, et d’autre part de l’homme de Pékin (Homo erectus pekinensis, anciennement Sinanthropus pekinensis) qui, découvert en 1922 à Zhoukoudian (dans la banlieue sud-ouest de Pékin), a vécu de – 500 000 à – 230 000 ans environ.

C’est par étapes que les peuples de langue et de culture chinoises se sont fixés sur le territoire de l’actuelle Chine. Au néolithique, la riziculture et la domestication du buffle semblent acquises. Au nord, dans l’actuelle province du Henan, existe alors une communauté agraire, la culture de Peiligang (6500-5000 av. J.-C.). Au sud, les fouilles de Xianrendong (Jiangxi) ou de Zengpiyan (Guangxi) ont révélé la présence d’ossements, de céramiques et d’outils datant également de la période néolithique.

Quelque cinq siècles plus tard, des sociétés agricoles se développent dans le bassin du Huang He. Deux d’entre elles se distinguent par leur importance et par la qualité de leurs céramiques. La culture de Yangshao (v. 4500-v. 2500 av. J.-C.) rayonne à l’ouest de la Chine (Gansu, Shaanxi, Shanxi, Henan) et à l’est (Henan, Hebei, Shandong, Jiangsu). La culture de Longshan (v. 2500-v. 1800 av. J.-C.), dans le Shandong, issue de celle de Dawenkou (5000-2200 av. J.-C.), profite des acquis de cette dernière et fonde les premiers sites urbains connus.

Après une période de transition, la tradition chinoise évoque le règne de souverains légendaires comme Pangu, Fuxi ou Huangdi. Ceux-ci auraient ensuite laissé place à des dynasties semi-mythiques, comme celle des Xia (2205-1766 ou 1989-1558 av. J.-C.), dans le Shanxi, fondée par Yu le Grand (Dayu). Mais la première dynastie avérée par l’histoire est celle des Shang, sous laquelle l’écriture chinoise se développe.

5.2 Premières dynasties
5.2.1 La dynastie Shang (xviiie-xiie siècle av. J.-C.)

La dynastie Shang ou Yin règne sur le nord et le centre de la Chine (Grande Plaine du Nord, Shanxi, Shaanxi, Hubei, Anhui). À partir de 1384 av. J.-C. environ, la capitale est établie à Yin, près d’Anyang, non loin de la frontière nord du Henan. L’économie est essentiellement agricole (mil, blé, orge, riz, élevage). Des armes, des outils et de la vaisselle de bronze retrouvés à l’occasion de fouilles archéologiques ont révélé l’existence d’une métallurgie assez sophistiquée.

La Chine des Shang est une société féodale fortement hiérarchisée en classes (aristocratie guerrière, religieux, paysannerie). Les seigneurs guerriers, qui reçoivent leur fief du souverain, s’engagent à assister celui-ci dans ses entreprises militaires. Les religieux, qui sont aussi des lettrés, s’occupent de l’administration, participent au gouvernement et pratiquent des divinations très élaborées sur des os ou des écailles de tortues.

Les rois Shang rendent un culte à leurs ancêtres royaux et à une multitude de dieux, dont le principal est Shangdi, le « Seigneur d’en haut «. L’écriture se compose alors de 3 000 signes. Au xie siècle, les Shang sont renversés par les attaques d’une cité vassale, qui fonde la dynastie Zhou.

5.2.2 La dynastie Zhou (xie siècle-221 av. J.-C.)
5.2.2.1 Les Zhou occidentaux

Originaire de la vallée du Wei he, la dynastie Zhou établit sa capitale à Hao, près de Xi’an (Shaanxi). Il y a d’abord l’époque des Zhou dits « occidentaux « (1027-771 av. J.-C.), qui règnent sur la moitié nord de la Chine et sur la vallée du Yang-tseu-kiang. Mais l’immensité du royaume et l’état primitif des communications empêchent les Zhou occidentaux d’exercer et de centraliser leur pouvoir. Vers le xe siècle av. J.-C., des mutations d’ordre social et politique se dessinent. Le pouvoir royal ne joue bientôt plus qu’un rôle d’arbitre entre des principautés aux mains d’une noblesse héréditaire.

La société Zhou reste profondément rurale (élevage, riz, sorgho, haricots, fruits, etc.). La terre est répartie en parcelles carrées divisées en neuf parties égales. Les huit parcelles extérieures sont attribuées à huit familles paysannes, qui associent leurs efforts et leurs ressources pour cultiver la parcelle centrale, dont la récolte est destinée à la noblesse. Ce système est considéré par les dynasties suivantes comme le mode de répartition le plus juste des terres arables.

5.2.2.2 Les Zhou orientaux

Les Zhou gardent le contrôle effectif de leur territoire jusqu’en 771 av. J.-C. À cette date, des soulèvements éclatent, favorisant l’invasion de tribus venues de l’ouest. Chassés, les Zhou établissent une nouvelle capitale dans l’est, à Luoyang (Henan). C’est l’époque des Zhou dits « orientaux « (770-221 av. J.-C.). Désormais à l’abri des attaques barbares, les souverains ne peuvent bientôt plus exercer d’autorité politique ou militaire sur leurs États vassaux, dont beaucoup se sont agrandis au point de devenir plus puissants qu’eux. Néanmoins, ils restent, aux yeux de tous, détenteurs d’un « mandat du Ciel «. Ainsi légitimés dans leur autorité politique, ils continuent à investir les seigneurs du pouvoir de gouverner leurs terres. La dynastie peut ainsi se maintenir jusqu’au iiie siècle av. J.-C.

La fin de l’ère Zhou se subdivise en deux périodes : celle des « Printemps et des Automnes « ou Chunqiu (722-481 av. J.-C.) et celle des « Royaumes combattants « ou Zhanguo (475-221 av. J.-C.).

Du viiie au iiie siècle av. J.-C., un rapide essor économique s’accompagne de transformations sociales, dans un contexte d’extrême instabilité politique et de guerres quasi incessantes.

C’est à cette époque que la Chine entre dans l’âge du fer, en 513 av. J.-C. La charrue à soc de fer tirée par un bœuf et l’amélioration des techniques d’irrigation autorisent de meilleurs rendements agricoles, et donc un accroissement de la population. La croissance démographique s’accompagne d’une production accrue de richesses et donne naissance à une nouvelle classe de négociants et de commerçants. Les découvertes scientifiques se multiplient (tables de multiplication, astronomie, etc.).

Ce développement économique permet aux souverains locaux de contrôler progressivement de plus grandes étendues de territoire. Les États vassaux, situés aux marges du monde chinois, s’étendent aux dépens des peuples voisins non chinois. Cette expansion leur permet d’enrichir et de diversifier leur propre culture. Ils apprennent notamment, au contact des peuples du nord-ouest, à former des unités de cavalerie. En revanche, pour les États vassaux du centre de la Chine, l’expansion ne peut se faire qu’en empiétant sur d’autres États de même civilisation, et cette uniformité engendre une stagnation culturelle. Ainsi, dès le vie siècle av. J.-C., sept royaumes puissants entourent les royaumes plus petits et plus faibles de la Grande Plaine du Nord.

Avec le déclin de l’autorité politique des Zhou et l’émergence de nouveaux États à la périphérie du territoire, les relations s’enveniment. À la fin du ve siècle av. J.-C., la Chine vit une période de luttes féodales incessantes entre les différents États (Qin, Han, Zhao, Chu, Yan, Qi, Wei) connue sous le nom de « Royaumes combattants « (voir Zhou).

5.2.2.3 Confucianisme et taoïsme

C’est au cours de cette longue période d’instabilité que naissent les grandes écoles de pensée de la philosophie chinoise, qui exercent une influence majeure sur le développement de la civilisation et sur l’État chinois durant les deux millénaires suivants.

Le premier, et de loin le plus influent des philosophes de cette époque, est Kongfuzi, connu en Occident sous le nom de Confucius. Fils instruit du gouverneur de l’État de Lu (actuel Shandong), issu de la petite noblesse, il représente la classe naissante des gestionnaires et des conseillers de cour dont l’aristocratie au pouvoir a besoin pour gérer l’administration intérieure et les relations inter-États. Confucius propose une restauration des institutions sociales et politiques des premiers Zhou, estimant que ces sages souverains ont cherché à établir une société idéale par l’exemple de leur vertu personnelle. C’est pourquoi il veut créer une classe de gentilshommes vertueux et cultivés, capables de prendre en charge les fonctions les plus hautes du gouvernement et de diriger le peuple, tout en se donnant en exemple. Il s’appuie sur une morale selon laquelle une pensée juste aboutit à une attitude juste, apanage du junzi, ou « homme bien né «, être à la fois droit, beau et bon. Par la suite, Mencius et Xunzi (v. 298-v. 238 av. J.-C.) reprennent et développent les théories de Confucius.

Une autre école de pensée politique fleurit et pèse durablement sur la civilisation chinoise : celle des « légistes «. Partisans d’une centralisation poussée à l’extrême, ces légistes entendent substituer aux coutumes et aux droits hérités du passé une réglementation pénale uniforme pour chaque aspect de l’activité humaine. Afin de pouvoir appliquer ce système, ils souhaitent l’établissement d’un État riche et puissant, où l’autorité du souverain serait incontestée. Ils réclament la socialisation du capital, la création de monopoles d’État et d’autres mesures économiques destinées à enrichir l’État, à renforcer sa puissance militaire et à centraliser le pouvoir administratif. Les principaux représentants de ce courant de pensée sont Shang Yang, Li Si, réformateur de l’État des Qin, et l’écrivain Han Fei.

Situés à l’opposé des moralistes confucéens et des légistes, les taoïstes sont à l’origine d’un courant de pensée toujours vivace en Chine. Selon leur philosophie, chaque progrès technique ne peut être qu’une étape de plus dans la perte des vertus naturelles de l’Homme et toute institution, un progrès de l’asservissement de l’être humain. Les deux textes fondateurs furent le Daodejing, ou « Classique de la voie et de sa vertu «, dû à Lao-tseu, et le Zhuangzi, écrit par Zhuangzi.

5.3 Naissance de l’Empire

Au cours du ive siècle av. J.-C., le royaume des Qin, l’un des États du nord-ouest, entreprend un programme de réformes administratives, économiques et militaires inspirées par l’un des principaux théoriciens du légisme, Li Si. En 256 av. J.-C., il absorbe celui des Zhou, ou, du moins, ce qu’il en reste. À partir de 230 av. J.-C., il soumet un à un les autres royaumes chinois (Han, Zhao, Chu, Yan, Qi, Wei), sous l’impulsion du jeune roi Qin, Ying Zheng.

5.3.1 La dynastie Qin (221-206 av. J.-C.)

En 221 av. J.-C., Zheng se proclame Qin Shi Huangdi, ou « Premier Auguste Souverain de la dynastie Qin «. Cette dynastie va donner son nom à la Chine.

Durant son règne (221-210 av. J.-C.), le premier empereur transforme un ensemble hétéroclite d’États quasi féodaux en un empire administrativement centralisé et culturellement unifié, dont la capitale se situe à Xianyang, à proximité de l’actuelle Xi’an. Les aristocraties héréditaires sont abolies et leurs fiefs divisés en provinces, dont l’administration est confiée à des gouverneurs directement nommés par l’empereur.

L’écriture est normalisée et son usage rendu obligatoire dans tout le pays. Pour favoriser le commerce intérieur et l’intégration économique, Shi Huangdi unifie les poids et mesures, la monnaie et la longueur des essieux (qui détermine la distance entre les ornières sur les routes).

Leur quête d’une uniformité culturelle pousse les dirigeants à bannir toutes les écoles de pensée qui ont fleuri à la fin des Zhou. Seul le légisme, qui a un statut officiel, est autorisé. En 213 av. J.-C., des confucéens sont enterrés vivants, tandis que leurs livres et ceux des autres écoles philosophiques interdites sont brûlés, à l’exception des volumes de la bibliothèque impériale.

Shi Huangdi cherche également à étendre son royaume. Au sud, ses armées atteignent le delta du Sông Hông (fleuve Rouge), au Viêt Nam. Au sud-ouest, l’empire s’étend à la plus grande partie des actuelles provinces du Yunnan, de Guizhou et du Sichuan. Au nord-ouest, il s’avance jusqu’à Lanzhou, dans l’actuelle province du Gansu. Au nord-est, une partie de la Corée doit prêter allégeance à l’Empire. Cependant, le centre de la civilisation reste dans le bassin du Huang He. Outre l’unification et l’expansion territoriale de la Chine, Shi Huangdi fait achever la construction de la Grande Muraille contre les invasions barbares.

