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comme si tu me demandais de courir aussi vite que Crison d'Himère au mieux de sa forme ou de participer à une course de fond.

Publié le 22/10/2012

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comme si tu me demandais de courir aussi vite que Crison d'Himère au mieux de sa forme ou de participer à une course de fond. Je te dirais que je suis moi-même, plus que tu ne peux l'être, désireux de me mettre à ce train, mais que j'en suis incapable et que, si tu veux me voir courir avec Crison, c'est à lui qu'il faut que tu demandes de la complaisance, car moi je ne puis courir vite, tandis que lui peut aller lentement. Donc si tu as envie de nous entendre, Protagoras et moi, demande-lui de continuer à faire des réponses brèves et uniquement aux questions posées ; sinon, quelle tournure prendra le dialogue ? Car pour moi, je pensais qu'une chose était de se réunir pour dialoguer, une autre de faire un discours au peuple. — Voyons Socrate, la proposition de Protagoras est équitable, il demande que dans le dialogue, on le laisse parler comme il le juge bon et t'accorde le droit d'en faire autant. « Protagoras, 334c-336b 2. DIALOGUER, C'EST ÉCHANGER DES RAISONS Alcibiade intervint alors : <4 Tu n'y es pas Callias. Socrate te dit que le discours suivi n'est pas son affaire et qu'il l'abandonne à Protagoras ; ce qui en revanche m'étonnerait, c'est qu'il le cède à personne dans l'art de dialoguer, de donner ses raisons et d'accueillir celles d'autrui. Donc si Protagoras reconnaît qu'il est inférieur à Socrate dans le dialogue, Socrate en reste là ; mais s'il prétend le contraire, alors, qu'il procède à l'échange des questions et des réponses sans prendre occasion de chaque réponse pour se lancer dans un long discours, en esquivant les arguments et en refusant de se justifier, et en pérorant jusqu'à ce qu'il ait chance que la plupart des auditeurs aient oublié quel était l'objet de la question. Car je me porte garant que Socrate, lui, ne l'oubliera pas, et que c'est par jeu qu'il se prétend oublieux. Ainsi, pour ma part, c'est la pro- position de Socrate que je crois la plus équitable, car c'est sa propre conception personnelle qu'il faut que chacun manifeste. « Protagoras, 336b-336d 3. CONVERSER, CE N'EST PAS CONTROVERSER Après Alcibiade, ce fut, je crois, au tour de Critias : « Prodicos et Hippias, dit-il, m'est avis que Callias penche pour Protagoras, tandis qu'Alcibiade veut toujours la victoire pour le parti qu'il prend ; mais nous, ce n'est pas la victoire de Socrate ou de Protagoras qu'il nous faut souhaiter, mais à l'un comme à l'autre il faut que tous ensemble nous leur demandions de ne pas interrompre l'entretien. « — À quoi Prodicos répondit : « Je crois, Critias, que tu as raison : il faut que ceux qui assistent à de tels débats accordent aux deux interlocuteurs une audience commune, mais non pas égale, car ce n'est pas la même chose : aux deux indistinctement il faut accorder audience, sans pour cela faire la part égale à chacun, la meilleure doit revenir à celui qui a le plus de savoir, la moindre au plus ignorant. Pour ma part, Protagoras et Socrate, je vous demande, moi aussi, de vous mettre d'accord, mais pour faire des thèses un objet de discussion et non pas de dispute : entre amis on discute avec bienveillance, ce sont rivaux et ennemis qui disputent. Voilà dans quelles conditions la rencontre prendrait pour nous le plus de valeur, car ce sont celles qui vous permettraient le mieux, vous les interlocuteurs, d'obtenir de nous qui vous écoutons l'estime et non la louange ; l'estime exclut la fausseté dans l'esprit des auditeurs, tandis qu'il arrive souvent que la louange en parole ne traduise pas l'opinion des gens qui dissimulent ; enfin c'est dans ces conditions que nous, les auditeurs, nous trouverions le plus de satisfaction et non pas de plaisir : car on éprouve de la satisfaction à apprendre quelque chose et à comprendre par la seule pensée, tandis qu'on éprouve du plaisir à manger ou à ressentir quelque chose d'agréable dans son corps seulement. « Beaucoup de ceux qui étaient là approuvèrent les propos de Prodicos. Protagoras, 336d-337c 4. L'INTERLOCUTION VRAIE : L'ENTRETIEN EST SON PROPRE ARBITRE C'est le savant Hippias qui intervint ensuite : « Vous tous ici présents, je vous tiens pour mes parents, mes proches, mes concitoyens selon la nature, non selon la loi, car c'est selon la nature que le semblable est parent du semblable, tandis que la loi, ce tyran des hommes, fait à maints égards violence à la nature. Ce serait une honte si nous qui savons la nature des choses, qui sommes les plus savants des gens, réunis à ce titre en ce moment dans le prytanée même de la science, dans la plus illustre demeure de la cité elle-même, nous ne faisions rien voir qui soit digne de cette dignité et si nous nous chicanions comme les premiers venus. Voici donc, Protagoras et Socrate, ma requête et mon conseil : faites chacun la moitié du chemin comme si notre arbitrage vous réconciliait ; ne cherche pas, Socrate, cette forme stricte des dialogues, cet excès de brièveté, si elle est désagréable à Protagoras, lâche un peu la bride aux propos pour qu'ils prennent à nos yeux plus d'ampleur et d'apprêt ; et toi, Protagoras, évite de ton côté de prendre le large et de perdre la côte de vue en déployant les voiles de tes discours ; trouvez tous deux un moyen terme. Faites ainsi, et croyez-moi choisissez un arbitre, un épistate, un prytane qui veille à la juste mesure de vos propos respectifs. « Ces propos plurent à l'assistance, tous approuvèrent et tandis que Callias affirmait que je ne m'en irais pas, on me demanda de choisir un arbitre. Pour moi je dis que choisir un arbitre du débat serait une mauvaise solution, car ou bien l'élu ne nous vaudrait pas et il ne serait pas correct que le moins bon arbitrât ceux qui lui

« 108 PLATON PAR LUI-MÊME position de Socrate que je crois la plus équitable, car c'est sa propre conception personnelle qu'il faut que chacun manifeste.

•> Protagoras, 336b-336d 3.

CONVERSER, CE N'EST PAS CONTROVERSER Après Alcibiade, ce fut, je crois, au tour de Critias : - À quoi Prodicos répondit :. »

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