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Commentaire Oral: Gérard de Nerval, Une allée du Luxembourg

Publié le 15/09/2006

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INTRO:  Gérard de Nerval, de son vrai nom Gérard Labrunie, né à Paris le 22 Mai 1808 et mort le 26 Janvier 1895, était un poète français de renom. Il s'inscrivit dans de nombreux genres tels que les romans et les contes, mais il écrivit également de nombreux poèmes tels que « Le Peuple « en 1830 et surtout « Les Odelettes « en 1834 dans lequel se trouvait des poèmes remarquables comme « Un réveil en Voiture « et « Une Allée du Luxembourg « qu'on va d'ailleurs analyser.  Ce poème à pour thème un coup de foudre, une rencontre qui ne se reproduira plus. L'intérêt de cette odelette réside dans l'évocation d'un moment fugitif cristallisant le fantasme amoureux et le regret du temps passé.    Problématique : Comment Nerval parvient-t-il à traduire le caractère éphémère de cette rencontre ?    I - Jeunesse et vieillesse  II - une rencontre impossible : diversités temporelles  III - Regrets : renouveau de l'élégie.    I - Jeunesse et vieillesse  1 -En effet, Nerval évoque sans le décrire l'archétype féminin de la jeune fille. Tout est compris dans cette façon générique de la nommer. Elle est bien plus qu'"une" jeune fille, puisque l'article défini la promeut au rang de type universel. Dès lors, l'aura dont elle s'environne est tout entière marquée par cette universelle nouveauté : sa vivacité et sa légèreté comparées à celles de l'oiseau, la fleur symbolisant la beauté éphémère si l'on en croit les sonnets de Ronsard ("Mignonne allons voir si la rose...") ou ce "refrain nouveau" , tout aussi indéfini, qui a pour charge de représenter le perpétuel recommencement de la nouveauté. Nommé, cet air serait condamné à passer de mode ; ainsi désigné, il est ce refrain qui nous paraîtra demain résumer toute la nouveauté dont nous sommes si friands.  2 -Ensuite, La forme choisie épouse ce parti-pris de jeunesse et de mouveauté. L'odelette, dans sa simplicité, sa modestie même, rencontre la présence irréelle de la jeune femme. Rien d'ampoulé ni de solennel dans ces trois quatrains de vers octosyllabes. L'odelette est une forme légère qui s'apparente à la chanson populaire et sied parfaitement ici au personnage central comme aux circonstances décrites : "une allée de Luxembourg", quelque jour représentatif d'une vie parfaitement banale. La brièveté de l'octosyllabe et sa rapidité, imitent de même l'ébahissement du poète, la succession rapide des émotions ressenties au passage de la jeune femme dont la "vivacité" et la "prestance" sont tout entières reflétées par l'odelette.  c -Pour finir, Face à cette grâce pleine de jeunesse, on devine en contraste, l'univers plus sévère de l'homme âgé. "ma nuit profonde", métaphore d'un corps ou d'un esprit tourmentés par quelque douleur physique ou morale introduit une modulation dramatique après le portrait de la jeune fille. Puis c'est un soupir qui s'échappe " Mais non," marqué par la pause d'une double ponctuation (, -) peu orthodoxe. Tout est fait pour que la voix reste en suspens après cette soudaine dénégation. Plus que dans l'aveu qui suit : "ma jeunesse est finie..." c'est dans le rythme entrecoupé du vers que l'on ressent tout le poids et toute la tristesse de cette jeunesse envolée. En écho, le dernier vers du poème résonne comme une sentence plus implacable encore parce qu'il peut être lu hors de tout contexte comme une constatation définitive : "Le bonheur passait, - il a fui"    II - Une rencontre impossible : diversités temporelles.  a -Dans un premier temps, Le raccourci temporel à l'oeuvre dans ce dernier vers résume bien la temporalité particulière du poème. Le brusque passage de l'imparfait au passé composé (il délimite l'action et la parachève) conclut une série d'actions accomplies, douloureusement envisagées comme déjà finies : "elle a passé" "doux rayon qui m'a lui". Au passé simple, Nerval préfère le passé composé, moins littéraire, plus tangible, afin de donner l'impression d'un événement qui viendrait juste de se produire. Les points de suspension et points-virgules viennent brouiller la chronologie supposée de l'événement. Aussi est-il difficile d'établir si le portrait de la jeune fille, le moment de son passage et les réflexions du poète sont simultanés ou successifs : tout arrive dans une espèce de tourbillon atemporel, dont on sent qu'il n'a duré qu'un instant.  b -Dans un second temps, Cette briéveté n'exclut pas un fantasme élaboré. Le deuxième quatrain représente un surgissement du rêve, lequel est signifié par l'emploi du conditionnel présent. "Peut-être" suffit à amorcer un projet ambitieux : la découverte de l'âme soeur qui, pour n'être qu'une hypothèse, s'ancre immédiatement et irrémédiablement dans un présent d'éternité : "C'est peut-être la seule au monde". En employant ce présentatif actuel, Nerval affirme qu'il est encore convaincu de la validité de son intuition : il ne la place pas sur le compte du souvenir ou de la pure rêverie : elle entre d'emblée dans l'ordre de l'existence.  