À sa mort, en 210 av. J.-C., il est enterré dans un vaste mausolée près de Lintong (à 35 km de Xi’an). Ce site, mis au jour depuis 1974 (le tumulus où se trouve la tombe de Shi Huangdi lui-même n’ayant pas encore à ce jour été exploré), renferme une armée de terre cuite de plus de 6 000 soldats (grandeur nature), avec leurs chevaux et leurs chars de combat.

Mais les conquêtes militaires, la construction de routes et de ports, la Grande Muraille et d’autres grands travaux ont eu un coût financier et humain considérable. Une fiscalité de plus en plus lourde, la conscription obligatoire et le travail forcé inspirent un ressentiment profond dans la population à l’encontre du régime Qin, notamment dans les royaumes conquis, comme le royaume Chu dans le sud. De plus, l’empereur s’est aliéné les lettrés par une politique totalitaire de contrôle de la pensée, symbolisée notamment par les autodafés.

Après sa mort, son fils cadet Ying Huhai lui succède. Il prend le titre de Ershi Huangdi, mais tombe rapidement sous l’influence d’un eunuque du palais. Une lutte pour le pouvoir s’ensuit, qui paralyse l’administration centrale et indigne la population. Des révoltes éclatent. Ershi Huangdi, contraint au suicide (207 av. J.-C.), ne peut éviter l’écroulement de l’Empire.

5.3.2 Les Han antérieurs (206 av. J.-C.-9 apr. J.-C.)

Les trois dernières années de la dynastie Qin, marquées par des troubles et la guerre civile, voient l’émergence d’un chef rebelle, d’origine modeste, Liu Bang (voir Gaozu des Han). Après avoir éliminé les prétendants au trône, Liu Bang se proclame empereur de Chine en 206 av. J.-C. et fonde la dynastie des Han occidentaux (Xihan), ou antérieurs (Qianhan). La capitale est établie à Chang’an (actuelle Xi’an).

5.3.2.1 L’héritage

Les Han bâtissent leur empire sur les bases unitaires établies par Shi Huangdi. Mais ils abrogent les lois les plus contraignantes et allègent les impôts les plus impopulaires. L’empereur Liu Bang (202-195 av. J.-C.) commence par octroyer des royaumes à certains de ses anciens alliés et à des membres de sa famille. Cependant, au milieu du iie siècle av. J.-C., la plupart de ces royaumes sont repris par son fils, Wendi (180-157 av. J.-C.), et l’ensemble de l’empire est directement soumis à l’autorité impériale.

Les Han favorisent la renaissance du taoïsme et adoptent le confucianisme en tant qu’idéologie officielle. Néanmoins, désireux de le rendre universel, les Han y incorporent des idées empruntées à d’autres écoles de pensée, afin de compléter l’enseignement laissé par Confucius et ses disciples. L’administration, héritée des Qin, est très hiérarchique, mais ils nomment les fonctionnaires sur la base du mérite plutôt que de la naissance, suivant là un principe confucéen. La sélection et la qualification reposent sur des examens écrits. À la fin du iie siècle av. J.-C., une université impériale est créée pour enseigner aux futurs fonctionnaires les cinq classiques de l’école confucéenne.

5.3.2.2 Wudi le conquérant

La dynastie des Han antérieurs connaît son apogée sous le règne de Wudi (140-87 av. J.-C.). La quasi-totalité de la Chine actuelle est soumise à l’ordre impérial, même si de nombreuses régions, notamment au sud du Yang-tseu-kiang, ne sont pas encore complètement assimilées. L’autorité chinoise est établie au sud de la Mandchourie et au nord de la Corée. À l’ouest, les armées Han combattent les tribus nomades Xiongnu et Xianbei, peut-être apparentées aux Huns. Elles s’avancent jusqu’à la vallée du fleuve Iaxarte (actuelle Syr-Daria, au Kazakhstan), ouvrant ainsi la célèbre « route de la Soie «. Au sud, elles conquièrent l’île de Hainan et fondent des colonies autour du delta du Xi jiang ainsi qu’en Annam et en Corée.

Seulement, l’expansionnisme de Wudi épuise les réserves financières laissées par ses prédécesseurs et nécessite un retour au légisme pour renflouer le Trésor public. Les impôts sont majorés, les monopoles d’État restaurés et la monnaie dévaluée. Les souffrances endurées par les paysans sont aggravées par la croissance démographique qui réduit la superficie des exploitations, alors que les taxes augmentent. Les familles de grands propriétaires fonciers, défiant les collecteurs d’impôts du gouvernement central, acquièrent une sorte d’exonération fiscale. Au fur et à mesure que le nombre de ces « non-imposés « croît, l’assiette fiscale de l’empire diminue. Le fardeau supporté par les ruraux soumis à l’impôt se fait de plus en plus lourd. Les révoltes paysannes se multiplient et le banditisme se développe.

5.3.3 La dynastie Xin (9-23 apr. J.-C.)

Au cours de cette période de troubles et de désordres, un courtisan ambitieux, Wang Mang, dépose l’empereur, alors enfant, dont il assume la régence. Il crée la dynastie éphémère des Xin et tente de restaurer la puissance du gouvernement impérial et d’alléger le fardeau des paysans. Il lutte, notamment, contre les grandes propriétés exemptées d’impôts. Celles-ci sont confisquées au profit du domaine impérial et redistribuées aux paysans qui les cultivent. L’esclavage est aboli, les monopoles impériaux sur le sel, le fer et la monnaie renforcés, et de nouveaux monopoles établis. Mais la résistance des propriétaires est si forte que Wang Mang se voit contraint d’annuler sa réforme du régime foncier. La crise agraire s’intensifie, avec la détérioration progressive des systèmes de contrôle de l’eau mis en place dans la Chine du Nord, où une violente insurrection paysanne éclate, en 23 apr. J.-C., sous la conduite des « Sourcils rouges «. Ces derniers reçoivent bientôt l’aide des grands propriétaires, qui prennent d’assaut Chang’an et parviennent à tuer l’usurpateur Wang Mang. La dynastie Han est alors rétablie.

5.3.4 Les Han postérieurs (23-220)

Le prince Liu Xiu (23-55 apr. J.-C.), qui deviendra plus tard Guang Wudi, fonde la dynastie des Han postérieurs (Houhan), ou Han orientaux (Donghan). Leur capitale est Luoyang. Au ier siècle apr. J.-C., la Chine poursuit son extension vers l’ouest. Les Chinois, qui contrôlent la route de la Soie (grâce aux actions entreprises contre les Xiongnu et les tribus Wuhuan, Xianbei et Qiang par les généraux Ma Yuan et Ban Chao), développent un commerce actif avec les peuples barbares d’Occident. C’est par eux que le bouddhisme est introduit en Chine. Dès leur accession au pouvoir, les Han postérieurs souffrent de la faiblesse et de l’inefficacité de l’administration impériale. Comme sous les Han antérieurs, le gouvernement est miné par l’existence d’empereurs encore enfants et par le népotisme des familles impériales. Les empereurs finissent par s’en affranchir grâce aux eunuques du palais, qui gagnent ainsi en autorité et en influence. Le gouvernement est alors déchiré par des querelles intestines entre factions rivales et des luttes de pouvoirs. Entre 168 et 170, fonctionnaires et eunuques s’affrontent, les premiers reprochant aux seconds d’avoir usurpé leur fonction légitime. En 184, deux révoltes éclatent, menées par des sectes taoïstes. L’une, celle des « Turbans jaunes «, ravage le Shandong et les provinces voisines. L’autre, la « Société des cinq boisseaux de riz «, au Sichuan, n’est matée qu’en 215 par le général Cao Cao.

5.3.5 La division (220-581)
5.3.5.1 Le démembrement et le sursaut

L’empire des Han commence à s’effondrer lorsque les familles de grands propriétaires fonciers, profitant de la fragilité du gouvernement, constituent leurs propres armées. Le pays se fragmente en trois États et entre dans la période dite des « Trois Royaumes « (qui a inspiré de nombreux romans, opéras et récits populaires). En 220, Cao Pi, fils de Cao Cao institue la dynastie des Wei (220-265) dans le bassin du fleuve Jaune, avec pour capitale Luoyang. La dynastie Shu-Han (221-263) règne dans le sud (capitale Chengdu) et la dynastie Wu (222-280) dans le sud-est (capitale Jiankang, aujourd’hui Nankin). Ces trois royaumes se livrent une guerre incessante.

En 263, le royaume Wei s’empare de son voisin Shu. Deux ans plus tard, Sima Yan (265-289), puissant général du royaume Wei, usurpe le trône et fonde, dans le nord, la dynastie des Jin occidentaux (265-316). En 280, il réunit sous son autorité le Nord et le Sud. Mais peu après sa mort, en 290, l’unité du pays s’effondre de nouveau, en raison notamment de l’influence des familles de grands propriétaires. Ces derniers jouent de leur pouvoir par l’intermédiaire du système de classement en neuf grades, établi le plus souvent arbitrairement, par lequel les personnages importants de chaque région administrative classent les familles et les individus selon les services qu’ils rendent à l’État.

Les tribus nomades et barbares, que les Han ont réussi à maintenir aux frontières, profitent de l’occasion pour étendre leurs zones de pâturage à la Grande Plaine du Nord. Les invasions débutent en 304. La Chine du Nord est rapidement submergée et, en 316, les tribus nomades chassent les Jin, qui s’installent à Nankin où ils fondent une nouvelle dynastie (dite des Jin orientaux). Pendant environ trois siècles, le nord du pays est soumis à une ou plusieurs dynasties non chinoises.

5.3.5.2 Trois siècles et deux Chine

Au ive siècle, la Chine est donc séparée en deux. Dans le Nord, c’est l’époque des « Seize Royaumes des Cinq [ethnies] Barbares « (Shiliu guo). Le territoire, très morcelé, a été envahi par plusieurs peuples barbares (Xianbei, Di, Jie, Qiang), avant de passer sous la domination partielle des Xiongnu en 304. Aucune de ces dynasties étrangères ne parvient à dominer la totalité de la Grande Plaine du Nord avant 420, date à laquelle l’ensemble de la région passe sous la domination de la dynastie des Wei du Nord (386-534), fondée par les tribus Tuoba, de fervents bouddhistes.

Au cours de la seconde moitié du Vve siècle, les Wei du Nord, dont la capitale est Pingcheng (aujourd’hui Datong), adoptent une politique de sinisation. La population rurale est soumise à une administration bureaucratique, sur le modèle des dynasties chinoises précédentes. Un service militaire obligatoire est imposé aux tribus. Les coutumes et l’habillement chinois sont adoptés, et le chinois devient langue officielle de la cour. Cette politique de sinisation se heurte à une vive résistance des chefs des tribus nomades. Leur rébellion (révolte des Six Garnisons, vers 525) provoque la chute de la dynastie des Wei du Nord en 534. Pendant les cinquante ans qui suivent, le Nord retombe aux mains de dynasties non chinoises.

La Chine du Sud, où se sont réfugiés les Jin occidentaux, voit se succéder cinq dynasties chinoises successives, formant avec la dynastie des Wu (222-280) les Six Dynasties du Sud (selon une dénomination couramment adoptée) : Jin orientaux (317-420), Liu-Song ou Song (420-479), Qi (479-502), Liang (502-557), Chen (557-589). La capitale, qui se trouve à Jian Kang ou Jianye (Nankin), devient un important carrefour culturel.

5.4 Rétablissement de l’Empire
5.4.1 La dynastie Sui (581-618)

La Chine retrouve son unité avec la dynastie des Sui, qui a succédé, en 581, dans le Nord, aux héritiers des Tuoba. Son fondateur, le général Yang Jian, conquiert le sud de la Chine et établit sa capitale à Chang’an (Xi’an). Les Sui restaurent le système administratif centralisé des Han et les concours officiels pour le recrutement des fonctionnaires. Bien que le confucianisme soit la doctrine officielle, le taoïsme et le bouddhisme sont également reconnus par le régime dans sa formulation d’une nouvelle idéologie impériale. Le bouddhisme, déjà implanté, se répand rapidement et supplante progressivement le confucianisme.

