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Guy Mollet par François Mauriac.

Publié le 14/04/2013

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Guy Mollet par François Mauriac. Entre la crise de Suez et l'insurrection de Budapest, l'automne 1956 est d'une rare intensité événementielle, tant pour le monde que pour une France enlisée dans la guerre d'Algérie. François Mauriac choisit alors d'interpeller Guy Mollet, le président du Conseil. Dans son « Bloc Notes « hebdomadaire, publié dans l'Express, il décline les motifs de sa colère : perte de confiance dans un Front républicain qui vient d'arrêter le leader algérien Ahmed Ben Bella au Maroc et qui refuse obstinément de solder la question algérienne, condamnation de l'aventureux néo-colonialisme de Suez et présentation d'un président du Conseil, de gauche, devenu un vassal droitisant des États-Unis. Bloc Notes de François Mauriac (tome 1) « Vendredi 16 novembre Des amis qui l'ont vu lundi soir à la télévision m'assurent que M. le président du Conseil a bonne mine. Me voilà tranquillisé. Je m'étais fait des idées. On s'attache aux gens malgré tout, fussent-ils des fléaux. Il aurait même prononcé un mot, le plus inattendu dans sa bouche : il aurait parlé de « succès «. Mais cela est un peu fort et je me refuse à le croire. C'est pourtant vrai qu'il a battu un record. Nous pouvions nous demander naguère quelle est, parmi les politiciens de la IVe république, l'espèce la plus nuisible : celle qui ne fait rien ou celle qui fait quelque chose. J'inclinais à redouter surtout la première. M. Guy Mollet m'a fait changer d'avis. Non M. Guy Mollet tout seul. Il ne faut pas enlever à M. Christian Pineau ce qui lui revient de droit. Nous n'en ferons pas l'inventaire, et d'ailleurs il est trop tôt : des murs ont l'air de qui vont peutêtre s'effondrer. [...] Mais de quoi vais-je parler ? Qu'est ce que cette petite histoire marocaine auprès de l'expédition d'Égypte ? Je ne m'y attarderai pas, en ayant presque tout dit d'avance, dès l'avant-dernier bloc-notes, alors que toute la presse délirait [...]. Voici une des suites de l'aventure égyptienne qui échappe encore à beaucoup : Washington consentirait à nous pardonner, mais du bout des dents. [...] Nous ne referons pas une seconde fois aux Américains le coup de Suez, cela va de soi : toutes nos affaires les concerneront désormais, dans la mesure où elles affectent la paix internationale et d'abord la guerre d'Algérie. Je crains fort qu'à ce propos on ne nous mette le marché en mains. Le coup de Suez ne nous laisserait alors d'autre choix qu'entre une dépendance humiliante et un refus désespéré. Que ferons-nous ? La solitude, pour une nation, n'est plus imaginable dans l'univers de l'atome. [...] [...] Tout cela [...] devrait accabler MM. Guy Mollet et Christian Pineau. Pourtant, ils ne vacillent pas. La complicité de tous les maintiendra en place. C'est qu'il n'y a pas un seul innocent dans cette histoire. La politique algérienne et égyptienne du gouvernement était celle de la droite. Les socialistes l'ont accomplie. Quant au parti communiste, le sang des Hongrois l'étouffe. Qui donc jetterait la pierre à M. Guy Mollet ? D'ailleurs, il nous importe peu qu'il s'en aille ou qu'il demeure, s'il ne devait plus rester au président du Conseil français qu'à regarder du côté de Washington et à en attendre un mot d'ordre. «. Source : Mauriac (François), Bloc Notes, tome 1, 1952-1957, Paris, Seuil, 1993. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.

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