Devoir de Philosophie

jerusalem

Publié le 07/11/2012

Extrait du document

Le patrimoine : la Vieille Ville de Jérusalem Jérusalem est la ville sainte des trois religions monothéistes. Tout au long de son histoire, la cité a été au coeur de l'identité religieuse du judaïsme, du christianisme et de l'islam. À ce titre, elle a souvent été un enjeu. La vieille ville constitue aujourd'hui le centre d'une agglomération encore divisée entre l'État d'Israël et les territoires occupés. Entourée par les remparts construits vers 1520, la Vieille Ville représente un résumé de l'histoire des grands monothéismes. Elle est organisée en trois quartiers ayant chacun une identité propre : quartier juif, quartier chrétien, quartier musulman. Au sud-est de la ville se trouve par ailleurs l'esplanade des Mosquées, qui occupe l'emplacement de l'ancien Temple, lieu de mémoire difficilement partagé entre juifs et musulmans.Le patrimoine de Jérusalem est de plusieurs natures. Il s'agit en premier lieu d'un patrimoine spirituel. On appelle ainsi tous les éléments qui relèvent d'un héritage philosophique ou religieux. La Vieille Ville de Jérusalem associe en effet dans un espace réduit les lieux saints juifs, avec « le Mur des lamentations «, chrétiens, avec le Saint-Sépulcre, et musulmans, avec l'esplanade des Mosquées. Cette concentration de lieux sacrés a également conduit à la réalisation d'un patrimoine architectural et artistique tout à fait remarquable, chacune des grandes religions présentes dans la ville l'ayant marquée par des édifices et des oeuvres d'art. Ce patrimoine a aussi été meurtri par les rencontres et les conflits entre les civilisations qui souhaitaient posséder la cité. Cette extraordinaire concentration patrimoniale a valu à la Vieille Ville d'être inscrite sur la liste du patrimoine mondial par l'Unesco dès 1982.Comment faire une lecture historique du patrimoine de la vieille ville de Jérusalem ? En quoi est-elle révélatrice de la coexistence, parfois difficile, de lieux de mémoire des trois monothéismes ? 1. La ville sainte du judaïsme Une empreinte millénaire o À sa naissance, rien ne prédispose Jérusalem à tenir une place particulière au sein du patrimoine de l'humanité. L'archéologie a révélé les traces d'une agglomération depuis 3500 ans av. J.-C. Cette cité est alors peuplée par les Jébuséens. o La prise de la ville par le roi David, vers 1004 av. J.-C., transforme son destin. David bâtit sa cité au sud-est de la Vieille Ville actuelle. Il fit dresser sur le mont Moriah un autel au Dieu unique adoré par son peuple : Yahwé. o Le successeur de David, Salomon, mort vers 930 av. J.-C., fait construire à l'emplacement de l'autel de David un temple qui devient le lieu unique où est rendu le culte du Dieu unique. Dans son espace le plus sacré, le « Saint des Saints «, se trouvent les Tables de la Loi, conservées dans l'arche d'alliance. Un patrimoine entre apports et héritages o Le patrimoine de Jérusalem se retrouve ensuite au coeur des enjeux politiques et spirituels. En 587 av. J.-C., les Babyloniens pillent la ville et détruisent le Temple, provoquant l'exil d'une part importante de la population. o Le retour des exilés en 515 av. J.-C. conduit à la reconstruction du Temple, à l'édification d'une nouvelle muraille et à une reprise de la vie urbaine. Alors que Rome a déjà imposé son protectorat, depuis 63 av. J.-C., le roi Hérode, qui règne à partir de 37 av. J.-C., reconstruit le Temple et l'ensemble de son esplanade, qui existe toujours. La cité occupe alors une superficie plus vaste que l'actuelle Vieille Ville. Un patrimoine marqué par la diversité o En 70, suite à une révolte des juifs, les Romains détruisent le Temple. En 130, suite à une nouvelle révolte, les juifs sont expulsés. Certains d'entre eux restent cependant dans la cité. Parmi les communautés juives vivant en diaspora, la mémoire de la ville sainte perdure. Le mur occidental, le kothel, vestige le mieux préservé et le plus accessible de l'enceinte du Temple, demeure le principal lieu de pèlerinage du judaïsme. Il s'agit d'un lieu de mémoire du Temple détruit, d'où le nom qui lui a été donné de « Mur des lamentations «. o L'actuel quartier juif témoigne de la présence juive. La population juive de Jérusalem au Moyen Âge est constituée d'apports successifs dont témoignent de nombreux monuments. Les musulmans permettent l'établissement de populations juives. La synagogue Ramban est la plus ancienne, fondée par un juif espagnol dès 1267. La diversité des traditions juives apparaît avec la présence de quatre synagogues sépharades construites à partir du xvie siècle. Détruite lors de la guerre israélo-arabe de 1948, la synagogue ashkénaze de la Hourva a été reconstruite en 2006. 