La dynastie Sui règne sur une courte période, mais connaît une grande activité. La Grande Muraille est restaurée, au prix de nombreuses vies humaines. Un système de canaux, qui formera plus tard le Grand Canal, est construit afin de transporter l’abondante production agricole du delta du Yang-tseu-kiang jusqu’à Luoyang et dans le nord. L’Empire rétablit sa domination sur le nord du Viêt Nam et, dans une moindre mesure, sur les peuples d’Asie centrale. Une campagne militaire longue et coûteuse, menée contre un royaume situé au sud de la Mandchourie et au nord de la Corée, se conclut néanmoins par une défaite en 616. Son prestige terni, sa population appauvrie, la dynastie Sui est renversée en 617 par une révolte intérieure commandée par Li Yuan, qui fonde la dynastie Tang. Connu sous le titre posthume de Gaozu des Tang, il règne de 618 à 626.

5.4.2 La dynastie Tang (618-907)

La dynastie Tang constitue une période de puissance et de prospérité culturelle sans précédent dans l’histoire de la civilisation chinoise. Le système des examens impériaux utilisé pour le recrutement des fonctionnaires est encore amélioré (il reste en vigueur jusqu’au xxe siècle). Les organes des gouvernements impériaux et locaux sont restructurés, afin de former une administration centralisée. Un code élaboré de droit administratif et pénal est appliqué. La capitale, Chang’an, devient un centre culturel, cosmopolite et religieux rayonnant sur tout le royaume. De nombreuses religions et courants de pensée sont pratiqués (christianisme nestorien, islam, bouddhisme, manichéisme, entre autres). De nouvelles relations commerciales se développent avec l’Asie centrale et l’Occident le long des routes empruntées par les caravanes. À Canton (Guangzhou), de nombreux marchands venus du Proche-Orient pratiquent le commerce maritime. Sous les Tang, l’influence chinoise s’étend à la Corée, au sud de la Mandchourie et au nord du Viêt Nam. À l’ouest, ils prennent le contrôle du bassin du Tarim et leur influence s’étend jusqu’à l’actuel Afghanistan.

5.4.2.1 Le système administratif

La puissance économique et militaire de l’empire Tang repose sur un système d’égale répartition des terres entre la population mâle adulte. L’impôt agricole payé par chacun des bénéficiaires de cette répartition constitue la principale recette fiscale du gouvernement. La milice, dans laquelle les Chinois doivent effectuer un service périodique, constitue la base du pouvoir militaire du régime. Cependant, l’État continue à exonérer d’impôts certaines grandes propriétés et à attribuer de vastes étendues de terre à des privilégiés.

Au viiie siècle, en raison de la croissance démographique, les paysans bénéficiant des terres allouées par l’État reçoivent des parcelles de plus en plus réduites, tout en continuant à payer le même impôt. De nombreux paysans s’enfuient, réduisant par la même occasion les recettes fiscales de l’État et dépeuplant les forces armées. Un système de commanderies est alors établi le long des frontières, et la défense confiée à des troupes et des chefs militaires non chinois.

5.4.2.2 La révolte d’An Lushan

Les premiers empereurs Tang, dont Li Shimin (600-649), connu sous le titre posthume de Taizong des Tang, sont des monarques compétents. Mais le brillant Xuanzong s’éprend de la courtisane Yang Guifei, beaucoup plus jeune que lui, et néglige les devoirs de sa charge. Yang place ses amis et des membres de sa famille à des postes importants de l’appareil d’État. L’un de ses favoris est An Lushan, un général d’origine turco-sogdienne habile et ambitieux. En 755, celui-ci provoque une rébellion, s’empare de Luoyang et se proclame empereur. Il est finalement assassiné par son fils en 757.

La paix ne revient cependant qu’en 763, grâce à des alliances passées avec des tribus d’Asie centrale. Après la rébellion d’An Lushan, la dynastie des Tang ne retrouve jamais son prestige et sa puissance passés. Le pouvoir perd notamment le contrôle des commanderies militaires établies aux frontières. Certaines d’entre elles deviennent des royaumes héréditaires et s’attribuent les impôts perçus pour le gouvernement central. Ce système de commanderies s’étend à quelques régions de l’intérieur. Au ixe siècle, l’État ne contrôle plus réellement que l’actuel Shaanxi.

Les dernières décennies de la dynastie des Tang sont marquées par un important essor culturel, encouragé par l’impression des livres, qui favorise l’unité de la culture chinoise. Ainsi les poètes Li Bai, Du Fu et Bo Juyi et le grand prosateur Han Yu (768-824) apparaissent, alors que le processus de déclin politique est déjà entamé.

La croissance sociale et économique permet de préserver l’unité du pays pendant ces années de fragmentation politique. Des guildes d’artisans, l’usage du papier-monnaie et une forte centralisation commerciale se développent à la fin de la dynastie.

5.4.2.3 Les persécutions religieuses

Le bouddhisme connaît une très grande popularité au cours des années pacifiques et prospères des premiers Tang. Mais, vers la fin de leur règne, le recul du bouddhisme est associé à un renouveau du confucianisme. Une classe de fonctionnaires lettrés, principalement confucéens, se développe alors. Ceux-ci considèrent le bouddhisme comme une force néfaste à la société chinoise, notamment en raison de sa puissance économique. En 845, un décret proscrit toutes les religions étrangères. La même année, l’empereur lui-même entreprend une persécution à grande échelle des bouddhistes. Plus de 4 600 monastères et 40 000 temples et autels sont détruits, tandis que 260 000 moines et moniales environ sont contraints de retourner à la vie séculaire.

5.4.3 Les Cinq Dynasties (907-960)

La chute des Tang entraîne une dispersion du pouvoir politique et économique. La Chine connaît alors une courte période de division, dite période des Cinq Dynasties. Cinq dynasties éphémères se succèdent au nord de la Chine, dans la vallée du Huang He, et dix États indépendants se créent, la plupart dans le Sud. Durant cette période, la dynastie Liao (907-1125) des Mongols Khitans (peuple nomade toungouse), établie en Mandchourie et en Mongolie, étend son influence sur les régions situées au nord du Hebei, du Shanxi et du Shaanxi. Pékin devient la capitale méridionale de leur Empire sino-khitan.

5.5 Maturité culturelle et domination étrangère

La période des Cinq Dynasties s’achève en 960, lorsqu’un chef militaire, Zhao Kuangyin, s’empare du trône et proclame la dynastie Song (960-1279). En 978, les Song contrôlent la plus grande partie de la Chine, à l’exception des régions septentrionales détenues par les Mongols Khitans. On distingue généralement la période des Song du Nord (960-1127), dont la capitale est Kaifeng, de celle des Song du Sud (1127-1279), dont la capitale est Hangzhou, et pendant laquelle la dynastie ne contrôle plus que le sud du pays.

5.5.1 Les Song du Nord (960-1127)
5.5.1.1 La réorganisation

Les premiers empereurs Song redoutent une dispersion du pouvoir militaire aux frontières, responsable de l’affaiblissement des Tang. Ils limitent donc étroitement la puissance de l’armée dans les provinces et la subordonnent au pouvoir civil. Dès lors, ce sont les fonctionnaires qui dominent chaque aspect du gouvernement et de la société. Leur recrutement par concours, réapparu sous les Tang, est étendu pour fournir un flux constant de personnel compétent.

Les Song réorganisent le pouvoir impérial et renforcent la centralisation sur la capitale. La structure administrative locale est à peu près celle des Tang. La littérature, les arts (porcelaine fine et céladons notamment) et la philosophie continuent de se développer sur les voies tracées à la fin des Tang. L’enseignement fleurit, l’économie se développe et se diversifie. Mais la faiblesse militaire va se révéler une tare chronique.

5.5.1.2 Les Liao

À la suite de plusieurs défaites contre les Khitans de Pékin (dynastie Liao), les Song signent un traité en 1004, leur cédant ainsi à titre permanent la zone qu’ils occupent le long de la frontière nord, et fixant le paiement d’un tribut annuel. Après de longs combats contre les Xia, à la frontière nord-ouest du royaume, les Song obtiennent à nouveau la paix en échange du paiement d’un tribut en 1044.

Au milieu du xie siècle, ils connaissent des difficultés budgétaires. La croissance démographique annihile celle de l’économie. De plus, les dépenses militaires liées à la défense des frontières septentrionales absorbent une grande part des recettes annuelles, tout comme les coûts administratifs d’une bureaucratie civile de plus en plus importante. Celle-ci, à mesure que la situation militaire et budgétaire se détériore, se déchire en luttes de factions proposant chacune des mesures différentes.

5.5.1.3 La tentative de réforme

En 1069, Wang Anshi, le principal conseiller du jeune empereur, élabore une série de changements radicaux destinés à accroître le revenu de l’État, à réduire les dépenses et à renforcer l’armée. Comprenant que les recettes sont, en définitive, liées à la prospérité du monde paysan soumis à l’impôt, il propose plusieurs mesures agraires, comme l’attribution de la même superficie agricole à chaque cultivateur, l’instauration de prêts pour aider les paysans lors des semailles et des récoltes, la suppression des corvées, l’établissement d’un impôt progressif sur la richesse, ou encore l’achat par l’État des surplus de denrées en vue d’une redistribution en période de famine. Plusieurs de ces réformes sont adoptées, mais rapidement abandonnées en raison de l’opposition des bureaucrates.

5.5.2 Les Song du Sud (1127-1279)

Poussés par leur faiblesse militaire et budgétaire, et pour mieux lutter contre les Liao, les Song s’allient, au début des années 1120, aux Jin (Kin ou Tsin, 1115-1234) de Mandchourie du Nord, dynastie née de l’unification des tribus Djurtchets. Après la défaite des Liao, les Jin se retournent contre les Song et envahissent la Chine du Nord, prenant la capitale Kaifeng en 1126. Les Song se replient et établissent leur capitale à Hangzhou, dans l’actuelle Zhejiang, en 1127.

Sous leur règne, le Sud continue à se développer rapidement. Son rayonnement intellectuel dépasse de loin celui du Nord. Les lettrés (wenren) ont une influence grandissante à la cour, sujette aux rivalités entre réformateurs et conservateurs. D’importantes découvertes ont lieu, comme la boussole, l’imprimerie à caractères mobiles ou la poudre à canon. Grâce à un rapide essor économique, l’État peut renforcer sa défense militaire. Le bouillonnement intellectuel de la Chine sous la dynastie Song du Sud donne naissance à un nouveau système de pensée confucéenne, inspiré d’éléments taoïstes et bouddhistes, connu sous le nom de néoconfucianisme et dont le représentant le plus illustre est Zhu Xi. Cette nouvelle école est essentiellement centrée sur l’être humain, bien que ses emprunts aux doctrines métaphysiques du bouddhisme lui permettent de présenter une vision plus équilibrée et à long terme de l’Univers.

Malgré une bureaucratie pléthorique et une détérioration de l’administration, la Chine des Song du Sud ne montre aucun signe d’effondrement intérieur. La dynastie ne finit par tomber que sous les assauts répétés d’une armée mongole nettement supérieure en nombre et après des années de combats.

En 1206, une assemblée de toutes les tribus mongoles se réunit à Karakorom, en Mongolie, pour confirmer la création de l’unité mongole sous l’autorité de Gengis Khan, l’« empereur suprême «. Les Mongols entament rapidement une série de conquêtes, qui aboutit à la formation du plus grand empire du monde de l’époque. En Chine, Gengis Khan s’empare d’abord de Pékin, la capitale des Jin, en 1215, avant de se rendre maître de tout le nord de la Chine après la reddition de Kaifeng (1233). La conquête du territoire des Song du Sud ne s’achève cependant qu’en 1279, avec le suicide du dernier empereur et la victoire de Kubilaï Khan, petit-fils de Gengis Khan, qui a succédé à ce dernier à la tête de l’Empire mongol.

5.5.3 La domination mongole et la dynastie des Yuan (1279-1368)

Kubilaï Khan transfère la capitale mongole de Karakorom à Pékin qu’il nomme Khanbalik (Cambaluc). En 1279, il fonde la dynastie des Yuan. Il dirige un immense empire qui s’étend de l’Europe orientale à la Corée, et du nord de la Sibérie à la bordure septentrionale de l’Inde. Il emprunte aux Song l’essentiel de leur système administratif, et ses successeurs l’imitent. Bouddhistes lamaïques, ils ne cherchent pourtant pas à se siniser.