c -Finalement, Après le passage de la jeune fille et le fantasme qu'il suggère, c'est un retour à l'amère solitude. Le référent temporel n'est cependant pas clairement indiqué comme présent, si bien que la temporalité du texte échappe par cet "Adieu" qui nous ramène en boucle, à la destruction du fantasme : "il a fui". Cette mouvance de la temporalité est sans doute la plus grande réussite du poème. Pour traduire l'instant fugitif, Nerval tisse un canevas temporel lui-même fuyant, insaisissable. Entre deux irréels, celui de l'instant irrémédiablement achevé (passé composé) et celui du fantasme non-avenu (conditionnel), la rencontre de cette jeune fille sera devenue un pur moment de magie atemporelle et universelle. Perdu dans deux dimensions du temps irréconciliables, les deux personnages sont donc condamnés à ne jamais se rencontrer.    III - Nerval parvient ainsi à renouveller l'élégie en donnant une interprétation nouvelle au regret du temps passé.  a -D'une part, Le ton élégiaque est en effet modulé par la simplicité et l'efficacité du rythme. Si la déploration est encore sensible dans les métaphores opposées de l'obscurité et de la clarté (cf. v. 7 et 8), si le vers 9 résonne bien comme une lamentation, le reste de l'odelette n'en est pas moins une pièce enlevée. Elle est d'ailleurs ryhmée non par les soupirs du poète, mais par la marche "vive et preste" de la jeune fille qui semble imprimer un balancement binaire à tout le poème dès lors que le premier vers a donné le tempo : "Elle a passé, la jeune fille." Ici, le vers est parfaitement symétrique rythmiquement (4/4) et thématiquement puisque la figure d'emphase, très orale, telle une exclamation pleine d'émotion, met deux fois en valeur le personnage féminin. Ce balancement binaire se retrouve dans le couple d'adjectifs au vers suivant et dans la structure anaphorique des vers 3 et 4 : "A la main.../A la bouche...". C'est "l'harmonie" même sur laquelle s'extasie le poète au vers 11 ; de fait, c'est le pas de la jeune fille qui ordonne et rythme en parfaite symétrie la composition du premier quatrain.  B – D'autre part, La spontanéité des images évoquées participe de ce tourbillon sentimental : au vers 11, la syntaxe est abandonnée au profit d'une succession d'expressions nominales "Parfum, jeune fille, harmonie..." Tout rapport logique banni, ces trois termes jetés pêle-mêle comme des exclamations ou des soupirs crèent une cadence rythmique ternaire, signe d'un dernier abandon au fantasme avant la sentence finale qui elle, renoue avec un ryhtme binaire. Dans cette soudaine bouffée onirique, on perçoit ensemble la sensualité du parfum, la figure idéale de la jeune fille, une abstraction : intuition d'une harmonie, dont on ne sait si elle est musicale, sentimentale (le thème de l'âme soeur ayant été évoqué) ou spirituelle. Car l'enjeu déclaré de cette rencontre manquée n'est-il pas "le bonheur" lui-même ?  c -Enfin, La polysémie du terme nous permet en effet d'ouvrir sur une autre réussite de ce poème : ancré dans un quotidien banal, situé dans "une allée du Luxembourg", le poème peut aussi se lire comme une quête symbolique. Le "bonheur", étymologiquement, c'est l'heureuse coincidence, le bon moment, tel cet instant où le chemin du poète croise par hasard le passage d'une jeune fille. Cette odelette n'est dès lors qu'un croquis fait d'après nature, un fragment de "choses vues" glané au hasard de n'importe quelle journée dans un jardin de la capitale. Ou bien l'on entend "bonheur" au sens plus vaste d'harmonie vaste et perpétuelle et dès lors, cette lecture est rendue possible par le symbolisme étrange de certains éléments : a-t-on déjà vu une fleur "briller"? et ces yeux qui jettent "des rayons"? comment réconcilier ces coeurs qui "se répondraient" l'un à l'autre avec la simple matérialité d'une "allée du luxembourg". Insensiblement, Nerval réussit en vérité à entremêler le concret avec l'abstrait, le prosaique avec le symbolique, afin de donner à cette rencontre fulgurante et banale une dimension toute poétique.  CONCLUSION:reprise des 3 parties    I - Jeunesse et vieillesse  II - une rencontre frustrante et impossible : diversités temporelles  III - Regrets : renouveau de l'élégie.+ Ouverture :    Sentiment romantique du "jamais plus" chez E.-A. Poe (Le corbeau) et surtout dans A une passante de Baudelaire, qui reprend exactement les mêmes circonstances (le passage d'une jeune femme) pour exprimer la même frustration devant un instant passé trop vite, devant une réaction qui n'est jamais venue et qui rend impossible la vérification d'une intuition sublime. Trop souvent considéré comme un romantique mineur, Nerval prouve ici tout au contraire qu'il ouvre la voie menant à Baudelaire. On a vu comment l'originalité dans le traitement d'un thème usé lui permet d'expérimenter la limite entre réel et symbolique, en un jeu qui trouvera sa pleine expansion dans "Aurélia" ou "Les filles du feu".