2. Un patrimoine chrétien Un lieu fondamental du christianisme o C'est à Jérusalem qu'ont lieu les événements les plus marquants de la naissance du christianisme. Les Évangiles y situent de nombreux épisodes de la vie du Christ. C'est notamment dans cette ville qu'il est condamné et crucifié, sur le mont Golgotha. Pour les chrétiens, c'est là également qu'il est ressuscité. o Le patrimoine chrétien de la ville montre à la fois la volonté par tous les chrétiens d'honorer ces lieux et la division de ceux-ci en plusieurs Églises. La constitution d'un patrimoine chrétien o La ville abrite des édifices relevant de plus de trente Églises chrétiennes différentes. Lorsque le christianisme est autorisé dans l'empire romain, en 313, quand il en devient ensuite la religion officielle, puis pendant la domination byzantine, les empereurs font bâtir des basiliques sur les lieux saints. Le lieu de la Crucifixion et le tombeau du Christ sont surmontés d'une rotonde qui, après des remaniements importants, est devenue l'actuelle église du Saint-Sépulcre, partagée entre les différentes Églises chrétiennes. o Les chrétientés orientales construisent des Églises, notamment l'Église grecque orthodoxe, qui regroupe aujourd'hui encore la majorité des Palestiniens chrétiens, ou encore l'Église apostolique arménienne. Un patrimoine marqué par des rencontres entre Orient et Occident o À l'époque des croisades, Jérusalem devient de 1099 à 1187 le siège d'un royaume latin, c'est-à-dire relevant du point de vue spirituel de la chrétienté d'Occident. La ville prend alors pour les chrétiens une dimension mythique. Après une conquête violente qui s'accompagne de la démolition ou de la transformation d'édifices musulmans, les croisés importent les arts romans puis gothiques. La basilique du Saint-Sépulcre est notamment remaniée en style gothique. o L'afflux de pèlerins venant du monde chrétien conduit à l'édification dans la Vieille Ville, à partir duxviiie siècle surtout, d'édifices inspirés des styles en vogue en Europe. Aujourd'hui encore, le patrimoine de la ville est un lieu de rencontre pour les différentes Églises chrétiennes. Les fidèles suivent la via dolorosa qui reprend le parcours du Christ lors de sa Passion. La basilique du Saint-Sépulcre est partagée entre les différentes Églises chrétiennes, qui y disposent chacune d'un espace. La cohabitation fut parfois si difficile que c'est finalement à une famille musulmane qu'ont été confiées les clés de l'édifice. 3. Les patrimoines de l'islam La troisième ville sainte de l'islam o La prise de Jérusalem par les armées musulmanes en 638 transforme la destinée de la ville. La tradition musulmane en fait le lieu de la chevauchée nocturne de Mahomet. Monté sur son cheval « Buraq «, le prophète de l'islam s'y serait rendu de nuit et y aurait été élevé au ciel. Le lieu de cette élévation aurait été le mont du Temple. o L'ancienne esplanade du Temple devient ainsi un espace sacré pour les musulmans, qui y édifient plusieurs monuments, dont la mosquée al-Aqsa et le dôme du Rocher. Cet édifice est l'un des premiers exemples d'architecture musulmane. Édifié en 698, il couvre le rocher qui serait le lieu du sacrifice d'Abraham, la pierre de fondation du Temple et le lieu de l'élévation de Mahomet. Son plan octogonal et sa coupole circulaire et dorée souhaitent rivaliser avec la rotonde du Saint-Sépulcre. La sacralité de la ville se renforce pendant les croisades. Sa reconquête par Saladin, en 1187, renforce sa dimension de ville sainte. Le façonnement du paysage urbain o La ville est adaptée au principe musulman qui accepte la présence d'édifices de cultes juifs et chrétiens pourvu qu'ils ne soient ni reconstruits ni restaurés. Ce principe a été appliqué de façon plus ou moins tolérante. En 1009, toutes les églises de Jérusalem sont démolies par le calife Al-Hakim, mais les Turcs ottomans, qui dominèrent la cité à partir du xvie siècle, autorisent à nouveau les constructions d'églises et de synagogues. o Les Turcs ottomans donnent à la Vieille Ville ses limites actuelles en édifiant les remparts à partir de 1520. Ils lui donnent également sa structure en quartiers, marqués chacun par une population spécifique. Ils restaurent également la citadelle. Le sultan souhaite alors honorer les patrimoines juif et chrétien ; une légende raconte qu'il fait pendre l'architecte car celui-ci aurait laissé en dehors du tracé de l'enceinte le cénacle (lieu où Jésus célébra son dernier repas) et la tombe de David, ces deux personnages étant par ailleurs cités dans les traditions musulmanes. Un patrimoine sensible o La juxtaposition des lieux saints juifs et musulmans est aujourd'hui parfois source de conflits. Israël règlemente l'accès à l'esplanade des Mosquées. La réouverture aux visiteurs d'un tunnel construit à l'époque hasmonéenne et permettant d'accéder à l'esplanade des Mosquées a conduit à des émeutes en 1992. On l'a vu, le patrimoine de Jérusalem se prête donc parfaitement à une lecture historique. L'historien peut y lire comment la ville a été marquée par les conflits et les coexistences. Chaque époque et chaque civilisation y a laissé des traces monumentales et des apports culturels et spirituels. À l'heure actuelle, la cité vit toujours à la fois la coexistence des cultures et les tensions entre elles. L'interprétation par l'historien du patrimoine culturel de cette ville reste donc un enjeu majeur. Il permet de comprendre comment il est possible de vivre ensemble dans la ville trois fois sainte.

Liens utiles