Le règne de Kubilaï Khan constitue l’apogée du pouvoir mongol. Les communications sont considérablement améliorées et les routes commerciales de l’Asie centrale, entièrement sous contrôle mongol, plus sûres que jamais. Pour cette raison, les échanges entre l’est et l’ouest s’intensifient, notamment avec les missionnaires (franciscains) et les commerçants étrangers (Florence, Gênes, Venise), dans le domaine intellectuel, culturel que technique. Le plus connu des voyageurs européens est sans doute le négociant vénitien Marco Polo qui séjourne à Cambaluc (Pékin) et à la cour de Kubilaï Khan de 1275 à 1292. Dans le Livre des merveilles du monde, il dépeint de façon vivante la splendeur de l’Empire mongol.

Pendant ce temps, le mécontentement grandit dans le pays. Les Chinois soumis sont brimés par le pouvoir en place. La classe des mandarins lettrés s’irrite de l’interdiction faite aux Chinois de détenir des postes importants. L’inflation et une fiscalité écrasante alimentent la grogne des paysans. Les années 1330 et 1340 sont marquées par de mauvaises récoltes, la famine dans le Nord et des crues dévastatrices du Huang He. Au cours des années 1340, des soulèvements se produisent dans presque toutes les provinces. Durant les dix ans qui suivent, plusieurs chefs rebelles apparaissent. En 1357, le Sud échappe aux Mongols. Par la suite, un ancien moine bouddhiste, Zhu Yuanzhang, s’allie avec les nationalistes du « Turban rouge «. Il réussit à reconquérir tout le bassin du Yang-tseu-kiang, se proclame empereur sous le nom de Hongwu et fonde la dynastie Ming. En 1371, alors que les chefs militaires mongols sont divisés par des rivalités internes, il s’attaque au nord de la Chine et prend Pékin. Les Mongols se replient sur leur base de Mongolie d’où ils continuent à harceler les Chinois.

5.6 Pouvoir impérial

Deux grandes dynasties dominent l’histoire de la Chine après la prise de pouvoir de Zhu Yuanzhang au xive siècle : la dynastie Ming et la dynastie mandchoue Qing.

5.6.1 La dynastie Ming (1368-1644)
5.6.1.1 Des débuts prometteurs

Les Ming commencent par établir leur capitale à Nankin (Nanjing) et restaurent la civilisation chinoise des Tang et des Song. La puissance chinoise se réaffirme en Chine et dans toute l’Asie orientale. Un gouvernement civil est rétabli, la littérature encouragée, des écoles fondées et l’administration de la justice réformée. L’Empire est divisé en 15 provinces, dont la plupart portent encore leur nom initial.

Chaque province est supervisée par trois commissaires chargés respectivement des finances, des affaires militaires et de la justice. Le commissaire chargé des finances, qui dirige l’administration, est remplacé à la fin de la dynastie par un gouverneur.

Sous l’empereur Yongle (1403-1424), la Grande Muraille est consolidée et agrandie. Les tribus de Mongolie ayant été définitivement vaincues, la capitale de l’Empire est transférée en 1421 à Pékin, où commence la construction de la Cité interdite. Yongle rétablit également le système du tribut, par lequel les États non chinois d’Asie orientale reconnaissent la suprématie culturelle et morale de la Chine. Plusieurs expéditions navales, conduites par l’amiral et eunuque Zheng He, révèlent le pouvoir des Ming dans toute l’Asie du Sud-Est, dans les États indiens et jusqu’à Madagascar. Grâce au développement de l’irrigation, la famine recule, l’agriculture prospère et la population augmente. Vers 1600, la Chine compte près de 150 millions d’habitants.

5.6.1.2 Un long déclin

À partir du milieu du xve siècle, le pouvoir des Ming décline. Les nomades des steppes s’attaquent aux provinces du Nord. La compétence des dirigeants se dégrade. Les eunuques commencent à exercer une grande influence sur l’empereur, provoquant mécontentement et luttes de factions à la Cour. Sous le règne de Wanli, les tensions opposant les eunuques aux fonctionnaires débouchent sur de graves troubles politiques. L’influence des eunuques se renforce et s’étend à tous les domaines de l’État (police, finances, gouvernement).

Parallèlement, des relations maritimes s’établissent avec le monde occidental. Arrivés les premiers en 1514, les Portugais installent un comptoir commercial à Macao en 1557. Après 1570, le commerce se développe entre la Chine et les colonies espagnoles des Philippines.

En 1619, les Hollandais s’installent à Taïwan et prennent possession des îles Pescadores (Penghu). Des missionnaires jésuites — dont Matteo Ricci —, arrivés d’Europe dans la seconde moitié du xvie siècle, répandent les connaissances occidentales et le christianisme. Leur sagesse et leur culture leur valent rapidement une position respectée à la cour des Ming. Toutefois, ils ne réussissent pas à implanter durablement le christianisme ni la pensée scientifique occidentale.

5.6.1.3 Une fin précipitée

Vers la fin du xvie siècle, le trésor impérial a été épuisé par le coût de la lutte contre les incursions répétées des Mongols et les raids des pirates japonais, les Wokou, qui ravagent la côte sud-est pendant tout le xvie siècle. Une campagne de sept ans contre les troupes japonaises débarquées en Corée, en 1592, laisse les finances de l’État exsangues.

La chute des Ming est provoquée par une rébellion née dans la province du Shaanxi, confrontée à la famine et au chômage. La révolte est conduite par Li Zicheng, un ancien berger, qui parvient à prendre Pékin en 1644, avec une armée de 300 000 hommes, les troupes de l’Empire étant alors déployées sur la Grande Muraille. Le dernier empereur de la dynastie Ming se suicide. Le chef des armées Ming, le général Wu Sangui, fait alors appel aux Mandchous, tribus apparentées aux Jürchets, pour l’aider à chasser les rebelles de la capitale. Mais, une fois leur mission achevée, les Mandchous refusent de quitter Pékin et fondent une nouvelle dynastie, la dynastie Qing. Réfugiés en Chine méridionale, les derniers Ming tentent, sans succès, de rétablir leur régime.

5.6.2 La dynastie mandchoue Qing (1644-1912)

C’est sous la dynastie mandchoue que le pouvoir de l’Empire chinois connaît l’apogée de ses deux mille ans d’histoire, jusqu’à son effondrement, au début du xxe siècle, imputable à la fois à une décadence intérieure et aux pressions extérieures exercées par l’Occident.

5.6.2.1 Les changements

Maîtres de la Chine, les Mandchous cherchent à se siniser, tout en brimant les Chinois, contraints, par exemple, à porter la natte, signe de leur soumission.

L’organisation politique est largement fondée sur celle des Ming, bien que plus centralisée. L’administration centrale dépend d’un nouvel organe gouvernemental, le Grand Conseil, qui traite les affaires militaires et politiques de l’État, sous les ordres directs de l’empereur. À Pékin, un Chinois et un Mandchou gèrent chaque direction administrative. La bureaucratie traditionnelle et le système des examens impériaux, reposant en grande partie sur la connaissance des classiques confucéens, sont maintenus.

À la fin du xviie siècle, les Qing éliminent toute opposition favorable au retour des Ming. Ils écrasent dans la foulée une rébellion lancée par des généraux chinois qui, en échange de leur soutien, ont reçu des domaines semi-autonomes dans le sud.

5.6.2.2 Des lumières à la pénombre

Le xviiie siècle est une période de paix et de prospérité sans précédent. L’ordre intérieur règne dans tout l’Empire. La dynastie atteint son apogée sous Kangxi (1662-1722), et surtout sous Qianlong (1736-1796). Les Chinois sont mieux traités. La Chine établit une solide influence sur la Mandchourie, la Mongolie, le Xinjiang et le Tibet. Le Népal subit à son tour le joug chinois. La Birmanie doit payer un tribut, tout comme les îles Ryukyu. La Corée et le nord du Viêt Nam reconnaissent la suzeraineté de la Chine, tandis que Taïwan est incorporée à l’Empire. La population connaît une forte croissance démographique (313 millions d’habitants en 1794), que ne parvient pas à suivre la production.

À la fin du règne de Qianlong, la situation des paysans s’aggrave, tandis que les ressources financières du gouvernement sont rognées par la politique d’expansion territoriale et la corruption croissante des fonctionnaires. Les troupes mandchoues, en garnison dans toute la Chine, contribuent à ruiner l’économie, et se montrent peu aptes à assurer une défense efficace après des générations de paix.

À la fin du xviiie siècle, les Mandchous restent réticents au développement des relations commerciales. Le commerce avec l’étranger est alors confiné au port de Canton, et les négociants sont contraints de passer par l’intermédiaire d’un nombre limité de commerçants chinois, groupés en associations, les Cohong (gonghang). Les nations les plus présentes sont alors le Royaume-Uni (de loin la plus importante), la France et les États-Unis. Au départ, les échanges favorisent l’économie de la Chine, car la Grande-Bretagne achète du thé et paie en métal-argent. Au cours des années 1780, les marchands britanniques développent le commerce de l’opium indien en Chine, alors que ce produit est prohibé depuis 1731. En 1800, ce marché s’étant largement développé, les échanges commerciaux deviennent excédentaires pour la Grande-Bretagne. L’hémorragie de métal-argent chinois, provoquée par le commerce florissant de l’opium, aggrave les difficultés budgétaires que connaît déjà le gouvernement des Qing.

5.6.2.3 La pression étrangère

Le xixe siècle est marqué par une détérioration rapide du système impérial et par un accroissement de la pression occidentale, puis japonaise. Les relations commerciales entre la Chine et la Grande-Bretagne s’enveniment. Les Britanniques cherchent à tout prix à étendre leurs échanges au-delà de Canton et des limites imposées par la Chine. Pour parvenir à leurs fins, ils tentent d’établir avec les autorités chinoises des relations diplomatiques similaires à celles qu’ils entretenaient avec les États occidentaux. Mais la Chine, qui vit depuis longtemps en autarcie économique, n’est guère intéressée par le développement de ses échanges commerciaux. Par ailleurs, les Chinois souhaitent mettre fin aux importations illégales d’opium par les négociants britanniques, qui ruinent les bases fiscales et morales de l’Empire et creusent le déficit extérieur du pays. En 1839, des fonctionnaires confisquent et détruisent de grandes quantités d’opium saisies sur des bateaux mouillant à Canton. La Grande-Bretagne, refusant de mettre un terme à ce négoce lucratif, déclenche les hostilités à la fin de 1839 avec l’envoi d’un corps expéditionnaire : c’est la guerre de l’opium.

5.6.2.4 Guerres commerciales et traités inégaux

La Chine subit une défaite sévère. Sa faiblesse militaire, imputable pour partie au ressentiment des Han à l’encontre des Mandchous, éclate au grand jour. La première guerre de l’Opium s’achève en 1842 avec la signature du traité de Nankin qui offre à la Grande-Bretagne tous les privilèges commerciaux qu’elle recherche. Au cours des deux années suivantes, la France et les États-Unis obtiennent des concessions identiques. Mais les puissances occidentales en trouvent rapidement les clauses insuffisantes. La Grande-Bretagne, alliée à la France, ne tarde pas à trouver l’occasion de reprendre les hostilités.

Au cours de la seconde guerre de l’Opium (1856-1860), leurs armées menacent le nord de la Chine. De nouveaux traités signés à T’ien-tsin (Tianjin), en 1858, accroissent les avantages commerciaux consentis aux Occidentaux. Mais lorsque Pékin refuse de les ratifier, le conflit reprend. En 1860, un corps expéditionnaire franco-britannique, sous le commandement de lord Algin et du général Cousin-Montauban, entre dans Pékin. Le palais d’Été (Yuanmingyuan) est incendié, en représailles contre les atrocités commises à l’égard de prisonniers occidentaux. La Chine signe alors les conventions de Pékin et ratifie les clauses des traités de T’ien-tsin.

Ces traités, que les Chinois appellent « traités inégaux «, régissent les relations de la Chine avec l’Occident jusqu’en 1943. Ils modifient le cours du développement social et économique du pays et jettent le discrédit sur la dynastie mandchoue. Les ports chinois sont ouverts au commerce et aux résidents étrangers, et Hong Kong est cédée à titre permanent à la Grande-Bretagne avec la presqu’île attenante de Kowloon. Les ressortissants des nations signataires bénéficient de l’extraterritorialité, qui leur permet d’être jugés par leurs propres magistrats ou dans leurs consulats, selon les lois de leur pays. Ces traités comportent en outre la clause de la nation la plus favorisée, par laquelle tout privilège accordé par la Chine à une nation est automatiquement étendu à tous les autres pays signataires. L’économie chinoise tout entière se retrouve bientôt contrôlée par un réseau d’exploitation économique étranger. Les droits de douane sur les produits importés en Chine sont plafonnés à 5 p. 100, afin d’empêcher l’imposition arbitraire de droits excessifs. Cette mesure empêche la Chine d’établir des taxes d’importation suffisamment élevées pour protéger son industrie et permettre une modernisation de son économie.

