Devoir de Philosophie

FAYE (Jean Pierre)

Publié le 17/01/2019

Extrait du document

FAYE (Jean Pierre), écrivain français (Paris 1925). Abondante et très diversifiée (roman, poésie, théâtre, critique littéraire, mais aussi traductions, essais philosophiques et sociologiques, ouvrages de caractère politique, interventions journalistiques), l'œuvre de J. P. Faye (dissident du groupe Tel Quel en 1967 et fondateur peu après — 1968 — de la revue et du collectif Change) a établi quelques-uns des repères essentiels à la compréhension des voies textuelles contemporaines. Inaugurée véritablement par la poésie {Fleuve renversé, 1959), toute l'entreprise d'écriture de Faye désigne les pouvoirs de la langue « en actes » dans la narration et le désir de les mettre à nu : l'effort du langage (de la littérature, a fortiori) ne peut se dissocier du rapport et par là, dans la spécificité de ses moyens et la re-figuration de l'événement qu'ils impliquent, agit sur le cours de l'histoire ; changeant ses formes par le récit, elle en bouleverse les occurrences et les possibles. Traversée par l'histoire et le sens, la langue en est aussi productrice (Mallarmé : « Énoncer signifie produire ») : elle oscille constamment entre le moment (ou le fait) qu'elle redit et celui qu'elle crée (ou, au moins, provoque). Théoricien de ce balancier dans le diptyque Théorie du récit-Lang âges totalitaires, sous-titré : Critique/de la rai-son/de l'économie/ narrative (1972), créateur de cette « sociologie des langages » sans quoi il ne peut y avoir de science de l'histoire, Faye est donc, également, celui qui « hurle sa démonstration par la pratique » (Mallarmé). Ainsi, dans l'étoilement fictionnel de l'Hexagramme (Entre les rues, 1959 ; la Cassure, 1961 .Battement, 1962 ; Analogues, 1964 ; 1'Écluse, 1964 ; les Troyens, 1970), où la « prosodie du désir » vient battre et couper l'entrecroisement du parcours des villes et des événements politiques : c'est le récit des corps qui, de même que dans Infemo, versions (1975) et l'Ovale, détail (1975), rythme ces romans et leur donne forme (Yumi, (1983). Car le dire de la langue et de l'histoire, ses résonances politiques (Grandes Narrations de Bourgogne, 1983) sont inséparables de l'inscription amoureuse — sœur instigatrice de la parole poétique ; dans Couleurs pliées (1965), Verres (1978), Syeeda (1980), où se marquent les « temps souterrains du récit », éclate, à travers une complexité métrique peu commune dans le champ poétique français contemporain, une louange des sens que Faye verrait comme le ciment de ce triangle « poé-sie/pensée/politique » qui porte toute sa recherche et qu'il nomme, en hommage à Hôlderlin (qu'il a traduit), « le trèfle ».

Liens utiles