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Dissertation une allée du luxembourg

Publié le 12/11/2011

Extrait du document

luxembourg

Texte :

Elle a passé, la jeune fille

Vive et preste comme un oiseau

À la main une fleur qui brille,

À la bouche un refrain nouveau.

C'est peut-être la seule au monde

Dont le coeur au mien répondrait,

Qui venant dans ma nuit profonde

D'un seul regard l'éclaircirait !

Mais non, - ma jeunesse est finie ... 

Adieu, doux rayon qui m'as lui, -

Parfum, jeune fille, harmonie...

Le bonheur passait, - il a fui !

Gérard de Nerval, Odelettes, 1835

Éléments d’introduction et contexte :

Nerval :

- poète romantique torturé et brillant

- internement régulier

- mort pendu à une grille « dans le coin le plus sordide qu’il ait pu trouver » (Baudelaire)

« Une allée du Luxembourg » :

- rencontre stérile et fugace avec une jeune fille

Construction du texte :

3 quatrains

Octosyllabes

Rimes croisées ABAB

Les procédés rhétoriques et leur interprétation :

Procédés

Interprétations

« Une allée du Luxembourg » (titre)

Jardin parisien très fleuri, lieu traditionnel des promenades amoureuses au XIXe.

Pronom démonstratif « la » (v.1)

Indique qu’il s’agit d’une jeune fille en particulier, qu’elle l’a particulièrement marquée et dont le souvenir est plutôt vif.

Périphrase « la jeune fille » (v.1)

Vient renforcer son importance car il aurait pu se contenter d’écrire « elle a passé », ce qui met en valeur son sexe, son jeune âge, la posant comme l’objet de fantasme amoureux.

La comparaison « vive et preste comme un oiseau » (v.2)

L’assimile à un volatile pour mieux monter son côté furtif, comme si sa marche était un vol, à l’élégance et la rapidité de l’oiseau. Nerval peut aussi suggérer son côté sauvage, non dompté. Elle volette dans le jardin, sans ne se soucier de rien.

Parallélisme » A la main » (v.3), « A la bouche » (v.4)

Prend des accents chantants, musicaux, d’autant plus que ces expressions sont suivies de phrases nominales, plus légères, plus dansantes. Le poète semble emporté par le passage de cette jeune fille, au point de lui associer des clichés de la littérature courtoise : « fleur ». Par ailleurs, si cette fleur « brille » (v.3), c’est pour mettre en valeur sa jeunesse (fait écho avec « jeune » (v.1)) et son éclat, probablement pour désigner indirectement les mêmes caractéristiques chez la jeune fille.

Hyperbole « peut-être la seule au monde » (v.5)

La pose en être unique, bien que l’emploi du modélisateur « peut-être » en atténue la force, cette femme représente l’unique occasion pour le poète de revivre et quitter « sa nuit profonde ».

Pléonasme « nuit » (v.7) et « profonde » (v.7)

Insiste sur l’épaisseur de la nuit. Nerval semble installé depuis longtemps dans cette « nuit », c'est-à-dire dans ce mal-être, cette mélancolie. (Lui, auteur célèbre de l’oxymore « soleil noir de ma mélancolie » exprime une fois encore son mal être de vivre typique des Romantiques.)

CL de la lumière : « brille » (v.3), « éclaircirait » (v.8), « rayon » (v.10), « lui » (v.10)

Ce CL accorde à la femme des pouvoirs quasi magiques, et suppose que, de sa seule présence, elle illumine l’existence du poète.

Antithèse entre « nuit » (v.7) et « éclaircirait » (v.8)

Insiste sur l’opposition entre les deux personnages et sur leur complétude.

Métonymie « c?ur » (v.6) et la métaphore/personnification « dont le c?ur au mien répondrait » (v.6)

Indique deux choses. D’une part, l’apparition de cette femme touche le poète dans ses sentiments (c?ur=lieu métamorphique des sentiments) ce qui peut laisser penser qu’elle serait son âme s?ur, sa compagne dont les deux c?urs battraient à l’unisson : « au mien répondrait ». D’autre part, cette métonymie montre que la vie même du poète peut entrer en jeu avec cette rencontre (c?ur=source de vie).

Connecteur d’opposition « mais » renforcé par la négation tonique « non » (v.9)

Affirme nettement l’échec de cette apparition.

Affirmation négative est directement d’un constat amer sans détour « ma jeunesse est finie » (v.9)

L’auteur semble associé cette jeune fille à sa propre situation, comme si elle représentait métamorphiquement l’âge d’or envolé, ses jeunes années à présent derrière lui. On retrouve ainsi l’expression maladive du temps qui passe, dont l’écoulement irrépressible obsède les Romantiques.

CL du passage : « passé » (v.1), « adieu » (v.10), « passait » (v.12), « fui » (v.12)

Préparait déjà cet échec car la jeune fille ? ou la jeunesse ? était caractérisée par la fugacité et la rapidité : elle est voué à disparaître.

Emploi du conditionnel « répondrait » (v.6), « éclaircirait » (v.8)

N’avance finalement que des hypothèses d’améliorations de la vie et des états d’âme du poète et suggère qu’il n’était même pas certain de son impact bénéfique. Ce conditionnel prouve qu’elle avait la capacité d’illuminer sa « nuit profonde » mais qu’elle n’en a pas eu le temps ou la volonté de le faire.

Emploi du passé composé « elle a passé » (v.1), « elle a fui » (v.12

Signale un fait certes récent (sinon il aurait employé le passé simple) mais achevé, terminé, dont l’espoir n’a été qu’un germe.

La gradation entre les deux verbes employés aux deux extrémités du poème

Met en évidence le fait que le poète a sombré. En effet, le premier verbe prend des connotations de rapidité et de passage, pas forcément négatives, alors que « fui » connote plus négativement la volonté de partir, voire le rejet de celui qui reste.

Ponctuation expressive dans le dernier quatrain

Pour mettre en valeur l’émotion du poète. Ainsi les « ... » (v.9) après le constat d’échec « ma jeunesse est finie » peuvent être interprétés comme le silence du poète soumis à une trop forte émotion en réalisant son malheur tandis que les tirets (v.9 et v.12) marquent une autre pause, probablement tout aussi douloureuse dans l’écriture du poème, pour signaler la souffrance du poète.

 

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