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« irréels, celui de l'instant irrémédiablement achevé (passé composé) et celui du fantasme non-avenu (conditionnel), la rencontre decette jeune fille sera devenue un pur moment de magie atemporelle et universelle.

Perdu dans deux dimensions du tempsirréconciliables, les deux personnages sont donc condamnés à ne jamais se rencontrer. III - Nerval parvient ainsi à renouveller l'élégie en donnant une interprétation nouvelle au regret du temps passé.a -D'une part, Le ton élégiaque est en effet modulé par la simplicité et l'efficacité du rythme.

Si la déploration est encore sensibledans les métaphores opposées de l'obscurité et de la clarté (cf.

v.

7 et 8), si le vers 9 résonne bien comme une lamentation, lereste de l'odelette n'en est pas moins une pièce enlevée.

Elle est d'ailleurs ryhmée non par les soupirs du poète, mais par lamarche "vive et preste" de la jeune fille qui semble imprimer un balancement binaire à tout le poème dès lors que le premier vers adonné le tempo : "Elle a passé, la jeune fille." Ici, le vers est parfaitement symétrique rythmiquement (4/4) et thématiquementpuisque la figure d'emphase, très orale, telle une exclamation pleine d'émotion, met deux fois en valeur le personnage féminin.

Cebalancement binaire se retrouve dans le couple d'adjectifs au vers suivant et dans la structure anaphorique des vers 3 et 4 : "A lamain.../A la bouche...".

C'est "l'harmonie" même sur laquelle s'extasie le poète au vers 11 ; de fait, c'est le pas de la jeune fille quiordonne et rythme en parfaite symétrie la composition du premier quatrain.B – D'autre part, La spontanéité des images évoquées participe de ce tourbillon sentimental : au vers 11, la syntaxe estabandonnée au profit d'une succession d'expressions nominales "Parfum, jeune fille, harmonie..." Tout rapport logique banni, cestrois termes jetés pêle-mêle comme des exclamations ou des soupirs crèent une cadence rythmique ternaire, signe d'un dernierabandon au fantasme avant la sentence finale qui elle, renoue avec un ryhtme binaire.

Dans cette soudaine bouffée onirique, onperçoit ensemble la sensualité du parfum, la figure idéale de la jeune fille, une abstraction : intuition d'une harmonie, dont on ne saitsi elle est musicale, sentimentale (le thème de l'âme soeur ayant été évoqué) ou spirituelle.

Car l'enjeu déclaré de cette rencontremanquée n'est-il pas "le bonheur" lui-même ?c -Enfin, La polysémie du terme nous permet en effet d'ouvrir sur une autre réussite de ce poème : ancré dans un quotidien banal,situé dans "une allée du Luxembourg", le poème peut aussi se lire comme une quête symbolique.

Le "bonheur",étymologiquement, c'est l'heureuse coincidence, le bon moment, tel cet instant où le chemin du poète croise par hasard le passaged'une jeune fille.

Cette odelette n'est dès lors qu'un croquis fait d'après nature, un fragment de "choses vues" glané au hasard den'importe quelle journée dans un jardin de la capitale.

Ou bien l'on entend "bonheur" au sens plus vaste d'harmonie vaste etperpétuelle et dès lors, cette lecture est rendue possible par le symbolisme étrange de certains éléments : a-t-on déjà vu une fleur"briller"? et ces yeux qui jettent "des rayons"? comment réconcilier ces coeurs qui "se répondraient" l'un à l'autre avec la simplematérialité d'une "allée du luxembourg".

Insensiblement, Nerval réussit en vérité à entremêler le concret avec l'abstrait, leprosaique avec le symbolique, afin de donner à cette rencontre fulgurante et banale une dimension toute poétique.CONCLUSION:reprise des 3 parties I - Jeunesse et vieillesseII - une rencontre frustrante et impossible : diversités temporellesIII - Regrets : renouveau de l'élégie.+ Ouverture : Sentiment romantique du "jamais plus" chez E.-A.

Poe (Le corbeau) et surtout dans A une passante de Baudelaire, qui reprendexactement les mêmes circonstances (le passage d'une jeune femme) pour exprimer la même frustration devant un instant passétrop vite, devant une réaction qui n'est jamais venue et qui rend impossible la vérification d'une intuition sublime.

Trop souventconsidéré comme un romantique mineur, Nerval prouve ici tout au contraire qu'il ouvre la voie menant à Baudelaire.

On a vucomment l'originalité dans le traitement d'un thème usé lui permet d'expérimenter la limite entre réel et symbolique, en un jeu quitrouvera sa pleine expansion dans "Aurélia" ou "Les filles du feu". Commentaire réalisé par LAARAYBI Dimitri, élève de 1°S (Une version améliorée pourrait être publiée dans hors du cadrescolaire). »

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