5.6.2.5 La révolte Taiping

Au cours des années 1850, les fondations de l’Empire sont ébranlées par le mouvement révolutionnaire Taiping (1851-1864), soulèvement populaire d’origine religieuse, sociale et économique. Son chef, Hong Xiuquan, qui a échoué aux examens impériaux, puis étudié le christianisme auprès d’un missionnaire protestant américain, se considère comme le second fils de Dieu, et donc le frère de Jésus-Christ, chargé de la mission divine de débarrasser la Chine de la domination mandchoue et de fonder une dynastie chrétienne reposant sur un partage équitable des richesses et sur l’égalité des sexes. En 1847, il fonde l’Association des adorateurs de Dieu et réunit de nombreux partisans, souvent pauvres, hostiles aux Mandchous.

La rébellion éclate dans la province de Guangxi en 1851. En 1853, le mouvement progresse vers le nord et Hong Xiuquan établit sa capitale à Nankin où il crée le « Royaume céleste de la Grande Paix « (Taiping Tianguo). Malgré leur échec aux portes de Pékin, les Taiping sont, en 1860, solidement retranchés dans le bassin du Yang-tseu-kiang et menacent Shanghai.

Le pouvoir mandchou, contraint à entretenir des relations avec des Occidentaux plus puissants et ravagé par un soulèvement intérieur d’une dimension sans précédent, comprend que l’Empire ne peut survivre qu’au prix d’un changement de politique. Sous le règne de l’impératrice douairière Cixi (Tseu-hi), entre 1861 et 1895, les Mandchous tentent de restaurer le gouvernement confucéen « bienveillant « des beaux jours de la dynastie, de résoudre les problèmes intérieurs sociaux et économiques, et d’adopter la technologie occidentale de manière à renforcer le pouvoir de l’État. Incapables de diriger eux-mêmes de tels programmes, ils s’adressent aux dirigeants chinois des différentes provinces. Investis par le pouvoir impérial d’une autorité financière, administrative et militaire inégalée, certains d’entre eux accomplissent leur mission avec un succès remarquable.

Entre 1860 et 1880, en grande partie grâce aux efforts des gouverneurs Zeng Guofan, Li Hongzhang et Zuo Zongtang, tous les soulèvements importants sont matés : les Taiping (1864), les Nian (1868), les Miaos (1872) et les Hui (1878). Ces guerres font entre 20 à 30 millions de morts. Cependant, la paix est restaurée, des arsenaux et des chantiers navals sont créés, et plusieurs mines ouvertes. Mais les objectifs de préserver un gouvernement confucéen et de développer une puissance militaire moderne sont incompatibles. La direction du programme de modernisation est confiée à la seule élite disponible, la bureaucratie néoconfucéenne lauréate des examens impériaux, mal équipée ou peu motivée pour mettre en œuvre les mesures nécessaires au renforcement du pouvoir de l’État. Si bien que les efforts tentés par la Chine pour accroître sa puissance entre 1860 et 1895 n’aboutissent pas.

5.6.2.6 Les zones d’influence étrangère

Les puissances occidentales tentent tout d’abord de consolider les avantages commerciaux acquis par les « traités inégaux « plutôt que de rechercher des privilèges supplémentaires. Mais, en 1875, elles commencent, avec le Japon, à s’attaquer au protectorat chinois sur l’Asie du Sud-Est. Après 1875, les îles Ryukyu sont placées sous la domination japonaise. La guerre, qui oppose la France à la Chine en 1884 et 1885, fait entrer le Viêt Nam dans l’Empire colonial français. L’année suivante, la Grande-Bretagne annexe la Birmanie. En 1860, la Russie obtient les provinces du nord de la Mandchourie. En 1894, les tentatives japonaises pour soustraire la Corée à la suzeraineté chinoise aboutissent à la guerre sino-japonaise. La Chine subit une défaite décisive en 1895. Par le traité de Shimonoseki, elle reconnaît l’indépendance de la Corée, désormais sous influence japonaise, paie une indemnité de guerre considérable et cède au Japon l’île de Taïwan et la péninsule du Liaodong, au sud de la Mandchourie.

La Russie, la France et l’Allemagne réagissent immédiatement à la cession du Liaodong, qu’elles considèrent comme une mainmise du Japon sur l’une des régions les plus riches de la Chine. Elles interviennent pour que le Japon rétrocède cette région en échange d’une indemnité supplémentaire. Le Japon ayant accepté, les puissances européennes acculent la Chine à de nouvelles concessions.

5.6.2.7 L’Empire démantelé

En 1898, incapable de résister aux pressions occidentales, la Chine est morcelée en zones d’influence étrangère. La Russie obtient une concession pour la construction d’une ligne de chemin de fer transsibérienne reliant Moscou à Vladivostok, en passant par la Mandchourie, ainsi qu’un chemin de fer sud-mandchou jusqu’à l’extrémité de la péninsule du Liaodong. Elle possède également des droits économiques exclusifs sur toute la Mandchourie. D’autres droits exclusifs sur le développement des chemins de fer et des mines sont accordés à l’Allemagne (Shandong), à la France (provinces frontalières du Sud), à la Grande-Bretagne (provinces riveraines du Yang-tseu-kiang) et au Japon (côte sud-orientale). Les États-Unis, qui cherchent à préserver leurs acquis sans entrer dans des rivalités territoriales, lancent la politique de la Porte ouverte (1899-1900) qui obtient l’assentiment des autres puissances étrangères. Selon cette politique, les privilèges obtenus en Chine par un pays ne doivent pas remettre en cause la clause de la nation la plus favorisée. Les États-Unis entreprennent également de garantir l’intégrité territoriale et administrative de la Chine, même si, jusqu’en 1941, ils se montrent réticents à utiliser la force pour faire respecter cette garantie.

5.6.2.8 Les mouvements de réforme et la révolte des Boxers

En 1898, un groupe de réformateurs éclairés réussit à se faire écouter du jeune empereur Guangxu. Durant l’été, en réaction à la création de nouvelles zones d’influence, ils mettent en place un programme de réformes radicales destiné à transformer la Chine en une monarchie constitutionnelle et à moderniser l’économie et le système éducatif. Mais ce programme se heurte au pouvoir des dignitaires mandchous, traditionalistes et anti-occidentaux, que l’impératrice Cixi a placés à la tête du gouvernement avant de se retirer. Celle-ci, avec la complicité de Yuan Shikai, fait séquestrer l’empereur, reprend les rênes du pouvoir et, avec l’aide de chefs militaires loyaux, met fin au mouvement réformateur. Le pays est alors balayé par une puissante vague de réaction nationaliste, qui atteint son paroxysme en 1900 avec la révolte des Boxers. Bien qu’officiellement dénoncée par le pouvoir chinois, cette société secrète bénéficie en réalité du soutien de Cixi et de nombreux dignitaires mandchous. Les Boxers assiègent les légations étrangères à Pékin pendant près de deux mois (18 juin-14 août 1900), jusqu’à l’intervention des détachements militaires envoyés par les différentes puissances étrangères. Le protocole de Pékin (17 septembre 1901) achève de placer la Chine sous tutelle occidentale. Les Chinois sont contraints de verser d’importantes indemnités, échelonnées sur une période de quarante ans, et d’accorder de nouvelles concessions commerciales aux nations occidentales. Le gouvernement mandchou comprend alors la futilité de sa politique réactionnaire. En 1902, le pouvoir adopte son propre programme de réformes et élabore un projet de régime constitutionnel sur le modèle japonais. En 1905, l’ancien système des examens impériaux est abandonné. La Russie profite de la révolte des Boxers pour étendre son influence sur toute la Mandchourie. Cette ingérence est à l’origine de la guerre russo-japonaise de 1904-1905, à l’issue de laquelle la quasi-totalité du chemin de fer sud-mandchou et des privilèges russes en Mandchourie reviennent au Japon.

5.6.3 Les prémices de la République

La mort de l’impératrice Cixi en 1908 accélère la chute de la dynastie Qing. Peu après la guerre sino-japonaise (1894-1895), un médecin éduqué à l’occidentale, Sun Yat-sen, lance le Tongmenghui (« société de la conjuration «), mouvement destiné à établir un gouvernement républicain. Dans la première décennie du xxe siècle, les révolutionnaires forment une vaste coalition réunissant les étudiants et les commerçants d’outre-mer, ainsi que les Chinois de l’intérieur mécontents du régime. Au milieu de l’année 1911, des soulèvements se produisent, en protestation contre un programme de nationalisation des chemins de fer. En octobre, la révolte éclate à Hankou, en Chine centrale. Elle s’étend rapidement à d’autres provinces et Sun Yat-sen prend le pouvoir. Les armées mandchoues, réorganisées par le général Yuan Shikai, sont alors nettement supérieures aux forces rebelles. Mais, négligeant le combat, Yuan préfère négocier avec les rebelles le poste de président du nouveau gouvernement républicain. Le 12 février 1912, Sun Yat-sen démissionne en faveur de Yuan, et les Mandchous se retirent. Le 14 février, une assemblée révolutionnaire réunie à Nankin élit Yuan Shikai premier président de la république de Chine. La même année, Puyi, dernier empereur de Chine, abdique à l’âge de 6 ans.

5.7 La république de Chine (1912-1949)

Une Constitution est adoptée et un Parlement convoqué en 1912. Mais Yuan Shikai ne laisse jamais ces institutions entraver sa mainmise sur le pouvoir et établit une dictature (1912-1916). Lorsque le Guomindang, parti nationaliste fondé en 1911 par Sun Yat-sen, tente de limiter ses pouvoirs, d’abord par des tactiques parlementaires, puis par la révolution manquée de 1913, Yuan réagit. Il impose la dissolution du Parlement, interdit le Guomindang et utilise son influence personnelle auprès des chefs militaires provinciaux pour gouverner. Sun Yat-sen se réfugie au Japon. L’opposition populaire contraint néanmoins Yuan Shikai à abandonner ses ambitions de restaurer l’Empire et de devenir empereur. À sa mort en 1916, plusieurs gouverneurs proclament l’indépendance de leur province. Pendant plus de dix ans, le pouvoir politique passe aux mains de ces seigneurs de la guerre (dujun), qui règnent localement. Le gouvernement central conserve une existence précaire et parfois fictive jusqu’en 1927.

5.7.1 La « trahison « de Wilson

Pendant la Première Guerre mondiale, le Japon tente d’établir sa suprématie coloniale. En 1915, il présente à la Chine les « 21 demandes « visant à faire de celle-ci un véritable protectorat japonais. Pékin en accepte certaines, comme le transfert des possessions allemandes du Shandong au Japon. En entrant en guerre aux côtés des Alliés en 1917, la Chine pense obtenir un siège à la table des négociations de paix, et freiner ainsi les ambitions japonaises. Elle espère également que les États-Unis, conformément à la politique de la Porte ouverte, lui offriront leur soutien. Mais lors des pourparlers de Versailles, le président Thomas Woodrow Wilson se désolidarise de la Chine et les anciennes possessions allemandes reviennent finalement au Japon.

Or, depuis dix ans, les jeunes et les intellectuels chinois sont de plus en plus nombreux à chercher en Occident des modèles et des idéaux pour réformer la Chine. Ils sont, par conséquent, choqués par ce qu’ils jugent comme une trahison de Wilson. Lorsque la nouvelle atteint le pays, un vaste mouvement de protestation antijaponais éclate, le 4 mai 1919, à l’université de Pékin et se propage dans tout le pays.

5.7.2 Le Guomindang et la montée du Parti communiste

Dans la période d’observation qui suit, deux objectifs apparaissent clairement : débarrasser la Chine de l’impérialisme occidental et rétablir l’unité nationale. Déçus par l’égoïsme cynique des Occidentaux, les Chinois se tournent de plus en plus vers l’Union soviétique et le marxisme-léninisme. Le Parti communiste chinois est créé à Shanghai en 1921. Parmi ses fondateurs figure Mao Zedong. En 1923, Sun Yat-sen recourt à l’aide soviétique pour réorganiser le Guomindang désagrégé et militairement faible, et accepte, en échange, d’y admettre les communistes chinois.

Les « Trois Principes du Peuple « (nationalisme, démocratie et socialisme), qui constituent l’idéologie du Guomindang, sont fortement empreints d’anti-impérialisme et du désir d’unification nationale. Malgré la mort de Sun Yat-sen en 1925, le Guomindang régénéré, sous le commandement du jeune général Jiang Jieshi (Tchang Kaï-chek), lance une expédition militaire depuis sa base de Canton (expéditions du Nord-Beifa) en 1926 et reconquiert une partie de la Chine. Jiang Jieshi cherche alors à réunifier la Chine sous la souveraineté du Guomindang et à se débarrasser des impérialistes et des Seigneurs de la guerre. En 1927, il procède, au sein du Guomindang, à une purge sanglante des communistes. Le 12 avril, il écrase l’insurrection prolétarienne de Shanghai. Il s’appuie dès lors sur la classe des propriétaires fonciers et sur les puissances impérialistes.

5.7.2.1 Les difficultés de Jiang Jieshi

Le nouveau gouvernement nationaliste établi à Nankin en 1928 se trouve confronté à trois problèmes difficiles. Le premier est la portée encore limitée de l’unification : seules cinq provinces se trouvent réellement sous son autorité, les autres demeurant aux mains de Seigneurs de la guerre locaux. Le deuxième concerne la rébellion communiste. Les communistes chassés du Guomindang se séparent en deux factions clandestines. La première tente de fomenter des soulèvements urbains, la seconde, dirigée par Mao Zedong, se replie dans une région reculée du centre de la Chine, où elle mobilise et forme une armée paysanne, et crée plusieurs soviets. Le troisième problème, enfin, est l’agression japonaise en Mandchourie et en Chine du Nord.

5.7.2.2 L’expansionnisme japonais

Au cours des années 1920, le Japon a adopté une politique plus modérée à l’égard de la Chine. À la conférence de Washington en 1922, il a même accepté de lui restituer les anciennes possessions allemandes du Shandong. Mais, à partir de 1928, le Guomindang se heurte aux intérêts japonais concernant le contrôle du chemin de fer sud-mandchou par le Japon. Le 18 septembre 1931, celui-ci prétexte un prétendu bombardement du chemin de fer par les nationalistes chinois pour étendre son contrôle militaire sur toute la Mandchourie. Au printemps suivant, le Japon réunit les trois provinces de Mandchourie en un nouvel État, le Mandchoukouo, puis place à sa tête Puyi, le dernier empereur de la dynastie mandchoue. Au début de l’année 1933, l’est de la Mongolie-Intérieure est intégré au Mandchoukouo. Quelques mois plus tard, le Japon oblige la Chine à signer un accord de démilitarisation du nord-est du Hebei.

5.7.2.3 L’incident de Xi’an

Dans les années 1930, la politique de Jiang Jieshi consiste à négocier avec les Seigneurs de la guerre, à temporiser avec les Japonais, et à concentrer ses efforts sur la lutte contre les communistes. Écrasé dans les villes ouvrières, le mouvement communiste ne subsiste plus que clandestinement. Mao Zedong innove, en déplaçant l’action du Parti vers les campagnes. Paradoxalement, la révolution chinoise est le fait de paysans et non d’ouvriers. De 1927 à 1934, Mao crée des bases en Chine du Sud et en Chine centrale. Il rallie à lui des Seigneurs de la guerre comme Zhu De et des officiers communistes de l’armée régulière, tels que Liu Shaoqi. En 1934, les armées du Guomindang réussissent à asphyxier les soviets paysans. Les quelque 100 000 rescapés doivent quitter leur base, établie au Jiangxi, et se frayer un chemin à travers la Chine, d’abord vers l’ouest, puis vers le nord. C’est la Longue Marche (octobre 1934-octobre 1936). En 1936, après deux ans de combats et de progression épuisante, seuls 8 000 survivants parviennent à rallier la ville de Yanan (Shaanxi), où ils établissent leur quartier général. Cette retraite forcée, qui sonne comme une victoire morale, va s’avérer préjudiciable au Guomindang.

Par ailleurs, à mesure que l’agression japonaise s’intensifie, la pression populaire se fait de plus en plus forte pour que les dirigeants chinois unissent leurs efforts contre le Japon. Mais Jiang Jieshi refuse toute alliance. En décembre 1936, l’un de ses généraux, Zhang Xueliang, mécontent de son attentisme vis-à-vis du Japon, organise son enlèvement à Xi'an. L’intervention du communiste Zhou Enlai permet d’arriver à un compromis. Libéré, Jiang Jieshi accepte, en 1937, de former un front national uni, Guomindang-Parti communiste, contre le Japon. En juillet 1937, l’armée japonaise attaque la Chine.

5.7.3 La Seconde Guerre mondiale

La Seconde Guerre mondiale débute en Chine dès 1937, avec l’agression nippone. En 1938, l’armée chinoise tente, en vain, de ralentir la progression des troupes japonaises en dynamitant les digues du Huang He. L’immense inondation qui s’ensuit fait 12 millions de sans-abris. Le pays éclate en plusieurs entités.

Deux années après le début des hostilités, l’armée japonaise occupe les grands ports du pays, les centres industriels et les plaines fertiles du Nord et se livre à de nombreuses exactions (sac de Nankin en 1938). L’activité économique est réorientée et développée en fonction des intérêts des occupants. Le gouvernement nationaliste se réfugie dans le Sud-Ouest, à Chongqing (Sichuan), tandis qu’au nord l’Armée populaire communiste tient solidement la base du Shaanxi et harcèle les arrières des Japonais.

Malgré la présence aux côtés de Jiang Jieshi du général Stilwell, brillant chef d’état-major américain, la résistance antijaponaise est davantage l’œuvre du Parti communiste que celle du Guomindang. Les heurts entre troupes communistes et nationalistes ne cessent jamais vraiment. Le refus de Jiang Jieshi de coordonner ses actions avec celles des guérillas communistes amène Stilwell à démissionner, aussi le Guomindang perd progressivement le soutien d’une population croissante, exaspérée par la misère, par la guerre, par l’inflation, par une corruption généralisée et par l’incompétence de l’administration.

Réduit à quelques milliers de fidèles en 1935, le mouvement communiste profite de la guerre pour renforcer son audience. Il n’a de cesse de se déployer depuis sa base de Yanan et de s’infiltrer dans la plupart des zones rurales. En 1945, il contrôle dix-neuf zones libérées regroupant cent millions d’habitants. Mao Zedong et ses partisans appliquent une politique d’« union nationale « destinée à rallier les paysans riches, les propriétaires fonciers et les notables ruraux refusant de collaborer avec le Japon. C’est également au cours de cette période que se développe réellement l’idéologie maoïste.

5.7.4 La lutte pour le pouvoir entre le Guomindang et le Parti communiste

Le Guomindang sort de la Seconde Guerre mondiale discrédité. Jamais il ne cherche à s’attaquer au régime foncier, source de la misère paysanne, ni à la corruption généralisée de l’administration. Militairement, les généraux nationalistes, peu compétents, consacrent l’essentiel de leur énergie à contrer la progression de l’Armée populaire, plutôt qu’à combattre les Japonais. À l’inverse, les succès de la guérilla communiste permettent au parti de Mao Zedong d’apparaître comme le défenseur de la nation chinoise au moment de la capitulation du Japon, en août 1945. La lutte armée entre les deux partis s’accentue au lendemain du conflit mondial et dégénère rapidement en guerre civile. Une trêve est signée en 1946 grâce à la médiation du général George C. Marshall. Mais les combats reprennent malgré les efforts de ce dernier pour tenter de réconcilier les deux adversaires.

En août 1946, les États-Unis suspendent leur aide militaire au gouvernement nationaliste, mais cette mesure ne met pas pour autant fin aux hostilités. Marshall quitte la Chine au mois de janvier 1947. En mai, l’aide américaine reprend, mais les forces du Guomindang s’effondrent, malgré le matériel et les conseillers fournis par les Américains. En 1948, Lin Biao s’empare de la Mandchourie. En moins de six mois, l’Armée populaire reconquiert l’ensemble du territoire. Le 8 décembre 1949, le gouvernement du Guomindang se réfugie sur l’île de Taïwan, entraînant dans sa fuite deux millions de réfugiés.

5.8 La République populaire de Chine (depuis 1949)

La République populaire de Chine est proclamée le 1er octobre 1949 à Pékin. Le nouveau régime communiste adopte le modèle de développement soviétique. Afin d’étendre la révolution et de généraliser son pouvoir, le Parti communiste chinois (PCC) entreprend, entre 1949 et 1952, plusieurs grandes campagnes de réformes et de propagande.

5.8.1 Les premières réformes

En 1950, la réforme agraire libère la petite paysannerie de la tutelle économique et financière des grands propriétaires. Elle est souvent violente et aboutit parfois à des procès et à des exécutions sommaires. La loi sur le mariage, en autorisant le divorce, met fin à l’oppression traditionnelle des femmes. D’autres campagnes sont organisées comme celle des « trois anti « qui épure le Parti de ses éléments corrompus et celle des « cinq anti «, en 1953, qui s’attaque à la bourgeoisie d’affaires. Chacune de ces mesures permet au Parti communiste de gagner de nouveaux adhérents.

5.8.1.1 Politique économique

L’économie chinoise évolue rapidement. L’inflation disparaît, le réseau des communications est remis en état, les productions agricole et industrielle redémarrent. Cependant, la Chine est encore bien loin de la prospérité et de l’autosuffisance alimentaire. Le premier plan quinquennal, lancé en 1953, privilégie l’industrie lourde aux dépens des productions de biens de consommation ; l’aide et l’assistance technique soviétiques contribuent largement à sa réussite. En 1955, contre l’avis de tous, Mao Zedong décide la collectivisation de l’agriculture. En mai 1956, les dirigeants du Parti, conscients de l’impossibilité d’obtenir une loyauté sans partage des intellectuels, lancent une campagne encourageant les Chinois à « laisser 100 fleurs s’épanouir, laisser 100 écoles rivaliser «. Les Chinois instruits sont invités à formuler tous leurs mécontentements de manière à identifier et à résoudre les problèmes. Au début de l’année 1957, Mao lui-même élargit le thème en appelant à critiquer librement la politique du gouvernement. Les communistes sont persuadés que ces critiques ne sortiront pas du cadre fixé par le Parti. Mais la mise en cause du PCC décide les dirigeants à interrompre l’expérience, et entraîne une répression brutale. Harry Wu, l’un des principaux dissidents, est condamné à passer dix-neuf ans en camp de détention (1960-1979).

5.8.1.2 Politique étrangère

La Chine et l’URSS signent un traité d’amitié et d’alliance en 1950, complété par de nouveaux accords en 1952 et en 1954. Son engagement dans le clan socialiste amène la Chine à intervenir directement ou indirectement dans les conflits de la guerre froide. Au cours de la guerre de Corée, les volontaires chinois commandés par Lin Biao s’engagent aux côtés de la Corée du Nord et de son dirigeant, Kim Il Song. Beaucoup plus discret et plus important est le soutien apporté aux communistes vietnamiens lors de la guerre d’Indochine. Le Viêt-minh bénéficie, à partir de 1950, des stocks d’armes américaines et soviétiques de l’Armée populaire. Les zones frontalières chinoises lui servent de refuge, ce qui rend impossible une solution militaire au conflit indochinois. Cette aide militaire chinoise est doublée d’un appui diplomatique sans faille et Zhou Enlai pèse lourdement sur la négociation des accords de Genève, qui mettent fin aux hostilités en 1954. De même, en avril 1955, à la conférence afro-asiatique de Bandung, la Chine se pose en artisan de la lutte anticoloniale et du non-alignement.

En même temps, la Chine, qui entend récupérer ce qu’elle considère être historiquement son territoire, développe son projet de « Grande Chine «. L’occupation du Tibet, en 1950, par les troupes chinoises, ne suscite que des protestations de pure forme de la part de la communauté internationale. En août 1954, Zhou Enlai déclare officiellement que la libération de Taïwan est l’un de ses principaux objectifs. De son côté, Jiang Jieshi, refusant également le statu quo, affirme régulièrement son intention de reconquérir le continent. Les combats entre nationalistes et communistes reprennent sur l’île de Quemoy (Jinmen), aux mains des nationalistes, puis au large de la côte chinoise. À partir de 1958, cependant, le cessez-le-feu est généralement observé de chaque côté du détroit.

5.8.2 Le Grand Bond en avant (1958-1962)

Les bons résultats du premier plan quinquennal encouragent Mao, en 1958, à développer un nouveau programme économique, social et politique, connu sous le nom de Grand Bond en avant. Préconisant un développement du collectif dans tous les domaines de la vie quotidienne, ce projet utopique marque une rupture idéologique avec le modèle soviétique. Des contrôles plus rigides sont imposés pour accroître la production agricole, réduire la consommation et accélérer l’industrialisation. La Chine doit rattraper son retard par tous les moyens et une mobilisation effrénée des travailleurs donne, dans un premier temps, des résultats positifs. Puis la production industrielle commence à chuter (- 50 p. 100 entre 1959 et 1962), des récoltes médiocres font affluer près de 15 millions de ruraux dans les villes, entraînant une grave famine (1959-1961) qui cause la mort de 13 à 30 millions de Chinois. En 1959, Liu Shaoqi devient le chef de l’État, Mao ne gardant que la présidence du Parti communiste chinois.

5.8.3 Une nouvelle fermeture

La situation empire en 1960 lorsque l’URSS met brutalement fin à son aide économique et à son assistance technique. Les divergences idéologiques, qui datent des années 1920, s’aggravent en 1956 quand, seule avec l’Albanie, la Chine refuse de condamner le stalinisme. De plus, celle-ci est perçue comme une menace pour l’hégémonie soviétique sur le mouvement communiste international. L’échec du Grand Bond en avant, le refus des Soviétiques d’aider les Chinois dans le domaine de la recherche nucléaire enveniment les rapports entre les deux pays. La crise éclate en 1962, quand la Chine fustige l’Union soviétique pour avoir retiré ses missiles de Cuba sous la pression des États-Unis, accusant Nikita Khrouchtchev de révisionnisme et de trahison des idéaux marxistes-léninistes.

5.8.4 La Grande Révolution culturelle prolétarienne
5.8.4.1 Le stratagème

Le bilan catastrophique du Grand Bond en avant a affaibli Mao Zedong, critiqué par de nombreux dirigeants, et mis en avant Liu Shaoqi et Deng Xiaoping, qui s’attachent à redresser le pays. De 1962 à 1965, une lutte sourde oppose, au sein du régime, les modérés aux extrémistes. Mao et ses partisans organisent la Grande Révolution culturelle, destinée à raviver l’esprit révolutionnaire, afin de récupérer le pouvoir qui leur échappe. Celle-ci commence à l’automne 1965 par une critique des milieux intellectuels et universitaires dans les organes de presse. Le 25 mai 1966, dans un dazibao (affiche révolutionnaire), Nie Yuanzi, une enseignante en philosophie à l’université de Pékin, attaque avec une violence inouïe le recteur dont elle dépend. Le 5 août, Mao écrit un article dont le slogan « Bombardez le quartier général « va faire le tour de la Chine. À la mi-juillet naissent à Pékin, sous la direction de Lin Biao, les premières organisations de Gardes rouges rassemblant de jeunes Chinois âgés de 15 à 20 ans, qui, à l’appel de Mao, se livrent à des manifestations de masse. Plus de 13 millions de jeunes — lycéens, étudiants, jeunes ouvriers venus de tout le pays — défilent sur la place Tian'anmen, à Pékin, à partir du 18 août 1966.

5.8.4.2 Les effets et les conséquences

Le mouvement est ensuite savamment entretenu par Mao, dont les pensées sont résumées dans le « Petit Livre rouge «, publié en octobre 1966. Il s’appuie à la fois sur l’Armée populaire de libération (APL), sur les Gardes rouges et sur de grandes figures du communisme chinois comme Zhou Enlai, Lin Biao ou Jiang Qing, la propre femme de Mao et l’un des membres les plus actifs de la Bande des Quatre. La révolution culturelle attaque surtout les intellectuels, les artistes, les universitaires, les cadres du Parti et les anciens bourgeois. Puis, avec l’aval de Mao, elle s’étend au monde du travail. Battus parfois à mort, humiliés publiquement, de nombreux dirigeants, y compris le chef de l’État, Liu Shaoqi, sont destitués et exclus du Parti. Certains se suicident ; d’autres, comme Liu Shaoqi, décèdent des suites de leurs mauvais traitements. Les écoles sont fermées et l’économie complètement désorganisée. C’est dans ce climat chaotique que le général de Gaulle, en 1966, renoue des relations diplomatiques avec Pékin, bientôt imité par d’autres chefs d’État.

Entre 1967 et 1968, des combats sanglants opposent maoïstes et antimaoïstes, ainsi que les diverses factions des Gardes rouges. Plusieurs milliers de Chinois périssent au cours de ces affrontements. On se bat au canon dans les rues de Canton, tandis que les convois d’armes pour le Viêt Nam sont pillés. Les dirigeants se retrouvent rapidement débordés par les Gardes rouges. En dernier recours, l’armée, sous la conduite de Lin Biao, se pose en arbitre. Les Gardes rouges sont désarmés, renvoyés dans leurs écoles ou expédiés dans des régions reculées pour y travailler.

La Révolution culturelle a un effet négatif sur les relations étrangères. Les Gardes rouges sont à l’origine d’émeutes violentes à Hong Kong. La propagande en leur faveur et l’agitation de certains Chinois d’outre-mer enveniment les rapports de la Chine avec de nombreux États, notamment l’URSS. Un essai réussi de bombe H chinoise en 1967 aggrave encore l’inquiétude des Soviétiques. La tension entre les deux pays s’accroît lorsque les Chinois accusent les dirigeants de Moscou d’impérialisme après l’intervention du pacte de Varsovie en Tchécoslovaquie (1968). En 1969, des incidents frontaliers opposent des gardes-frontières soviétiques et chinois sur les rives de l’Oussouri, en Mandchourie.

5.8.5 Les dernières années sous Mao

Mao Zedong sort victorieux de la Révolution culturelle. Mais celle-ci suscite un vif ressentiment dans une partie de la jeunesse et dans de nombreuses couches de la population. En avril 1969, le IXe Congrès du PCC tente de rétablir l’organisation centrale du Parti. Mao est réélu à grand bruit, et le ministre de la Défense, Lin Biao, officiellement présenté comme son futur successeur. Pourtant, les personnages les plus influents ne sont pas les maoïstes mais les modérés : chefs militaires, partisans de Lin Biao, ou pragmatiques, comme le Premier ministre Zhou Enlai.

La lutte pour le pouvoir provoque, en 1971, la disparition de Lin Biao de la scène politique. Ce dernier est, plus tard, accusé de complot contre Mao et déclaré mort dans un accident d’avion, le 12 septembre 1971. Zhou Enlai, de son côté, accroît son pouvoir. Le Xe Congrès du Parti, en août 1973, retire de la Constitution la mention faisant de Lin Biao le successeur de Mao. L’engagement de Mao en faveur de la mobilisation des masses et sa profonde méfiance à l’égard de la bureaucratie et des intellectuels resurgissent en 1973 et en 1974 dans une nouvelle réforme visant le confucianisme. La pensée radicale de Mao se reflète également dans la nouvelle Constitution, largement simplifiée, adoptée par la IVe Assemblée nationale populaire en janvier 1975. Deng Xiaoping, victime réhabilitée de la Révolution culturelle, est alors nommé vice-Premier ministre aux côtés de Zhou Enlai.

Au cours de cette période, les relations avec l’étranger s’améliorent brusquement. En 1971, la Chine est admise aux Nations unies. En 1972, le président des États-Unis, Richard Nixon, se rend en visite officielle à Pékin et reconnaît la nécessité de maintenir des contacts entre les deux pays et de retirer à terme les troupes américaines de Taïwan. Première étape dans l’établissement de relations diplomatiques normalisées, des bureaux de liaison sont créés à Pékin et à Washington en 1973. Des liens avec le Japon sont également tissés en 1972.

5.8.6 Les successeurs de Mao

Le Premier ministre Zhou Enlai et le président Mao Zedong décèdent tous les deux en 1976. La mort de Zhou Enlai précipite la lutte entre les modérés et les extrémistes. Les radicaux remportent une première victoire en empêchant le vice-Premier ministre Deng Xiaoping d’accéder au poste de Premier ministre, puis en le privant de ses fonctions au gouvernement et au sein du Parti. En signe de compromis, Hua Guofeng, un gestionnaire n’appartenant à aucune des deux factions, devient Premier ministre et président du PCC. Il fait prévaloir une politique modérée et consolide sa position en faisant arrêter et accuser de crimes divers la Bande des Quatre, qui comprend la veuve de Mao, Jiang Qing et trois autres dirigeants radicaux, ces derniers ayant tenté un coup d’État.

Hua Guofeng s’efforce de stabiliser le jeu politique. Il doit faire face, en 1976, aux séismes telluriques qui dévastent Tangshan et la Chine du Nord. Pour mener à bien son programme politique, il nomme des modérés aux postes importants. En 1977, Deng Xiaoping redevient premier vice-Premier ministre. Les membres de la Bande des Quatre sont exclus du Parti. En août 1977, le XIe Congrès du Parti est dominé par un triumvirat composé du président du parti Hua Guofeng et des vice-présidents Deng Xiaoping et Ye Jianying. L’accent est mis sur la modération politique et sur la modernisation du gouvernement. Lors de la Ve Assemblée nationale populaire (février et mars 1978), Hua Guofeng est réélu Premier ministre et Deng Xiaoping premier vice-Premier ministre. Ye Jianying est nommé, quant à lui, président du Comité permanent de l’Assemblée, poste équivalent à celui de chef de l’État dans la nouvelle Constitution de 1978.

5.8.7 Vieillissement de l’équipe dirigeante

Pendant les années 1980 et le début des années 1990, la politique chinoise est dominée par Deng Xiaoping qui abandonne progressivement toutes ses fonctions officielles, tout en continuant à régner dans l’ombre. Désireux de développer le commerce et l’industrie en attirant les investissements étrangers, Deng Xiaoping et ses alliés optent pour une politique pragmatique de réformes économiques tout en maintenant la dictature politique.

En 1980, Hua Guofeng démissionne de son poste de Premier ministre. Zhao Ziyang, un partisan de Deng Xiaoping, lui succède. Au début de l’année 1981, après une parodie de procès très médiatisé en Chine, les membres de la Bande des Quatre sont jugés coupables et emprisonnés. En juin, un autre allié de Deng Xiaoping, Hu Yaobang, prend la tête du Parti communiste chinois à la place de Hua Guofeng. Une nouvelle Constitution nationale, ainsi qu’un nouveau statut du Parti, sont adoptés en 1982. La première restaure la fonction hautement symbolique de président de la République, supprimée par Mao Zedong en 1968.

En janvier 1987, Zhao Ziyang est nommé secrétaire général du Parti, à la place de Hu Yaobang, contraint de démissionner. Li Peng le remplace au poste de Premier ministre. Ce remaniement intervient après une vague de protestation étudiante (1986) réclamant davantage de démocratie et de liberté d’expression. La mort de Hu Yaobang, en avril 1989, provoque un nouveau mouvement de protestation en faveur de la démocratie. Ce mouvement atteint son paroxysme en mai, pendant la visite à Pékin du chef d’État soviétique Mikhaïl Gorbatchev, destinée à mettre fin à trente ans de tensions entre les deux pays. Les manifestants occupent la place Tian'anmen à Pékin, jusqu’à ce que des troupes blindées pénètrent dans la ville, dans la nuit du 3 au 4 juin, et tirent sur la foule, tuant entre 3 000 et 5 000 civils (voir manifestation de Tian'anmen). La répression qui s’ensuit fait perdre à Zhao Ziyang, qui a plaidé en faveur des étudiants, toutes ses fonctions au sein du Parti communiste, dont Jiang Zemin devient le secrétaire général.

En 1992, la Chine se lance officiellement dans l’économie de marché. En mars 1993, la VIIIe Assemblée nationale populaire élit Jiang Zemin président de la République. En 1995, celui-ci cherche à affermir son pouvoir, en traquant notamment la corruption inhérente à l’essor économique. Lors du XIVe Congrès du Parti communiste chinois, en septembre 1995, l’accent est mis sur un retour à l’idéologie politique sans porter préjudice à l’économie. En effet, les instances du Parti, craignant d’être débordées par l’apparition d’une bourgeoisie issue des affaires et par une contestation parlementaire, renforcent leur autorité sur les députés de l’Assemblée nationale populaire (mars 1996) et accentuent le contrôle sur la presse, la répression contre les opposants et les religions non orthodoxes. En même temps, le rôle des gérontes de la politique se voit conforté, ainsi que celui de l’armée. D’autres personnages, comme Qiao Shi, président de l’Assemblée nationale populaire, se réclament davantage du libéralisme. Mais la mise en avant des individualités cache une réalité trouble. Deng Xiaoping, dont la dernière apparition publique datait de février 1994, décède en février 1997. Sa succession s’annonce âpre, même si Jiang Zeming, qui cumule les fonctions de chef de l’État, du PCC et de l’armée, entend poursuivre la politique d’ouverture et de modernisation entamée par son illustre prédécesseur. Lors de la session annuelle de l’ANP, dix jours après la disparition de Deng Xiaoping, Qiao Shi et Li Peng lui apportent leur soutien. Priorité est donnée à l’économie (poursuite des réformes et de l’ouverture économique, réformes des entreprises d’État), ainsi qu’à la sécurité intérieure et au maintien de l’unité, après les vagues d’émeutes et d’attentats perpétrés par les séparatistes musulmans ouïgours, qui secouent la Chine depuis février 1997. Malgré un discours rassurant sur un possible hégémonisme chinois, et bien que prônant une réunification pacifique avec Taïwan, Pékin se lance dans une entreprise d’intimidation en exécutant d’importantes manœuvres militaires au large de l’îlot nationaliste fin 1996. Le dialogue entre Pékin et Taipei, rompu en 1995, ne reprend qu’en 1998. En juillet 1997, Hong Kong est rétrocédée à la Chine.

5.8.8 Tentative de renouveau politique et économique

À partir du XVe Congrès du Parti communiste, en septembre 1997, une nouvelle ère semble s’ouvrir. Le président Jiang Zemin annonce, dans son discours d’ouverture, la privatisation des entreprises d’État et la relance des réformes économiques destinées à faire face à la concurrence internationale (adapter l’économie à une ouverture partielle à l’international et la convertibilité du yuan). Le nouveau Bureau politique insiste également sur l’urgence de restructurer le Parti et le gouvernement, sur la lutte contre la corruption, et s’ouvre aux technocrates. Le gouvernement entreprend une réforme globale de l’administration chinoise : le nombre de postes et de ministères est réduit, la moyenne d’âge des dirigeants tombe à moins de 60 ans.

Arrivé en mars 1998, le nouveau Premier ministre, Zhu Rongji, qui succède à Li Peng, dont il est le vice-Premier ministre, est un technocrate considéré comme un réformateur. À l’origine des réformes économiques entreprises depuis 1992, il lance le pays sur une nouvelle voie, provoquant l’inquiétude des conservateurs. Par sa politique d’austérité, il obtient une réduction sensible de l’inflation (de 24 p. 100 à 1 p. 100). Les principales réformes annoncées sont la poursuite de la privatisation des entreprises d’État, le renforcement du rôle de la Banque centrale, la réduction de la dette publique, le développement des travaux publics, du logement, des industries de pointe et l’amélioration du système éducatif.

À Hong Kong, le gouvernement, tout en prenant le contrôle politique, laisse au particularisme local une marge pour s’exprimer : aux élections de mai 1998, les partis démocrates recueillent 60 p. 100 des voix et obtiennent 14 sièges. Cependant, l’économie de l’ex-territoire britannique est touchée par la crise monétaire et financière asiatique : baisse de la Bourse, faillites, récession, chômage et menace sur la monnaie et sur sa parité avec le dollar.

L’inflexion de la politique chinoise favorise un dégel des relations sino-américaines : la visite officielle de Jiang Zemin aux États-Unis, en novembre 1997 — première visite d’un dirigeant chinois depuis dix-huit ans — est suivie, en juin 1998, de celle de Bill Clinton en Chine. Depuis lors, les relations entre les deux pays se dégradent, Pékin accusant les États-Unis de soutenir le gouvernement taïwanais, Washington accusant la Chine de ne pas respecter les accords militaires et commerciaux conclus et dénonçant les dangereux transferts de technologies que ces accords ont généré (le « rapport Cox «, publié en mai 1999, dénonce, par ailleurs, l’ampleur de l’espionnage chinois aux États-Unis). De nombreux désaccords accroissent encore la tension entre les deux pays : la volonté américaine de mettre en place en Asie un dispositif de sécurité qui, outre le Japon et la Corée du Sud, pourrait inclure Taïwan, qui conduit la Chine à riposter en pointant plusieurs centaines de missiles en direction de l’île ; l’échec des discussions sur l’admission de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce (OMC), qui frustre les attentes chinoises ; le bombardement accidentel, en mai 1999, de l’ambassade de Chine à Belgrade, pendant la crise du Kosovo, qui est qualifié de « crime de guerre « et provoque de nombreuses manifestations anti-occidentales et une condamnation sévère par la Chine de l’OTAN et des États-Unis.

La situation des droits de l’homme en Chine est toujours régulièrement dénoncée par les organisations internationales ou par le gouvernement des États-Unis, malgré la signature, le 5 octobre 1998, de la Convention internationale des droits civiques et politiques ou l’assouplissement, en janvier 1999, de sa politique de l’enfant unique. Deux dissidents, Wei Jingsheng, en novembre 1997, et Wang Dans, en avril 1998, sont cependant libérés et expulsés vers les États-Unis. Toute manifestation pro-démocratique continue d’être empêchée par les autorités, aussi la commémoration publique du dixième anniversaire de Tian’anmen, en juin 1999, n’est-elle pas autorisée.

Déjà touchée en août 1998 (et à nouveau pendant l’été 1999) par de graves inondations du Yang-tseu-kiang, qui ont affecté plus de 250 millions de Chinois, l’économie, jusque-là épargnée par la crise asiatique et qui a amorcé une transition prudente vers une économie « socialiste de marché « (secteur privé reconnu par un amendement de la Constitution en 1999), connaît une forte crise financière en 1999, essentiellement due à la chute des exportations et aux faillites bancaires répétées. Malgré une forte croissance du PIB (8 p. 100 en moyenne entre 1997 et 1999) et de la production industrielle, le chômage frappe sévèrement les Chinois, et la précarité des situations individuelles, y compris dans les entreprises publiques, accroît fortement la pauvreté ainsi que les inégalités.

Sur le plan régional, les relations avec l’Inde se tendent après les essais nucléaires conduits par ce pays (1998) et la réponse de son voisin, le Pakistan, dont les essais ont été favorisés par une aide chinoise. En décembre 1999, des accords frontaliers sont passés entre la Chine et la Russie, d’une part, la Chine et le Viêt Nam, d’autre part. Également en décembre 1999, la Chine célèbre la rétrocession de Macao, qui met fin à 442 ans de présence portugaise. Macao devient, comme Hong Kong, une région sous administration spéciale, selon le principe « un pays, deux systèmes «. Les rapports avec Taïwan, qui a élu en mars 2000 son nouveau président, restent tendus ; Pékin, désirant « sauvegarder l’intégrité territoriale du pays «, déclare que « l’indépendance de Taïwan, c’est la guerre «, et continue à renforcer son armement (augmentation conséquente de son budget militaire). Mise hors la loi en juillet 1999, la secte Falungong, qui revendique plus de 80 millions d’adhérents, sème à nouveau le désordre dans la capitale en mai 2000, et les autorités procèdent à de nouvelles interpellations.

Quant à l’épineuse question de l’admission de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce (OMC), elle enregistre de nets progrès : le 19 mai 2000, les négociateurs européens et chinois signent un accord préalable à l’adhésion de la Chine à l’OMC, par lequel celle-ci s’engage à abaisser ses droits de douane sur certains produits et à faciliter l’investissement européen sur son territoire. Quelques jours plus tard, la Chambre des représentants américaine adopte une loi de normalisation des relations commerciales entre les États-Unis et la Chine, permettant de libéraliser les échanges entre les deux pays.

Si la conjoncture économique demeure favorable, la situation diplomatique se dégrade au contraire, en particulier avec les États-Unis. En effet, l’arrivée du républicain George W. Bush au pouvoir contribue à un refroidissement important des relations sino-américaines. Comme ses prédécesseurs, Reagan et Bush, il se montre critique à l’égard du régime communiste, affirmant que les désaccords avec Pékin sont nombreux, notamment dans le domaine des droits de l’homme, de la liberté religieuse et de l’évolution de la région Asie-Pacifique. En avril 2001, un avion espion américain, EP-3, est contraint d’atterrir en Chine après une collision avec un avion de chasse chinois. Durant une douzaine de jours, l’équipage américain de 24 personnes est retenu par Pékin qui exige des excuses de Washington après la disparition du pilote chinois. Au terme d’un véritable bras de fer diplomatique, l’équipage est libéré après que George W. Bush a exprimé des regrets officiels. Quelques jours plus tard, le président américain annonce la volonté américaine de continuer à aider militairement Taïwan, par la vente de bateaux et d’avions de guerre, provoquant une vive réaction de Pékin, où les militaires voient se renforcer leur influence auprès des dirigeants du parti.

En juillet, Pékin est choisie par le Comité international olympique (CIO) pour accueillir les jeux Olympiques en 2008. Ce sera la première fois que la Chine organisera la plus grande manifestation sportive mondiale. Cette élection suscite la joie des habitants de Pékin, mais elle est déplorée par les défenseurs des droits de l’homme qui militaient contre l’attribution des Jeux à la Chine.

Au mois de septembre 2001, après quinze ans de discussions, un accord est finalement signé à Genève entre la Chine et ses partenaires commerciaux en vue de l’adhésion de Pékin à l’OMC. Elle est formellement entérinée au mois de décembre lors de la conférence de l’OMC à Doha (Qatar). Dans l’optique de cette nouvelle donne économique, les entreprises chinoises se réorganisent fébrilement afin de faire face à la concurrence internationale.

Les entrepreneurs chinois sont au cœur de la pensée de Jiang Zemin, lors de son discours d’ouverture du XVIe Congrès du Parti communiste, au mois de novembre 2002, alors qu’il loue le rôle joué par les « couches sociales avancées « dans la modernisation du pays. Ce Congrès est l’occasion pour le président chinois d’annoncer son retrait de la scène politique et de désigner son successeur, à la fois à la tête du pays et du parti, en la personne de Hu Jintao. Cette succession, effective en mars 2003, marque un rajeunissement de la classe politique dirigeante : Hu Jintao, âgé de 59 ans, inaugure en effet la « quatrième génération « des cadres communistes depuis la naissance de la République populaire. Elle s’accompagne en outre d’un changement à la tête du gouvernement qui confirme cette tendance : Wen Jiabao (60 ans), qui succède à Zhu Rongji au poste de Premier ministre, présente un profil de technocrate consensuel, similaire à celui du nouveau numéro un chinois. Toutefois l’ancien président Jiang Zemin ne disparaît pas totalement de la vie politique, puisqu’il conserve la présidence de la Commission militaire centrale.

Au printemps 2003, le pays connaît une très grave crise sanitaire liée à l’épidémie du SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère), probablement née dans la province de Guangdong. Alors que les dirigeants chinois ont longtemps gardé le silence sur l’apparition de cette épidémie de pneumopathie atypique, favorisant ainsi sa propagation, ils sont contraints de présenter des excuses publiques pour avoir sous-estimé la gravité de la situation. Le ministre de la Santé est limogé, ainsi que le maire de Pékin. Au mois de juillet 2003, le bilan de l’épidémie en Chine continentale est de 5 327 cas et 348 décès.

Sur le plan international, l’année 2003 est marquée par la visite officielle d’Atal Bihari Vajpayee, la première visite en Chine d’un Premier ministre indien depuis dix ans. Cette visite marque un tournant dans les relations entre les deux puissances asiatiques, altérées par le conflit territorial qui les oppose depuis la guerre sino-indienne de 1962, et ouvre la voie à leur rapprochement économique. Dans une déclaration sur les principes régissant leurs relations bilatérales et la coopération, l’Inde reconnaît la souveraineté de la Chine sur la région autonome du Tibet, tandis que la Chine accepte l’appartenance du Sikkim à l’Inde.

Au mois d’octobre 2003, la Chine s’impose comme une grande puissance scientifique et technologique en réussissant son premier vol spatial habité, un succès qui revêt aussi une dimension patriotique considérable. Le pays poursuit sa libéralisation économique en amendant sa Constitution en mars 2004, afin d’y inscrire la protection de la propriété privée. Sur le plan politique, la transition en douceur s’achève en septembre 2004 par la démission de Jiang Zemin de la présidence de la Commission militaire centrale, au profit de Hu Jintao.

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